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Rapport définitif - Rapport No. 199, Mars 1980

Cas no 942 (Inde) - Date de la plainte: 14-AOÛT -79 - Clos

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  1. 28. La plainte du Centre panindien des organisations d'employés supérieurs figure dans deux lettres en date du 14 août et du 25 septembre 1979. Le gouvernement a communiqué ses observations dans une lettre en date du 5 janvier 1980.
  2. 29. L'Inde n'a ratifié ni la convention (no 87) sur la liberté syndicale et la protection du droit syndical, 1948, ni la convention (no 98) sur le droit d'organisation et de négociation collective, 1949.

A. Allégations des plaignants

A. Allégations des plaignants
  1. 30. Le Centre panindien des organisations d'employés supérieurs allègue qu'un syndicat qui lui est affilié, l'Association des employés supérieurs de l'aéronautique de l'Hindoustan (sigle anglais: HAOA), de Bangladore, a fait l'objet de mesures discriminatoires antisyndicales de la part de l'employeur, la société d'Etat Hindustan Aeronautics Ltd. (sigle anglais: HAL), qui dépend du ministère de la Défense.
  2. 31. Le plaignant affirme que la HAL a délibérément essayé de briser la HAOA qui, après avoir été inactive pendant près de vingt ans, est devenue une organisation active comptant environ 2.300 membres sur les 2.600 employés supérieurs des différentes usines de la HAL. Selon le plaignant, lorsque la HAOA s'est fait enregistrer conformément à la loi indienne sur les syndicats, la HAL a déformé ce fait et a trompé l'opinion publique en disant qu'il s'agissait d'un organisme rival du syndicat des ouvriers qui existait déjà pour protéger cette derrière catégorie de travailleurs dans les diverses usines de la HAL. Le plaignant affirme que l'argument de la rivalité n'est pas soutenable car les employés supérieurs forment une catégorie de salariés nettement différente, et l'on ne s'attend donc pas à ce qu'ils s'affilient au syndicat des ouvriers.
  3. 32. Le plaignant ajoute que la HAOA avait présenté ses revendications (demande de révision du barème des traitements et indemnités) à la direction par les voies de communication et du dialogue, mais que ces démarches étant restées sans effet, les employés supérieurs ont recouru à des méthodes pacifiques d'action directe comme le port d'insignes noires et le boycottage du déjeuner, qui ont abouti à une journée de débrayage le 27 octobre 1978. La HAL a pris des mesures répressives contre cette protestation en proposant une retenue sur le salaire pour la participation au débrayage et en engageant des poursuites disciplinaires contre sept dirigeants de la HAOA, dont cinq ont été suspendus en attendant une enquête interne sur leur prétendue faute. Les dirigeants de la HAOA sont accusés d'avoir incité les employés supérieurs à un débrayage, d'avoir organisé des réunions et incité par d'autres moyens des employés supérieurs à se joindre à la grève, d'avoir empêché des employés supérieurs de s'acquitter de leurs fonctions, d'avoir tenu des réunions illicites à l'intérieur de l'usine, d'avoir publié et distribué des tracts sur le boycottage du déjeuner et le débrayage et d'avoir tenu une conférence de presse sans autorisation. Le plaignant affirme que ces manifestations sont des méthodes acceptables d'activité syndicale il ajoute que malgré les représentations et les protestations de diverses organisations d'employés supérieurs et de parlementaires depuis que ces mesures répressives ont été prises il y a plusieurs mois, la HAL n'a pas modifié sa position. Au Parlement, le ministre de la Défense a appuyé l'attitude de la direction,
  4. 33. Dans sa lettre du 25 septembre 1979, le plaignant déclare que ses représentants se sont entretenus, avec le ministre de la Défense et le secrétaire du Département de la production aux fins de défense, de la façon dont le personnel de la HAL avait été traité le 18 août 1979. En revenant de cet entretien, où ils avaient eu l'impression d'avoir été écoutés avec patience, ils ont appris que la HAL avait décidé le jour même de se passer des services des cinq employés suspendus. Le plaignant a joint à sa lettre un rapport sur l'agitation organisée à la suite de ces licenciements par le syndicat des ouvriers et par la HAOA dans l'usine de la HAL à Bangladore: grèves surprises sur le tas des employés et des ouvriers, grève tournante de la faim, réunions, manifestations et défilés au cours desquels des slogans ont été scandés, des effigies et des bulletins de la direction brûlés, et boycottage du déjeuner. Les pourparlers entre le syndicat et la direction n'ont pas donné de résultat jusqu'au 24 août lorsque, à l'issue d'une réunion entre les parties et les ministres intéressés, il a été décidé de ne pas mettre à exécution les retenues sur les salaires décidées comme sanctions et de ne pas prendre de mesures disciplinaires contre les personnes qui avaient participé à la grève. La direction a déclaré que si les cinq employés supérieurs licenciés présentaient des recours individuels aux autorités compétentes, conformément au règlement disciplinaire, ces requêtes seraient examinées de manière objective et favorable et tranchées selon leur bien-fondé.
  5. 34. Le plaignant joint aussi à sa lettre un article paru dans le Deccan Herald du 4 septembre 1979 et intitulé "La HAL est tenue de dédommager un employé". Selon cet article, le tribunal a ordonné à la HAL de payer des sommes importantes à l'un des dirigeants syndicaux contre lesquels des poursuites disciplinaires avaient été engagées pour l'avoir licencié alors que le recours qu'il avait introduit tendant à faire déclarer illégales les poursuites disciplinaires était encore en instance. Selon l'article, le tribunal a déclaré que "l'action du défendeur (la HAL) est manifestement destinée à empêcher le plaignant de faire valoir ses droits devant les tribunaux. Il semble que le défendeur veuille rendre sa propre justice et qu'il a ordonné le licenciement de mauvaise foi".
  6. 35. Le plaignant est d'avis que le gouvernement et les sociétés d'Etat ne voient pas d'un bon oeil les associations d'employés supérieurs: la seule liberté qu'ils sont prêts à leur, laisser est celle de former une association Pt d'avoir des discussions stériles ne servant qu'à inspirer de la frustration aux intéressés. Par exemple, le plaignant affirme que le gouvernement n'a pas répondu à ses réclamations ni à aucune des communications qui lui ont été adressées par plusieurs organisations d'employés supérieurs.
    • Réponse du gouvernement
  7. 36. Dans sa lettre du 5 janvier 1980, le gouvernement déclare que la HAL a toujours eu un sens élevé de ses responsabilités sociales et a été au tout premier rang des entreprises indiennes soucieuses d'assurer à son personnel de bonnes conditions d'emploi. Elle a toujours encouragé un syndicalisme florissant et il existe un syndicat dans chacune de ses divisions. Le gouvernement déclare que la HAOA est active depuis de nombreuses années mais qu'en janvier 1978 un groupe de cadres subalternes militants a usurpé le pouvoir en renversant les dirigeants élus lors de l'assemblée générale. Les tribunaux sont saisis d'un différend concernant la légalité de la prise de fonctions des nouveaux dirigeants. Selon le gouvernement, sous l'impulsion des nouveaux dirigeants, la HAOA est devenue militante et a adopté une ligne d'action qui a entraîné des actes de violence et d'indiscipline.
  8. 37. La direction de la HAL réfute l'allégation selon laquelle elle aurait essayé de briser la HAOA en présentant son enregistrement en tant que syndicat comme favorisant un syndicat rival. Le gouvernement affirme que la direction a simplement fait savoir qu'une fois enregistrée comme syndicat, l'Association des employés supérieurs devait partager avec d'autres syndicats enregistrés certaines facilités accordées par la direction.
  9. 38. Le gouvernement affirme que la revendication de la HAOA tendant à négocier la révision du barème des traitements, comme cela se fait pour le barème des salaires des ouvriers, n'est pas recevable en Inde car la loi sur les conflits du travail ne vise pas les employés supérieurs comme travailleurs subalternes. Néanmoins, ajoute le gouvernement, la HAL a tenu compte de l'avis de la HAOA à ce sujet lorsqu'elle a soumis des propositions au gouvernement pour approbation. En fait, le gouvernement avait accepté une augmentation substantielle des traitements et des indemnités des employés supérieurs, mais les dirigeants de la HAOA ont néanmoins incité ceux-ci à la grève.
  10. 39. Le gouvernement affirme qu'à la suite de cette action les dirigeants de la HAOA ont été reconnus coupables d'avoir enfreint le règlement de la HAL; cinq dirigeants et deux membres du comité de direction ont fait l'objet de poursuites disciplinaires pour fautes graves, notamment pour avoir incité des employés supérieurs à arrêter le travail, pour avoir tenu des conférences de presse et divulgué des renseignements confidentiels concernant la production aux fins de la défense nationale. Au cours de l'enquête interne, les faits reprochés ont été établis; trois dirigeants et deux membres du comité de direction de la HAOA ont été licenciés et les traitements des deux autres dirigeants ont été réduits pour une période de deux ans. Conformément au règlement, les employés supérieurs licenciés ont fait appel auprès de la direction de la HAL; l'examen de leurs requêtes n'est pas terminé.
  11. 40. Le gouvernement conclut qu'il n'y a pas eu de violation des droits syndicaux à la HAL. Aucun des neuf syndicats d'ouvriers n'a déposé de plainte dans ce sens. Il estime regrettable que dans un organisme public clé comme la HAL, des employés supérieurs fassent preuve de si peu de sens des responsabilités, compromettant ainsi l'intérêt national.

B. B. Conclusions du comité

B. B. Conclusions du comité
  • Conclusions du comité
    1. 41 Le plaignant soutient que la société publique relevant du ministère de la Défense, Hindustan Aeronautics Ltd. (HAL), essaie de briser le syndicat des employés supérieurs en le présentant au public comme un syndicat rival du syndicat des ouvriers, et il affirme que des dirigeants syndicaux ont été licenciés pour avoir organisé une grève le 27 octobre 1978 et y avoir pris part.
    2. 42 Le comité a déclaré que le droit de grève des travailleurs et de leurs organisations est généralement reconnu comme étant un moyen légitime de défendre leurs intérêts professionnels. Le comité a admis toutefois que le droit de grève peut faire l'objet de restrictions, voire d'interdictions, dans la fonction publique ou les services essentiels, au sens strict du terme, c'est-à-dire les services dont l'interruption mettrait en danger l'existence ou le bien-être de l'ensemble ou d'une partie de la population. Lorsque les grèves sont interdites ou soumises à des restrictions dans les services essentiels ou dans la fonction publique, le comité a souligné l'importance qu'il attache à ce que des garanties appropriées soient accordées pour sauvegarder les intérêts des travailleurs ainsi privés d'un moyen essentiel de défense professionnelle; il a aussi indiqué que les restrictions devraient s'accompagner de procédures de conciliation et d'arbitrage appropriées, impartiales et rapides, aux diverses étapes desquelles les intéressés devraient pouvoir participer et que les décisions arbitrales devraient être dans tous les cas obligatoires pour les deux parties; une fois rendus, de tels jugements devraient être exécutés rapidement et de façon complète.
    3. 43 En l'espèce, le plaignant affirme que lorsque la HAOA a présenté ses revendications, elle n'a pas reçu de réponse de la direction, mais le gouvernement affirme que la direction de la HAL les a prises en considération lorsqu'elle a soumis des propositions au gouvernement pour approbation et qu'une augmentation substantielle des traitements et des indemnités des employés supérieurs a été accordée. De plus, il ressort de la plainte que des entretiens et des réunions entre le syndicat et la direction ont eu lieu continuellement pendant la période d'agitation qui a suivi le licenciement de dirigeants syndicaux en août 1979. Un accord a été conclu selon lequel aucune retenue sur le traitement ne serait effectuée à titre de sanction, ni aucune mesure disciplinaire prise contre les syndicalistes qui avaient participé aux manifestations d'août 1979. La possibilité existe pour les syndicalistes licenciés de faire appel et les cinq dirigeants syndicaux intéressés l'ont fait. L'examen de leurs requêtes n'est pas terminé. Par ailleurs, au cours de poursuites judiciaires, les tribunaux civils ont décidé que la direction devrait payer des dommages-intérêts importants à l'un des dirigeants syndicaux ayant fait l'objet de poursuites disciplinaires pour lui avoir signifié son licenciement alors qu'une requête contestant la légalité des poursuites disciplinaires n'était pas encore tranchée.
    4. 44 Quant à l'allégation du plaignant selon laquelle la direction aurait présenté l'enregistrement de la HAOA en tant que syndicat comme une manifestation de rivalité syndicale, le gouvernement a répondu que cet enregistrement signifiait que les facilités accordées devaient être partagées sans distinction par tous les syndicats enregistrés dans ses usines. Le comité considère que, aucune preuve du désir de la direction de favoriser la rivalité syndicale n'ayant été présentée, cet aspect du cas n'appelle pas un examen plus approfondi.

Recommandation du comité

Recommandation du comité
  1. 45. Comme les entretiens entre le syndicat et la direction qui ont eu lieu pendant la période des manifestations ont abouti à un règlement, et que les cinq dirigeants syndicaux licenciés ont la possibilité de faire appel contre leur licenciement, ce qu'ils font actuellement. Dans ces conditions, le comité recommande au Conseil d'administration de décider que le cas n'appelle pas un examen plus approfondi.
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