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Rapport définitif - Rapport No. 181, Juin 1978

Cas no 880 (Madagascar) - Date de la plainte: 07-AVR. -78 - Clos

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  1. 106. L'Union des syndicats autonomes de Madagascar (USAM) a déposé sa plainte par une lettre du 20 octobre 1977. Le gouvernement a envoyé ses observations par une communication du 7 avril 1978.
  2. 107. Madagascar a ratifié la convention (no 87) sur la liberté syndicale et la protection du droit syndical, 1948, mais non la convention (no 98) sur le droit d'organisation et de négociation collective, 1949.

A. A. Allégations des organisations plaignantes

A. A. Allégations des organisations plaignantes
  1. 108. L'USAM se réfère aux obstacles rencontrés par M. Norbert Rakotomanana, président de l'organisation plaignante et secrétaire général du Cartel national des organisations syndicales malagasy (CARNOSYMA), quand il souhaite sortir du pays pour se rendre à des réunions syndicales. L'intéressé s'est vu ainsi refuser à quatre reprises en six mois la possibilité d'aller à l'étranger pour ses activités syndicales. Le plaignant cite en particulier deux invitations reçues au début du mois d'octobre 1977 à se rendre au congrès de la Confédération mondiale du travail en Belgique et à un colloque sur la formation des représentants des travailleurs en vue de la participation aux décisions dans l'entreprise organisé par le BIT à Genève. M. Rakotomanana s'est adressé au ministère de l'Intérieur ainsi qu'au Premier Ministre lui-même pour obtenir le droit de sortir du pays, mais en vain. L'intéressé est spécialement chargé de l'éducation ouvrière au sein du CARNOSYMA et sa participation à des réunions, séminaires ainsi que des contacts destinés à parfaire ses connaissances sont donc particulièrement souhaitables.
  2. 109. Le gouvernement déclare, dans sa réponse, qu'il possède toute discrétion pour la délivrance des visas de sortie car il s'agit d'une question relevant de sa souveraineté. Il souligne par ailleurs que l'USAM et le CARNOSYMA jouissent sur le territoire national de leurs droits d'exercer des activités syndicales.
  3. 110. Le comité note que M. Rakotomanana devait se rendre à deux réunions différentes. En premier lieu, le Conseil d'administration du BIT avait, à sa session de mai-juin 1977 (203e session), choisi un certain nombre de syndicalistes, dont le groupe des travailleurs avait proposé la désignation, pour participer à un colloque sur la formation des représentants des travailleurs en vue de la participation aux décisions dans l'entreprise organisé par le BIT du 10 au 21 octobre 1977. M. Rakotomanana avait été désigné comme suppléant et fut invité au colloque à la suite de l'empêchement d'un autre participant.

B. B. Conclusions du comité

B. B. Conclusions du comité
  1. 111. Le comité a déjà examiné récemment une autre affaire qui concernait le refus d'un gouvernement d'autoriser un de ses fonctionnaires, dirigeant syndical, à sortir du pays pour assister à une réunion organisée par le BIT. Une telle décision ne constituait, de l'avis du comité, une atteinte aux principes de la liberté syndicale que si la raison de ce refus était fondée sur les activités ou les fonctions syndicales de la personne en cause. En l'occurrence, M. Rakotomanana, faute d'avoir obtenu des autorités les documents nécessaires, n'a pu se rendre au colloque organisé par le BIT. Le comité estime que la participation en tant que syndicaliste à des colloques organisés par le Bureau constitue une activité syndicale légitime et qu'un gouvernement ne devrait pas refuser les documents de sortie nécessaires pour ces motifs.
  2. 112. D'ailleurs, l'article 12 du Pacte international relatif aux droits civils et politiques dispose que:
  3. "2. Toute personne est libre de quitter n'importe quel pays, y compris le sien.
  4. 3. Les droits mentionnés ci-dessus ne peuvent être l'objet de restrictions que si celles-ci sont prévues par la loi, nécessaires pour protéger la sécurité nationale, l'ordre public, la santé ou la moralité publiques, ou les droits et libertés d'autrui, et compatibles avec les autres droits reconnus par le présent pacte.
  5. 4. Nul ne peut être arbitrairement privé du droit d'entrer dans son propre pays."
  6. 113. Le comité désire également se référer à ces principes à propos du refus opposé à la demande de passeport de M. Rakotomanana pour se rendre à la seconde réunion, le congrès de la Confédération mondiale du travail organisé du 17 au 21 octobre 1977. En outre, selon l'article 5 de la convention no 87, toute organisation de travailleurs ou d'employeurs, toute fédération ou confédération de telles organisations a le droit de s'affilier à des organisations internationales de travailleurs. Cette disposition n'est que la reconnaissance, comme l'indiquent les travaux préparatoires de l'instrument, du fait de la solidarité d'intérêts qui unit travailleurs ou employeurs; cette solidarité ne se limite ni à une entreprise ni à une branche d'activité déterminées, ni même à l'économie nationale mais s'étend à l'économie internationale tout entière. Ce droit correspond d'ailleurs à la pratique suivie par l'organisation des Nations Unies et l'Organisation internationale du Travail qui, toutes deux, ont formellement reconnu les organisations internationales de travailleurs et d'employeurs en les associant directement à leurs travaux.
  7. 114. Le comité a, de son côté, estimé à maintes reprises que le principe énoncé à l'article 5 entraîne le droit pour les représentants des syndicats nationaux de se tenir en contact avec les organisations syndicales internationales auxquelles ils sont affiliés, de prendre part aux activités de ces organisations et de bénéficier des services et des avantages provenant de leur adhésion. En particulier, le droit des organisations syndicales nationales d'envoyer des représentants aux congrès syndicaux internationaux découle normalement de leur droit de s'affilier à des organisations internationales de travailleurs.
  8. 115. Si le refus d'accorder un passeport ou un visa touche à la souveraineté d'un Etat, cette question, a souligné le comité, peut dans certains cas avoir des répercussions sur l'exercice des droits syndicaux. En l'occurrence, ce refus a notamment empêché M. Rakotomanana de participer à un congrès syndical international. Sur cet aspect du cas également, le comité estime qu'un gouvernement ne devrait pas refuser les documents de sortie nécessaires pour ces motifs.

Recommandation du comité

Recommandation du comité
  1. 116. Le comité regrette que le gouvernement n'ait pas fourni de précisions sur les motifs de son refus de laisser M. Rakotomanana sortir du pays pour participer en tant que syndicaliste à des réunions à l'étranger et il recommande au Conseil d'administration de signaler à l'attention du gouvernement les principes exposés aux paragraphes précédents.
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