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- 197. Le comité a examiné les cas nos 1129, 1169 et 1298 pour la dernière fois à sa réunion de novembre 1985. (Voir 241e rapport, paragr. 440 à 494, approuvé par le Conseil d'administration à sa 231e session (novembre 1985).)
- 198. Le comité avait déjà examiné le cas no 1129 (présenté par la Centrale latino-américaine de travailleurs et la Confédération mondiale du travail) à ses réunions de novembre 1982 et février 1984. (Voir 218e rapport, paragr. 467 à 481, et 233e rapport, paragr. 236 à 242 et 317, approuvés par le Conseil d'administration à ses 221e et 225e sessions, en novembre 1982 et février-mars 1984, respectivement.) Par la suite, la Confédération mondiale du travail a présenté de nouvelles allégations dans une communication du 6 novembre 1985.
- 199. Le cas no 1169 (présenté par la Confédération internationale des syndicats libres et la Confédération mondiale du travail) avait déjà été examiné par le comité à quatre reprises: en mars 1983, mars et juin 1984 et mars 1985. (Voir 222e, 233e, 234e et 238e rapports du comité, approuvés par le Conseil d'administration.)
- 200. Le cas no 1298 (présenté par la Confédération internationale des syndicats libres) a été examiné en février-mars 1985 et a fait l'objet d'un rapport intérimaire, approuvé par le Conseil d'administration. (Voir 238e rapport, paragr. 232 à 247.) Par la suite, la Confédération internationale des syndicats libres (CISL) a présenté de nouvelles allégations dans des communications des 14 et 23 janvier et 4 et 10 mars 1986.
- 201. Les plaintes concernant les cas nos 1344 et 1351, formulées par l'Organisation internationale des employeurs (OIE), figurent dans des communications des 16 juillet (cas no 1344) et 17 octobre (cas no 1351) 1985; sur le premier cas, l'OIE a envoyé des informations complémentaires par communication du 5 août 1985.
- 202. Le gouvernement a envoyé ses observations dans des communications des 1er et 7 novembre 1985, 14 janvier, 12 février, 22 et 23 mai ainsi que 21 octobre 1986.
- 203. Le Nicaragua a ratifié la convention (no 87) sur la liberté syndicale et la protection du droit syndical, 1948, et la convention (no 98) sur le droit d'organisation et de négociation collective, 1949.
A. A. Allégations des organisations plaignantes
A. A. Allégations des organisations plaignantes- Cas no 1129
- 204 Lorsqu'il avait examiné le cas à sa session de novembre 1985, le comité avait prié le gouvernement de répondre aux allégations relatives à la détention de divers membres de la Centrale des travailleurs nicaraguayens (Eduardo Aburto Gutiérrez, Eric González González et Milton Silva Gaitán - ce dernier, dirigeant de la CTN, a été arrêté en novembre 1983 après avoir été emmené de force hors de son domicile) ainsi qu'aux allégations selon lesquelles le ministère du Travail continuerait de refuser des certificats de reconnaissance aux organes directeurs des syndicats suivants, tous affiliés à la CTN: exploitations agricoles de Fatima et de Las Mojarras à El Jicaral (département de León), exploitation agricole de La Concepción à Matagalpa et stations-service de Chinandega et de Managua. (Voir 241e rapport, cas no 1129, paragr. 484 et 494.)
- 205 Par la suite, la Confédération mondiale du travail (CMT) a présenté de nouvelles allégations dans une communication du 6 novembre 1985. La CMT allègue en particulier que, le 24 octobre 1985, les forces de la sécurité de l'Etat ont fait irruption dans les locaux de la Centrale des travailleurs nicaraguayens (CTN) à Managua; les archives ont été saccagées et les dirigeants Sergio Rosa et Eugenio Membreño ont été arrêtés et conduits sous menace de mort et de torture à la prison de Chipote; là, ils ont été dévêtus d'abord puis on leur a fait revêtir l'uniforme des prisonniers et on les a photographiés; ils ont aussi été privés de leur passeport et soumis à toutes sortes d'insultes. Le même jour, ajoute la CMT, les domiciles de ces dirigeants et d'autres dirigeants de la CTN ont été perquisitionnés, leurs papiers et effets personnels saccagés et leurs familles exposées à des menaces et des mesures d'intimidation.
- 206 La CMT allègue aussi que les syndicalistes de la CTN, Arcadio Ortiz, Napoleón Molina Aguilera, Milton Silva, Ricardo Cervantes Rizo et Orlando Aguilera, ont été condamnés à de longues peines d'emprisonnement pour leurs activités syndicales et que beaucoup d'autres syndicalistes se trouvent privés de liberté pour la même raison.
- 207 Enfin, la CMT allègue que le 26 octobre 1985 Carlos Herrera, dirigeant de la raffinerie San Antonio Chichigalpa, Chinandega, a été arrêté sur son lieu de travail et qu'il n'a toujours pas été inculpé.
- 208 Dans sa communication du 12 février 1986, le gouvernement déclare qu'en 1982 une série de désaccords entre les organes directeurs de la CTN ont eu pour résultat la division interne de cette organisation. Cette division a eu des conséquences négatives à l'intérieur de l'organisation ainsi que dans ses activités et même jusqu'au sein des syndicats affiliés à la CTN. Des exemples concrets sont les cas concernant les syndicats des stations-service de Chinandega et de Managua, l'exploitation agricole Fatima située dans la région de Las Mojarras, à El Jicaral, département de León, ainsi que l'exploitation La Concepción, dans le département de Matagalpa.
- 209 En particulier, le gouvernement a fait savoir que le syndicat des travailleurs de l'exploitation agricole Fatima avait été constitué le 23 février 1980, avec 45 membres, dans la région de Las Mojarras, à El Jicaral, dans le département de León. Il a été inscrit le 26 mars 1980 au Département des associations syndicales du ministère du Travail. Au début, ce syndicat fonctionnait normalement en ce qui concerne le mandat de chacun de ses organes directeurs, mais son fonctionnement a été perturbé ensuite pour les raisons internes mentionnées plus haut. Néanmoins, le Département des associations syndicales a fourni les certificats correspondants, la dernière fois le 3 décembre 1984, pour le comité directeur élu pour la période comprise entre le 28 novembre 1984 et le 27 novembre 1985.
- 210 Le gouvernement ajoute que le syndicat des travailleurs de l'exploitation agricole La Concepción, ayant son siège dans la région de Wasaka, département de Matagalpa, a été constitué le 11 novembre 1979 avec 100 membres. Il a été inscrit le 8 janvier 1980 auprès du Département des associations syndicales. Le 9 juillet 1984, un certificat a été délivré pour le comité directeur élu pour la période allant du 2 mars 1984 au 1er mars 1985. On sait qu'une assemblée de restructuration a eu lieu, mais les documents correspondants n'ont pas été présentés, sans qu'on sache pourquoi.
- 211 Quant au syndicat des travailleurs de Chinandega, poursuit le gouvernement, au début il regroupait tous les travailleurs des stations-service au niveau départemental. Par la suite, il a été dissous et un syndicat a été constitué au niveau municipal dénommé Syndicat des travailleurs des stations-service de Chinandega; constitué le 7 octobre 1984, il a été inscrit le 15 novembre 1984 au Département des associations syndicales. Un certificat a été délivré à son comité directeur pour la période allant du 7 octobre 1984 au 6 octobre 1985, les démarches ayant été faites par la CTN. Par ailleurs, le syndicat des travailleurs des stations-service de Managua (Sitegma), inscrit également au Département des associations syndicales, a reçu un certificat émis le 25 mai 1982, reconnaissant le comité directeur élu pour une année lors de l'assemblée du 22 mai, pour la période 1982-83. Le 20 mai 1984 a été élu, au cours d'une assemblée tenue dans les locaux de la CTN, un autre comité directeur qui a fait l'objet d'une contestation auprès du ministère du Travail émanant de 19 travailleurs représentant un secteur affilié au syndicat. Sur la base de cette contestation, le Département des associations syndicales a refusé l'inscription par une décision du 13 août 1984, ayant constaté qu'au cours de cette assemblée divers articles des statuts du Sitegma avaient été transgressés. Dans un esprit de collaboration et pour tenter de résoudre le conflit surgi au sein du syndicat, le Département des associations syndicales a convoqué les parties au conflit pour coordonner la tenue d'une nouvelle assemblée. Cette assemblée a eu lieu mais elle n'a eu ni l'assistance ni la représentativité requises, de sorte que, conformément aux principes de la légalité institutionnelle, le ministère du Travail s'est tenu en dehors du conflit car il a considéré que ce dernier était dû aux activités internes particulières tant des dirigeants du syndicat que de la centrale qui le conseille.
- 212 En conclusion, le gouvernement considère que, dans les cas exposés, le Département des associations syndicales n'a jamais refusé de certificat de reconnaissance. Dans ces cas, les problèmes sont nés des répercussions du conflit interne surgi au sein de la CTN et qui a eu pour aboutissement la formation de deux centrales dont chacune allègue la représentativité et l'affiliation des organes directeurs.
- 213 Dans une communication postérieure, en date du 23 mai 1986, le gouvernement déclare que Milton Silva Gaitán se trouve dans l'établissement pénitentiaire de Tipitapa où il est entré le 10 octobre 1983; il a été inculpé du délit de violation de la loi sur le maintien de l'ordre et de la sécurité publique et condamné à six ans de prison par les tribunaux populaires antisomozistes. Eugenio Membreño a également été inculpé du délit de violation de la loi sur le maintien de l'ordre et de la sécurité publique sur ordre du juge du Tribunal pénal de Chinandega; par la suite, le 9 mars 1983, il a été remis en liberté. Ricardo Cervantes Rizo a été arrêté le 17 juillet 1983 et transféré dans la zone franche le 28 juillet de la même année. Il a été inculpé du délit de violation de la loi sur le maintien de l'ordre et de la sécurité publique pour être membre de l'organisation contre-révolutionnaire, le Front démocratique nicaraguayen (FDN), et avoir été trouvé en possession de propagande contre le gouvernement légalement constitué. Il a été condamné par les tribunaux populaires antisomozistes le 1er décembre 1983 à sept ans de prison. Ce jugement a été confirmé en appel le 17 février 1984. Arcadio Ortiz Espinoza, syndicaliste, travailleur de l'Entreprise nationale des autobus, a été arrêté le 5 novembre 1983 et inculpé par les tribunaux populaires antisomozistes du délit de violation de la loi sur le maintien de l'ordre et de la sécurité publique, pour être membre de l'organisation Front démocratique nicaraguayen (FDN). Il a effectué plusieurs voyages clandestins au Honduras et a fourni des informations à l'état-major du FDN sur des objectifs économiques et militaires du Nicaragua. Il a été condamné en première instance à huit ans de prison, le 9 juillet 1984. Ce jugement a été réformé par les tribunaux populaires antisomozistes en seconde instance, et la sanction a été réduite à six ans de prison. Orlando Napoleón Molina Aguilera, affilié à SIMOTUR (syndicat des conducteurs urbains), ancien garde national collaborateur des colonels somozistes Enrique Bermúdez, Agustín Bodán et Juan García Saldaña, a conservé des liens depuis le Nicaragua avec le colonel somoziste Enrique Bermúdez, actuellement membre du bureau du Front démocratique nicaraguayen (FDN) résidant au Costa Rica. Il a été arrêté le 14 novembre 1983, inculpé par les tribunaux populaires antisomozistes du délit de violation de la loi sur le maintien de l'ordre et de la sécurité publique, condamné à cinq ans de prison le 9 juillet 1984 par les tribunaux populaires antisomozistes (TPA); en appel, la peine a été réduite à quatre ans de prison le 26 juin 1985.
- Cas no 1169
- 214 Lors de son dernier examen du cas, le comité avait demandé au gouvernement d'envoyer le texte des jugements condamnant les syndicalistes José Angel Altamirano López, Mercedes Hernández Díaz et Eleazar Marenco. Le gouvernement avait signalé que José Angel Altamirano López avait été arrêté en avril 1983 pour le fait d'être chef d'une cellule contre-révolutionnaire et de se trouver en possession illégale d'armes de guerre; appartenant au groupement mercenaire ARDE, il avait été condamné à 12 ans de prison par les tribunaux; Mercedes Hernández Díaz avait été arrêtée en avril 1983 pour avoir mené des activités de recrutement de nouveaux éléments pour le groupe mercenaire ARDE et pour avoir fourni une aide économique pour l'achat d'armes; elle avait été condamnée à 12 ans de prison; Eleazar Marenco avait été arrêté en avril 1983 pour avoir participé à de multiples réunions de conspiration et avoir fourni une aide économique pour l'achat d'armes; il avait été condamné à six ans de prison.
- 215 Le comité avait demandé également au gouvernement d'indiquer si les neuf syndicalistes mentionnés à l'annexe du 241e rapport étaient toujours détenus et, dans l'affirmative, les raisons pour lesquelles ils se trouvaient encore en prison. (Voir 241e rapport, paragr. 494.) Les plaignants avaient fourni les informations suivantes sur ces neuf syndicalistes: Rito Rivas Amador (arrêté en décembre 1982 à Juigualpa, département de Chontales); Iván Blandón, Victor Ríos, Napoleón Aragón, Juan Ramón Duarte et son frère (arrêtés en avril 1983 à El Cascal - Nueva Guinea, département de Celaya); Máximo Flores Obando (arrêté en décembre 1982 dans le département de organisé la contre-révolution dans la région); Anastasio Jimenéz Maldonado et Gabriel Jiménez Maldonado (les plaignants n'avaient pas fourni d'informations particulières).
- 216 Dans sa communication du 7 novembre 1985, le gouvernement déclare que Máximo Flores Obando a été condamné à trois ans de prison, le 11 juillet 1983, par le juge de la quatrième Chambre criminelle pour avoir commis le délit d'attaque à main armée. Iván Blandón, Victor Ríos, Napoleón Aragón, Juan Ramón Duarte ont été arrêtés à El Cascal - Nueva Guinea, en avril 1983, en raison de leurs liens avec une cellule contre-révolutionnaire du groupement mercenaire "ARDE", dirigée par José Angel Altamirano López; ils ont été remis en liberté le même mois.
- 217 En ce qui concerne Rito Rivas et Antonio et Gabriel Maldonado, le gouvernement indique, dans sa communication du 21 octobre 1986, qu'à la suite d'une enquête minutieuse sur les différents établissements pénitentiaires du pays il a été possible d'établir que ces personnes ne figurent sur aucun registre de détenus.
- 218 Le gouvernement envoie aussi copie du jugement du 7 novembre 1984 condamnant José Angel Altamirano, José Mercedes Hernández Díaz et Eleazar Marenco.
- Cas no 1298 Examen antérieur du cas 219. Les allégations en instance dans le présent cas portaient sur l'occupation du siège de la Confédération de l'union syndicale (CUS) à deux reprises, une première fois par un groupe de 20 personnes le 18 août 1984 et la seconde fois après que des groupes l'eussent envahi le 25 août 1984. Le gouvernement avait estimé qu'il s'agissait de divergences à l'intérieur de la CUS à propos de son maintien ou de son retrait d'un groupement politique d'opposition. En revanche, selon les plaignants, les faits auraient résulté de l'ingérence de fonctionnaires publics tendant à ce que la CUS se retire dudit mouvement d'opposition. Les plaignants avaient d'ailleurs transmis à l'appui de leur plainte une déclaration sous serment passé devant notaire par un conseiller juridique de la CUS faisant état de menaces et de pressions à son encontre pour le contraindre à commettre des actes visant à l'anéantissement de ladite centrale. L'intéressé y indiquait qu'un fonctionnaire du ministère de l'Intérieur lui avait suggéré de rechercher des personnes affiliées à la CUS afin d'appuyer un groupe de personnes non affiliées à cette organisation qui avait pris possession de son siège; il avait été contraint de se rendre au siège de la CUS le 25 août pour appuyer les occupants et il y avait rencontré des membres de la CUS et des personnes n'appartenant pas à cette organisation; une assemblée s'était tenue le même jour et, faute d'accord entre les parties, plusieurs individus avaient agressé les personnes authentiquement affiliées à la CUS et avaient saccagé les bureaux du siège. Les plaignants avaient aussi indiqué que la police n'aurait rien fait pour éviter l'attaque de certains groupes le 25 août contre le siège de la CUS. Par ailleurs, les plaignants avaient allégué l'arrestation de M. José Agustén Téllez, secrétaire général de la FETRACAMCA.
- 220 Le comité avait noté avec regret que le gouvernement n'avait pas répondu aux allégations encore en instance dans cette affaire et il avait renouvelé sa demande antérieure d'explications au sujet de l'occupation du siège de la CUS le 18 août 1984 conduite par deux personnes qui auraient des liens avec les forces de sécurité de l'Etat, comme en témoignerait la déclaration devant notaire de l'ancien conseiller juridique de la CUS. Le comité avait demandé également à nouveau au gouvernement de répondre à l'allégation selon laquelle, lors de la seconde occupation du siège de la CUS le 25 août 1984, la police n'aurait rien fait pour éviter l'attaque et ne serait intervenue qu'une fois que tout était terminé, alors qu'elle se trouvait aux abords du siège de l'organisation. Enfin, le comité avait demandé au gouvernement d'indiquer si José Agustín Téllez, secrétaire général de la FETRACAMCA, était détenu et, dans l'affirmative, d'indiquer les motifs de sa détention. (Voir 241e rapport, paragr. 490 à 494.)
- Evolution ultérieure du cas
- 221 Dans ses communications des 14 et 23 janvier 1986, la Confédération internationale des syndicats libres (CISL) allègue que le gouvernement empêche la publication de la revue syndicale de la CUS "Solidarité". La décision initiale du gouvernement de suspendre cette revue avait pris pour prétexte qu'au vu de l'évaluation annuelle de ses activités, on ne pouvait accorder le permis nécessaire pour continuer la publication de la revue; par la suite, la seconde fois, le 17 décembre 1985, la raison donnée était qu'elle n'était pas conforme à la loi. Il convient de souligner que la revue existait depuis plus de deux ans et que 19 numéros avaient été publiés, et diffusés dès le début au sein des organismes de l'Etat et du Front sandiniste. La CISL envoie en annexe une communication de la Direction des moyens de communication du ministère de l'Intérieur indiquant que la CUS n'avait pas tenu compte du décret no 619 et en particulier les pouvoirs que ce décret octroie à la Direction des moyens de communication en matière de permis et d'autorisations.
- 222 La CISL ajoute que divers camarades syndicalistes appartenant à la CUS ont été convoqués à de multiples reprises par la sécurité de l'Etat et ont fait l'objet de mesures d'intimidation et de fortes menaces. Environ 300 personnes ont été convoquées dans l'ensemble du pays, parmi lesquelles Xavier Altamirano Pérez (secrétaire à la culture du Comité exécutif de la CUS et président de la Fédération des travailleurs de Chinandega). De même, selon la CISL, pendant les mois de novembre et décembre 1985, diverses organisations syndicales affiliées à la CUS dans les zones nord, sud et ouest du pays ont reçu la visite de trois personnes qui ont été identifiées comme appartenant au ministère du Travail, à la Sécurité de l'Etat et au Front sandiniste de libération nationale. Cette "délégation" se déplaçait dans un véhicule blanc immatriculé POK 03388. Au cours des différentes visites effectuées, ils ont fait part du "caractère sérieux et des conséquences de l'état d'urgence élargi" prononcé le 15 octobre 1985, en ajoutant que "ce n'était pas une plaisanterie et que s'ils se réunissaient à l'avenir ils iraient en prison et qu'aucun nouveau syndicat ou fédération ne serait enregistré". Des "visites" du même genre ont eu lieu même dans les écoles d'enseignement technique de la couture de la CUS.
- 223 Dans ses communications des 4 et 10 mars 1986, la CISL allègue l'arrestation de 15 syndicalistes de la CUS à Posoltega (Chinandega), à 120 kilomètres de Managua. Il s'agit d'Eduardo Gutiérrez, Porfirio Gutiérrez, Pablo Roberto Gaitán, Juan Gaitán, Antonio Flores, Enrique Flores, Leoncio Flores et Enrique de la Cruz (arrêtés le 20 février 1986), Estanislao Flores, Rodolfo Flores, Alberto Argüello, Gonzalo Avendano, Antonio Vargas et Tomas Silva (arrêtés le 22 février et libérés le 3 mars) et Domingo Espinoza Gómez (arrêté le 25 février).
- 224 La CISL indique que ces arrestations ont été effectuées par des membres de la police nationale sandiniste, vêtus de civil, qui ont fait irruption au domicile des syndicalistes susmentionnés au petit jour. Actuellement, on ne sait pas où ces derniers sont détenus. La CISL ajoute qu'au cours d'une entrevue entre un représentant de la CISL et un commandant de Managua, ce dernier a indiqué que les détenus étaient accusés d'homicide, d'agression et de vol de bétail; cependant, le jour même, des proches des détenus et des voisins de Posoltega ont fait savoir qu'il n'y avait pas eu d'homicide ni de vol dans la région, de sorte que les accusations portées contre les détenus seraient de pures inventions du gouvernement. Par ailleurs, des filles, des épouses et des mères des détenus ont été menacées de prison si leurs pères, époux ou fils ne renonçaient pas à leur affiliation à la CUS, et elles reçoivent constamment la visite de la police qui les menace, s'empare de leurs effets personnels et des provisions qui se trouvent dans la maison.
- 225 Dans sa communication du 7 novembre 1985, le gouvernement déclare qu'après avoir effectué une enquête minutieuse auprès des différents établissements pénitentiaires du pays il a été établi que José Agustín Téllez ne figure dans aucun registre de détenus.
- 226 Postérieurement, dans une communication du 14 janvier 1986, le gouvernement déclare, au sujet des allégations concernant les événements survenus lors de l'occupation du siège de la CUS, qu'il estime avoir donné des explications suffisantes à ce sujet et qu'il ne va pas répondre à des questions de détail trahissant pareille méfiance. Le gouvernement insiste sur le fait que les événements survenus au siège de la CUS n'ont été que la conséquence des désaccords internes entre ses dirigeants et que si la police est intervenue elle n'a fait que se conformer strictement à son devoir, comme l'aurait fait la police dans n'importe quelle partie du monde. La preuve en est que la CUS continue de fonctionner librement. Le gouvernement n'a eu ni pour but ni pour intérêt de détruire ou de porter atteinte à l'existence d'une organisation syndicale quelconque. Il est partisan du pluralisme politique et syndical, comme ont pu le constater de multiples organisations et personnalités internationales importantes qui sont venues dans le pays; telle est et continuera toujours d'être la ligne qu'il suivra. Il déclare qu'il saurait gré au Comité de la liberté syndicale de se référer aux explications qu'il a déjà données et qu'il considère valables, suffisantes et véridiques.
- 227 Dans sa communication du 22 mai 1986, le gouvernement déclare que le juge du tribunal pénal de district de Chinandega a prononcé un jugement interlocutoire, le 19 mars 1986, ordonnant d'emprisonner les suspects Porfirio José Gaitán Gutiérrez, Marco Antonio Flores López, Pedro José Gaitán Gutiérrez et Leoncio Eulogio Flores Santeliz pour le délit de vol de bétail au préjudice de Raúl Rodríguez Sarria (qui a perdu environ 60 têtes de bétail) . Pour avoir été complice du même délit, Domingo Porfirio Espinoza Gómez a été mis en prison. Les poursuites ont été abandonnées définitivement en ce qui concerne Pablo Roberto Gaitán Gutiérrez, Estanislao Francisco Flores López et Enrique de la Cruz Gaitán Gutiérrez. Les poursuites ont été maintenues contre tous les suspects susmentionnés en ce qui concerne le délit de vol de bétail au préjudice de M. Carlos Herdocia Icaza (qui a perdu environ 40 têtes de bétail). Le gouvernement ajoute que Marco Antonio Flores López a été mis en prison pour le délit de vol avec intimidation au préjudice d'Ofilio Peralta Vasquez et que les poursuites ont été définitivement abandonnées s'agissant du délit de vol de bétail au préjudice de M. Julio Espinales. Les inculpés ont bénéficié de l'assistance d'un défenseur dès le début des poursuites et ont joui d'amples garanties pour leur défense.
- Cas no 1344
- Allégations de l'organisation plaignante
- 228 Dans ses communications des 16 juillet et 5 août 1985, l'OIE proteste contre les mesures discriminatoires prises par le gouvernement à l'encontre du secteur privé en général et du Conseil supérieur de l'entreprise privée (COSEP) et de son président, M. Enrique Bolaños en particulier.
- 229 Les faits allégués sont les suivants:
- - en 1982, confiscation des biens et expulsion à l'étranger de M. Frank Bendaña, vice-président du COSEP et président de l'UPANIC;
- - en 1983, confiscation des terres de M. Ramiro Gurdián, vice-président du COSEP et président de l'UPANIC;
- - en 1983, confiscation des entreprises de M. Ismael Reyes, vice-président du COSEP, président de la Chambre d'industrie et délégué des employeurs à la Conférence internationale du Travail;
- - en 1983, incarcération sans jugement, puis mise en liberté, de M. Douglas Reyes, fils de M. Ismael Reyes, pendant la Conférence internationale du Travail (juin 1983);
- - en 1983, confiscation de l'exploitation agricole de M. Benjamín Lanzas, vice-président du COSEP et président de la Chambre de la construction;
- - en 1984, malgré l'absence de tout conflit social, désordres fomentés aux établissements Bolaños-Saimsa, par des travailleurs étrangers à l'entreprise et employés par le ministère de la Réforme agraire le 14 février et par des travailleurs des entreprises d'Etat INCA et CELCALZA le 16 février. Les travailleurs en question auraient utilisé à cette occasion des véhicules de l'armée sandiniste;
- - 14 juin 1985, confiscation arbitraire, et sans respect des règles légales sur la réforme agraire, des terres de M. Bolaños, et déclarations diffamatoires et calomnieuses proférées par le commandant J. Weelock, ministre de la Réforme agraire et de la radio officielle;
- - 28 juin 1985, confiscation arbitraire, sans décret d'expropriation, de la société industrielle Bolaños-Saimsa et de son matériel;
- - interdiction par la Direction des moyens de communication du ministère de l'Intérieur de publier dans "La Prensa", le seul organe de presse indépendant du pays, une lettre ouverte adressée le 29 décembre 1984 par le COSEP au coordinateur de la junte gouvernementale intitulée "Et si on essayait la liberté?";
- - interdiction par la censure de publier dans "La Prensa" les réponses au commandant Weelock (seuls les journaux, la radio et la télévision sandinistes ont pu donner leur version et leurs commentaires de l'expropriation des terres de M. Bolaños). Les articles censurés traitaient de l'expropriation vexatoire dont a été victime M. Bolaños, et ce dernier y faisait valoir que la procédure du tribunal compétent pour examiner un éventuel recours contre cette expropriation n'offrait aucune garantie d'impartialité, car le président du tribunal aurait publiquement admis qu'il fondait ses décisions (sans appel) sur les témoignages du ministère de la Réforme agraire, c'est-à-dire l'organe auteur de l'expropriation;
- - arrestation et torture par le commandant Lenin Cerda, surbordonné de M. Tomás Borge, ministre de l'Intérieur, du président de l'Association des parents d'élèves des écoles privées religieuses, affiliée à la CONAPRO (Confédération des professions libérales); la victime, membre du COSEP, avait publiquement exprimé son opinion sur les réformes de l'enseignement préconisées par le Front sandiniste de libération nationale.
- Réponse du gouvernement
- 230 Dans sa communication du 1er novembre 1985, le gouvernement réfute énergiquement l'allégation selon laquelle la confiscation des terres de M. Enrique Bolaños aurait obéi à des motivations politiques tendant à restreindre la liberté syndicale et constituerait une mesure discriminatoire pour appartenance à une organisation déterminée.
- 231 Le gouvernement explique que la décision d'exproprier l'intéressé répondait uniquement à la nécessité objective d'apporter une solution efficace et rapide au problème contraignant auquel le département le plus densément peuplé du pays doit faire face et où la terre manque depuis longtemps.
- 232 Il indique qu'en raison de cet état de choses M. J. Weelock, ministre du Développement agricole et de la Réforme agraire, usant des facultés que lui confère la loi a émis la décision no 18, qui déclare le département de Masaya zone de développement agricole et de réforme agraire; cette mesure était conforme à l'intention fondamentale de la révolution nicaraguayenne, qui est de garantir au paysan la possibilité de vivre dignement du travail de la terre et de l'associer pleinement à la planification nationale du développement agricole.
- 233 Le gouvernement ajoute qu'historiquement la population indigène de la région de Masaya a été victime d'une éviction brutale qui a entraîné, d'une part, le morcellement des sols en exploitations à baux précaires, trop petites et trop pauvres pour assurer la subsistance des familles paysannes, et, d'autre part, la formation de grandes propriétés détenues par un petit nombre de personnes.
- 234 Il poursuit en expliquant que la décision no 18 prévoyait aussi que les terres de la région seraient attribuées à 1.700 familles paysannes qui pourraient ainsi améliorer leur niveau de vie; cette décision devait entraîner la cession gratuite aux paysans de 2.000 manzanas (parcelles de 0,7 hectare) de domaines administrés par l'Etat, mesure conforme à l'article 26 de la loi sur la réforme agraire, qui dispose que, "dans les zones de développement agricole et de réforme agraire, le ministre de tutelle pourra émettre des règlements spéciaux sur la possession des terres, déterminer l'attribution et l'usage des sols et autres ressources naturelles qui y sont liées et réglementer l'exploitation de l'agriculture, conformément aux plans et projets spécifiques établis pour la zone".
- 235 Le gouvernement déclare aussi que le Pacte international relatif aux droits économiques, sociaux et culturels, ratifié par le Nicaragua le 12 mai 1980, reconnaît dans son préambule que, "conformément à la Déclaration universelle des droits de l'homme, l'idéal de l'être humain libre, libéré de la crainte et de la misère, ne peut être réalisé que si des conditions permettant à chacun de jouir de ses droits économiques, sociaux et culturels, aussi bien que de ses droits civils et politiques, sont créées". Il ajoute qu'en vertu de sa législation interne, pleinement conforme aux accords internationaux en matière de promotion et de protection des droits de l'homme, il a traité légalement avec 15 propriétaires privés qui ont accepté de négocier des accords mutuellement satisfaisants.
- 236 Selon le gouvernement, M. Bolaños serait le propriétaire auquel l'Etat a offert les conditions de négociation les plus favorables, allant jusqu'à lui proposer l'échange de ses terres contre d'autres de qualité égale ou supérieure, elles aussi situées sur le versant Pacifique du pays; en superficie, les terres offertes à M. Bolaños équivaudraient au double de ses anciennes propriétés; M. Bolaños a cependant été le seul à refuser son droit à indemnisation et à ne pas user de son droit de recours devant le tribunal foncier.
- 237 Enfin, le gouvernement réaffirme son adhésion aux principes du pluralisme idéologique et de l'économie mixte, fondements de sa conduite, et assure qu'en vertu de ce principe il a respecté les organisations d'employeurs, notamment le COSEP, conformément à la loi et malgré le soutien évident de ses dirigeants aux plans soutenus par un gouvernement étranger pour détruire la révolution nicaraguayenne.
- 238 Le gouvernement joint à sa communication du 14 janvier 1986 le rapport du ministère du Développement agricole et de la Réforme agraire sur la question; ce rapport confirme les informations du gouvernement, précisant que le département de Masaya a une densité de 280 habitants au kilomètre carré, contre une densité moyenne de 25 pour l'ensemble du pays; que, sur les 13.296 familles du département, 8.730 manquent de terre; que plus de 50 pour cent des terres appartiennent à 2 pour cent des propriétaires tandis que 8.500 familles sont concentrées sur de très petites exploitations, sans compter les 1.200 familles sans terre; enfin, que le sous-emploi frappe dans cette zone 92 pour cent de la population active.
- 239 Le rapport ajoute qu'en vertu de la loi sur la réforme agraire, le 14 juin 1985 la moitié du département de Masaya, soit 323 kilomètres carrés, a été déclarée zone de développement agricole et de réforme agraire, ce qui a permis d'attribuer des parcelles à 2.000 familles. Le gouvernement donne le détail des mesures prises: cession gratuite de 2.000 parcelles sous administration de l'Etat et négociations sur les biens des 15 propriétaires privés. Selon le rapport, tous ces propriétaires auraient participé avec civisme à ces négociations, sauf M. Bolaños, qui a refusé l'échange de terres et l'indemnisation, et qui a même renoncé à son droit de recours devant le tribunal foncier.
- 240 Le gouvernement joint aussi à sa communication le texte de la décision no 18, ainsi qu'un rapport sur l'état d'avancement de l'application du plan Masaya au 25 septembre 1985: d'où il ressort que le plan a été exécuté à 67 pour cent pour les terres et à 59,5 pour cent pour les familles bénéficiaires; toutefois, alors que certaines familles ont accepté de négocier, d'autres ont dû être expropriées parce qu'elles posaient des conditions trop onéreuses. Le gouvernement évoque aussi les occupations de terres qui se sont produites avant que n'aient été conclues les négociations. Malgré le peu de temps écoulé depuis le début de la mise en oeuvre du plan, il convient de souligner qu'il est déjà exécuté dans une proportion acceptable, même s'il faut reconnaître que les difficultés de négociation n'ont pas permis d'éviter les occupations spontanées, qu'une attitude plus ferme aurait peut-être empêchées; il est vrai que l'approche des semailles a joué le rôle de détonateur qui a poussé le paysan à agir.
- Cas no 1351
- Allégations du plaignant
- 241 L'OIE allègue dans sa communication du 17 octobre 1985 que, le samedi 7 septembre 1985, environ 2.000 employeurs devaient se réunir à Managua à l'appel du Conseil supérieur de l'entreprise privée (COSEP). Ce rassemblement, préparé par des réunions régionales tenues depuis plusieurs semaines dans trois grandes villes du pays, devait permettre aux entreprises privées de l'industrie, du commerce et de l'agriculture de définir leur position face aux graves difficultés économiques du pays. Le COSEP avait déclaré le 7 septembre Journée de l'entreprise privée. Le 6 septembre, veille de la réunion, les dirigeants du COSEP ont été obligés par manu militari de se présenter au ministère de l'Intérieur, pour s'entendre dire que la réunion était interdite. Le lendemain, toutes les entrées de Managua étaient fermées pour empêcher les délégués de participer à la Journée de l'entreprise privée, et le président du COSEP était assigné à résidence à son domicile. Ainsi, poursuit l'organisation plaignante, le gouvernemet du Nicaragua a une fois de plus violé la liberté d'association des employeurs.
- 242 Elle allègue aussi que le 15 octobre 1985, sous prétexte de l'hostilité de la "droite", de la "gauche" et de l'église catholique, "inspirée par les Etats-Unis d'Amérique", le gouvernement a suspendu ou limité pour une durée d'un an les droits de réunion, d'expression, d'association et de grève, l'habeas corpus, la liberté de presse, le droit de circuler dans le pays, le droit d'appel contre l'Etat et les garanties judiciaires.
- 243 Ce décret ne fait à certains égards que légaliser une situation déjà existante qui avait motivé les plaintes présentées par l'OIE et par d'autres plaignants devant le Comité de la liberté syndicale, et il constitue une nouvelle violation de la liberté d'association au Nicaragua.
- Réponse du gouvernement
- 244 En ce qui concerne les événements du 6 et du 7 septembre 1985, le gouvernement déclare, dans ses communications des 23 mai et 21 octobre 1986, que le COSEP avait placé sous l'invocation du nom de Jorge Salazar le Front démocratique nicaraguayen (FDN), organisation contre-révolutionnaire coupable de crimes odieux et de campagnes de terreur contre la population nicaraguayenne. Ces jours-là, le COSEP comptait rendre hommage à la mémoire du contre-révolutionnaire Jorge Salazar, tué lors d'un coup de main antirévolutionnaire; cet hommage était déguisé sous le nom de Journée de l'entreprise privée. Informé des plans du COSEP, le gouvernement a décidé de suspendre la manifestation et de charger le ministère de l'Intérieur d'en informer le COSEP, ce qu'il fit au cours d'une réunion à laquelle assistaient ses principaux dirigeants. Au cours de cette réunion, le ministère a déclaré au COSEP que le gouvernement ne pouvait pas autoriser un hommage public à la mémoire d'un contre-révolutionnaire qui avait cherché, par des actes illégaux et violents, à renverser le gouvernement légitime du Nicaragua. Le COSEP a aussi été informé que le gouvernement ne s'opposait pas à la tenue d'une journée de l'employeur à une date ultérieure, sous réserve du préavis et des formalités voulus. Dans tout pays, il faut l'accord des autorités pour décider qu'une journée sera consacrée à célébrer un événement ou une personne, mais le COSEP n'a jamais fait aux autorités la demande de célébrer une journée des employeurs. Enfin, le gouvernement indique que personne n'a été arrêté ces jours-là pour des raisons directement liées à la situation considérée.
- 245 En ce qui concerne le décret no 128, instituant l'état d'urgence national, le gouvernement déclare qu'en vertu des pouvoirs que lui confère la loi et du droit qu'a tout Etat souverain de défendre son intégrité territoriale, son indépendance et son droit à disposer de lui-même, il a décrété un état d'urgence national. Le décret no 128 est un instrument juridique qui permet l'adoption de certaines mesures tendant à protéger et à défendre la paix et la sécurité nationales, directement menacées par les menées interventionnistes d'un gouvernement étranger qui, outre le soutien qu'il donne à l'agression extérieure, cherche à troubler l'ordre public par des actes de terrorisme tels que des attentats à l'explosif contre les établissements industriels et les voies de communication et autres sabotages destinés à créer les conditions d'une intervention directe. C'est la gravité de cette situation qui a obligé le gouvernement à limiter quelques-unes des garanties accordées aux citoyens par le statut fondamental des droits et garanties du peuple nicaraguayen, pour affronter l'agression étrangère dont est victime le pays.
- 246 Le gouvernement signale que la durée de l'état d'urgence est strictement limitée à celle des conditions qui l'ont rendu nécessaire. Le Nicaragua continue à respecter les obligations des divers instruments internationaux, autant que le lui permettent ses moyens et l'état de guerre; de même, il considère que l'état d'urgence n'est qu'une mesure exceptionnelle essentiellement destinée à assurer aux Nicaraguayens le calme et la stabilité. Le peuple et le gouvernement du Nicaragua n'en déplorent pas moins que la situation, au lieu de s'améliorer, ne fasse que s'aggraver à cause de la détermination d'un pays à porter la guerre à un niveau toujours plus dangereux.
- 247 Le gouvernement donne les renseignements suivants sur la portée du décret:
- - Liberté d'expression: les restrictions concernant la presse portent sur toutes les informations contraires à la stabilité et à la sécurité nationales, mais n'impliquent aucunement que les moyens de communication publics doivent cesser de fonctionner (circulation de l'information écrite, fonctionnement des stations de radio et de télévision, etc.).
- - Droit de réunion et de manifestation: les rassemblements en plein air et les manifestations publiques à caractère politique, social ou religieux ne sont pas interdits, mais ne peuvent être tenus qu'avec l'autorisation préalable de l'autorité compétente, comme c'est le cas dans la plupart des pays.
- - Droit d'association et d'organisation: toute nouvelle organisation politique ou association de quelque ordre que ce soit peut être enregistrée si elle satisfait aux formalités prévues par la loi.
- - Habeas corpus: les restrictions sont limitées aux poursuites entamées devant la Cour suprême de justice pour des faits précisés dans le décret sur l'état d'urgence. Les autres droits de recours contre les actes du gouvernement en matière ordinaire restent en vigueur.
- - Droit de grève: ce droit ne doit être en principe exercé que pour permettre aux travailleurs d'obtenir un ensemble de revendications que la législation sociale n'offre aucun autre moyen d'obtenir. Les instruments juridiques internationaux qui garantissent l'exercice de ce droit visent fondamentalement à réserver aux travailleurs l'usage de ce recours comme un moyen légitime de défendre leurs intérêts. Dans la situation particulière où se trouve le Nicaragua, il faut tenir compte des facteurs suivants pour apprécier la manière dont s'exerce ce droit: le Nicaragua subit actuellement une crise économique due principalement à la guerre et à un blocus commercial qui alourdit les coûts de production et empêche l'industrie de s'approvisionner en machines, en pièces de rechange et en matières premières; en pareille situation, la paralysie d'une entreprise ou d'une branche d'activité aggrave dramatiquement la situation, au détriment de toute la population et pour les travailleurs eux-mêmes. Le gouvernement rappelle qu'en six années de pouvoir révolutionnaire les travailleurs nicaraguayens ont obtenu la conclusion de 1.200 conventions collectives, contre 126 pendant les quarante années de la dictature, et la création de 1.300 syndicats (plus que pendant toute la dictature). Ces avantages ont été acquis sans que les travailleurs aient à user de pressions ou de violences, car le gouvernement révolutionnaire ne s'est jamais opposé aux revendications justifiées des travailleurs. Dans le même ordre d'idées, s'il est vrai que depuis le mois d'octobre 1985 la guerre a obligé le pays à suspendre l'exercice de plusieurs droits constitutionnels liés à l'activité syndicale, ces mesures n'ont en fait aucunement supprimé les droits acquis par les travailleurs; preuve en est que, depuis cette date, plus de sept syndicats nouveaux ont été enregistrés dans les différents secteurs, et que 45 nouvelles conventions collectives ont été conclues. On ne peut toutefois pas autoriser des grèves qui ébranleraient politiquement le pays; il faut d'ailleurs relever qu'en vertu de la loi le droit de grève n'est pas automatique, mais qu'il n'intervient qu'après épuisement d'une procédure légale à laquelle participe le ministre du Travail.
B. B. Conclusions du comité
B. B. Conclusions du comité- Conclusions du comité
- 248 En ce qui concerne le cas no 1129, le comité prend note, selon les informations fournies par le gouvernement, de ce que MM. Arcadio Ortiz et Ricardo Cervantes Rivo ont été condamnés par les tribunaux populaires antisomozistes en raison de leur appartenance à une organisation contre-révolutionnaire armée et des activités menées en faveur de ladite organisation. Le comité regrette que le gouvernement, en se référant à la condamnation des syndicalistes Milton Silva Gaitán et Orlando Napoleón Molina Aguilera par les tribunaux populaires antisomozistes, n'ait pas indiqué les faits concrets qui leur étaient reprochés. Le comité déplore que le gouvernement n'ait pas répondu aux allégations relatives à la perquisition effectuée au siège de la CTN le 24 octobre 1985 et accompagnée de mise à sac des archives, à l'arrestation parfois assortie de menaces de mort ou de tortures des syndicalistes Eduardo Aburto, Eric González González, Carlos Herrera, Sergio Rosa et Eugenio Membreño (au sujet de ce dernier, les plaignants avaient allégué son arrestation en octobre 1985 et le gouvernement a répondu en se référant à la mise en liberté de ce syndicaliste en mars 1983) , et aux perquisitions de domicile accompagnées de menaces et d'intimidations envers les familles des deux derniers nommés. Dans ces conditions, le comité demande instamment au gouvernement d'envoyer des informations sur ces aspects du cas de toute urgence, ainsi que le texte des sentences rendues ou qui seront rendues au sujet des syndicalistes mentionnés dans ce paragraphe.
- 249 Observant que les tribunaux populaires autisomozistes sont des tribunaux créés spécifiquement par un décret d'exception en avril 1983, le comité rappelle qu'il a toujours accordé une grande importance à ce que, dans tous les cas, y compris lorsque des syndicalistes sont accusés de délits politiques ou criminels, les personnes en question soient jugées promptement par une autorité judiciaire impartiale et indépendante. Le comité demande au gouvernement de fournir le texte de la législation instituant les tribunaux populaires antisomozistes.
- 250 Quant aux allégations relatives au refus du ministère du Travail d'envoyer des certificats de reconnaissance des organes directeurs de quatre syndicats, le comité note que ces allégations ont été présentées par la CMT dans une communication du 13 avril 1984. Il note aussi que, selon le gouvernement, le Département des associations syndicales a délivré les certificats aux organes directeurs de trois des syndicats en question pour la période 1984-85 et que, s'agissant du quatrième syndicat (syndicat des travailleurs des stations-service de Managua), le gouvernement indique que, par suite de la formation de deux factions en conflit au sein de ce syndicat, le Département des associations syndicales du ministère du Travail avait convoqué les deux factions pour coordonner la tenue d'une assemblée et que cette assemblée a eu lieu mais sans l'assistance ni la représentativité requises.
- 251 En ce qui concerne le cas no 1169, le comité prend note du contenu du jugement fourni par le gouvernement au sujet de la condamnation des syndicalistes José Angel Altamirano, José Mercedes Díaz et Eleazar Marenco, qui réitère les déclarations antérieures du gouvernement.
- 252 Le comité prend note également des déclarations du gouvernement concernant certains syndicalistes dont la détention avait été alléguée. Il note en particulier que Máximo Flores Obando a été condamné à trois ans de prison pour le délit d'attaque à main armée et qu'aucun registre des établissements pénitentiaires du pays ne fait état de la détention alléguée de Rito Rivas et d'Anastasio et Gabriel Maldonado.
- 253 Le gouvernement admet en revanche l'arrestation d'Iván Blandón, Víctor Ríos, Napoleón Aragón et Juan Ramón Duarte en avril 1983 en raison de leurs rapports avec une cellule contre-révolutionnaire du groupe mercenaire "ARDE" mais il indique que les intéressés ont été remis en liberté le même mois. A cet égard, relevant qu'il n'y a pas eu de motif d'inculpation de ces syndicalistes, le comité appelle l'attention du gouvernement sur le fait que les mesures privatives de liberté prises à l'encontre de dirigeants syndicaux ou de syndicalistes comportent un risque grave d'ingérence dans les activités syndicales et que, lorsqu'elles obéissent à des motifs syndicaux, elles constituent une violation des principes de la liberté syndicale. (Voir, par exemple, 233e rapport, cas no 1169, paragr. 292.)
- 254 En ce qui concerne le cas no 1298, le comité prend note des déclarations du gouvernement concernant les deux occupations des locaux de la CUS au mois d'août 1984 qui ont donné lieu à des agressions et des destructions au siège de cette organisation. Il relève en particulier que le gouvernement affirme que ces événements ont été la conséquence des désaccords internes entre les dirigeants de la CUS. Le comité déplore toutefois que, malgré diverses demandes, le gouvernement ne se soit pas référé spécifiquement aux affirmations d'une des organisations plaignantes qui, avec preuves à l'appui, accusaient des fonctionnaires publics d'être responsables des faits survenus et la police de n'avoir rien fait pour éviter l'agression manifestée contre les membres de la CUS et la mise à sac de son siège. Dans ces conditions, le comité rappelle que les autorités publiques sont tenues de s'abstenir d'ingérences contraires à la convention no 87 dans les activités et la vie interne des syndicats.
- 255 Quant aux allégations de détention, le comité note que, selon le gouvernement, aucun registre ne fait état de la détention de José Agustín Téllez dans les établissements pénitentiaires du pays. Il note également que, selon le gouvernement, les arrestations de syndicalistes de la CUS à Posoldega au cours du mois de février 1986 avaient eu lieu dans le cadre de l'enquête sur le délit de vol de bétail. Le gouvernement indique que l'autorité judiciaire est chargée de cette affaire, que certaines de ces personnes ont bénéficié d'un non-lieu et que cinq d'entre elles se trouvent en prison comme auteurs présumés ou complices. Le comité demande au gouvernement de le tenir informé de l'évolution des poursuites actuellement en cours et d'envoyer ses observations au sujet des syndicalistes dont il n'a pas fait mention et qui, selon la CISL, seraient détenus (Eduardo Gutiérrez, Juan Gaitán et Enrique Flores). Le comité demande également au gouvernement de répondre à l'allégation selon laquelle les filles, femmes et mères de syndicalistes détenus ont été menacées de prison si leurs pères, maris et fils ne renonçaient pas à leur affiliation à la CUS et reçoivent constamment la visite de la police qui les menace et en outre s'empare de leurs effets personnels et des provisions de la maison.
- 256 Enfin, le comité déplore que le gouvernement n'ait pas répondu aux allégations contenues dans les communications d'une des organisations plaignantes des 14 et 23 janvier 1986 (suspension de la revue syndicale de la CUS; convocations par la sécurité de l'Etat de syndicalistes de la CUS, accompagnées d'actes d'intimidation et de menaces; visites d'une délégation de fonctionnaires dans les organisations affiliées à la CUS des zones nord, sud et ouest du pays, informant les intéressés que s'ils se réunissaient dans l'avenir ils iraient en prison et que l'interdiction s'étendait à la constitution de nouvelles organisations syndicales). Le comité demande instamment au gouvernement d'envoyer des informations sur ces aspects du cas.
- 257 En ce qui concerne le cas no 1344, le comité observe que l'organisation plaignante allègue une série de mesures discriminatoires prises par le gouvernement contre les dirigeants du COSEP en particulier dans le cadre de mesures générales contre le secteur privé. Le comité relève que le gouvernement n'a répondu spécifiquement qu'à une allégation (confiscation arbitraire, et sans égard à la loi sur la réforme agraire, des terres de M. Enrique Bolaños, dirigeant du COSEP), mais sans que la réponse donne des commentaires sur chacun des points signalés par l'organisation plaignante à propos de cette allégation. Etant donné que toutes les allégations formulées dans ce cas ont pour objet de démontrer une attitude discriminatoire du gouvernement à l'égard du COSEP, le comité ajourne l'examen du cas et demande au gouvernement qu'il envisage de toute urgence une réponse sur les aspects dont il n'a pas traité.
- 258 En ce qui concerne le cas no 1351, le comité observe que les allégations portent sur l'interdiction de la réunion à Managua d'environ 2.000 employeurs, prévue par le COSEP pour le 7 septembre 1985 (déclaré Journée de l'entreprise privée), sur l'assignation à domicile du président du COSEP le jour même, et sur la suspension ou la limitation de certains droits fondamentaux par voie de décret pour une durée d'une année.
- 259 En ce qui concerne l'interdiction de la réunion du 7 septembre 1985, le comité note que, selon le gouvernement, cette interdiction était due: 1) à ce que, le COSEP ayant prévu pour cette journée de rendre hommage à Jorge Salazar, sous couvert d'une journée de l'entreprise privée, le gouvernement ne pouvait pas permettre que soit honorée publiquement la mémoire d'un contre-révolutionnaire qui voulait renverser par la force le gouvernement légitime du Nicaragua; 2) à ce que le COSEP n'avait jamais fait aux autorités la demande nécessaire pour célébrer au niveau national la journée de l'employeur. Le comité note aussi que le COSEP a été informé que le gouvernement ne s'opposait nullement à la tenue d'une journée de l'employeur à quelque autre date, sous réserve du préavis et des formalités voulus.
- 260 A cet égard, le comité tient à rappeler les principes fondamentaux qu'il a établis en matière de droit de réunion des organisations de travailleurs, et qu'il considère également applicables aux organisations d'employeurs. Le comité estime notamment que le droit des organisations professionnelles à tenir des réunions dans leurs propres locaux pour y examiner les questions professionnelles, sans autorisation préalable ni ingérence des autorités, constitue un élément essentiel de la liberté d'association (voir par exemple 233e rapport, cas no 1217 (Chili), paragr. 109 et 110), et que les autorités devraient s'abstenir de toute intervention de nature à limiter ce droit ou à en entraver l'exercice, à moins que cet exercice ne trouble l'ordre public ou ne le menace de manière grave ou imminente. (Voir par exemple 211e rapport, cas no 1014 (République dominicaine), paragr. 512.)
- 261 Compte tenu des principes rappelés ci-dessus, le comité considère que la question de la fixation d'une journée de l'entreprise privée par une organisation supérieure d'employeurs doit être laissée au libre choix de l'organisation professionnelle considérée, sans qu'il faille une disposition publique pour autoriser ce genre de commémoration ou en fixer la date. Le comité considère également qu'en l'occurrence le COSEP, en rendant hommage à la mémoire de l'un de ses dirigeants défunts, reste entièrement dans le cadre de ses activités en tant qu'organisation d'employeurs, pourvu que la célébration d'un hommage de cette nature dans le cadre de l'exercice du droit de réunion ne trouble pas l'ordre public ou n'en menace pas le maintien de manière grave ou imminente. Pour ce qui est de l'affirmation du gouvernement selon laquelle J. Salazar Argüello, président en fonctions du COSEP au moment de sa mort violente en novembre 1980, était un "contre-révolutionnaire" mort dans une attaque destinée à renverser la révolution, le comité renvoie aux conclusions qu'il avait adoptées sur cette affaire. Dans ces conditions, le comité déplore que les autorités aient empêché la célébration de la Journée de l'entreprise privée le 7 novembre 1985 et exprime l'espoir qu'à l'avenir le COSEP pourra fixer, sans ingérence aucune, la date et le programme de la célébration de la journée de l'entreprise privée.
- 262 Le comité note de même que, selon le gouvernement, les 6 et 7 septembre 1985 aucune personne n'a été arrêtée pour des raisons directement liées aux allégations. Le comité demande au gouvernement d'indiquer expressément si le président du COSEP a été assigné à résidence à son domicile le 7 septembre 1985 (Journée de l'entreprise privée) comme l'affirme l'organisation plaignante, et, dans l'affirmative, pour quelles raisons.
- 263 En ce qui concerne la suspension ou la limitation de certains droits fondamentaux pendant un an, en vertu des décrets qui établissent l'état d'urgence national (décret no 128 du 15 octobre 1985, modifié par le décret no 130 du 31 octobre 1985), le comité prend note des raisons invoquées par le gouvernement pour la déclaration de l'état d'urgence national, et de ses explications sur la portée pratique des restrictions aux libertés publiques et à l'exercice des droits syndicaux. Le comité observe de même que la Commission d'experts pour l'application des conventions et recommandations a examiné à sa session de mars 1986 les décrets en question dans le cadre de l'observation qu'il avait formulée sur l'application de la convention no 87 par le Nicaragua. A cette occasion, la commission d'experts avait exprimé l'espoir que le gouvernement lèverait, aussi rapidement que les circonstances le permettraient, les restrictions aux libertés publiques et syndicales contenues dans les décrets des 15 et 31 octobre 1985 sur l'Etat d'urgence national. Le comité rappelle également que la Commission de l'application des normes de la 72e session de la Conférence internationale du Travail a regretté, au paragraphe 105 de son rapport, que, en dépit de l'invitation qui lui a été faite à plusieurs reprises, le gouvernement du Nicaragua se soit abstenu de participer aux discussions sur les observations de la commission d'experts.
- 264 Observant que la durée de vigueur de ces décrets et de l'état d'urgence national devait expirer à la fin du mois d'octobre 1986, et notant la gravité des restrictions que ces mesures apportent aux droits syndicaux et aux libertés publiques, le comité exprime le ferme espoir que ces restrictions ne seront pas à nouveau imposées et demande au gouvernement de fournir des informations à ce sujet.
Recommandation du comité
Recommandation du comité- 265. Dans ces conditions, le comité recommande au Conseil d'administration d'approuver le présent rapport intérimaire et, en particulier, les conclusions suivantes:
- a) Le comité exprime tout d'abord sa préoccupation devant la gravité des allégations formulées tant par les organisations d'employeurs que par celles de travailleurs, qui concernent en particulier la détention et la condamnation de syndicalistes et les ingérences des autorités dans la vie des organisations professionnelles.
- b) En ce qui concerne le cas no 1129, le comité demande instamment au gouvernement de fournir des informations sur certains aspects du cas, ainsi que le texte des jugements rendus par les tribunaux populaires antisomozistes ou qui seraient rendus au sujet des syndicalistes mentionnés au paragraphe 248 ci-dessus. Observant que les tribunaux populaires antosomozistes sont des tribunaux créés de façon spécifique par un décret d'exception en avril 1983, le comité rappelle la grande importance qu'il a toujours attachée à ce que, dans tous les cas, y compris lorsque des syndicalistes sont accusés de délits politiques ou criminels que le gouvernement considère comme étrangers à leurs activités syndicales, les personnes en question soient jugées promptement par une autorité judiciaire impartiale et indépendante. Le comité demande au gouvernement de fournir le texte de la législation instituant les tribunaux populaires antisomozistes.
- c) En ce qui concerne le cas no 1169, le comité appelle l'attention du gouvernement sur le fait que les mesures privatives de liberté prises à l'encontre de dirigeants syndicaux ou de syndicalistes comportent un risque grave d'ingérence dans les activités syndicales et que, lorsqu'elles obéissent à des motifs syndicaux, elles constituent une violation des principes de la liberté syndicale.
- d) En ce qui concerne le cas no 1298, le comité déplore que, malgré diverses demandes, le gouvernement ne se soit pas référé spécifiquement aux affirmations d'une des organisations plaignantes qui, avec preuves à l'appui, accusaient des fonctionnaires publics d'être responsables des faits survenus au siège de la CUS en août 1984 et la police de n'avoir rien fait pour éviter l'agression manifestée contre les membres de la CUS et la mise à sac de son siège. Dans ces conditions, le comité rappelle que les autorités publiques sont tenues de s'abstenir d'ingérences contraires à la convention no 87 dans les activités et la vie interne des syndicats.
- e) Le comité demande au gouvernement de le tenir informé de l'évolution du procès actuellement en cours contre certains syndicalistes pour le délit de vol de bétail et d'envoyer ses observations au sujet des syndicalistes auxquels il ne s'est pas référé et qui, selon la CISL, seraient détenus (Eduardo Gutiérrez, Juan Gaitán et Enrique Flores). Le comité demande également au gouvernement de répondre à l'allégation selon laquelle les filles, femmes et mères de syndicalistes détenus ont été menacées de prison si leurs pères, maris et fils ne renonUaient pas à leur affiliation à la CUS et font constamment l'objet de visites de la police qui les menace et s'empare de leurs effets personnels et de leurs denrées alimentaires.
- f) Enfin, le comité déplore que le gouvernement n'ait pas répondu aux allégations contenues dans les communications d'une des organisations plaignantes des 14 et 23 janvier 1986 (suspension de la revue syndicale de la CUS; convocations par la sécurité de l'Etat de syndicalistes de la CUS, accompagnées d'actes d'intimidation et de menaces; visites d'une délégation de fonctionnaires aux organisations affiliées à la CUS des zones nord, sud et ouest du pays, informant les membres que s'ils se réunissaient dans l'avenir ils iraient en prison et que l'interdiction s'étendait à la constitution de nouvelles organisations syndicales). Le comité demande au gouvernement d'envoyer des informations sur ces aspects du cas.
- g) En ce qui concerne le cas no 1344, le comité prend note de ce que le gouvernement n'a envoyé des informations que sur une seulement des nombreuses allégations. Etant donné que toutes les allégations formulées dans le présent cas ont pour objet de démontrer une attitude discriminatoire du gouvernement à l'égard du COSEP, le comité ajourne l'examen du cas et demande au gouvernement d'envoyer de toute urgence une réponse sur les aspects dont il n'a pas traité.
- h) En ce qui concerne le cas no 1351, le comité déplore que les autorités aient empêché la célébration de la Journée de l'entreprise privée prévue pour le 7 novembre 1985 par le COSEP et exprime l'espoir qu'à l'avenir cette organisation d'employeurs pourra fixer sans aucune ingérence la date et le programme de la célébration de la journée de l'entreprise privée.
- i) Le comité attire l'attention du gouvernement sur le principe selon lequel le droit des organisations professionnelles de tenir des réunions dans leurs locaux sans autorisation préalable et sans ingérence des autorités constitue un élément fondamental de la liberté d'association.
- j) Le comité prend également note de ce que, selon le gouvernement, les 6 et 7 septembre 1985 aucune personne n'a été arrêtée pour des raisons directement liées aux allégations. Le comité demande au gouvernement de lui indiquer expressément si le président du COSEP a été assigné à résidence à son domicile le 7 septembre 1985 (Journée de l'entreprise privée) comme l'affirme l'organisation plaignante et, dans l'affirmative, pour quelles raisons.
- k) Le comité observe que les décrets nos 128 et 130 proclamant l'état d'urgence national et restreignant les libertés publiques et les droits syndicaux devaient cesser d'être en vigueur à la fin du mois d'octobre 1986. Le comité exprime le ferme espoir que ces restrictions ne seront pas à nouveau imposées et demande au gouvernement de fournir des informations à ce sujet.