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Rapport définitif - Rapport No. 150, Novembre 1975

Cas no 787 (Brésil) - Date de la plainte: 08-AVR. -74 - Clos

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  1. 44. La plainte de la Fédération syndicale mondiale (FSM) figure dans une lettre du 8 avril 1974, la réponse du gouvernement dans une communication du 25 octobre 1974.
  2. 45. Le Brésil n'a pas ratifié la convention (no 87) sur la liberté syndicale et la protection du droit syndical, 1948, mais il a ratifié la convention (no 98) sur le droit d'organisation et de négociation collective, 1949.

A. A. Allégations des organisations plaignantes

A. A. Allégations des organisations plaignantes
  1. 46. Après avoir rappelé d'autres cas relatifs au Brésil soumis au comité, la FSM indique que la police militaire de Sao Paulo (9e bataillon) a adressé aux entreprises de cet Etat un "questionnaire secret industriel" dont elle communique le texte. Pour le plaignant, ce questionnaire correspond à des instructions générales des autorités militaires du pays et prouve que les droits syndicaux sont lettre morte au Brésil, que le gouvernement veut ainsi contrôler les entreprises, leurs propriétaires, leurs employés, et encadrer la réaction dans les mouvements revendicatifs ainsi que dans les luttes pour le respect de la liberté syndicale. La FSM réclame aussi la libération des syndicalistes emprisonnés et l'annulation de leurs procès et condamnations.
  2. 47. Ce questionnaire contient une liste de 60 points sur différents sujets. Certains portent sur l'identification de l'entreprise, de ses propriétaires, de sa direction, des sociétés dont éventuellement elle dépend, sur sa production, etc.; d'autres concernent l'existence d'un département de la sécurité, d'un département de lutte contre l'incendie, d'un réfectoire, de logements, de terrains de sport, ainsi que d'un plan de protection civile; certaines questions encore se réfèrent au nombre d'employés, à leur âge moyen, au mode de paiement des salaires. On y demande aussi si des travailleurs appartiennent à la police militaire ou aux forces armées.
  3. 48. Le questionnaire demande en outre s'il y a des leaders naturels au sein du personnel (avec leurs nom, adresse et fonction dans l'entreprise), des éléments instigateurs de grèves, des délégués syndicaux ainsi que des organisations ouvrières présentes dans l'entreprise (une question a trait à leur but et à leurs rapports avec la direction de l'entreprise, une autre aux liens des travailleurs avec les syndicats).
  4. 49. Le gouvernement s'élève contre la façon dont la FSM cherche à relier ses accusations à d'autres affaires que l'OIT a examinées précédemment sur la base d'informations contestées formellement par le gouvernement. Il dément que le questionnaire ait été établi selon des instructions générales des autorités militaires du pays: il s'agit, d'après lui, d'une initiative d'un commandant de bataillon qui désire tenir un registre pour l'aider dans son action de prévention dans les zones de la ville sous son contrôle (le gouvernement précise d'ailleurs que la situation y est normale, comme dans le reste du pays). Il ne s'agit pas, poursuit le gouvernement, d'un document de caractère syndical, mais d'un relevé cadastral des entreprises, d'une enquête confidentielle destinée à la police préventive, ce qui est normal dans n'importe quel pays. Le questionnaire se limite à aborder des questions de sécurité industrielle, de protection civile, etc. essentielles pour préparer un plan de police préventive. Le gouvernement considère que la question est étrangère aux travaux du comité puisqu'elle ne concerne ni la vie des groupements syndicaux, ni les droits individuels, encore moins ceux de caractère syndical.
  5. 50. La FSM, ajoute le gouvernement, ne s'appuie sur aucun élément concret et ne peut citer aucune séquelle de l'enquête. Celle-ci n'entraîne aucune mesure pratique de caractère individuel, sauf en cas d'urgence et de situation grave de désordre public; elle n'a pas eu de contrecoup; aucun droit individuel n'a été violé. Les organisations syndicales, continue-t-il, vivent au Brésil dans une atmosphère de paix constructive et se consacrent entièrement aux intérêts des travailleurs; elles n'ont même rien entendu des faits mentionnés par la FSM, puisqu'ils sont sans lien avec leurs objectifs réels. Les accusations de la FSM signifieraient que la police ne peut établir de registre, ne peut connaître à l'avance ceux qui sont susceptibles de troubler l'ordre public, ni se documenter pour agir rapidement et efficacement quand on l'appelle.
  6. 51. Il ressort des informations disponibles que le 9e bataillon de la police militaire de Sao Paulo a établi et remis aux entreprises de cette région un questionnaire secret portant sur divers aspects de la vie des entreprises, et notamment sur les syndicats, les leaders des travailleurs et les instigateurs de grèves.

B. B. Conclusions du comité

B. B. Conclusions du comité
  1. 52. Le comité note les explications du gouvernement et sa déclaration selon laquelle ce questionnaire n'a pas d'effet sur la situation actuelle des syndicalistes. D'après le gouvernement, il s'agit d'une pratique normale dans n'importe quel pays.
  2. 53. Le comité estime que la remise d'un tel questionnaire aux entreprises par les autorités militaires n'est pas une pratique générale. Dans beaucoup de pays, l'administration du travail enregistre des informations sur les syndicats et leurs dirigeants, mais la situation est différente lorsque c'est l'autorité militaire qui demande des renseignements, en particulier sur les leaders naturels des travailleurs et sur les éléments instigateurs de grèves.
  3. 54. Le comité considère qu'une enquête ayant ce contenu peut comporter des risques d'abus de la part des autorités militaires ou de police en cas de conflit du travail, comme la détention de travailleurs pour la seule raison qu'ils figurent sur les listes de personnes ainsi établies, sans qu'ils aient commis aucun délit. Le comité remarque d'ailleurs que ce danger ressort implicitement des déclarations du gouvernement quant au fait que le questionnaire n'entraîne aucune mesure pratique de caractère individuel "sauf en cas d'urgence et de situation grave de désordre public". Le comité considère également que cette méthode, par le climat de méfiance qu'elle peut créer, est peu propice au développement de relations professionnelles harmonieuses.

Recommandation du comité

Recommandation du comité
  1. 55. Dans ces conditions, le comité recommande au Conseil d'administration d'appeler l'attention du gouvernement sur les considérations qui figurent aux paragraphes 53 et 54 ci-dessus et de prier ce dernier de bien vouloir prendre les mesures appropriées pour éviter les risques signalés.
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