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Rapport où le comité demande à être informé de l’évolution de la situation - Rapport No. 214, Mars 1982

Cas no 1068 (Grèce) - Date de la plainte: 16-JUIL.-81 - Clos

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  1. 351. La plainte de la Fédération syndicale mondiale (FSM) et de l'Union internationale des syndicats (UIS) des travailleurs des transports est formulée dans une communication du 16 juillet 1981. Le Syndicat panhellénique des mécaniciens de la marine marchande (PEMEN) a adressé des informations sur cette affaire le 27 août 1981. Pour sa part, le gouvernement a fourni ses observations dans des communications des 10 août, 15 octobre et 7 décembre 1981 respectivement.
  2. 352. La Grèce a ratifié la convention (no 87) sur la liberté syndicale et la protection du droit syndical, 1948, ainsi que la convention (no 98) sur le droit d'organisation et de négociation collective, 1949.

A. Allégations des plaignants

A. Allégations des plaignants
  1. 353. La FSM et PUIS des travailleurs des transports protestent contre la répression, qui, selon elles, a frappé le syndicat panhellénique des mécaniciens de la marine marchande (PEMEN), organisation qui leur est affiliée.
  2. 354. Les organisations plaignantes expliquent que, face au refus de satisfaire des revendications légitimes des travailleurs de ce secteur d'activité et malgré plusieurs démarches auprès des autorités compétentes, la PEMEN a dû lancer un préavis de grève pour le 13 juillet 1981.
  3. 355. A la demande du patronat, les autorités grecques ont alors intenté un procès contre ce syndicat, poursuivent les organisations plaignantes, et le Tribunal du Pirée a interdit la grève le 9 juillet 1981, contrairement aux garanties prévues par la Constitution grecque en matière de grèves et de négociations collectives.
  4. 356. Il ressort de la documentation annexée à la plainte que les revendications des mécaniciens de la marine marchande portaient sur des questions d'ajustements des salaires, de paiement des samedis et des congés, de modification de la tarification des heures supplémentaires, de classification de ce secteur d'activité dans la catégorie des professions insalubres et dangereuses, de modification des bas salaires des mécaniciens non encore diplômés en application d'une décision du tribunal qui les avait déclarés inégaux et abusifs.
  5. 357. La grève a été interdite, explique la PEMEN, car la convention collective qui régit les conditions de travail dans ce secteur est en vigueur jusqu'au 30 septembre 1981. Or, rappelle-t-elle, bien que cette convention ait été signée et ratifiée par l'Union des armateurs grecs (EEE), la Fédération panhellénique maritime (PNO) et l'Union des mécaniciens diesel (PEME KEN) (cette dernière ne regroupant que 260 membres), elle a été étendue aux membres de la PEMEN par décision du ministre de la marine marchande alors que la PEMEN était encore en train de négocier. En outre, les employeurs ont fait valoir que la grève serait très dommageable à leurs propres intérêts et à l'économie nationale et que les revendications des travailleurs étaient illégales, abusives et inacceptables puisqu'il s'agissait de travailleurs très bien rémunérés. Les employeurs ont donc demandé au tribunal, outre l'interdiction de la grève, une sanction de 100.000 drachmes d'amende en cas de violation de la décision judiciaire et une peine d'une année d'emprisonnement pour chaque membre de la direction du syndicat.

B. Réponse du gouvernement

B. Réponse du gouvernement
  1. 358. Dans sa réponse du 10 août 1981, le gouvernement transmet les informations fournies par les services du ministère de la marine marchande sur cette affaire. Selon le gouvernement, le droit de grève doit s'exercer dans la cadre de la loi et toute contestation en la matière doit être tranchée par les tribunaux compétents. En l'occurrence, déclare le gouvernement, en juillet. 1980, le tribunal avait interdit le recours à une grève de 48 heures dans ce secteur d'activité et ordonné l'interdiction de toute nouvelle grève qui aurait pour objet les mêmes revendications. La PEMEN n'a, à l'époque, pas introduit de recours contre cette décision remarque le gouvernement; en mai 1981, trois mois avant l'expiration de la convention collective, la PEMEN a décidé de lancer un préavis de grève visant à satisfaire à peu près les mêmes revendications. Le tribunal, s'appuyant sur sa décision antérieure, a donc déclaré la grève illégale.

C. Informations complémentaires communiquées par les plaignants

C. Informations complémentaires communiquées par les plaignants
  1. 359. Dans une communication du 27 août 1981, la PEMEN annonce qu'une grève de trois jours a effectivement eu lieu sur tous les bateaux grecs à travers le monde et qu'elle s'est terminée avec succès. Cependant, plusieurs travailleurs grévistes ont été licenciés et certains ont dû regagner la Grèce à leurs frais, poursuit-elle.

D. Réponses récentes du gouvernement

D. Réponses récentes du gouvernement
  1. 360. Dans une communication, datée du 15 octobre 1981, le ministre de la marine marchande a rétorqué que la PEMEN était en droit d'introduire un recours en annulation de la décision du tribunal. En outre, pour ce qui concerne la procédure de négociation et d'approbation des conventions collectives du travail, le ministre a renvoyé aux explications qu'il avait fournies dans le cas no 947, à savoir que la convention collective en cause avait été ratifiée par l'union des armateurs grecs (EEE) et par la Fédération panhellénique maritime (PNO) dont fait partie la PEMEN. Le ministre l'a étendue à ce secteur d'activité conformément à la loi. Le 7 décembre 1981, le gouvernement déclare que les grévistes ont effectivement été licenciés par les armateurs pour avoir déclenché illégalement une grève du 13 juillet au 11 août 1981 et il précise que les intéressés peuvent recourir devant les tribunaux pour obtenir leur réintégration.

E. Conclusions du comité

E. Conclusions du comité
  1. 361. Le comité observe que le différend du travail qui oppose les syndicalistes de la PEMEN et leurs employeurs a déjà fait l'objet d'examens de sa part dans les cas nos 947 et 1008 où il est parvenu à des conclusions définitives.
  2. 362. Lors de ces précédents examens, le comité avait indiqué que l'homologation - et l'extension qui en découle pour les syndicalistes de la PEMEN - par le ministère de la Marine marchande de la convention collective signée par la PNO et l'EEE ne semblait pas constituer une atteinte aux principes de la négociation collective dès lors que la convention en question avait été signée par la Fédération panhellénique maritime (PNO) à laquelle adhère la PEMEN et les organisations d'employeurs compétentes. Cependant, le comité avait estimé que dans la mesure où la PEMEN est l'organisation la plus représentative de la branche, il aurait été souhaitable que cette organisation soit représentée dans les négociations concernant les problèmes spécifiques de la catégorie de personnel qu'elle représente.
  3. 363. Dans l'affaire actuellement en instance, le comité observe que la PEMEN estime que la convention collective qui lui a été étendue par décision ministérielle et, qui était en vigueur jusqu'au 30 septembre 1981, l'a été alors qu'elle était encore en train de négocier, et qu'en conséquence c'est à bon, droit qu'elle a lancé un préavis de grève pour obtenir des modifications dans les conditions de travail qui lui avaient été imposées. En revanche, pour le gouvernement, une précédente décision du tribunal avait interdit aux intéressés de faire grève et ceux-ci n'avaient pas fait appel de la décision. Le tribunal a, à nouveau, déclaré la grève illégale, conformément à sa décision antérieure, et les syndicalistes de la PEMEN pouvaient recourir contre cette seconde décision qui est intervenue trois mois avant l'expiration de la convention collective qui régissait leurs conditions de travail.
  4. 364. Pour sa part, le comité constate que, malgré l'interdiction du tribunal, la grève a eu lieu et que des grévistes ont été licenciés. Le comité souhaite donc rappeler au gouvernement qu'il a toujours considéré que le droit de grève devrait être reconnu aux travailleurs comme un des moyens légitimes de défense de leurs intérêts professionnels. Bien que le comité ait néanmoins admis que ce droit pouvait faire l'objet de restriction, voire d'interdiction dans certains services essentiels, c'est-à-dire dans des services dont l'interruption risque de mettre en danger la vie ou les conditions normales d'existence de l'ensemble ou d'une partie de la population, il a estimé que ce principe risquerait de perdre tout son sens s'il était interprété comme permettant d'interdire la grève dans un service qui ne fournit pas un service essentiel au sens strict du terme. Dans ces conditions, le comité estime qu'il serait approprié que le gouvernement prenne des mesures en vue de favoriser la réintégration des travailleurs licenciés.

Recommandation du comité

Recommandation du comité
  1. 365. Dans ces conditions, le comité recommande au Conseil d'administration d'approuver les conclusions suivantes:
    • Le comité estime, pour ce qui concerne le licenciement de syndicalistes de la PEMEN accusés d'avoir participé à une grève illégale, compte tenu de l'importance qu'il attache à l'exercice du droit de grève comme l'un des moyens essentiels dont doivent pouvoir disposer les travailleurs pour défendre leurs intérêts professionnels, qu'il serait approprié que le gouvernement adopte des mesures en vue de favoriser la réintégration des travailleurs licenciés. En conséquence, le comité prie le gouvernement de le tenir informé des mesures qu'il prendra en ce sens.
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