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Rapport intérimaire - Rapport No. 168, Novembre 1977

Cas no 861 (Bangladesh) - Date de la plainte: 10-SEPT.-76 - Clos

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  1. 217. La plainte de la Fédération syndicale mondiale est formulée dans une communication datée du 10 septembre 1976. Dans une communication datée du 4 octobre 1976, l'Union internationale des syndicats de travailleurs de l'agriculture, des forêts et des plantations a présenté d'autres allégations concernant la violation des droits syndicaux au Bangladesh.
  2. 218. Ces allégations ont été transmises au gouvernement du Bangladesh qui, dans une communication datée du 2 mars 1977, a fait parvenir au Bureau certaines observations en rapport avec la plainte.
  3. 219. Le Bangladesh a ratifié la convention (no 87) sur la liberté syndicale et la protection du droit syndical, 1948, ainsi que la convention (no 98) sur le droit d'organisation et de négociation collective, 1949.

A. Allégations concernant une intervention générale dans les activités syndicales

A. Allégations concernant une intervention générale dans les activités syndicales
  1. 220. Dans sa communication datée du 10 septembre 1976, la Fédération syndicale mondiale (FSM) allègue de graves atteintes aux droits syndicaux par les autorités du Bangladesh qui constituent une violation les conventions nos 87 et 98 de l'OIT, toutes deux ratifiées par ce Pays. La FSM déclare que les autorités ont, en vertu de la loi martiale, déclaré illégales toutes les formes d'organisation et d'expression démocratiques par les syndicats, violant notamment le droit de réunion et la liberté d'expression ainsi que le droit de grève. Les grèves, cortèges, manifestations, etc. ont été constitués en délits de droit commun. Selon les plaignants, des contingents de l'armée ont été utilisés dans les régions industrielles pour terroriser les travailleurs et restreindre les activités des syndicats. Les autorités ont annoncé des restrictions au droit des travailleurs d'élire librement les dirigeants syndicaux, notamment des personnes ne travaillant pas dans l'entreprise intéressée. Cette mesure a été prise pour empêcher les dirigeants reconnus du mouvement syndical d'exercer leurs fonctions. D'après certaines informations parvenues également é la FSM, les autorités encourageraient les activités d'éléments perturbateurs et interviendraient dans les affaires intérieures des syndicats, afin d'exercer un contrôle sur les activités de ceux-ci.
    • Allégations concernant la dissolution de la Ligue Jatiya Sramik (Ligue ouvrière nationale)
  2. 221. La FSM allègue que la Ligue Jatiya Sramik, l'organisation des syndicats unis fondée par les centrales syndicales les plus représentatives du pays, parmi lesquelles la Centrale syndicale du Bangladesh (BTUK), qui est affiliée à la FSM, a été dissoute et que tons ses biens ont été confisqués par les autorités. Ces mesures constituent, pour la FSM, une attaque directe au droit d'organisation des travailleurs du Bangladesh.
    • Allégations concernant l'arrestation et la détention de syndicalistes
  3. 222. Ces derniers mois, poursuit la FSM, les autorités du Bangladesh ont effectué une vague d'arrestations de dirigeants syndicaux qui ont été maintenus en détention sans jugement. Des mandats d'arrêt ont été délivrés contre M. Saifuddin Manik, membre du Conseil général de la FSM et secrétaire général de la Centrale syndicale du Bangladesh (BTUK), ainsi que contre M. Harun-ur-Rashid, membre suppléant du Conseil général de la FSM et président du BTUK, M. Manjurul Ahsan, co-secrétaire du Syndicat du BTUK, et contre de nombreux autres syndicalistes.
  4. 223. La FSM ajoute que, parmi les syndicalistes qui ont été arrêtés et détenus sans jugement, figurent les personnes suivantes:
  5. 1. M. Abu Taher Masud, secrétaire du Comité du BTUK pour la région de Chittagong et président du Syndicat des travailleurs du jute de Daud à Chittagong;
  6. 2. M. Udayan Nag, du Syndicat des travailleurs des transports routiers de Chittagong;
  7. 3. M. Alauddin Ahmad, du Syndicat de la fabrique d'allumettes d'Ujala;
  8. 4. M. Quazi Muzammel Hoq, membre du Parlement et dirigeant de la Ligue Jatiya Sramik;
  9. 5. M. Saidur Rahman Sadu, président de la Ligue des travailleurs de l'usine de jute d'Adamjee;
  10. 6. M. Hasanuddin Sarkar, dirigeant du Comité de la Ligue Jatiya Sramik pour la région de Tongi;
  11. 7. M. Ali Azam, secrétaire général du Syndicat des travailleurs d'Adamjee;
  12. 8. M. Chitta Deg, du Syndicat des cheminots;
  13. 9. M. Abdur Rahim, du Syndicat des cheminots;
  14. 10. M. Ruhul Amin, du Syndicat des cheminots;
  15. 11. M. Selim, dirigeant du Conseil syndical du district de Padna.
    • Selon les informations de la FSM, la plupart de ces syndicalistes ont été soumis à la torture alors qu'ils étaient en détention et leur santé s'est considérablement détériorée à la suite des mauvais traitements subis.
  16. 224. Dans sa communication datée du 4 octobre 1976, l'Union internationale des syndicats de travailleurs de l'agriculture, des forêts et des plantations (UISTAFP) allègue qu'il y a eu des violations graves et constantes des libertés démocratiques et syndicales par le gouvernement du Bangladesh, aux dépens du mouvement syndical. Le Syndicat des travailleurs des plantations de thé de Chittagong, qui lui est affilié, ne peut plus exercer librement les fonctions syndicales ni représenter les intérêts des travailleurs des plantations de thé en raison de la persécution à laquelle il est soumis. Son secrétaire général, M. P.C. Biswas, a été arrêté en mars dernier et son président, M. Tapan Datta, est recherché par la police. Le secrétaire de l'organisation n'a pas pu exercer librement ses fonctions syndicales, les autorités du Bangladesh l'ayant empêché de le faire. L'UISTAFP ajoute que d'autres militants appartenant au syndicat qui lui est affilié sont en prison et, comme d'autres syndicalistes emprisonnés, ne sont pas passés en jugement.
    • Réponse du gouvernement
  17. 225. Dans sa communication en date du 2 mars 1977, le gouvernement déclare qu'aucun dirigeant syndical au Bangladesh n'a été détenu pour ses activités syndicales et que les allégations concernant les violations des droits syndicaux sont fausses. Au dire du gouvernement, le dirigeant syndical, M. Alauddin Ahmed, n'a jamais été détenu et MM. Sapu, Chitta Deg, Abdur Rahim et Ruhul Amin ne sont plus détenus. Selon le gouvernement, les dirigeants suivants ont été détenus pour des activités préjudiciables à la sécurité du pays, et non pour des activités syndicales: MM. Abu Taher Masud, Udayan Nag, Ouazi Mozzamel Hog, Hasanuddin Sarker, Ali Azam et Selim.
  18. 226. Au sujet des allégations de l'Union internationale des syndicats des travailleurs de l'agriculture, des forêts et des plantations, le gouvernement déclare qu'aucune personne du nom de D.C. Biswas n'a été détenue par le gouvernement; en ce qui concerne M. Tapan Datta, le gouvernement déclare qu'il n'a pas été arrêté et qu'on rapporte qu'il a fui en Inde où il réside.

B. B. Conclusions du comité

B. B. Conclusions du comité
  • Conclusions du comité
    1. 227 Le comité note que le gouvernement a fourni quelques informations sur certains aspects du cas, mais qu'il n'en a pas données au sujet d'autres graves allégations formulées par les plaignants, notamment en ce qui concerne les restrictions imposées par les autorités aux activités des syndicats et la dissolution alléguée de la Ligue Jatiya Sramik. A cet égard, le comité souhaite rappeler que le but de l'ensemble de la procédure instituée est d'assurer le respect des libertés syndicales en droit comme en fait, et le comité est convaincu que si elle protège le gouvernement contre des accusations déraisonnables, celui-ci voudra bien reconnaître à son tour l'importance qu'il y a, pour sa propre réputation, à ce qu'il présente, en vue d'un examen objectif, des réponses bien détaillées et portant sur des faits précis, aux accusations bien détaillées, et portant sur des faits précis, qui pourraient être dirigées contre lui.
    2. 228 Au sujet des allégations concernant la dissolution de la Ligue Jatiya Sramik, le comité estime devoir appeler l'attention du gouvernement sur les dispositions de l'article 4 de la convention (no 87) sur la liberté syndicale et la protection du droit syndical, 1948, aux termes duquel "les organisations de travailleurs et d'employeurs ne sont pas sujettes à dissolution ou à suspension par voie administrative". Le comité souhaite demander au gouvernement de transmettre ses observations sur ces allégations, en précisant notamment le statut actuel de cette organisation et sa capacité d'exercer des activités syndicales normales.
    3. 229 Au sujet des allégations concernant l'arrestation et la détention de syndicalistes, le comité note la déclaration du gouvernement selon laquelle MM. Alauddin Ahmed et P.C. Biswas n'ont jamais été détenus par le gouvernement. Il note également la déclaration du gouvernement selon laquelle MM. Sadu, Chitta Dev, Abdur Rahin et Rauhul Amin ne sont plus détenus. Le gouvernement a déclaré également que M. Tapan Datta n'a pas été arrêté et qu'il aurait fui en Inde où il résiderait. Le gouvernement ne donne aucune information en ce qui concerne l'allégation formulée par la FSM selon laquelle des mandats d'arrêt auraient été délivrés contre un certain nombre de dirigeants syndicalistes de la Centrale syndicale du Bangladesh.
    4. 230 En premier lieu, le comité souhaite signaler que l'arrestation par les autorités de syndicalistes contre lesquels finalement aucun chef d'inculpation n'est relevé peut entraîner des restrictions de la liberté syndicale et que les gouvernements devraient prendre des dispositions afin que les autorités intéressées reçoivent des instructions appropriées pour prévenir le risque que comportent pour les activités syndicales les mesures d'arrestation. Le comité a également souligné l'importance qu'il attache à ce que, dans tous les cas, y compris lorsque des syndicalistes sont accusés de délits politiques ou criminels que le gouvernement considère comme étrangers A leurs activités syndicales, les personnes en question soient jugées promptement par une autorité judiciaire impartiale et indépendante.
    5. 231 Le comité tient également à souligner que, dans un certain nombre de cas où les plaignants allèguent que des dirigeants syndicaux ou des travailleurs ont été arrêtés en raison d'activités syndicales et que les gouvernements se sont bornés à répondre que les arrestations avaient été opérées en raison d'activités subversives, pour des raisons de sécurité intérieure ou pour des crimes de droit commun, le comité s'est fait une règle de demander aux gouvernements en question des informations aussi précises que possible sur les arrestations incriminées, en particulier en ce qui concerne les actions judiciaires entreprises et le résultat de ces actions, pour lui permettre de procéder en connaissance de cause à l'examen des allégations.
    6. 232 En conséquence, le comité souhaite demander au gouvernement de fournir des informations complètes et précises concernant les syndicalistes qui auraient été arrêtés, en spécifiant les chefs d'accusation retenus contre eux et les procédures légales engagées pour les déférer devant les tribunaux. Le comité souhaite également demander au gouvernement de communiquer le texte des jugements prononcés contre ces personnes par les tribunaux, avec leurs attendus. Enfin, le comité souhaite que le gouvernement fasse parvenir des informations complètes et précises concernant les syndicalistes contre lesquels des mandats d'arrêt ont été délivrés, en donnant notamment les raisons polir lesquelles ces personnes sont recherchées.
    7. 233 Au sujet des allégations de nature générale concernant l'intervention des autorités dans les activités syndicales, le comité souhaite attirer l'attention en particulier sur l'article 3 de la convention (no 87) sur la liberté syndicale et la protection du droit syndical, 1948, qui garantit notamment aux organisations de travailleurs et d'employeurs le droit d'élire librement leurs représentants, d'organiser leur gestion et leur activité, et de formuler leur programme d'action, sans intervention des autorités publiques de nature à limiter ce droit ou à en entraver l'exercice légal. Le comité souhaite demander au gouvernement de communiquer ses observations sur les allégations se rapportant à une intervention dans les activités syndicales.

Recommandation du comité

Recommandation du comité
  1. 234. Dans ces conditions, et pour ce qui est du cas dans son ensemble, le comité recommande au Conseil d'administration:
    • i) d'appeler l'attention du gouvernement sur les dispositions de l'article 4 de la convention no 87, aux termes duquel les organisations de travailleurs et d'employeurs ne sont pas sujettes A dissolution ou à suspension par voie administrative et de demander au gouvernement de communiquer ses observations sur les allégations relatives à la dissolution de la Ligue Jatiya Sramik, en précisant en particulier le statut actuel de cette organisation et sa capacité d'exercer des activités syndicales normales;
    • ii) d'appeler l'attention du gouvernement sur les principes et les considérations exposés aux paragraphes 230 et 231 ci-dessus concernant l'arrestation et la détention de dirigeants syndicaux et de demander au gouvernement de fournir des informations complètes et précises au sujet des dirigeants syndicaux qui, selon certaines déclarations, seraient détenus, y compris des informations concernant les chefs d'accusation retenus contre eux, et de communiquer le texte des jugements prononcés contre ces personnes par les tribunaux, avec leurs attendus; de fournir des informations sur la situation des syndicalistes mentionnés par la FSM contre lesquels des mandats d'arrêt ont été délivrés en indiquant, en particulier, les raisons pour lesquelles ces personnes sont recherchées;
    • iii) en ce qui concerne lés allégations concernant une intervention de caractère général dans les activités syndicales, d'appeler l'attention du gouvernement sur les dispositions de l'article 3 de la convention no 87 concernant notamment le droit des organisations de travailleurs et d'employeurs d'élire librement leurs représentants et d'organiser leur gestion et leur activité sans intervention des autorités publiques et de prier le gouvernement de communiquer ses observations sur les allégations se rapportant à l'intervention dans les activités syndicales;
    • iv) de prendre note du présent rapport intérimaire.
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