Afficher en : Anglais - Espagnol
- 316. La plainte figure dans des communications de la Confédération unitaire des travailleurs des 15 mars et 26 avril 1982. Le gouvernement a répondu par des communications des 3 mai et 13 août 1982.
- 317. Le Costa Rica a ratifié la convention (no 87) sur la liberté syndicale et la protection du droit syndical, 1948, ainsi que la convention (no 98) sur le droit d'organisation et de négociation collective, 1949.
A. Allégations de l'organisation plaignante
A. Allégations de l'organisation plaignante
- 318. Dans sa communication du 15 mars 1982, la Confédération unitaire des travailleurs (CUT) allègue que l'Association syndicale des travailleurs des aqueducs et des égouts (ASTRAA) a été notamment expulsée de son local par la police.
- 319. Dans sa communication du 26 avril 1982, la CUT se réfère ensuite au conflit collectif qui est intervenu dans les entreprises bananières Chiriqui Land Company et PAIS S.A. au mois de septembre 1981. L'organisation plaignante allègue qu'une convention collective absolument incorrecte a été signée le 8 septembre 1981 entre le Syndicat des travailleurs de la Chiriqui Land Company (SITRACHIRI) et l'entreprise et que, en violation des dispositions de l'article 276, alinéa c), du code du travail, cette convention n'a pas été soumise à l'assemblée générale pour approbation définitive. Elle ajoute que, là-dessus, les travailleurs ont demandé l'aide de l'Union des travailleurs agricoles de la province de Limón (UTRAL) pour contester la validité de la convention collective ainsi conclue - qu'elle qualifie de manoeuvre patronale puisque, selon les plaignants, le syndicat SITRACHIRI aurait été créé par la Chiriqui Land Company - et obtenir la signature d'une nouvelle convention collective qui résolve réellement les problèmes posés par les difficiles conditions de travail et de vie des travailleurs. A partir de ce moment a commencé un mouvement de démission massive du SITRACHIRI et d'affiliation à l'UTRAL, dont 400 des 500 travailleurs de la Chiriqui Land Company sont devenus membres. Malgré cela, l'entreprise a refusé de faire droit à la demande des travailleurs qui souhaitaient que leurs cotisations syndicales soient retenues sur leur salaire pour être versées à l'UTRAL.
- 320. En même temps, poursuit l'organisation plaignante, l'entreprise PAIS S.A. faisait pression sur ses travailleurs pour obtenir qu'ils signent un accord direct qui ne tenait pas compte de leurs intérêts, si bien que ceux-ci se sont affiliés en masse à l'UTRAL et ont demandé que des négociations soient engagées en vue de la conclusion d'une véritable convention collective. Finalement, l'entreprise a imposé l'accord direct.
- 321. L'organisation plaignante déclare que, le 13 janvier 1982, aucune communication n'ayant été reçue des entreprises Chiriqui Land Company et PAIS S.A. ni des autorités depuis le début du conflit, une grève a été déclarée avec l'appui de 60 pour cent des travailleurs de l'ensemble des plantations de la Chiriqui Land Company et de PAIS S.A. Elle allègue que les faits suivants, dans lesquels elle voit une violation des droits syndicaux, se seraient produits avant et après la grève:
- - au cours des jours qui ont précédé le déclenchement de la grève, trois compagnies de la garde civile auraient pris le contrôle des plantations et auraient arrêté 43 travailleurs ainsi que les membres d'une délégation de la CUT qui s'étaient rendus à la plantation no 97 pour se rendre compte des faits et manifester leur solidarité. Selon l'organisation plaignante, la garde civile aurait arrêté les dirigeants syndicaux Luis Carlos Montero, Jesús Garbanzo, Jesús Campos, Felipe Rodríguez, Herminio Dover et Mauricio Solana, et ces arrestations se seraient produites après un échange de coups de feu avec la garde civile. L'organisation plaignante reconnaît toutefois que quelques-uns des travailleurs étaient en possession d'armes de petit calibre qu'ils utilisaient pour chasser dans la région. D'autre part, à la plantation no 96, après que les travailleurs aient tenu une réunion avec leurs dirigeants, ceux-ci auraient été arrêtés, de même lue la majorité des travailleurs. Selon l'organisation plaignante, le nombre total de dirigeants syndicaux et de travailleurs arrêtés à la suite de la grève dans les deux entreprises intéressées s'élèverait à 250;
- - le 19 janvier 1982, à 10 heures du matin, des coups de feu auraient été tirés contre un travailleur, Narcisso Morales Valdelomar, qui aurait été tué sur le coup. Auraient été blessés également la fille de la victime, âgée de cinq ans, dont la jambe aurait été fracassée par une balle, et Juan Luis Aguilar, négociateur et ex-dirigeant du SITRACHIRI;
- - à plusieurs reprises, la garde civile aurait contraint les travailleurs en grève à retourner au travail, et elle aurait envahi le domicile de nombre d'entre eux, enfonçant parfois la porte des maisons à coups de crosses;
- - à la suite de la grève, des travailleurs étrangers, titulaires ou non d'un permis de résidence, auraient été expulsés du pays et un grand nombre de travailleurs auraient été licenciés. Selon l'organisation plaignante, on aurait arrêté aussi les membres d'une délégation de dirigeants syndicaux composée de Mme Marielos Giralt Bermúdez (vice-présidente de la CUT), de M. Ignacio Robles Oropeza (secrétaire général du Syndicat des travailleurs de l'Université du Costa Rica) et d'autres dirigeants syndicaux qui apportaient des vivres pour soulager la situation inhumaine dans laquelle se trouvaient les travailleurs congédiés. Ces personnes ont pu constater que les conditions dans lesquelles elles étaient détenues, de même que les autres prisonniers, avaient un caractère vexatoire (conditions d'existence minimales, torture psychologique et violences d'ordre sexuel).
- 322. Pour finir, l'organisation plaignante signale qu'une action pénale intentée contre les dirigeants syndicaux et les travailleurs qui ont participé d la grève est en cours.
B. Réponse du gouvernement
B. Réponse du gouvernement
- 323. Dans sa communication du 3 mai 1982, le gouvernement déclare que, le secrétaire général de l'ASTRAA s'étant plaint auprès du cabinet du ministère du Travail et de la Sécurité sociale de ce que la gérance de l'Institut costaricien des aqueducs et des égouts avait annulé la concession d'un local syndical faite à l'ASTRAA, le ministère a ordonné à l'inspection du travail de procéder à une enquête. Celle-ci a abouti à constater qu'il y avait eu violation des dispositions de la convention no 87 et, plus précisément, ingérence de l'employeur dans l'organisation et le développement des activités syndicales. Le gouvernement ajoute que, la gérance de l'institut ne s'étant pas conformée à la demande de l'inspecteur du travail tendant à ce qu'elle autorise l'ASTRAA à utiliser le local et à bénéficier des services accessoires qui lui étaient fournis jusque-là, le ministère du Travail a ordonné à l'inspection du travail d'intenter une action en justice afin de faire appliquer les sanctions prévues en cas d'infraction aux dispositions de la législation du travail, action dont le résultat sera communiqué au comité. Toutefois, le gouvernement précise que, selon l'enquête menée par l'inspection du travail, il n'a pas été recouru à la garde civile pour expulser les syndicalistes de leur local.
- 324. En ce qui concerne le conflit collectif qui est intervenu dans les entreprises Chiriqui Land Company et PAIS S.A., le gouvernement joint à sa réponse une communication du ministère du Travail et de la Sécurité sociale dans laquelle celui-ci déclare qu'au mois de janvier 1982, un affrontement de fait a eu lieu entre un syndicat démocratique et un syndicat de gauche, et qu'il n'a pas compétence pour traiter des allégations relatives à des affrontements avec la police, à l'arrestation de dirigeants syndicaux et aux autres actes de violence dont il est fait état, ni des actes de sabotage mentionnés par l'employeur. En ce qui concerne la validité de la convention collective conclue entre l'entreprise Chiriqui Land Company et le SITRACHIRI, le gouvernement déclare qu'il a été procédé au dépôt définitif de cette convention après que le conseiller juridique du ministère eut déclaré qu'elle était conforme aux dispositions de la loi. Le gouvernement ajoute que, selon la loi, la jurisprudence et la doctrine, il n'est pas possible ail ministère d'intervenir à la demande d'une organisation professionnelle distincte de celle qui a signé la convention collective en question en vue d'obtenir que l'organisation patronale accepte de négocier un nouveau projet de convention collective. Au demeurant, poursuit le gouvernement, le point de vue de l'organisation plaignante, lorsqu'elle qualifie la convention collective en vigueur de "pseudo-convention", est très subjectif. La preuve en est, par exemple, que le taux de rémunération de base approuvé dans cette convention collective était, au moment où elle a été déposée, le plus élevé de tout le secteur bananier du Costa Rica.
C. Conclusions du comité
C. Conclusions du comité
- 325. Le comité observe que le présent cas concerne, d'une part, l'annulation de la concession du local syndical de l'Association syndicale des travailleurs des aqueducs et des égouts (ASTRAA) et, d'autre part, les causes et conséquences du conflit collectif intervenu dans les entreprises Chiriqui Lard Company et PAIS S.A.
- 326. En ce qui concerne l'annulation de la concession du local syndical de l'ASTRAA, le comité note que la gérance de l'Institut costa-ricien des aqueducs et des égouts ne s'est pas conformée A la demande de l'inspection du travail tendant à ce qu'elle autorise l'ASTRAA à utiliser le local syndical qui lui avait été concédé, l'inspection ayant constaté que l'annulation de cette concession était contraire aux dispositions de la convention no 87. Le comité note également que le ministère du Travail a ordonné à l'inspection du travail d'intenter une action en justice contre l'institut en vue de faire appliquer les sanctions prévues en cas d'infraction aux dispositions de la législation du travail. Dans ces conditions, le comité ne peut qu'inviter le gouvernement à continuer de prendre les mesures en son pouvoir pour faire en sorte que l'ASTRAA retrouve au plus tôt la jouissance de son local syndical et le prier de l'informer du résultat de la procédure intentée contre l'Institut costaricien des aqueducs et des égouts.
- 327. En ce qui concerne les faits qui, selon les allégations, auraient été à l'origine du conflit collectif intervenu dans l'entreprise Chiriqui Land Company (invalidité de la convention collective signée le 6 septembre 1981 et absence de réponse de l'entreprise à la demande tendant à ce qu'une nouvelle convention soit signée), le comité prend note des informations fournies par l'organisation plaignante et par le gouvernement et observe qu'au dire de celui-ci, la convention collective signée le 8 septembre 1981 est conforme aux dispositions de la législation du travail en vigueur. Le comité estime à cet égard qu'il ne lui appartient pas de formuler des conclusions quart à la validité de cette convention collective, non seulement parce que les éléments d'information dont il dispose à ce sujet sont très minces, mais aussi en raison du temps qui s'est écoulé entre la signature de ladite convention (8 septembre 1981) et la date à 'laquelle l'organisation plaignante a formulé ses allégations (26 avril 1982), soit plus de sept mois pendant lesquels, en principe, la convention collective en question a produit des effets, sans qu'aucune des parties n'ait, semble-t-il, contesté sa validité devant les tribunaux. A cet égard, le comité rappelle que, comme il l'a déjà signalé dans des cas antérieurs, la reconnaissance par un employeur des principaux syndicats représentés dans son entreprise ou du plus représentatif d'entre eux constitue la base même de toute procédure de négociation collective des conditions d'emploi au niveau de l'établissement. Le comité a déjà insisté pour que les autorités compétentes prennent les mesures nécessaires de conciliation afin d'obtenir cette reconnaissance par l'employeur intéressé.
- 328. En ce qui concerne les allégations relatives aux conséquences du conflit collectif et de la grève intervenus dans les entreprises Chiriqui Land Company et PAIS S.A., le comité observe qu'il s'est déjà prononcé dans le cadre du cas no 11082 sur cet aspect du cas. En conséquence, le comité renvoie aux conclusions auxquelles il était parvenu en examinant ce cas, où il avait notamment déploré profondément la mort du travailleur Narcisso Morales Valdelomar qui était intervenue au cours du conflit.
Recommandation du comité
Recommandation du comité
- 329. Dans ces conditions, le comité recommande au conseil d'administration d'approuver le présent rapport, et en particulier les conclusions suivantes.
- a) En ce qui concerne l'annulation de la concession du local syndical de l'ASTRAA, le comité invite le gouvernement à continuer de prendre les mesures en son pouvoir pour faire en sorte que l'ASTRAA retrouve au plus tôt la jouissance de son local et le prie de l'informer du résultat de la procédure intentée contre l'Institut costa-ricien des aqueducs et des égouts.
- b) En ce qui concerne les causes du conflit collectif intervenu dans l'entreprise Chiriqui Land Company:
- i) le comité estime qu'il ne lui appartient pas de formuler des conclusions quant à la validité de la convention collective signée le 8 septembre 1981 entre la Chiriqui Land Company et le SITRACHIRI, étant donné que les éléments d'information dont il dispose à ce sujet sont très minces et qu'il s'est écoulé beaucoup de temps depuis la signature de ladite convention collective;
- ii) le comité appelle l'attention du gouvernement sur le fait que la reconnaissance par un employeur des principaux syndicats représentés dans son entreprise ou du plus représentatif d'entre eux constitue la base même de toute procédure de négociation collective des conditions d'emploi au niveau de l'établissement.
- c) En ce qui concerne les conséquences du conflit collectif et de la grève intervenus dans les entreprises Chiriqui Land Company et PAIS S.A., le comité observe qu'il s'est déjà prononcé à cet égard dans le cas no 1108. En conséquence, le comité renvoie aux conclusions qu'il a formulées en examinant ce cas, où il avait notamment déploré profondément la mort du travailleur Narciso Morales Valdelomar qui était intervenue au cours du conflit.