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Rapport où le comité demande à être informé de l’évolution de la situation - Rapport No. 218, Novembre 1982

Cas no 1151 (Japon) - Date de la plainte: 22-AOÛT -82 - Clos

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  1. 349. Des plaintes alléguant des violations des droits syndicaux au Japon ont été présentées dans des communications datées des 22 et 24 août 1982 par les organisations syndicales suivantes: la Confédération internationale des syndicats libres (CISL); l'Union panjaponaise des travailleurs des postes, l'Union japonaise des travailleurs des chemins de fer et l'Union nippone des travailleurs des téléphones et télégrammes (22 août), organisations affiliées à la Confédération japonaise du travail (DOMEI); le Conseil général des syndicats du Japon (SOHYO), l'Union nationale des travailleurs des chemins de fer, l'Union nationale Nihon des forces motrices ferroviaires, la Fédération internationale des ouvriers du transport, l'Union des travailleurs de la sylviculture, le Syndicat japonais des postiers, le Conseil du syndicat des organismes publics et des entreprises nationales, l'Internationale du personnel des postes, télégraphes et téléphones, l'Union japonaise des travailleurs des télécommunications, l'Union des travailleurs de l'impression, la Fédération graphique internationale, l'Union des travailleurs de la régie des alcools, l'Union des travailleurs de la Monnaie, l'Union des travailleurs des régies japonaises du tabac et du sel et l'Union internationale des travailleurs de l'alimentation et des branches connexes (diverses lettres toutes datées du 24 août 1982). Par une communication en date du 30 août 1982, la Fédération internationale des travailleurs du bâtiment et du bois s'est associée aux plaintes. En date du 20 septembre 1982, l'Union panjaponaise des travailleurs des postes, l'Union japonaise des travailleurs des chemins de fer et l'Union nippone des travailleurs des téléphones et des télégraphes ont envoyé des informations supplémentaires se rapportant à la plainte. Le gouvernement a fait parvenir ses observations en date du 13 octobre 1982.
  2. 350. Le Japon a ratifié la convention (no 87) sur la liberté syndicale et la protection du droit syndical, 1948, et la convention (no 98) sur le droit d'organisation et de négociation collective, 1949.

A. Allégations des plaignants

A. Allégations des plaignants
  1. 351. Dans leurs diverses lettres, les organisations plaignantes déclarent que le gouvernement a enfreint les principes de la liberté syndicale en refusant de mettre en oeuvre, dans les secteurs des organismes publics et des entreprises nationales, des sentences arbitrales rendues par la commission des relations professionnelles dans les organismes publics et les entreprises nationales, que nous appellerons ci-après la commission tripartite compétente.
  2. 352. Les organisations plaignantes donnent l'historique suivant du cas: conformément à la pratique et aux procédures actuellement en vigueur en vue de la fixation des augmentations salariales dues en avril 1982, les divers syndicats japonais à l'oeuvre dans les organismes publics et les entreprises nationales ont soumis des revendications salariales à leur direction en mars 1982; étant donné que la négociation collective n'a pas abouti à un accord, ils se sont, les 13 et 14 avril, adressés à la commission tripartite compétente pour qu'elle joue le rôle de médiation que lui accorde la législation pertinente; ayant échoué dans ses efforts de médiation, la commission tripartite compétente a mis sur pied une commission d'arbitrage ne comprenant que des membres représentant les intérêts publics, en vue de trancher le différend; en date du 8 mai 1982, la commission d'arbitrage a rendu ses sentences qui accordaient des augmentations salariales mensuelles applicables à dater du 1er avril 1982 dans les divers secteurs des organismes publics et des entreprises nationales. Il ressort des textes des diverses sentences arbitrales fournis par les organisations plaignantes que la commission arbitrale s'était décidée en faveur d'une majoration salariale moyenne de 6,9 pour cent pour 1982, et avait exprimé l'espoir que ses décisions seraient mises en oeuvre promptement en faveur de tous les salariés intéressés. Elle avait également invité les autorités gouvernementales à faire des efforts spéciaux pour obtenir les fonds nécessaires à l'application de ses sentences.
  3. 353. on poursuivent les organisations plaignantes, le gouvernement n'a autorisé les directions intéressées ni à accepter ni à appliquer les sentences arbitrales et, en date du 18 mai 1982, a soumis ces cas à la Diète nationale, pour décision, en conformité de l'article 16 de la loi sur les relations professionnelles dans les organismes publics et les entreprises nationales. Selon les organisations plaignantes, le gouvernement a justifié son action en indiquant que son propre budget était en cours d'adoption.
  4. 354. Les organisations plaignantes fournissent le texte des réclamations que divers syndicats des organismes publics et entreprises nationales ont adressées au premier ministre le 11 mai et les: 13 et 30 juillet 1982, dans lesquelles ils déclarent que les sentences arbitrales elles-mêmes sont proches de l'augmentation salariale minimale nécessaire pour maintenir le niveau de vie effectif des salariés intéressés et prient instamment le gouvernement de respecter l'article 35 de la loi susmentionnée qui lui fait obligation de "déployer autant d'efforts que possible" pour faire porter effet aux, décisions arbitrales.
  5. 355. Les organisations plaignantes déclarent que la Diète n'a pas traité des sentences arbitrales considérées pendant sa session ordinaire, bien que celle-ci ait été prolongée de 94 jours, ce qui est inhabituel; d'après elles, il en a été ainsi parce que le gouvernement n'avait pas vraiment l'intention ni le désir de poursuivre ses délibérations sur l'application desdites sentences. Selon les organisations plaignantes, la mise en oeuvre de sentences arbitrales n'avait jamais auparavant, même dans des années de difficultés budgétaires, été reportée pendant une période déraisonnablement longue. Elles fournissent un tableau montrant la brièveté des délais qui, depuis 1958, année à laquelle ce type de révision salariale a vu le jour, se sont écoulés entre les dates des sentences arbitrales dans ces secteurs et celles auxquelles le gouvernement a décidé d'appliquer les sentences. Les organisations plaignantes déclarent que cette rapidité d'application était conforme aux assurances réitérées du gouvernement selon lesquelles le mécanisme d'arbitrage de la commission tripartite compétente fonctionnait de manière à compenser l'interdiction du droit de grève faite aux salariés du secteur public. A cet égard, les organisations plaignantes citent divers cas dans lesquels le Comité de la liberté syndicale a souligné l'importance qu'il y a à instaurer, partout où des grèves dans les services essentiels ou dans la fonction publique sont interdites, des garanties propres à sauvegarder pleinement les intérêts des travailleurs ainsi privés d'un moyen essentiel de défendre leurs intérêts professionnels.

B. Réponse du gouvernement

B. Réponse du gouvernement
  1. 356. Le gouvernement décrit les circonstances dans lesquelles s'insèrent les faits relatifs aux augmentations salariales considérées, faisant observer que les ressources financières requises pour mettre en oeuvre les sentences d'arbitrage s'élèvent à 247 milliards 900 millions de yen, alors que les crédits affectés aux augmentations salariales dans le budget de l'exercice financier 1982 représentent 55 milliards 900 millions de yen. Confronté à ce déficit, le Cabinet a décidé, lors des trois discussions des sentences arbitrales qu'il a eues les 12 et 14 mai 1982, de transmettre ces sentences à la Diète, en conformité de l'article 16 du texte législatif pertinent. Le gouvernement fait observer que cet article est en harmonie avec l'article 85 de la Constitution (qui interdit à l'Etat "d'assumer des dépenses ou de prendre des engagements autres que ceux que la Diète aura autorisés") et permet d'éviter une situation dans laquelle des sentences arbitrales deviennent immédiatement nulles et non avenues lorsque les affectations budgétaires ne prévoient pas de fonds suffisants. Le gouvernement cite également une décision rendue par la Cour suprême nippone en 1977 qui, d'après lui, appuie la formule consistant à saisir ainsi la Diète.
  2. 357. Selon le gouvernement, des consultations ont eu lieu à la Diète entre lui-même et les partis d'opposition pour décider du calendrier selon lequel seraient traités les sentences d'arbitrage et les autres importants projets de loi déposés, et il aurait été décidé à l'unanimité de reporter l'examen de la question salariale à la prochaine session de la diète. Le gouvernement déclare qu'il a expliqué aux syndicats intéressés, en toute bonne foi, les circonstances justifiant le report de l'examen des sentences arbitrales. Enfin, le gouvernement indique qu'une session extraordinaire de la Diète est prévue avant la fin de 1982 et qu'on prévoit que celle-ci prendra rapidement une décision en la matière le gouvernement s'engage à porter à la connaissance de l'OIT tous progrès réalisés dans les délibérations de la Diète en ce qui concerne l'examen des sentences.

C. Conclusions du comité

C. Conclusions du comité
  1. 358. Le comité observe que le présent cas porte sur la soumission à la Diète, par le gouvernement, de sentences arbitrales accordant des augmentations salariales au personnel des divers organismes publics et entreprises nationales. Selon les organisations plaignantes, le gouvernement, en n'appliquant pas promptement ces décisions et en les soumettant à la Diète, enfreint les principes de la liberté syndicale et, en particulier, porte atteinte aux garanties qui devraient être offertes lorsque le droit de grève est interdit dans des services essentiels ou dans la fonction publique, garanties parmi lesquelles figure la mise en oeuvre pleine et rapide des sentences arbitrales. Le gouvernement, toutefois, déclare qu'il agit en conformité de la législation pertinente et prévoit que la Diète aura pris une décision en la matière avant la fin de 1982.
  2. 359. Le comité a traité d'allégations directement comparables contre le gouvernement japonais à au moins deux occasions. Tout en notant l'assurance donnée par le gouvernement dans le présent cas, selon laquelle la Diète prendrait une décision sur les sentences arbitrales avant la fin de 1982, le comité estime qu'il est opportun de rappeler que, chaque fois que le droit de grève fait l'objet d'interdictions ou de restrictions dans des services essentiels ou dans la fonction publique - et il en est ainsi dans le présent cas -, des garanties appropriées devraient être accordées pour protéger pleinement les travailleurs ainsi privés d'un moyen essentiel de défense de leurs intérêts professionnels. Le comité voudrait souligner, comme il l'a fait dans le passé, que ces restrictions ou ces interdictions devraient être accompagnées de procédures de conciliation ou d'arbitrage appropriées, impartiales et expéditives, aux diverses étapes desquelles les intéressés devraient pouvoir participer, les sentences rendues à l'issue de ces procédures devant être obligatoires dans tous les cas pour les parties intéressées; ces sentences devraient également être appliquées entièrement et rapidement. Il souligne également que le fait que le pouvoir budgétaire soit réservé à l'autorité législative ne devrait pas avoir pour conséquence d'empêcher l'application des jugements rendus par le tribunal d'arbitrage obligatoire. S'écarter de quelque manière que ce soit de cette pratique serait nuire à l'application effective du principe susmentionnée.
  3. 360. Dans ces circonstances, le comité souhaite exprimer l'espoir que la session extraordinaire de la Diète, annoncée par le gouvernement, aura lieu sans tarder et qu'une décision en la matière sera prise, compte dûment tenu des principes énoncés ci-dessus. Il prie le gouvernement de le tenir informé de l'évolution de la situation.

Recommandation du comité

Recommandation du comité
  1. 361. Dans ces conditions, le comité recommande au Conseil d'administration d'approuver le présent rapport et en particulier les conclusions suivantes:
    • a) Le comité appelle l'attention du gouvernement sur l'importance qu'il attache, partout où des grèves dans des services essentiels ou dans la fonction publique sont interdites, aux principes selon lesquels, d'une part, une telle restriction devrait être compensée par des procédures de conciliation et d'arbitrage appropriées, impartiales et expéditives, les sentences rendues à l'issue de cette procédure devant être obligatoires dans tous les cas pour les deux parties intéressées, et appliquées intégralement et rapidement; et, d'autre part, le fait crue le pouvoir budgétaire soit réservé à l'autorité législative ne devrait pas avoir pour conséquence d'empêcher l'application des sentences arbitrales obligatoires.
    • b) Le comité exprime l'espoir que la session extraordinaire de la Diète, annoncée par le gouvernement, sera tenue sans tarder et qu'une décision en la matière sera prise, compte dûment tenu des principes énoncés ci-dessus.
    • c) Le comité prie le gouvernement de le tenir informé de l'évolution de la situation.
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