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Rapport intérimaire - Rapport No. 172, Mars 1978

Cas no 822 (République dominicaine) - Date de la plainte: 14-NOV. -74 - Clos

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  1. 112. Le comité a déjà examiné plusieurs plaintes sur la violation des droits syndicaux en République dominicaine qui ont été déposées par la Confédération mondiale du travail, la Fédération syndicale mondiale, la Fédération internationale des organisations de travailleurs de la métallurgie (FIOM), le Syndicat national des conducteurs de machines lourdes (SINOMAPE), la Fédération nationale des travailleurs des ports, le Syndicat des débardeurs (POASI) et la Centrale générale des travailleurs (CGT). Ces plaintes sont traitées dans les cas nos 672, 768, 802, 819 et 822. En ce qui concerne le cas no 672, le comité a présenté au Conseil d'administration certaines conclusions qui figurent aux paragraphes 114 à 118 de son 131e rapport et aux paragraphes 300 à 312 de son 133e rapport. Le comité a également examiné le cas no 672 ainsi que les cas nos 768, 802, 819 et 822 dans son 158e rapport (paragraphes 300 à 332) où il a également présenté certaines conclusions au Conseil d'administration.
  2. 113. Depuis lors, de nouvelles allégations concernant ces cas ont été reçues. Elles émanent de la FSM (communication du 6 juillet 1976), du syndicat national des travailleurs des téléphones (communications du 26 juillet 1976 et du 8 septembre 1977), du POASI et de la CGT conjointement (communication du 26 avril 1977) ainsi que de la CGT seule (communication du 2 juin 1977).
  3. 114. La Fédération internationale syndicale de l'enseignement (PISE) a également présenté des allégations par une lettre du 19 mai 1976 (cas no 847).
  4. 115. Le gouvernement a fait parvenir certaines informations par une lettre du 2 août 1977.
  5. 116. La République dominicaine a ratifié la convention (no 87) sur la liberté syndicale et la protection du droit syndical, 1948, de même que la convention (no 98) sur le droit d'organisation et de négociation collective, 1949.

A. Allégations examinées par le comité dans son 158e rapport

A. Allégations examinées par le comité dans son 158e rapport
  • Cas no 672
    1. 117 Les allégations encore en suspens dans ce cas (contenues dans une communication de la FIOM en date du 12 juin 1971) ont trait à l'arrestation de M. Albuquerque, secrétaire général du Syndicat UNACHOSIN, ainsi que de 39 autres membres de cette organisation.
    2. 118 Le gouvernement avait répondu qu'il ne poursuivait aucun dirigeant syndical pour ses activités syndicales et que, si quelque responsable avait été privé de sa liberté, c'était pour violation des lois sur l'ordre public ou pour des délits de droit commun.
  • Cas no 768
    1. 119 Plusieurs syndicats dominicains (le SINOMAPE, le POASI, la CGT et la Fédération nationale des travailleurs des ports) ont présenté, dans des communications des 17 octobre et 8 novembre 1973, 1er mai et 20 août 1974, des allégations en violation des droits syndicaux à l'égard du Syndicat POASI: organisation d'élections truquées avec l'aide des autorités, occupation des locaux syndicaux par les forces de l'ordre (comme des locaux d'autres syndicats: Textil les Minas, FASACO, UNACHOSIN, CEMENTERA, etc.), arrestation des principaux dirigeants du syndicat, impossibilité pour les syndiqués de réunir une assemblée générale, confiscation et utilisation des fonds syndicaux, etc.
    2. 120 Dans une lettre du 28 novembre 1975, un groupe de syndicalistes qui se désignaient comme le "secteur majoritaire" du Syndicat POASI avait communiqué une copie d'une requête adressée, le 23 novembre 1975, au Secrétaire d'Etat au travail en vue de l'organisation d'élections au sein du syndicat, conformément aux statuts syndicaux et au Code du travail.
    3. 121 La CGT citait encore d'autres faits survenus dans les entreprises Dulcera dominicana des frères Bolonotto et Cie, Industrias dominicanas et Cie, Los Navarros et Cie ainsi que Ray-O-Vac dominicana SA: licenciements de syndicalistes, interventions de la police, fourniture d'armes à feu à un employeur, tentative d'assassinat d'un dirigeant syndical par un employeur, etc. Selon la CGT, les autorités avaient également créé un syndicat parallèle au Puerto de Andrés à Boca Chica et le plaignant signalait différentes mesures prises dans ce sens.
    4. 122 Le gouvernement avait déclaré que le Syndicat POASI avait convoqué, conformément à ses statuts, une assemblée générale ordinaire pour élire son comité directeur. Ces élections eurent lieu, le 27 mars 1973, sous la surveillance de fonctionnaires du Département du travail, sans aucune espèce d'incident. Les fonctionnaires indiquèrent que le scrutin s'était déroulé tout à fait normalement, et la liste dirigée par Domingo Suero fut élue. Le gouvernement n'est jamais intervenu, ajoutait-il, et n'interviendrait jamais, dans les affaires intérieures d'un syndicat et n'avait jamais empêché le déroulement des activités syndicales. En ce qui concernait les allégations concernant l'entreprise Dulcera dominicana des frères Bolonotto et Cie, le gouvernement signalait que le syndicat de cette entreprise poursuivait ses activités dans un contexte normal, conforme à la loi, et bénéficiait des facilités accordées par l'employeur pour la tenue des réunions. Il n'était pas vrai, d'après le gouvernement, que les licenciements aient eu pour objectif la destruction du syndicat et, lorsque l'entreprise avait mis fin au contrat d'un travailleur, elle l'avait fait en stricte conformité avec la loi. Quant aux autres allégations relatives à ce cas, le gouvernement estimait qu'elles ne méritaient aucune mention vu qu'elles étaient inexactes.
  • Cas no 802
    1. 123 Le SINOMAPE et la FSM avaient allégué par des communications des 17 et 30 septembre 1974 que le local de la CGT avait été investi par la police le 15 septembre 1974 et que 43 délégués et dirigeants syndicaux de cette organisation (parmi lesquels Francisco Antonio Santos, secrétaire général, Dionisio Martínez, secrétaire à l'organisation, et Aguilés Maleno, membre du bureau exécutif) avaient été arrêtés.
    2. 124 Le gouvernement n'avait fourni aucune réponse spécifique à propos de ce cas.
  • Cas no 819
    1. 125 Le SINOMAPE et la FSM avaient signalé dans des lettres des 13 juin et 31 juillet 1975 l'arrestation, en juin 1975, de trois dirigeants nationaux de la CGT pour atteinte à la sécurité de l'Etat: Francisco Antonio Santos, secrétaire général, Julio de Peña Valdez, secrétaire à la formation, et Eugenio Pérez Cepeda, secrétaire aux revendications et conflits. La FSM ajoutait que des perquisitions avaient eu lieu aux domiciles de Dionisio Martinez Vargas et d'Aguilés Maleno qui étaient recherchés, et que la police surveillait étroitement le local de la CGT. La CMT avait, d'autre part, signalé par une lettre du 10 octobre 1975 que plusieurs dirigeants syndicaux avaient été arrêtés arbitrairement en août 1975 et que, parmi ceux-ci, se trouvait Juan Vargas, secrétaire général du Syndicat national des travailleurs des téléphones.
    2. 126 Le gouvernement avait déclaré, dans deux communications des 9 et 13 février 1976, que les dirigeants syndicaux mentionnés dans les plaintes relatives à cette affaire se trouvaient en liberté depuis plus de deux mois.
  • Cas no 822
    1. 127 La CMT avait allégué, dans une communication du 14 novembre 1974, que Florinda Muñoz Soriano, dirigeante régionale de la Fédération des ligues agraires chrétiennes avait été tuée à coups de feu par un contremaître du propriétaire foncier Pablo Diaz à Hato Viejo. La victime se trouvait à la tête de 500 travailleurs et de leurs familles qui refusaient d'abandonner, sous la pression de Pablo Diaz, les terres qu'ils possédaient depuis plus d'un demi siècle. Pablo Diaz aurait utilisé les services de véritables policiers pour contenir, par la violence, les paysans de Hato Viejo. Le plaignant ajoutait, dans une lettre du 16 juillet 1975, que de nombreux dirigeants syndicaux avaient été arrêtés, notamment 17 paysans militants de la Fédération dominicaine des ligues agraires chrétiennes (affiliée à la confédération autonome de syndicats chrétiens) et le secrétaire chargé de l'organisation du Syndicat de la Centrale Azucarera Caterey (également affiliée à cette organisation). Le 5 juillet 1975, Dionisio Frias, dirigeant syndical paysan, avait été assassiné par le propriétaire Virgilio Febes. Ce crime avait eu lieu dans la commune de El Cuey, située dans la province de Seygo.
    2. 128 Le gouvernement avait signalé, dans une communication du 20 février 1976, que les tribunaux avaient tenu plusieurs audiences dans l'affaire de l'homicide de Florinda Muñoz Soriano et que la cause était toujours pendante.
    3. 129 D'une manière générale, le gouvernement avait déclaré que les conventions nos 87 et 98 sont parfaitement respectées dans son pays et que les travailleurs ont la liberté de constituer leurs organisations et d'élire leurs représentants. Ils doivent seulement se conformer aux exigences prévues au livre 5 du code du travail (relatif aux syndicats) ainsi qu'aux dispositions administratives contenues dans les résolutions no 8/64 (qui établit et réglemente l'enregistrement des syndicats), no 15/64 (qui concerne la création de confédérations) et no 37/64 (selon laquelle les assemblées générales réunies pour constituer un syndicat, élire le comité directeur, etc., doivent être certifiées par un inspecteur du Département du travail).
    4. 130 Dans son 158e rapport, le comité avait constaté qu'il se trouvait devant une situation qui soulevait des problèmes importants en rapport avec les principes fondamentaux de la liberté syndicale et qui semblait affecter de nombreux syndicats dominicains. Les plaintes émanaient de plusieurs organisations syndicales nationales et internationales et contenaient des allégations sur l'arrestation ou même la mort de syndicalistes (ou la tentative de meurtre), l'occupation de locaux syndicaux, l'intervention des pouvoirs publics dans les affaires intérieures des syndicats (en particulier dans les élections syndicales et l'utilisation des fonds syndicaux), des tentatives de démantèlement de syndicats (notamment le licenciement de syndicalistes et la création d'un syndicat parallèle), les entraves apportées à l'exercice légal du droit de grève. Bien que le gouvernement eût envoyé des commentaires et des informations sur plusieurs de ces allégations, les éléments dont disposait le comité paraissaient insuffisants pour lui permettre d'aboutir à ce stade à des conclusions quant au fond sur les différentes questions soulevées. Par ailleurs, il avait déjà eu à examiner à plusieurs reprises des cas relatifs à la République dominicaine contenant des allégations analogues à celles présentées dans les cas présents. Dans ces conditions, le comité avait estimé qu'il serait très utile de recourir à la formule des contacts directs, utilisée à plusieurs reprises dans le passé et prévue aux paragraphes 20 et 21 de son 127e rapport.
    5. 131 Le Conseil d'administration, sur recommandation du comité, avait en conséquence prié le gouvernement d'examiner la possibilité de donner son consentement à ce qu'un représentant du Directeur général puisse procéder, en République dominicaine, à une étude des faits se rapportant aux plaintes, ce dernier en informant le comité.

B. Nouveaux développements

B. Nouveaux développements
  • Nouveaux examens de ces cas par le comité
    1. 132 Le gouvernement n'ayant transmis aucune réponse, le comité avait, en novembre 1976 et en février 1977, invité ce dernier à examiner sans tarder la demande décrite au paragraphe précédent et à communiquer sa décision à cet égard aussitôt que possible.
    2. 133 En mai 1977, le comité n'avait reçu aucune communication du gouvernement à ce propos. Il avait en conséquence décidé d'appliquer la procédure spéciale établie aux paragraphes 23 et 24 de son 164e rapport. En vertu de celle-ci, les cas nos 672, 768, 802, 819 et 822 avaient été spécialement mentionnés au paragraphe 14 de son 168e rapport et le gouvernement avait été immédiatement informé que le président du comité, au nom de ce dernier, prendrait contact avec ses représentants à la 63e session de la Conférence internationale du Travail, attirerait leur attention sur ces différents cas et discuterait avec eux des raisons du retard dans l'envoi de la réponse demandée. Le président devait faire ensuite rapport au comité des résultats de ces contacts. Toutefois, le gouvernement n'ayant pas désigné de représentant à la 63e session de la Conférence, la procédure décrite ci-dessus n'avait pas pu être appliquée.
  • Nouvelles allégations
    1. 134 La FISE allègue, dans sa communication du 19 mai 1976, qu'en dépit de la ratification de la convention no 87, les autorités gouvernementales refusent aux éducateurs le droit de se syndiquer sans autorisation préalable; elles ne reconnaissent pas l'existence légale de l'Association dominicaine des professeurs, refusent de négocier avec celle-ci les conditions de travail et n'accordent aucune facilité pour l'exercice des droits syndicaux.
    2. 135 Dans sa lettre du 6 juillet 1976, la FSM énumère les mesures prises contre plusieurs dirigeants syndicaux dont elle cite les responsabilités syndicales:
      • - ont été expulsés du pays: Vladimir Blanco, Fernando de la Rosa, Efrain Sánchez Soriano et Carlos Tómas Fernández;
      • - n'a pu rentrer dans le pays après avoir assisté à une conférence syndicale internationale à Budapest: José Cristóbal Durán;
      • - sont détenus: Juan Angel Santos Peña (depuis janvier 1974, bien qu'il eût été innocenté par le tribunal de première instance) et José Leonardo Enríquez (arrêté en janvier 1972 et condamné à huit ans de prison sous la fausse accusation d'avoir assassiné un policier; un recours a été introduit devant la Cour suprême).
    3. 136 Le plaignant affirme que la police met constamment obstacle aux activités de la CGT: son local a été investi par la police à différentes reprises; ses dirigeants Francisco Santos et Julio de Peña ont été détenus pendant 201 jours; le 8 septembre 1975, le chef de la police dominicaine a adressé une circulaire aux directeurs des raffineries de sucre pour qu'ils empêchent le travail des militants de la CGT dans les sucreries. La FSM rappelle également que le local du Syndicat POASI est occupé par la police depuis octobre 1973 et que ce syndicat ne peut organiser d'élections libres. Le Secrétaire d'Etat au travail, ajoute le plaignant, a édicté une résolution administrative no 13/74 grâce à laquelle le gouvernement intervient dans les activités des syndicats (voir paragraphe 139 ci-dessous); la Cour suprême a jugé cette résolution illégale, mais les autorités continuent à l'appliquer. La FSM cite enfin un grand nombre d'entreprises où des licenciements sélectifs de dirigeants et de militants syndicaux ont eu lieu.
    4. 137 Le Syndicat national des travailleurs des téléphones proteste, dans ses communications des 26 juillet 1976 et 8 septembre 1977, contre l'attitude antisyndicale de la Compagnie dominicaine des téléphones, filiale de l'entreprise multinationale Anglo Canadian Telephone Company. Le plaignant mentionne les noms et les responsabilités syndicales de très nombreux syndicalistes licenciés. Les plaintes déposées auprès des autorités du travail sont restées sans suite. Elle signale également l'arrestation de Juan Vargas, secrétaire général de l'organisation ainsi que d'un autre dirigeant, Ricardo Borges; quand les travailleurs voulurent établir un piquet pour protester contre la détention du secrétaire général, la compagnie appela la police et menaça de congédier ceux qui protestaient. Selon le plaignant, la compagnie se refuse également à mettre en oeuvre plusieurs clauses - que le plaignant énumère - de la convention collective. Les travailleurs vivraient dans un climat de crainte entretenu par l'entreprise; quant aux autorités du travail, elles resteraient inactives. Le plaignant demande en conclusion l'envoi d'une commission pour enquêter sur la situation du mouvement syndical dominicain dans son ensemble.
    5. 138 La CGT et le Syndicat POASI signalent, dans un télégramme du 26 avril 1977, l'arrestation de Barbarin Mojica, dirigeant du POASI. Les plaignants insistent pour que soit envoyée une mission d'enquête sur la situation syndicale du pays.
    6. 139 Dans sa communication du 2 juin 1977, la CGT énumère un certain nombre de cas de violation de la liberté syndicale:
      • - occupation par la police du local du Syndicat POASI (voir paragraphe 119 ci-dessus);
      • - annulation de la personnalité juridique du Syndicat unifié des travailleurs de la Central Romana Corporations y Central Romana Bys Productos (de l'entreprise multinationale Gulf and Westerns);
      • - refus de reconnaître juridiquement l'Association dominicaine des professeurs (voir paragraphe 134 ci-dessus);
      • - adoption de la résolution administrative no 13/74 en vertu de laquelle les assemblées générales organisées en vue de constituer un syndicat, d'élire son comité directeur, de modifier ses statuts ou de s'affilier à une fédération ou confédération doivent être certifiées par un inspecteur du Département du travail, ce qui suppose la présence de fonctionnaires aux assemblées et fait dépendre de l'appréciation des autorités la validité des décisions adoptées;
      • - protection accordée par le gouvernement aux pratiques antisyndicales des entreprises multinationales Gulf and Westerns Americans, Falconbridge dominicana (qui, avec l'aide des forces de l'ordre, aurait renversé quatre comités syndicaux exécutifs en l'espace de trois ans et anéanti complètement, au printemps 1976, le Syndicat des mineurs de la Falconbridge), Rosario Rosaurce dominicana (qui a empêché la constitution d'un syndicat) ainsi que des banques étrangères;
      • - obstacles mis par le gouvernement au droit pour les travailleurs agricoles de se syndiquer;
      • - bannissement de syndicalistes (voir paragraphe 135 ci-dessus).
    7. 140 La CGT signale également les faits suivants:
      • - licenciement par l'entreprise Barcelo et Cie de onze dirigeants syndicaux et de 46 travailleurs entre le 7 mars et le 4 mai 1977; à la suite des pressions des travailleurs et de l'opinion publique, la société a manifesté son intention de réintégrer les intéressés, mais à condition que soient conclus de nouveaux contrats de travail, que ne soit pas appliquée la convention collective en vigueur et que le syndicat n'exerce pas ses activités; le gouvernement se serait borné à entériner les congédiements et à accepter les conditions décrites ci-dessus;
      • - licenciement en mai 1977, par l'entreprise Productos de Calcio C. por A. (Cal Pomier) des membres fondateurs d'un syndicat en formation; un syndicat a toutefois été constitué;
      • - licenciement par la Compagnie dominicaine des téléphones (CODETEL), en décembre 1975, de dirigeants du Syndicat national des travailleurs des téléphones dont Juan Vargas qui dut également subir un emprisonnement de quatre mois (voir paragraphe 137 ci-dessus); le plaignant signale encore la campagne de discrédit organisée par l'entreprise à l'encontre des dirigeants du syndicat, les menaces et les pressions de la direction, de nouveaux licenciements ainsi que le système imaginé pour faire perdre au syndicat sa représentativité légale (faire de certaines catégories du personnel des "fonctionnaires" et les obliger ainsi à quitter le syndicat).
    8. 141 La législation nationale, souligne la CGT, reconnaît la liberté syndicale et deux arrêts de la Cour suprême datant de 1974 condamnent l'intervention des autorités dans le fonctionnement interne des syndicats - dont le POASI déjà cité. Toutefois, le gouvernement laisse les entreprises nationales et multinationales, ainsi que les entreprises et administrations publiques, fouler au pied les principes ainsi reconnus. La vie même des dirigeants syndicaux est en danger et le plaignant énumère les noms de nombreux responsables assassinés depuis 1967; parmi eux figurent notamment Florinda Soriano et Dionisio Frias (voir paragraphe 127 ci-dessus). La CGT mentionne également les noms de plusieurs syndicalistes qui ont été détenus, parfois à plus d'une reprise et ajoute que sont actuellement incarcérés José Leonardo Henriquez Torres (voir paragraphe 135 ci-dessus) et Juan López. Elle cite encore les noms d'une série de syndicats dont les locaux ont été occupés par les forces de l'ordre depuis 1967, notamment en 1976 le Syndicat des mineurs de Falconbridge. Le plaignant dresse enfin une longue liste de syndicats qui ont été anéantis. Devant ces faits, la CGT réitère sa demande pour qu'une mission soit organisée dans le pays.
  • Dernières informations communiquées par le gouvernement
    1. 142 Après s'être référé à ses communications antérieures, le gouvernement déclare, dans sa lettre du 2 août 1977, qu'il examine la demande qui lui a été faite d'accepter la visite d'un représentant du Directeur général et ajoute qu'il donnera une réponse définitive au moment opportun pour les intérêts du pays.
    2. 143 La résolution no 13/74 (selon laquelle les assemblées générales organisées en vue de constituer un syndicat, d'élire les dirigeants, etc., doivent être certifiées par un inspecteur du travail) n'influence pas, poursuit le gouvernement, le libre choix des décisions par les travailleurs. Les syndicats acquièrent la personnalité juridique à la suite de leur enregistrement au Secrétariat d'Etat au travail; une résolution analogue fut abrogée dans le passé et il s'en suivit une série de faits contraires aux conditions requises pour la constitution d'un syndicat, l'élection de ses dirigeants, etc.: fausse liste de signatures, quorums non atteints, etc. Des dirigeants syndicaux protestaient ou refusaient la passation des pouvoirs aux nouveaux responsables en alléguant de fraudes dans les scrutins, etc. Le Secrétariat d'Etat ne peut, continue le gouvernement, octroyer la reconnaissance ou l'enregistrement à un syndicat sur la seule base de ses affirmations. La présence d'un inspecteur du travail en tant qu'observateur est la solution la plus sage, selon lui, pour éviter les conflits souvent violents entre dirigeants syndicaux et se former une opinion correcte au moment d'accorder l'enregistrement.
    3. 144 D'après le gouvernement, l'entreprise Barcelo et Cie s'est basée, pour licencier plusieurs dirigeants syndicaux et travailleurs, sur l'article 69 du code du travail (en vertu de celui-ci, chaque partie à un contrat de travail conclu pour une durée indéterminée peut y mettre fin sans motif, lorsqu'elle l'estime convenable, même durant la suspension du contrat). Le Secrétariat d'Etat au travail a condamné énergiquement cette action qui rompait la paix sociale et a fait pression sur l'entreprise pour que, s'abstenant de faire un usage abusif de la disposition précitée, celle-ci réintègre les personnes licenciées. Le gouvernement ne dispose pas, précise-t-il, de pouvoirs coercitifs de caractère répressif pour obliger les employeurs à réintégrer les travailleurs et dirigeants licenciés. Quant à la violation de l'accord collectif en vigueur, le syndicat peut s'adresser à la juridiction compétente.
    4. 145 Le gouvernement déclare également avoir envoyé des inspecteurs du travail enquêter sur les plaintes formulées par des syndicalistes à l'encontre des entreprises Productos de Calcio C por A. (Calpomier) et Codetel; il a aussi adressé des communications énergiques à la direction de ces entreprises pour que cessent les licenciements et les pressions sur les syndicalistes, étant donné qu'il s'est engagé à faire pleinement respecter la liberté syndicale. Selon lui, la crainte existe dans certains secteurs patronaux d'une pénétration et d'une influence de dirigeants syndicaux qui suivent les consignes de partis politiques interdits parce qu'ils s'en prennent aux principes constitutionnels de l'Etat. Le gouvernement affirme enfin, à propos de la destruction alléguée de certains syndicats, que ces organisations, dans leur grande majorité, existent actuellement, mais que les dirigeants influencés par des extrémistes ont été expulsés par décision des syndiqués.

C. Conclusions du comité

C. Conclusions du comité
  1. 146. Le comité note les informations communiquées par le gouvernement. Ce dernier admet en particulier l'existence dans certaines entreprises de pratiques qui sont peu propices au développement de saines relations professionnelles et qu'il ne peut réprimer efficacement dans le cadre de la législation en vigueur. De nouvelles plaintes ont, d'autre part, été reçues qui contiennent des allégations aussi graves et aussi variées que celles examinées précédemment. Il convient de relever également que la Commission d'experts pour l'application des conventions et recommandations formule depuis plusieurs années des observations sur l'application par la République dominicaine des conventions nos 87 et 98 qu'elle a ratifiées.
  2. 147. Le comité regrette le retard mis par le gouvernement à répondre de manière affirmative à la demande qui lui a été adressée de donner son consentement à la visite d'un représentant du Directeur général. A cet égard, le comité désire souligner que le but de l'ensemble de la procédure instituée est d'assurer le respect de la liberté syndicale en droit comme en fait et qu'il est convaincu que si cette procédure protège les gouvernements contre des accusations déraisonnables, ces derniers devraient reconnaître à leur tour l'importance qu'il y a, pour leur propre réputation, à apporter leur pleine collaboration au comité afin de lui permettre d'examiner les faits allégués de manière complète et de rechercher des possibilités de solutions aux problèmes posés. Le comité a, aux paragraphes 25 à 27 de son 164e rapport, insisté en particulier sur l'importance qu'il attache à ce propos à la procédure de contacts directs.

Recommandation du comité

Recommandation du comité
  1. 148. Dans ces conditions, le comité recommande au Conseil d'administration:
    • a) de prier instamment le gouvernement de donner sans tarder son consentement à ce qu'un représentant du Directeur général procède en République dominicaine à un examen de la situation syndicale;
    • b) de charger le Directeur général de s'adresser au gouvernement, à son niveau le plus élevé, en exprimant la préoccupation du comité et en insistant pour qu'une suite favorable soit donnée à la demande exprimée ci-dessus;
    • c) de noter ce rapport intérimaire.
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