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- 49. Le comité a déjà examiné ce cas à plusieurs reprises et pour la dernière fois à sa réunion de mai 1984 où il a dû présenter un rapport intérimaire au Conseil d'administration en l'absence de réponses du gouvernement, celui-ci n'ayant pas envoyé d'informations substantielles aux demandes d'informations formulées par le comité dans ses rapports antérieurs. (Voir 234e rapport, paragr. 445 à 484, approuvé par le Conseil d'administration à sa 226e session (mai-juin 1984)).
- 50. Constatant, à sa réunion de février 1985, que le gouvernement n'avait toujours pas envoyé les informations et observations demandées, le comité avait lancé un appel pressant à celui-ci pour qu'il transmette d'urgence ses observations et avait indiqué que, conformément à sa procédure, il pourrait présenter un rapport sur le fond de l'affaire à sa réunion de mai 1985. (Voir 238e rapport, paragr. 20, approuvé par le Conseil d'administration à sa 229e session (février-mars 1985)).
- 51. Depuis lors, deux communications du gouvernement ont été reçues au BIT en date des 8 et 22 mai 1985.
- 52. La République centrafricaine a ratifié la convention (no 87) sur la liberté syndicale et la protection du droit syndical, 1948, ainsi que la convention (no 98) sur le droit d'organisation et de négociation collective, 1949.
A. Examen antérieur du cas
A. Examen antérieur du cas
- 53. Les plaintes portaient principalement sur la dissolution par voie administrative de l'Union générale des travailleurs du Centrafrique (UGTC). Elles avaient également trait à l'occupation des locaux, au gel des avoirs et à la censure imposée à l'UGTC ainsi qu'à des licenciements. Par la suite, les activités syndicales avaient été suspendues et plusieurs syndicalistes, dont le secrétaire général de l'UGTC, M. Sonny Cole, avaient été arrêtés.
- 54. Il était expliqué, dans les plaintes, que l'UGTC avait déclenché, le 15 mai 1981, une grève générale dans tout le secteur privé à la suite de vaines tentatives de négociation collective avec le gouvernement et le patronat. Le gouvernement avait, selon les plaignants, rejeté le cahier de doléances élaboré par les travailleurs à l'occasion du 1er mai, alors que ce cahier contenait essentiellement des revendications relatives aux conditions de travail de l'ensemble des salariés.
- 55. Le 16 mai 1981, lendemain du jour où la grève avait été déclenchée, le Président de la République avait dissous l'organisation par décret, au motif de sa prétendue intransigeance dans les négociations avec le patronat et le gouvernement, de sa prétendue intelligence avec l'étranger et de son illégalité qui tenait au monopole syndical prévu dans les statuts. L'UGTC alléguait en outre que, 48 heures avant sa dissolution, les autorités avaient reconnu une nouvelle centrale syndicale, la Confédération nationale des travailleurs centrafricains (CNTC).
- 56. Par la suite, l'UGTC avait allégué le licenciement ou la suspension d'un certain nombre de syndicalistes et elle avait annexé à sa communication un arrêté ministériel du 23 mai 1981 suspendant de leurs fonctions quatre hauts fonctionnaires. Elle avait joint aussi la note ministérielle ordonnant au directeur général de la Banque nationale centrafricaine de dépôt de bloquer le compte de l'UGTC.
- 57. En outre, le comité militaire de redressement national avait suspendu, dès sa prise de pouvoir, le 1er septembre 1981, toutes les activités des partis politiques et des organisations nationales, y compris des syndicats, sur toute l'étendue du territoire national.
- 58. Suite au blocage des fonds de l'UGTC, son secrétaire général, M. Sonny Cole, avait porté plainte contre le gouvernement devant le Tribunal de Bangui. L'audience, qui aurait dû se tenir le 17 mars 1982, n'avait pas eu lieu en raison de l'arrestation de trois magistrats du tribunal, dont le président du tribunal administratif.
- 59. Enfin, la Confédération internationale des syndicats libres (CISL) avait allégué l'arrestation, le 2 février 1983, de M. Sonny Cole et d'autres syndicalistes pour incitation à une grève.
- 60. Dans ses réponses initiales, le gouvernement avait confirmé que l'UGTC avait été dissoute, mais, selon lui, la grève générale du 15 mai 1981 n'avait aucun rapport avec les conditions de travail des salariés et aurait eu un caractère politique. Il affirmait avoir dissous l'UGTC qui exerçait un monopole syndical, afin de permettre aux travailleurs centrafricains de créer librement les associations professionnelles de leur choix.
- 61. Le gouvernement avait expliqué que, depuis la dissolution de l'UGTC, plusieurs centrales syndicales avaient vu le jour à l'initiative des travailleurs eux-mêmes: la Confédération nationale des travailleurs centrafricains (CNTC) dont les statuts ont été enregistrés, la Confédération centrafricaine des syndicats libres (CCSL) et la Fédération centrafricaine du travail (FCT) dont les statuts étaient à l'étude au ministère de l'Intérieur. Toutefois, le gouvernement avait indiqué que, les activités syndicales étant suspendues, il ne pouvait être question de reconnaître la CCSL ni toute nouvelle organisation à naître dans cette conjoncture. Il avait admis qu'il avait pris des mesures de sauvegarde des biens des travailleurs par le blocage des comptes de l'UGTC et expliqué que le Tribunal de grande instance de Bangui devait procéder à l'inventaire des biens de l'ancienne centrale et décider de leur affectation aux organisations poursuivant les mêmes buts. Selon le gouvernement, la suspension de certains fonctionnaires était une sanction disciplinaire concernant de hauts responsables administratifs qui avaient abandonné leur poste et leur faute professionnelle rendait la rupture de leur contrat de travail légitime.
- 62. Devant la Commission de l'application des normes de la Conférence en 1982, le représentant gouvernemental avait expliqué que les fonds de l'UGTC placés en banque avaient disparu après la dissolution de l'UGTC, les responsables du bureau qui avaient droit à la signature s'étant en effet précipités dans les banques pour tirer à leur profit des chèques, dont les traces étaient encore vérifiables. Il avait affirmé que rien ne s'opposait à ce que les affiliés de l'ex-UGTC constituent une nouvelle organisation syndicale de leur choix.
- 63. En 1983, toujours devant la Commission de l'application des normes de la Conférence, le représentant gouvernemental avait indiqué que le chef de l'Etat avait suspendu les activités syndicales et politiques dans le souci de mettre fin au désordre et à l'utilisation du syndicat par les partis politiques. Cependant, dans la pratique, si les activités politiques étaient suspendues, en revanche les activités syndicales existaient et la Confédération nationale des travailleurs centrafricains s'exprimait librement.
- 64. Au sujet de l'arrestation de M. Sonny Cole, le gouvernement avait déclaré que les faits reprochés à l'intéressé étaient d'ordre politique. Par la suite, le 1er mai 1983, M. Sonny Cole et ses camarades avaient été libérés.
- 65. A sa session de mai-juin 1984, le Conseil d'administration avait approuvé les recommandations suivantes du comité:
- "a) Le comité regrette l'attitude de non-coopération du gouvernement dans cette affaire.
- b) D'une manière générale, le comité tient à exprimer sa profonde préoccupation devant la gravité de la mesure de suspension des activités syndicales qui affecte l'ensemble de la vie syndicale depuis septembre 1981. Il exprime le ferme espoir que les organisations syndicales en République centrafricaine pourront reprendre le plus rapidement possible leurs activités et que tous les travailleurs pourront constituer les organisations de leur choix, y compris dans une organisation qui fasse suite à l'ex-UGTC, s'ils le désirent. Il prie le gouvernement de l'informer de toute mesure qu'il prendrait en vue de rétablir les activités de toutes les organisations syndicales qui souhaitent exister dans le pays.
- c) Tout en prenant note de la libération de M. Sonny Cole et de ses camarades à l'occasion de la fête du 1er mai 1983 après trois mois de détention pour incitation à la grève, le comité rappelle que l'arrestation de syndicalistes, en particulier de dirigeants syndicaux pour des activités liées à la défense des intérêts des travailleurs, constitue une grave atteinte aux libertés publiques en général et aux libertés syndicales en particulier.
- d) Le comité prie le gouvernement de lui communiquer le jugement du Tribunal de Bangui concernant la dissolution de l'UGTC et la dévolution de ses biens, dès qu'il sera rendu.
- e) En ce qui concerne l'arrestation des magistrats du Tribunal de Bangui, dont le président du tribunal administratif, le comité demande au gouvernement d'indiquer si cette arrestation a été effectuée en relation avec le procès en instance devant le tribunal et qui concernait la dissolution de l'UGTC par voie administrative et la dissolution des biens de ce syndicat.
- f) Le comité note que des entretiens entre son président et un représentant gouvernemental de la République centrafricaine ont eu lieu le 14 juin 1983 à la 69e session de la Conférence internationale du Travail au sujet de la possibilité d'envoyer une mission sur place afin d'examiner l'ensemble des affaires en cause. Le comité demande instamment au gouvernement de transmettre sa réponse à l'égard de cette mission qu'il estime être de la plus haute utilité et qui lui permettrait de formuler des conclusions sur ce cas en pleine connaissance de cause."
B. Réponse du gouvernement
B. Réponse du gouvernement
- 66. Dans une communication télégraphique du 8 mai 1985, le gouvernement annonçait l'envoi d'un mémorandum sur cette affaire et, par une communication ultérieure du 9 mai 1985 du ministre de la Fonction publique, du Travail et de la Sécurité sociale parvenue au BIT le 22 mai 1985, le gouvernement a fourni des explications détaillées sur ce cas.
- 67. Selon le gouvernement, la dissolution de l'UGTC est légale car cette organisation syndicale s'est écartée de son objectif essentiel qui aurait dû être la défense des intérêts professionnels, sociaux et économiques de ses membres. Or l'UGTC avait été créée dans le cadre de la Constitution de 1964 qui avait institutionnalisé le Mouvement d'évolution sociale de l'Afrique noire (MESAN) comme parti unique, ce qui impliquait une centrale syndicale unique: l'UGTC qui représentait tous les syndicats professionnels.
- 68. Le gouvernement explique que l'institution d'un système politique pluraliste dans le cadre de la Constitution du 5 février 1981 a eu pour conséquence, en droit, la dissolution de l'UGTC, centrale syndicale unique inféodée au MESAN. La décision gouvernementale de dissolution de l'UGTC est donc légale puisqu'elle est conforme à la nouvelle Constitution.
- 69. Toujours selon le gouvernement, cette dissolution a donné la liberté à tous les travailleurs de constituer des organisations de leur choix et trois centrales ont été constituées à l'initiative des travailleurs eux-mêmes:
- - la Confédération nationale des travailleurs centrafricains (CNTC), le 10 août 1980, affiliée à la Confédération mondiale du travail;
- - la Fédération centrafricaine du travail (FCT), le 12 juillet 1981, affiliée à la Fédération syndicale mondiale;
- - la Confédération centrafricaine des syndicats libres (CCSL) en 1981 affiliée à la Confédération internationale des syndicats libres.
- Le gouvernement admet toutefois que les statuts des deux dernières centrales sont encore à l'étude au ministère de l'Intérieur pour enquête d'usage sur la moralité des personnes composant leur bureau, conformément à la législation nationale sur les associations.
- 70. Le gouvernement poursuit en expliquant que la création de ces centrales a provoqué une scission profonde au sein de l'UGTC, que les dirigeants manipulés par les partis politiques et par l'étranger se sont écartés des objectifs de leur organisation, qu'ils ont organisé des incitations à la révolte et qu'ils ont ainsi perturbé les activités économiques et l'ordre social, paralysé le fonctionnement des institutions publiques et mis en danger la vie même de la nation. Toujours selon le gouvernement, c'est dans ces circonstances insurrectionnelles où les partis politiques ont récupéré les revendications syndicales à leur profit que le Comité militaire de redressement national a décidé la suspension des activités de toutes les organisations nationales, y compris des centrales syndicales, sur toute l'étendue du territoire national.
- 71. Quant à la dévolution des biens de l'ex-UGTC, le gouvernement indique que le tribunal ne s'est pas encore prononcé. Il réitère ses explications antérieures selon lesquelles les fonds de l'organisation déposés dans les banques de la place ont été retirés dès le 19 mai 1981 par les anciens dirigeants de l'UGTC qui les ont utilisés à leur profit. Pour le gouvernement, il serait logique de leur demander des comptes. Il ajoute que l'arrestation des magistrats alléguée par les plaignants n'a aucun rapport avec l'audience en cause.
- 72. Enfin, poursuit-il, c'est à la suite d'une grève sauvage déclenchée par les travailleurs du secteur privé pour faire échec à une décision gouvernementale étendant aux travailleurs de ce secteur la contribution exceptionnelle au redressement national, payée jusqu'alors par les seuls agents de l'Etat, que certains syndicalistes dont l'ex-secrétaire général de l'UGTC, M. Sonny Cole, et ses camarades ont été, après enquête policière, arrêtés en janvier 1983 pour incitation à une grève illégale qui s'apparentait à une véritable révolte contre l'autorité légitime de l'Etat. Mais à l'occasion du 1er mai 1983 les personnes arrêtées ont été libérées et reconduites dans leurs fonctions, explique le gouvernement.
- 73. Il indique à propos de la reprise des activités syndicales que la trève syndicale qu'il a décidée en septembre 1981 avait pour objet de permettre de relancer, dans la paix et la sécurité, l'économie nationale dévastée par quinze années de pillage et d'incurie et de redresser la nation de la situation lamentable où les agissements irresponsables des partis politiques, des organisations inféodées à ces partis et de certains dirigeants syndicalistes politisés l'avaient amenée. Le gouvernement décidera, assure-t-il, en temps opportun, de la reprise générale des activités syndicales quand les circonstances propices à un développement harmonieux seront rétablies et quand les causes des perturbations économiques et sociales seront dissipées car dans l'immédiat aucun élément nouveau ne lui permet de reconsidérer sa décision au risque de sombrer dans la situation d'avant septembre 1981.
- 74. Pour conclure, le gouvernement estime que les plaintes en instance dans le présent cas devraient être classées sans suite car aucun fait nouveau ne justifie la poursuite de leur examen dans les circonstances actuelles puisque la suspension des activités des organisations nationales est une mesure générale qui ne concerne pas spécialement les syndicats, que le droit d'organisation demeure en République centrafricaine conformément aux engagements internationaux, qu'une organisation syndicale reconnue, la Confédération nationale des travailleurs centrafricains, existe et collabore avec les pouvoirs publics et les employeurs au sein d'organismes tripartites aux niveaux national et international et que la décision gouvernementale critiquée n'interdit que les manifestations ou activités des organisations susceptibles d'être politisées et de nature à perturber l'ordre social et le fonctionnement de l'économie dans cette période de redressement national.
- 75. Devant la Commission de l'application des normes de la Conférence internationale du Travail en 1985, le représentant gouvernemental a réitéré les explications que son gouvernement avait fournies dans sa communication écrite du 9 mai 1985. En ce qui concerne la date d'une reprise éventuelle des activités syndicales, le représentant gouvernemental a déclaré qu'il n'était pas qualifié pour fournir des informations à cet égard mais que, bien que toutes manifestations de caractère national aient été suspendues par le Comité militaire, le gouvernement a fait appel aux travailleurs pour participer aux prochaines cérémonies commémoratives de la fête nationale, ce qui peut être considéré comme un signe d'évolution positive.
C. Conclusions du comité
C. Conclusions du comité
- 76. Le comité doit, en premier lieu, déplorer vivement que ce n'est qu'après avoir adressé au gouvernement deux appels pressants en février 1984 et en février 1985, respectivement, que celui-ci a envoyé un mémorandum le 9 mai 1985 sur cette affaire. Il observe en outre d'une manière générale que le contenu de ce mémorandum n'apporte que très peu d'éléments nouveaux d'informations.
- 77. Le comité regrette en particulier que le gouvernement n'ait pas donné suite à la proposition de recours aux contacts directs formulée par le comité et le Conseil d'administration. Etant donné l'importance et la gravité des questions soulevées dans les plaintes et l'insuffisance des éléments d'information fournis par le gouvernement, le comité demeure convaincu qu'une mission sur place d'un représentant du Directeur général aurait contribué à une meilleure connaissance de la situation syndicale et à un examen utile des solutions à apporter aux problèmes posés.
- 78. En conséquence, le comité croit devoir rappeler que l'ensemble de la procédure instituée est d'assurer le respect des libertés syndicales en droit comme en fait et qu'il est convaincu que, si elle protège les gouvernements contre des accusations déraisonnables, ceux-ci voudront bien reconnaître à leur tour l'importance qu'il y a à ce qu'ils présentent, en vue d'un examen objectif, des réponses détaillées aux allégations dirigées contre eux.
- 79. Le comité rappelle que les plaintes déposées originellement dans le présent cas concernaient la dissolution de l'UGTC. Cette dissolution a été prononcée par le décret no 81/216 signé par le Président de la République le 16 mai 1981. Tout en prenant note des explications réitérées à maintes reprises par le gouvernement sur le caractère de monopole syndical dont jouissait l'UGTC et sur la mise en place par voie constitutionnelle du pluralisme syndical, force est donc de constater qu'il s'agit là d'une dissolution d'une organisation syndicale par voie administrative manifestement contraire à l'article 4 de la convention no 87 ratifiée par la République centrafricaine.
- 80. La dissolution de l'UGTC a évidemment posé le problème de la dévolution des fonds et biens qui appartenaient à cette organisation. Le comité observe que le gouvernement lui-même reconnaît que le tribunal chargé d'instruire ce procès ne s'est pas encore prononcé. Le comité ne peut donc, dans ces conditions, que rappeler le principe selon lequel les biens des organisations dissoutes devraient être répartis en définitive entre les membres des syndicats en question ou transférés aux organisations qui leur succèdent, c'est-à-dire à l'organisation ou aux organisations qui poursuivent les objectifs pour lesquels le syndicat dissous avait été constitué et qui les poursuivent dans le même esprit. Voir, par exemple, 194e rapport, cas no 900 (Espagne), paragr. 258; 209e rapport, cas no 763 (Uruguay), paragr. 78.]
- 81. L'application de ce principe suppose évidemment que les travailleurs aient le droit de constituer les organisations de leur choix et en particulier la possibilité de créer, s'ils le souhaitent, une organisation qui prenne effectivement la suite de l'UGTC. Le comité prend note à cet égard des déclarations réitérées du gouvernement selon lesquelles la dissolution de l'UGTC a eu précisément pour but de rendre possible le pluralisme syndical. Il note également que, toujours selon le gouvernement, plusieurs centrales syndicales se sont créées après cette dissolution. Toutefois, le comité doit constater que le gouvernement lui-même reconnaît que seule la CNTC a été légalement enregistrée. Les statuts des deux autres centrales créées en 1981 sont encore en 1985 à l'étude au ministère de l'Intérieur. Il apparaît d'ailleurs qu'aucun représentant de ces deux centrales ne figurait dans la délégation de la République centrafricaine à la 71e session de la Conférence internationale du Travail de 1985. En conséquence, le comité signale au gouvernement l'extrême urgence de rétablir pour les travailleurs, tant en droit qu'en pratique, le droit de constituer les organisations de leur choix, conformément à l'article 2 de la convention no 87. Il demande en outre au gouvernement d'indiquer quel est le sort actuel des biens de l'ex-UGTC, tant en ce qui concerne les avoirs immobiliers que les liquidités, et la raison pour laquelle le Tribunal de Bangui, saisi de la question de la dévolution des biens de cette organisation depuis 1982, n'a pas encore statué sur cette affaire.
- 82. Pour ce qui est de l'annulation des activités syndicales, appelée en République centrafricaine trève syndicale, le comité note que, selon le gouvernement, les activités syndicales se déroulent normalement en pratique et que la CNTC s'exprime librement. Le comité observe cependant que le libre exercice des droits syndicaux ne s'applique, de l'aveu même du gouvernement, qu'à une seule centrale. Le gouvernement a d'ailleurs reconnu lui-même que la suspension des activités syndicales l'empêchait de reconnaître toute nouvelle organisation qui serait créée dans cette conjoncture. Le comité doit donc souligner que tous les travailleurs dans la République centrafricaine devraient avoir le droit, par l'intermédiaire des centrales de leur choix, d'exercer librement leurs activités de défense et de promotion de leurs intérêts économiques et sociaux.
- 83. Le comité considère que le retour à une vie syndicale normale doit être l'objectif du gouvernement qui a ratifié les conventions nos 87 et 98 et qui a donc l'obligation de les appliquer. Le comité estime donc que tant la question de la dévolution des biens de l'ex-UGTC que celle de l'annulation des activités syndicales et celle du non-enregistrement des statuts syndicaux déposés en 1981 par la Fédération centrafricaine du travail et par la Confédération centrafricaine des syndicats libres méritent d'être soumises à l'attention de la Commission d'experts pour l'application des conventions et recommandations.
Recommandation du comité
Recommandation du comité
- 84. Dans ces conditions, le comité recommande au Conseil d'administration d'approuver le présent rapport et, en particulier, les conclusions suivantes:
- a) Le comité déplore que, malgré les assurances données au président du Comité de la liberté syndicale et au cours de plusieurs sessions de la Conférence internationale du Travail devant la Commission de l'application des conventions et recommandations, le gouvernement n'a pas pris de mesures pour restaurer la liberté syndicale en République centrafricaine.
- b) Le comité déplore vivement avoir dû adresser deux appels pressants au gouvernement en février 1984 et en février 1985 pour qu'il envoie des informations détaillées sur cette affaire et il regrette que le gouvernement n'ait pas donné suite à la proposition qui lui avait été faite d'avoir recours à une mission de contacts directs.
- c) Le comité constate que la dissolution de l'Union générale des travailleurs de Centrafrique a été prononcée par voie administrative, contrairement à l'article 4 de la convention no 87 ratifiée par la République centrafricaine.
- d) Le comité rappelle que les biens d'organisations dissoutes devraient être répartis en définitive entre les membres des syndicats en question ou transférés aux organisations qui leur succèdent, étant entendu qu'il faut entendre par ces termes, les organisations qui poursuivent les mêmes buts dans le même esprit. Il demande au gouvernement d'indiquer quel est actuellement le sort des biens de l'ex-UGTC, tant en ce qui concerne les avoirs immobiliers que les liquidités, et de préciser les raisons pour lesquelles le Tribunal de Bangui, saisi de la question de la dévolution des biens de l'UGTC depuis 1982, n'a pas encore statué sur cette affaire.
- e) Le comité signale au gouvernement l'extrême urgence de rétablir pour les travailleurs, tant en droit qu'en pratique, le droit de constituer les organisations de leur choix, conformément à l'article 2 de la convention no 87 ratifiée par la République centrafricaine.
- f) Le comité souligne que tous les travailleurs centrafricains devraient avoir le droit, par l'intermédiaire des centrales de leur choix, d'exercer librement leurs activités de défense et de promotion de leurs intérêts économiques et sociaux.
- g) Le comité attire l'attention de la Commission d'experts pour l'application des conventions et recommandations sur l'ensemble du cas et en particulier sur la question de l'annulation des activités syndicales prononcée dans le cadre de la trève syndicale et celle du non-enregistrement des statuts syndicaux déposés depuis 1981 par deux centrales centrafricaines qui sont à l'étude au ministère de l'Intérieur depuis quatre ans déjà. Le comité considère qu'il s'agit de violations flagrantes des conventions sur la liberté syndicale ratifiées par la République centrafricaine.