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Rapport intérimaire - Rapport No. 197, Novembre 1979

Cas no 927 (Brésil) - Date de la plainte: 23-MARS -79 - Clos

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  1. 326. Par des communications respectivement datées des 23, 26 et 27 mars ainsi que du 3 avril 1979, le Front national du travail (FNT), la Confédération mondiale du travail (CMT), la Fédération syndicale mondiale (FSM) et la Centrale latino-américaine de travailleurs (CLAT) ont présenté des plaintes en violation des droits syndicaux au Brésil. La CMT a envoyé des informations complémentaires à l'appui de sa plainte le 11 mai 1979. Elle a transmis dans cette même communication une documentation adressée par le Front national du travail et a déclaré faire sienne la plainte de cette organisation. Pour sa part, le gouvernement a fourni ses observations dans une lettre du 28 mai 1979.
  2. 327. Le Brésil n'a pas ratifié la convention (no 87) sur la liberté syndicale et la protection du droit syndical, 1948; il a ratifié la convention (no 98) sur le droit d'organisation et de négociation collective, 1949.

A. Allégations des plaignants

A. Allégations des plaignants
  1. 328. Les plaintes du FNT, de la FSM et de la CLAT, adressées au BIT par télégrammes, se réfèrent à la mise sous contrôle par décision gouvernementale de syndicats des industries métallurgiques et mécaniques de l'Etat de Sao Paulo à la suite d'une grève destinée à obtenir des augmentations de salaires. La CLAT fait également état de mesures de licenciement prises à l'encontre de 450 travailleurs.
  2. 329. Dans sa lettre du 26 mars 1979, la CMT explique qu'au cours d'une négociation destinée à conclure une convention collective dans le secteur de la métallurgie de Sao Bernardo do Campo, Santo André et Sao Caetano (centres situés dans la zone industrielle de Sao Paulo), les représentants employeurs refusèrent d'accorder une augmentation de salaires de 20 pour cent, alors que, selon la CMT, celle-ci ne constituait rien d'autre qu'un ajustement pour perte de pouvoir d'achat.
  3. 330. A la suite de ce refus, il fut décidé, par des votes effectués dans des assemblées de travailleurs - dont certaines groupèrent plus de 80.000 personnes -, de déclencher une grève de durée illimitée commençant le 13 mars 1979. En application d'une législation qui, selon la CMT, nie pratiquement le droit de grève, le gouvernement déclara illégal ce mouvement. En outre, poursuit l'organisation plaignante, bien que la grève se soit étendue à d'autres centres industriels importants de l'Etat de Sao Paulo, tels que Jundiai et Sao José dos Campos, le gouvernement décida la mise sous contrôle des syndicats de la métallurgie de Sao Bernardo do Campo, Santo André et Sao Caetano.
  4. 331. La CMT joint en annexe à sa lettre du 11 mai 1979 une communication du 28 avril 1979 adressée au BIT par le Front national du travail et appuyée par les dirigeants destitués des syndicats des industries métallurgiques de Sao Bernardo do Campo, de Diadema et de Santo André, le Syndicat des industries métallurgiques de Sao Paulo, le Syndicat des travailleurs des industries métallurgiques d'Osasco et douze autres organisations brésiliennes de travailleurs de divers secteurs d'activités.
  5. 332. Il est indiqué dans les documents contenus dans cette communication du FNT que la législation brésilienne comporte certaines faiblesses. En premier lieu, elle ne prévoit pas de sanctions efficaces contre les entreprises qui ne respectent pas la loi. En deuxième lieu, elle institue un contrôle rigide, par le ministère du Travail, sur les syndicats en permettant au ministre ou à ses délégués régionaux d'intervenir dans toute organisation sous n'importe quel prétexte. En troisième lieu, le droit de grève des travailleurs est inexistant. Enfin, les indemnités de licenciement pour ancienneté et la stabilité à l'emploi ont été profondément atteintes, à partir de 1967, par la création du "Fonds de garantie pour temps de service", dans la mesure où la garantie d'emploi n'existe que temporairement pour le dirigeant syndical et où les indemnités ont été réduites dans les cas de licenciements sans juste motif.
  6. 333. La documentation du FNT signale en outre que, malgré l'article 616 de la consolidation des lois du travail, aux termes duquel les employeurs n'ont pas le droit de refuser la négociation ceux-ci tentent systématiquement d'y échapper lorsqu'il s'agit de questions sérieuses. D'autre part, lorsque les problèmes liés aux conventions collectives sont portés devant la justice du travail, celle-ci n'examine pas les questions soulevées ou se limite à faire appliquer les augmentations de salaires décidées par le pouvoir exécutif.
  7. 334. Pour ce qui concerne le conflit du travail auquel se réfèrent les plaintes, il est indiqué que les syndicats, objets de l'intervention du ministère du Travail, ont leur base géographique dans les sept villes du Grand Sao Paulo où se trouve concentrée l'industrie automobile.
  8. 335. Le document signale également qu'une enquête avait été effectuée par le Département intersyndical d'études et de statistiques socio-économiques (organe créé par les syndicats). Cette enquête avait établi que, pour assurer le maintien du pouvoir d'achat des travailleurs, il convenait d'augmenter les salaires de 34,l pour cent. Pour obtenir cette compensation, certains syndicats ont présenté sans succès des recours devant la justice et d'autres, parmi lesquels ceux mentionnés dans les plaintes, ont exercé des pressions par la base, avec ou sans mouvement de grève, et ont ainsi obtenu, par accord direct avec les employeurs ou leurs organisations, la récupération partielle des 34,l pour cent d'augmentation. C'est ainsi qu'en mai et juillet 1978, le Syndicat des ouvriers des industries métallurgiques, mécaniques et de matériel électrique de Sao Bernardo do Campo et Diadema et le Syndicat des industries de machines de l'Etat de Sao Paulo ont conclu des accords aboutissant à une augmentation de 11 pour cent incorporée définitivement aux salaires et non susceptible de déduction dans des ajustements futurs.
  9. 336. En février 1979, de nouvelles négociations eurent lieu. Un accord fut signé par 31 syndicats représentés par la Fédération des ouvriers métallurgistes de l'Etat de Sao Paulo. Il était ainsi attribué des augmentations de salaires allant de 44 à 63 pour cent alors que les ajustements fixés par le gouvernement étaient de 44 pour cent. Toutefois, les 11 pour cent accordés en 1978 avaient été déduits de l'ajustement et trois syndicats de métallurgistes de Santo André, Sao Bernado et Sao Caetano décidèrent de ce fait de poursuivre la grève qu'ils avaient déclenchée le 13 mars 1979. L'absence d'entente ayant persisté, le litige a été porté le 14 mars 1979 devant la justice du travail, qui a rendu un jugement en moins de vingt-quatre heures. Le tribunal, par une décision qui n'a pas été unanime, a accordé une augmentation de 44 pour cent, montant autorisé par le pouvoir exécutif, inférieur à celui attribué par la convention collective signée par les 31 syndicats de la Fédération des ouvriers métallurgistes de Sao Paulo. En outre, le tribunal déclara la grève illégale.
  10. 337. Devant cet échec, les travailleurs ont décidé de continuer la grève. Le ministre du Travail s'est alors rendu à Sao Paulo où il a tenté pendant plusieurs jours de concilier les parties sans obtenir de résultats. Ceci a entraîné la mise sous contrôle des syndicats, la suspension de leurs dirigeants et la nomination de fonctionnaires du ministère du Travail à la tête des organisations syndicales le 23 mars 1979.
  11. 338. Les travailleurs continuèrent cependant à se réunir dans la mairie de Sao Bernardo ainsi que dans des églises. Contactée par les parties, la Conférence nationale des évêques du Brésil avait permis de rétablir le dialogue interrompu entre le gouvernement, les employeurs et les travailleurs. Les dirigeants destitués des syndicats de Santo André, Sao Bernardo et Sao Caetano acceptèrent alors une trêve de quarante-cinq jours et l'extension de l'accord signé par les 31 syndicats de la Fédération des ouvriers métallurgistes de Sao Paulo, dans l'espoir de trouver une solution amiable au conflit et au problème du paiement des jours de grève. Il était entendu également qu'aucun gréviste ne serait licencié. En conséquence, la grève cessa le 27 mars 1979.
  12. 339. Le ministre du Travail déclara alors que la mise sous contrôle des syndicats pourrait prendre fin dans un proche délai et que les dirigeants destitués seraient autorisés à reprendre la direction des syndicats. Par la suite cependant, le ministre se serait contredit. Enfin, le document signale qu'un millier de travailleurs auraient été licenciés malgré l'accord intervenu sur ce point.
  13. 340. Le jugement du Tribunal régional du travail de la deuxième région ayant déclaré la grève illégale, qui est inclus dans la documentation fournie par le FNT, se réfère à la loi no 4330 du 1er juin 1964 réglementant le droit de grève. Aux termes de l'article 5 de cette loi, "l'exercice du droit de grève doit découler d'une décision prise au scrutin secret et à la majorité des voix par l'assemblée générale de l'organe syndical représentant la catégorie professionnelle visée, en présence des deux tiers ou d'un tiers des adhérents du syndicat, selon qu'il s'agit de la première ou de la deuxième convocation de l'assemblée". En outre, l'article 6 de la loi prévoit que l'assemblée générale est convoquée par le bureau de l'organe syndical intéressé moyennant publication, dix jours au moins à l'avance, d'avis dans les journaux locaux. Le tribunal n'a relevé dans le dossier aucun élément montrant que ces formalités ont été respectées. Il a, en conséquence, estimé que la grève était illégale.
  14. 341. Dans sa lettre d'accompagnement à la communication du FNT, la CMT déclare que la législation brésilienne contient des dispositions qui nient la liberté d'expression et d'association et la reconnaissance effective du droit de négociation. Selon la CMT, le syndicat est défini dans la législation du travail comme un organe de collaboration avec les pouvoirs publics et est soumis au contrôle de l'Etat dans l'élaboration de ses statuts, l'élection ou la destitution des dirigeants, la gestion financière, les assemblées syndicales et le programme d'action (interdiction de divergences avec la politique financière du gouvernement).
  15. 342. En outre, la CMT estime que les preuves de violations répétées de la convention no 98, ratifiée par le Brésil, ne manquent pas. Ainsi, l'article 623 de la consolidation des lois du travail permet d'annuler n'importe quelle clause d'une convention qui contredit directement ou indirectement la politique salariale du gouvernement. De plus, l'article 8 de la loi no 5584 autorise le gouvernement à recourir contre les jugements du tribunal du travail, avec effet suspensif, au cas où le pourcentage d'augmentation des salaires accordé dépasse celui fixé par l'exécutif.
  16. 343. La CMT se réfère également à la loi no 5107 du 13 septembre 1966 créant un Fonds de garantie pour ancienneté de service qui, selon elle, attribue à l'employeur un pouvoir illimité pour licencier un travailleur même si aucun motif ne justifié ce renvoi. De ce fait, conclut la CMT, tout le système de protection du travailleur est annulé en pratique.

B. Réponse du gouvernement

B. Réponse du gouvernement
  1. 344. Dans sa réponse, le gouvernement déclare en premier lieu que la mise sous contrôle des syndicats mentionnés dans les plaintes s'est fondée sur des lois en vigueur depuis 1943 et a eu pour objectif de garantir l'autorité d'un organe du pouvoir judiciaire.
  2. 345. Le gouvernement précise que l'illégalité de la grève a été prononcée par le tribunal régional du travail uniquement parce que les syndicats en cause n'ont pas respecté les formalités prévues par la loi no 4330 qui réglemente le droit de grève reconnu à l'article 165 de la Constitution fédérale. En effet, poursuit le gouvernement, les syndicats déclarèrent la grève sans observer les délais de publication préalables ni la convocation d'assemblées générales dans les formes prévues par la loi. En outre, la loi no 4330 dispose que les scrutateurs de l'assemblée sont présidés par un membre du ministère public de la juridiction du travail et que la décision adoptée doit être communiquée à l'organe local du ministère du Travail. Selon le gouvernement, aucune de ces procédures n'a été suivie dans le cas d'espèce et les avocats des syndicats ne purent présenter les procès-verbaux des assemblées exigés par la loi. Le tribunal déclara donc la grève illégale.
  3. 346. Le gouvernement déclare que les syndicats devaient alors respecter le jugement, décider le retour au travail avec possibilité, cependant, de présenter un recours devant le Tribunal supérieur du travail. Pourtant, ces organisations proclamèrent leur opposition au jugement et incitèrent les travailleurs à poursuivre la grève. Cette attitude amena l'autorité compétente, à savoir la ministre du Travail, à décider la mise sous contrôle des organisations, conformément à l'article 528 de la consolidation des lois du travail. Cette décision fut précédée d'appels des autorités administratives afin que les organisations concernées respectent l'ordre juridique.
  4. 347. Comme les dirigeants syndicaux de ces organisations ne se sont pas montrés sensibles aux raisons qui justifiaient le respect de la décision du tribunal et qu'ils se sont écartés des objectifs proprement syndicaux en violation ouverte de la loi, il n'a pas été possible d'adopter une autre procédure que celle prévue par les articles 553, paragraphe 2, et 724 de la consolidation des lois du travail, c'est-à-dire la suspension des dirigeants syndicaux de leurs fonctions. Le gouvernement remarque, en outre, que les décisions du pouvoir judiciaire doivent être respectées par la communauté et que les syndicats doivent respecter la légalité, comme le prévoit l'article 8 de la convention no 87.
  5. 348. Le gouvernement se réfère ensuite au principe exprimé par le comité dans des cas antérieurs, selon lequel l'interdiction de la grève en cas de conflit de droit ne constitue pas une violation de la liberté syndicale. Il signale également que le rapport soumis à la Conférence internationale du Travail lors de l'adoption de la convention no 87 précisait que l'article 8 de cette convention ne devait pas être interprété de manière à mettre en cause l'indépendance et l'autorité des tribunaux. Pour le gouvernement, c'est précisément ce qu'ont fait les syndicats dans le cas présent.
  6. 349. Dans une note annexée à sa communication, le gouvernement signale que, par arrêté du 16 Mai 1979, le ministre du Travail a suspendu la mise sous contrôle des trois syndicats, annulant ainsi les mesures de suspension prises à l'encontre de leurs dirigeants. En effet, selon le gouvernement, ces derniers ont reconsidéré leurs positions antérieures et pris des mesures concrètes pour que la décision du Tribunal régional du travail soit appliquée. Le respect de la décision judiciaire ayant été ainsi rétabli et l'indépendance et l'autorité du tribunal réaffirmées, le pouvoir exécutif a pu suspendre la mise sous contrôle des organisations et prononcer la réintégration de leurs dirigeants. Le gouvernement remarque que ces dirigeants n'ont intenté aucune action judiciaire lorsqu'ils furent destitués alors qu'il existe dans l'ordre juridique brésilien un recours spécial contre les actes des autorités considérés comme portant atteinte aux droits individuels.

C. Conclusions du comité

C. Conclusions du comité
  1. 350. Le comité observe que les plaintes déposées dans le présent cas contiennent cinq types d'allégations: la déclaration d'illégalité de la grève déclenchée par des syndicats de la métallurgie de la région de Sao Paulo en mars 1979 et l'impossibilité qui existerait en pratique d'exercer le droit de grève, la mise sous contrôle de ces organisations et la suspension de leurs dirigeants, les licenciements de travailleurs intervenus à la suite de la grève, le contrôle de l'Etat sur le fonctionnement des syndicats et, enfin, les restrictions au droit de négociation collective.
  2. 351. En ce qui concerne la déclaration d'illégalité de la grève déclenchée dans le secteur métallurgique de Sao Paulo, il ressort des informations en la possession du comité que le conflit a eu pour origine un différend survenu lors de négociations collectives salariales. En effet, un ajustement de salaires attribué en 1978 avait, semble-t-il, été déduit des augmentations accordées lors des négociations de 1979. Après déclenchement de la grève, le conflit avait été porté devant la justice du travail. Celle-ci rendit un jugement qui, d'une part, accordait une augmentation de salaire limitée à celle autorisée par le gouvernement et, d'autre part, déclarait le mouvement de grève illégal en se fondant sur les dispositions législatives réglementant le droit de grève. Il apparaît, d'après les informations fournies par le gouvernement, que ces dispositions n'avaient pas été respectées par les syndicats.
  3. 352. Malgré la déclaration d'illégalité de la grève, le mouvement se poursuivit encore pendant près de deux semaines, puis une trêve fut acceptée pour trouver une solution amiable et le travail reprit.
  4. 353. Dans les nombreux cas relatifs au droit de grève qui lui ont été soumis, le comité a estimé que ce droit constitue un des moyens essentiels dont disposent les travailleurs et leurs organisations pour promouvoir et défendre leurs intérêts professionnels. Partant de ce principe, le comité a considéré que les conditions posées par la législation pour qu'une grève soit considérée comme un acte licite doivent être raisonnables et, en tout cas, ne pas être telles qu'elles constituent une limitation importante aux possibilités d'action des organisations syndicales.
  5. 354. Les conditions fixées quant à la décision de déclencher une grève par la législation brésilienne et, en particulier, par la loi no 4330 de 1964 sont de diverses natures. La décision doit être prise au scrutin secret par la majorité de l'assemblée générale du syndicat, un quorum de deux tiers ou d'un tiers des membres étant exigé respectivement lors de la première ou deuxième convocation de l'assemblée. La convocation de l'assemblée doit faire l'objet d'une publication dans les journaux locaux avec dix jours d'avance. Les scrutateurs sont présidés par un magistrat et copie de la décision est remise aux autorités et à l'employeur, en accordant à ce dernier un délai de cinq jours pour accepter les revendications, faute de quoi la grève serait déclenchée, moyennant un nouveau préavis de cinq jours.
  6. 355. Dans le passé, le comité a considéré comme admissibles l'obligation de respecter un certain quorum et de prendre la décision de faire grève au scrutin secret, de même que celle de donner préavis à l'employeur avant de déclencher le mouvement. Le comité doit observer cependant que le respect d'un quorum de deux tiers des membres, tel que fixé par la législation brésilienne pour la première assemblée, peut être difficile à atteindre, en particulier dans les cas de syndicats regroupant un grand nombre d'adhérents ou couvrant un large secteur géographique. Dans ces conditions, l'obligation de convoquer une nouvelle assemblée, avec convocation dix jours à l'avance, risque d'entraîner de sérieux délais avant qu'une décision de faire grève puisse être considérée comme valide. A cet égard, le comité a pris connaissance d'un avant-projet de révision de la consolidation des lois du travail, publié au Journal officiel du Brésil le 2 mai 1979. Il note que cet avant-projet, qui doit être maintenant soumis au Parlement, propose de réduire le quorum nécessaire pour déclencher une grève.
  7. 356. Outre les conditions de forme imposées pour le déclenchement de la grève, la législation brésilienne contient des dispositions concernant la soumission, des différends collectifs de travail à des procédures de conciliation et d'arbitrage. A cet égard, les plaignants ont déclaré que l'exercice du droit de grève est nié en pratique. Dans un cas antérieur relatif au Brésil, le comité avait examiné ces dispositions de la loi no 4330. Il avait relevé, à cette occasion, qu'aux termes de l'article 11 de la loi, les autorités du travail adoptent toutes les mesures voulues pour parvenir à une conciliation entre salariés et employeurs au cours du délai de cinq jours qui suit l'assemblée générale. En outre, l'article 23 dispose qu'en cas d'échec de cette conciliation, le dossier de l'affaire est transmis au président du tribunal régional du travail. La décision du tribunal a force exécutoire. Comme le comité l'a déjà signalé, les dispositions précitées risquent de compromettre la possibilité pour les travailleurs de faire grève et de les priver ainsi d'un moyen essentiel pour promouvoir et défendre les intérêts de leurs membres. Le comité, tout en notant que le droit de grève est reconnu par la Constitution brésilienne, ne peut, dans le cas d'espèce, que confirmer ses conclusions et souligner qu'une telle limitation n'est pas conforme aux principes de la liberté syndicale et que, si les organisations de travailleurs sont, comme l'indique le gouvernement, tenues de respecter la légalité, la législation nationale, pour sa part, ne doit pas porter atteinte, ni être appliquée de manière à porter atteinte, aux droits généralement admis des organisations syndicales.
  8. 357. En ce qui concerne la mise sous contrôle des trois syndicats mentionnés dans les plaintes et la suspension de leurs dirigeants, le comité note la déclaration du gouvernement selon laquelle ces mesures ont été prises car les dirigeants concernés n'avaient pas respecté la décision du tribunal, déclarant la grève illégale. Le comité note en outre avec intérêt qu'après la décision de reprise du travail le gouvernement a mis un terme au contrôle des syndicats par les autorités ainsi qu'à la suspension des dirigeants syndicaux.
  9. 358. A propos de cet aspect du cas, le comité doit cependant rappeler qu'il a examiné à plusieurs reprises des cas concernant la mise sous contrôle de syndicats par les autorités brésiliennes. Dans ces cas, le comité a attiré l'attention du gouvernement sur l'importance qu'il attache au principe selon lequel les organisations de travailleurs devraient avoir le droit d'élire librement leurs représentants et d'organiser leur gestion et leur activité, les autorités publiques devant s'abstenir de toute intervention de nature à limiter ce droit ou à en entraver l'exercice légal. Le comité avait également fait remarquer que la mise sous contrôle des organisations syndicales comporte un grave danger d'entraîner une limitation de ce droit.
  10. 359. En réaffirmant ces principes, le comité tient à déclarer que le contrôle de l'activité interne d'un syndicat peut être conforme à la liberté syndicale lorsque l'organisation viole des dispositions légales qui, toutefois, ne devraient pas être de nature à porter atteinte aux principes de la liberté syndicale. Cependant, il est de la plus haute importance, en vue de garantir l'impartialité et l'objectivité de la procédure, que ce contrôle soit exercé par l'autorité judiciaire compétente. A cet égard, le comité note que l'avant-projet de révision de la consolidation des lois du travail mentionné plus haut envisage de supprimer les pouvoirs actuellement attribués au ministère du Travail pour suspendre ou destituer les dirigeants syndicaux, fermer temporairement les organisations ou annuler leur certificat de reconnaissance.
  11. 360. Le comité note que le gouvernement n'a pas communiqué ses observations sur les licenciements allégués d'un millier de travailleurs à la suite de la grève ni sur les allégations formulées en termes généraux, selon lesquelles les autorités exerçaient un contrôle sur le fonctionnement des syndicats autorisé par la législation (élaboration des statuts, élection des dirigeants, gestion financière, assemblées syndicales) et le droit de négociation collective était soumis à des restrictions.

Recommandation du comité

Recommandation du comité
  1. 361. Dans ces conditions, le comité recommande au Conseil d'administration:
    • a) au sujet du droit de grève, de signaler à l'attention du gouvernement les principes et considérations exprimés aux paragraphes 351 à 356 ci-dessus et de souligner que les conditions posées par la législation pour qu'une grève soit licite ne doivent pas être telles qu'elles constituent une limitation importante aux possibilités d'action des organisations syndicales;
    • b) au sujet de la mise sous contrôle d'organisations syndicales du secteur de la métallurgie de Sao Paulo et de la suspension de leurs dirigeants:
    • i) de noter avec intérêt que ces mesures ont été levées;
    • ii) de signaler cependant à l'attention du gouvernement les principes exprimés aux paragraphes 358 et 359 ci-dessus et de rappeler que le pouvoir des autorités administratives d'ordonner la mise sous contrôle des syndicats et la suspension des dirigeants syndicaux n'offre pas les garanties nécessaires pour assurer le droit des syndicats d'organiser leur gestion et leur activité;
    • c) au sujet des autres aspects du cas, de prier le gouvernement de fournir ses observations sur les allégations concernant les licenciements de travailleurs intervenus à la suite de la grève, ainsi que sur celles, formulées en termes plus généraux, concernant les dispositions législatives relatives au contrôle des autorités sur le fonctionnement des syndicats et les restrictions au droit de négociation collective;
    • d) de prendre note de ce rapport intérimaire.
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