Afficher en : Anglais - Espagnol
- 350. Le comité a déjà examiné cette affaire en novembre 1977 et en mai 1978; il a présenté à chacune de ces sessions des conclusions intérimaires qui figurent dans son 172e rapport (paragraphes 194 à 220) et dans son 181e rapport (paragraphes 117 à 143). Le Conseil d'administration a approuvé ces deux rapports respectivement en novembre 1977 et en juin 1978 (204e et 206e sessions). Le gouvernement a envoyé de nouvelles informations par une lettre du 19 septembre 1978.
- 351. Le Costa Rica a ratifié la convention (no 87) sur la liberté syndicale et la protection du droit syndical, 1948, et la convention (no 98) sur le droit d'organisation et de négociation collective, 1949.
A. A. Allégations des organisations plaignantes
A. A. Allégations des organisations plaignantes- 352. Les conclusions du comité, lors de son dernier examen de l'affaire, portaient sur le licenciement ou l'arrestation de dirigeants syndicaux et sur l'ingérence de la Caisse de sécurité sociale dans une assemblée syndicale.
- 353. Pour ce qui est de ce dernier point, les plaignants alléguaient que la Caisse de sécurité sociale du Costa Rica s'était ingérée dans le déroulement d'assemblées générales du syndicat et avait en particulier, par diverses manoeuvres, cherché à imposer certaines personnes à la direction syndicale et à éliminer le nouveau comité exécutif, légalement élu. Le gouvernement n'avait pas fourni de commentaires à ce propos, ce que le comité avait regretté.
- 354. Reprenant les conclusions qu'il avait formulées dans un cas précédent relatif au Costa Rica, le comité avait souligné que le gouvernement s'était engagé, par la ratification de la convention no 98, à respecter les normes contenues dans l'article 2 de cet instrument et qu'il devait veiller à ce que la loi nationale offre, aux organisations de travailleurs notamment, les moyens de se protéger contre les actes d'ingérence des employeurs ou de leurs associations. La législation costaricienne ne contenait pas de normes spéciales à cet effet, mais de telles dispositions figuraient par contre dans un projet de loi sur les relations collectives du travail; ce projet, soumis à l'assemblée législative, n'avait pas encore été adopté.
- 355. Sur recommandation du comité, le Conseil d'administration avait, en juin 1978, insisté auprès du gouvernement en vue de l'adoption aussitôt que possible des dispositions en projet sur la protection des organisations de travailleurs contre les actes d'ingérence des employeurs ou de leurs organisations. Dans sa lettre du 19 septembre 1978, le gouvernement déclare prendre note de ces observations.
- 356. Les allégations en suspens portent, d'autre part, sur l'arrestation de M. Luis Fernando Alfaro Zúñiga, secrétaire général de l'Association syndicale des employés de l'Institut costaricien d'électricité, et de M. Mario Devandas Brenes, secrétaire général de la Fédération nationale des travailleurs des services publics (FENATRAP) et du syndicat de l'Institut national du logement et de l'urbanisme. L'un et l'autre furent d'abord destitués de leur emploi. Par la suite, ajoutaient les plaignants, en raison d'arrêts de travail décidés par les travailleurs de leur établissement, ils furent accusés par le parquet d'incitation à la grève et d'autres charges. L'un et l'autre furent incarcérés à la prison publique de Heredia avec des délinquants de droit commun.
- 357. Le gouvernement avait signalé que M. Alfaro Zúñiga avait prononcé des discours subversifs lors d'une grève organisée le 19 juillet 1976 à l'Institut costaricien d'électricité. Le parquet l'avait poursuivi devant les tribunaux pour émeute, incitation à l'arrêt collectif des services et atteinte à l'ordre constitutionnel. M. Devandas Brenes était poursuivi en justice sur la base des mêmes charges. Le gouvernement précisait que le procès était pendant devant le tribunal supérieur de San José qui avait accordé aux deux intéressés le bénéfice de la liberté sous caution (d'un montant de 50.000 colons chacun).
- 358. Les poursuites avaient donc été engagées contre ces deux responsables syndicaux pour faits de grève dans des services publics. A cet égard, le comité a rappelé que la reconnaissance de la liberté syndicale aux fonctionnaires n'équivalait pas à leur accorder le droit de grève. Cependant, celui-ci étant un moyen important dont disposent les travailleurs et leurs organisations pour défendre et promouvoir leurs intérêts professionnels, une interdiction de la grève ou des restrictions sévères à l'exercice de celle-ci dans la fonction publique ou les services essentiels devraient s'accompagner de garanties adéquates afin de protéger pleinement les travailleurs. Le comité a cité spécialement parmi ces garanties des procédures de conciliation et d'arbitrage appropriées, impartiales et rapides, aux diverses étapes desquelles les parties concernées devraient pouvoir participer; les sentences arbitrales devraient toujours être obligatoires pour les deux parties, exécutées rapidement et de façon complète.
- 359. En l'occurrence, l'article 368 du Code du travail interdit la grève dans les services publics, et les différends susceptibles de surgir entre employeurs et travailleurs de ce secteur doivent obligatoirement être portés pour règlement devant les tribunaux du travail. Toutefois, dans une précédente affaire relative au Costa Rica, un plaignant affirmait qu'en vertu de la loi spéciale portant création de l'Institut costaricien d'électricité, cet organisme n'était pas tenu de se soumettre à un arbitrage obligatoire; le gouvernement n'apportait pas d'informations sur ce point. Si cette allégation était exacte, les travailleurs de cette institution seraient privés à la fois du droit de grève et des garanties de compensation pour sauvegarder leurs intérêts professionnels. En juin 1978, le Conseil d'administration avait, sur recommandation du comité, demandé au gouvernement d'indiquer si la procédure de règlement pacifique des différends prévue à l'article 368 du Code du travail s'appliquait aux conflits survenus à l'Institut costaricien d'électricité et à l'Institut national du logement et de l'urbanisme. Le Conseil avait également prié le gouvernement de transmettre les textes des jugements avec leurs attendus qui seraient prononcés à l'égard de MM. Alfaro Zúñiga et Devandas Brenes.
- 360. Dans sa lettre du 19 septembre 1978, le gouvernement déclare qu'il a pris note des principes et considérations rappelés ci-dessus et précise que l'article 368 du Code du travail est pleinement applicable à l'Institut national du logement et de l'urbanisme et à l'Institut costaricien d'électricité, conformément aux dispositions de l'article 369, alinéas a) et d), du code:
- "Aux fins de l'article précédent (368], on entend par "services publics":
- a) tous ceux qu'assurent les travailleurs de l'Etat ou de ses institutions, quand les activités de celui-ci et de celles-là n'ont pas le caractère d'activités exercées également par des entreprises privées à fin lucrative;
- d) ceux qu'assurent les travailleurs qui sont absolument indispensables pour maintenir le fonctionnement des entreprises privées qui ne peuvent suspendre leur service sans dommages graves et immédiats pour la santé ou l'économie publiques, telles que les cliniques et hôpitaux ainsi que les services d'hygiène et d'éclairage urbains; etc."
- Le gouvernement ajoute que le procès de MM. Alfaro Zúñiga et Devandas Brenes est toujours pendant devant le tribunal pénal supérieur après l'appel interjeté par la défense.
- 361. Le comité note ces informations.
- 362. Il avait enfin été saisi d'allégations relatives au licenciement de dirigeants syndicaux. Selon les plaignants, M. Carlos Manuel Acuña Castro, secrétaire général adjoint de l'Union nationale des employés de sécurité sociale (UNDECA), avait été congédié le 17 juin 1975 de son poste d'inspecteur des lois et règlements à la Caisse de sécurité sociale. On avait invoqué à son encontre qu'il assistait à des cours à la faculté de droit alors que, selon les plaignants, il s'était seulement présenté aux examens avec l'autorisation de l'employeur: la mesure prise serait la conséquence d'une plainte présentée au Conseil d'Etat sur l'ingérence de la caisse dans une assemblée générale du syndicat et la participation de l'intéressé aux élections syndicales. De même, M. Christian Sobrado Chaves, secrétaire général de l'Union des employés de banque du Costa Rica (UNEBANCO), aurait été licencié sans juste motif le 24 février 1977 alors que le tribunal supérieur du travail avait refusé le congédiement; cette mesure aurait en outre constitué une violation de la sentence arbitrale en vigueur à la banque. On reprochait à l'intéressé des absences injustifiées alors que, d'après les plaignants, celui-ci s'était absenté avec l'autorisation de ses supérieurs immédiats pour mener des activités liées à un conflit collectif de travail que le personnel de la banque avait porté devant le juge du travail.
- 363. Le gouvernement signalait que, selon la Caisse de sécurité sociale, le renvoi de M. Acuña Castro constituait une sanction prise à la suite d'une faute et ne devait pas être lié artificiellement à d'autres événements, étrangers à l'affaire. Néanmoins, le tribunal du travail puis le tribunal supérieur du travail de San José avaient décidé que la requête présentée par l'intéressé contre la caisse était justifiée. Le 18 août 1976, la Chambre de cassation de la Cour suprême avait confirmé cette décision. Il ressortait de l'arrêt que les magistrats avaient estimé non justifiés les motifs de licenciement invoqués par l'employeur et avaient condamné la caisse à lui verser, compte tenu de son ancienneté dans l'entreprise, neuf mois de salaire à titre d'indemnité. Ils avaient cependant jugé que l'intéressé n'avait pas, de surcroît, prouvé le caractère antisyndical de son congédiement et n'avait pas droit à un dédommagement de ce chef.
- 364. Le gouvernement indiquait, d'autre part, que la Banque du Costa Rica avait, le 19 août 1976, demandé l'autorisation de licencier M. Sobrado Chaves aux tribunaux du travail qui examinaient le conflit collectif déclenché par le personnel de la banque; selon celle-ci, l'intéressé avait commis des actes d'indiscipline inexcusables. Les tribunaux estimèrent quant à eux le licenciement injustifié. Le 24 février 1977, M. Sobrado Chaves avait été congédié pour absences injustifiées; la banque lui précisa que l'arbitrage du conflit collectif était achevé et qu'elle avait pleine liberté pour appliquer le régime disciplinaire correspondant aux fautes invoquées. Une action avait été engagée, poursuivait le gouvernement, devant le juge du travail de San José; le procès, entamé le 28 avril 1977, n'était pas terminé.
- 365. Le comité avait noté l'arrêt rendu par la Cour suprême à l'égard de M. Acuña Castro. Il avait souligné à ce propos qu'il peut être difficile sinon impossible à un travailleur d'établir le caractère antisyndical de la mesure prise à son égard. En l'espèce, les tribunaux avaient jugé que ce dirigeant syndical avait été licencié sans juste motif. Dans ces conditions, le Conseil d'administration, sur recommandation du comité, avait demandé au gouvernement d'envisager la possibilité de réintégrer l'intéressé dans ses fonctions. Par ailleurs, le comité avait relevé que M. Sobrado Chaves avait été licencié depuis longtemps et que la procédure judiciaire engagée n'était pas encore terminée. Il avait rappelé l'importance qu'il attache à l'utilisation d'une procédure rapide pour examiner des cas allégués de congédiements en raison d'activités syndicales, et le Conseil d'administration avait prié le gouvernement de transmettre, dès qu'il serait rendu, le jugement, avec ses attendus, prononcé à l'égard de M. Sobrado Chaves.
- 366. Le gouvernement signale, dans sa lettre du 19 septembre 1978, que M. Acuña Castro a occupé pendant plusieurs mois les fonctions de chef de l'unité de coopération technique et des affaires internationales au ministère du Travail et de la Sécurité sociale; il a démissionné volontairement pour occuper un poste qui s'offrait à lui dans le secteur privé. Quant à M. Sobrado Chaves, ajoute le gouvernement, son affaire est toujours pendante devant le tribunal du travail; le jugement doit être prononcé incessamment et il sera porté à la connaissance de l'OIT dès qu'il sera rendu.
B. B. Conclusions du comité
B. B. Conclusions du comité- 367. Le comité note ces informations. Il ne peut toutefois s'empêcher de relever une fois encore le temps qui s'est écoulé depuis que M. Sobrado Chaves a été congédié le 24 février 1977 et qu'une procédure judiciaire a été engagée. Les cas allégués de licenciements antisyndicaux devraient être examinés, il tient à le répéter, selon une procédure particulièrement rapide. Il est inévitable en effet qu'un travailleur qui vit de son emploi supporte avec peine une longue attente une fois privé de celui-ci pour des raisons qui lui paraissent antisyndicales. Quelques pays ont prévu, pour apporter une solution à ce problème, des procédures simplifiées d'urgence'; l'adoption de telles procédures - à titre provisoire ou définitif - contribuerait sans aucun doute, selon le comité, à améliorer le système de protection contre les pratiques discriminatoires dans ce domaine, spécialement les licenciements.
Recommandation du comité
Recommandation du comité- 368. Dans ces conditions, le comité recommande au Conseil d'administration:
- a) d'insister à nouveau auprès du gouvernement pour qu'il assure, dès que possible, l'adoption des dispositions en projet sur la protection des organisations de travailleurs contre les actes d'ingérence des employeurs;
- b) de prendre acte des informations communiquées par le gouvernement sur l'existence d'un arbitrage obligatoire pour compenser l'interdiction de la grève à l'Institut costaricien d'électricité ainsi qu'à l'Institut national du logement et de l'urbanisme et de le prier de transmettre les textes des jugements avec leurs attendus qui seront prononcés à l'égard de MM. Alfaro Zúñiga et Devandas Brenes;
- c) d'attirer l'attention du gouvernement, pour les raisons indiquées au paragraphe 367, sur l'importance d'une procédure rapide pour examiner des cas allégués de licenciements antisyndicaux, de prier ce dernier de transmettre dès qu'il sera rendu le jugement avec ses attendus prononcé à l'égard de M. Sobrado Chaves, et de noter par ailleurs les renseignements donnés par le gouvernement sur M. Acuña Castro;
- d) de prendre note de ce rapport intérimaire.