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Rapport définitif - Rapport No. 244, Juin 1986

Cas no 1334 (Nouvelle-Zélande) - Date de la plainte: 03-MAI -85 - Clos

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  1. 78. Dans une communication du 3 mai 1985, la Fédération des employeurs de la Nouvelle-Zélande a présenté une plainte contre le gouvernement de la Nouvelle-Zélande dans laquelle elle allègue que les dispositions du projet de loi sur l'affiliation syndicale, adopté le 13 juin 1985, et devenu loi modificatrice de 1985 sur les relations professionnelles, violent la liberté syndicale. L'organisation plaignante a fourni des renseignements complémentaires dans une communication du 22 mai 1985, et le gouvernement a répondu par une communication du 12 septembre 1985.
  2. 79. Le 1er août 1985, la Fédération néo-zélandaise du travail a demandé que la plainte lui soit communiquée et a formulé l'espoir que la possibilité lui serait donnée de présenter ses vues sur les questions soulevées. Le comité, après en avoir discuté à sa réunion de novembre 1985, a décidé que, conformément à sa procédure habituelle, il ne pouvait tenir compte dans l'examen du cas que des communications émanant de l'organisation plaignante ou de celles qui auraient été soumises par le gouvernement en cause ou par son intermédiaire. En conséquence, il a décidé d'informer la Fédération néo-zélandaise du travail que ses commentaires ne pourraient être pris en considération que s'ils étaient soumis par le gouvernement ou par l'intermédiaire de celui-ci. Les commentaires de la Fédération néo-zélandaise du travail ont par la suite été transmis par le gouvernement dans une communication du 10 décembre 1985.
  3. 80. La Nouvelle-Zélande n'a ratifié ni la convention (no 87) sur la liberté syndicale et la protection du droit syndical, 1948, ni la convention (no 98) sur le droit d'organisation et de négociation collective, 1949.

A. Allégations de l'organisation plaignante

A. Allégations de l'organisation plaignante
  1. 81. L'organisation plaignante allègue que la loi à laquelle a abouti le projet de loi sur l'affiliation syndicale a rétabli l'affiliation syndicale obligatoire à compter du 1er juillet 1985 par l'intermédiaire de dispositions en vertu desquelles la liberté de choix, que la législation précédente, en vigueur depuis le 1er février 1984, prévoyait pour les membres des syndicats, est remplacée par des clauses de sécurité syndicale.
  2. 82. Plus précisément, l'organisation plaignante allègue tout d'abord que la législation prévoit une période initiale d'obligation légale d'une durée de 18 mois pendant laquelle tous les travailleurs couverts par une sentence ou une convention collective devront devenir ou rester membres d'un syndicat; cette période de 18 mois sera suivie d'un scrutin sur l'affiliation syndicale qui, en vertu des dispositions de la loi, devra avoir lieu au niveau national, à l'échelon de la branche et non de l'établissement, selon des procédures que l'organisation plaignante juge impropres à donner effectivement voix au chapitre aux travailleurs, s'agissant de décider s'ils doivent appartenir à un syndicat. En second lieu, l'organisation plaignante allègue que la législation ne permet pas réellement aux travailleurs de choisir leur syndicat.
  3. 83. A l'appui de ces allégations, elle souligne la nouvelle disposition en vertu de laquelle, pendant une période initiale de 18 mois, une clause d'affiliation syndicale est réputée insérée dans toutes les sentences et les conventions collectives qui contenaient antérieurement une clause préférentielle (à savoir une clause ayant pour effet que tout travailleur couvert par une sentence arbitrale ou par une convention collective doit s'affilier au syndicat concerné dans un délai de 14 jours suivant l'embauche), et il déclare que, s'il est vrai qu'un scrutin peut intervenir au cours de cette période, le fait qu'il ne soit en aucun cas impératif d'y procéder signifie que l'obligation légale subsistera pendant toute la période à moins qu'un syndicat ne choisisse d'organiser un tel scrutin.
  4. 84. L'organisation plaignante déclare en outre que la législation impose à l'employeur de congédier tout travailleur qui, après que la demande lui en a été faite, refuse d'adhérer à un syndicat, à moins que l'intéressé ne bénéficie d'une exemption pour des motifs de conscience. Il estime que l'obligation légale qui entraîne le congédiement constitue indubitablement une violation de la liberté syndicale et cite, à ce propos, un arrêt de la Cour européenne des droits de l'homme relatif à l'article 11 de la Convention européenne des droits de l'homme.
  5. 85. En ce qui concerne les dispositions relatives au scrutin, l'organisation plaignante déclare que le fait que l'électorat soit constitué par les effectifs syndicaux à l'échelon national et non au niveau de l'établissement signifie qu'il n'y a guère de chances pour qu'un vote réellement représentatif des travailleurs puisse avoir lieu et que ce système implique aussi le risque que l'affiliation au syndicat puisse être obligatoire pour certains travailleurs tandis qu'elle ne le sera pas pour d'autres dans l'établissement (en raison de la multiplicité des syndicats de métiers en Nouvelle-Zélande).
  6. 86. L'organisation plaignante déclare aussi que, dans deux des trois types de scrutins prévus (le scrutin sur une nouvelle sentence ou convention - dénommé scrutin initial - et le scrutin sur le point de savoir si une clause d'affiliation syndicale doit être rétablie dans une sentence ou une convention collective - dénommé scrutin de rétablissement), tous les travailleurs couverts sont habilités à voter, encore qu'une faible majorité puisse suffire pour l'emporter. En revanche, dans la troisième situation visée par la législation, lorsqu'une clause d'affiliation syndicale est déjà incluse dans une sentence ou une convention collective (comme cela sera le cas pour toutes les sentences et les conventions collectives en vigueur qui contenaient antérieurement une clause préférentielle), c'est le vote majoritaire des membres du syndicat couverts par la sentence ou par la convention qui déterminera si la clause d'affiliation syndicale est maintenue.
  7. 87. En outre, selon l'organisation plaignante, la décision, dans tous les cas, repose principalement sur le vote des personnes présentes à la réunion, car les possibilités de vote spécial sont très limitées et il n'est pas exigé ni même prévu de scrutin postal. En pratique, déclare-t-elle, c'est une minorité - et souvent une petite minorité - qui déterminera le résultat pour la majorité.
  8. 88. Elle déclare en outre que c'est essentiellement au syndicat qu'il appartient d'organiser le scrutin et qu'il n'est pas prévu de dispositions suffisantes en vue d'un contrôle par le Greffier des unions professionnelles ou une personne par lui désignée et qu'il en va de même lorsqu'une demande est présentée au Greffier à propos d'une irrégularité dans, ou relativement à, la conduite du scutin.
  9. 89. Elle juge cette situation d'autant plus critiquable que, conformément à la loi, les syndicats sont libres de fixer le montant des cotisations, alors qu'avant l'instauration de l'affiliation syndicale volontaire en 1984 elles étaient limitées à 1 pour cent du salaire minimum.
  10. 90. Enfin, l'organisation plaignante allègue que, dans le contexte du système de sentences arbitrales de la Nouvelle-Zélande, un vote en faveur d'une clause d'affiliation syndicale contraindra en fait tous les travailleurs couverts par la sentence ou la convention collective à adhérer à un syndicat donné - celui dont relève leur emploi - sous peine de congédiement. Elle fait observer que, pour chaque sentence ou convention collective, il n'existe en Nouvelle-Zélande qu'un syndicat enregistré qui a le monopole des droits de négociation et que la nouvelle législation ne contient aucune disposition qui permette aux travailleurs d'opter pour le syndicat de leur choix ou de créer un autre syndicat et de le faire enregistrer. Elle déclare qu'une fois qu'une clause d'affiliation syndicale a été insérée dans une sentence ou une convention collective, un monopole syndical national s'instaure et tout choix est en fait supprimé.
  11. 91. En conséquence, elle estime que la législation ne satisfait pas au critère du Comité de la liberté syndicale selon lequel il n'est permis de déroger à la liberté syndicale individuelle que lorsque cette dérogation reflète le choix des personnes directement intéressées (comme dans le cas du monopole syndical d'entreprise). A cet égard, elle cite l'opinion de la Commission d'experts pour l'application des conventions et recommandations au sujet de la pratique en vigueur en Nouvelle-Zélande, selon laquelle "... le droit des syndicats enregistrés à obtenir l'insertion de clauses de sécurité syndicale (présentant la forme de clauses préférentielles) dans les sentences arbitrales d'application générale fait obstacle à la création et à l'existence de syndicats non enregistrés". (Paragr. 77 de l'Etude d'ensemble de 1973 intitulée Liberté syndicale et négociation collective, reproduit dans la note relative au paragraphe 144 de l'Etude d'ensemble de 1983 également intitulée Liberté syndicale et négociation collective.) A ce sujet, elle souligne qu'une autre procédure a existé par le passé (encore qu'elle n'ait jamais été utilisée): elle prévoyait qu'une clause préférentielle serait insérée dans une sentence ou une convention collective lorsqu'au moins 50 pour cent de travailleurs adultes qui seraient liés par elle désiraient qu'il en soit ainsi. Selon elle, la nouvelle législation est donc encore plus en contradiction avec l'opinion de la commission d'experts.
  12. 92. En conclusion, elle appelle aussi l'attention sur les décisions du Comité de la liberté syndicale dans les cas nos 266 (voir 65e rapport du comité, paragr. 60) et 303 (voir 83e rapport, paragr. 190 et 193), selon lesquelles "... lorsqu'un travailleur, tout en ayant légalement la possibilité de s'affilier à un autre syndicat (est) cependant contraint - par la législation - de devenir membre d'un syndicat déterminé pour conserver son emploi, cette obligation semble incompatible avec son droit de s'affilier à une organisation de son choix".

B. Réponse du gouvernement

B. Réponse du gouvernement
  1. 93. Dans sa réponse du 12 septembre 1985, le gouvernement déclare que la loi en question a supprimé les dispositions relatives au syndicalisme volontaire adoptées en 1984 pour revenir à un système, fondé en gros sur le système précédent de la clause préférentielle, qui prévoit maintenant un scrutin organisé par le syndicat pour décider de l'insertion d'une clause d'affiliation syndicale en vertu de laquelle les travailleurs (âgés de 18 ans ou plus ou recevant un salaire équivalant à celui d'une personne de cet âge) seront obligatoirement liés par les sentences ou les conventions collectives négociées par le syndicat. Ces dispositions sont uniformes pour tous les syndicats en dehors des syndicats du secteur public qui avaient un système d'affiliation volontaire avant la loi de 1984. Si les travailleurs se prononcent contre l'insertion de la clause d'affiliation syndicale, la liberté de choix individuel peut s'exercer sur la question de l'adhésion à une organisation.
  2. 94. Le gouvernement déclare en outre qu'il faut apprécier la plainte a) dans le contexte du système précédent de la clause préférentielle, et b) en tenant compte de la mesure dans laquelle les nouvelles dispositions facilitent la représentation syndicale. Selon lui, ce dernier point constitue la principale raison d'être de la législation en cause, qui vise aussi à reconnaître autant que possible dans le contexte des relations professionnelles en Nouvelle-Zélande les principes posés dans les articles 2 et 3 de la convention no 87. Le gouvernement estime que le système d'affiliation syndicale de la Nouvelle-Zélande n'est incompatible ni avec les obligations qu'il assume en vertu de la Constitution de l'OIT ni avec l'esprit de la convention.
  3. 95. Plus précisément, le gouvernement estime que les principes posés dans les articles précités de la convention no 87 sont reconnus dans la loi de diverses façons:
    • a) après la phase de transition, l'affiliation syndicale deviendra une question syndicale interne;
    • b) en en disposant ainsi, la loi prévoit que la décision relative à l'affiliation syndicale devra être prise à la majorité à l'issue d'un scrutin démocratique;
    • c) les problèmes de représentation sont reconnus dans la structure de ces scrutins (organisés par le syndicat), le droit de vote étant accordé aux personnes qui seraient concernées par les instruments négociés par le syndicat;
    • d) la législation reconnaît la préférence qui pourrait s'exprimer lors du scrutin en faveur de la clause d'affiliation syndicale ou contre elle et prévoit une protection contre le risque de discrimination dans l'un et l'autre cas;
    • e) dans le cadre des statuts syndicaux, les membres couverts par un instrument (qu'il contienne ou non une clause d'affiliation syndicale) peuvent engager la procédure en vue de la tenue d'un scrutin par le syndicat sur la question de l'affiliation syndicale;
    • f) le droit d'un individu d'avoir une authentique objection de conscience contre l'affiliation à un syndicat est reconnu par la loi qui crée un tribunal chargé de connaître des demandes tendant à la reconnaissance d'une telle objection;
    • g) le droit d'un individu d'adhérer à un syndicat est protégé;
    • h) dans le cadre de la nouvelle législation sur la fixation des salaires, les employeurs pourraient se servir de la question de la représentativité (qui risquerait de se poser par suite de l'usure naturelle des effectifs d'un syndicat en cas de non-insertion d'une clause d'affiliation syndicale) pour refuser l'accès à l'arbitrage. Il n'existe toutefois aucune disposition législative qui, en pareil cas, empêche les travailleurs concernés de constituer des associations de travailleurs et de négocier des instruments conformément aux dispositions de la loi sur les relations professionnelles.
  4. 96. Le gouvernement estime que les dispositions transitoires devraient être appréciées eu égard aux éléments susmentionnés. Dans un premier temps, ces dispositions rendent au syndicat une base d'affiliation qui reconnaît l'existence d'une responsabilité collective des travailleurs à l'égard de leur organisation, et elles prévoient leur participation à un scrutin démocratique en vue de trancher par la suite la question de la base de l'affiliation syndicale. La disposition transitoire relative à l'exemption consacre les droits individuels et assure aussi une protection en ce qui concerne la réaffiliation pour les personnes qui auraient usé de leur droit légal de se désaffilier au cours de la période de syndicalisme volontaire. L'obligation légale d'insérer une clause d'affiliation syndicale dans les sentences et les conventions vaut pour une période de 18 mois à compter de la promulgation de la loi, ou jusqu'à ce que le syndicat procède à un scrutin s'il le fait avant l'expiration de ce délai. Ces dispositions ne mettent aucun obstacle à l'organisation d'un scrutin et les syndicats sont libres d'en tenir un à tout moment au cours de la période de 18 mois. Une demande de scrutin a été reçue le 9 septembre d'une fédération qui regroupe sept syndicats, et la plupart de ceux-ci devraient voter avant la fin de la période de transition. La décision de ne pas procéder à un scrutin entraînerait la suppression de la clause d'affiliation syndicale.
  5. 97. Le gouvernement déclare que le système des clauses préférentielles autorisait les syndicats et les employeurs à négocier l'insertion dans les conventions d'une clause de monopole syndical postérieure à l'embauche sous réserve d'un vote favorable des membres du syndicat, et qu'une procédure d'exemption était prévue pour ceux qui avaient une objection contre l'appartenance à un syndicat. Il souligne que ces dispositions relatives à l'affiliation syndicale ne s'appliquaient qu'aux syndicats enregistrés conformément à la loi de 1973 sur les relations professionnelles, en faisant toutefois observer que la majorité des syndicats étaient enregistrés pour bénéficier des avantages découlant de l'enregistrement. Dans la mesure où l'enregistrement entraînait la reconnaissance de droits de négociation exclusifs, le gouvernement déclare que le système soulevait des questions de liberté syndicale en ce qui concerne le droit des intéressés de créer les organisations de leur choix. Selon lui, il n'y a pas eu de modifications importantes dans le cadre du nouveau système d'affiliation syndicale, et sa position en ce qui concerne le respect de l'article 2 de la convention no 87 n'a pas changé.
  6. 98. Le gouvernement déclare que, dans le cadre du syndicalisme volontaire, les clauses relatives à l'affiliation négociées antérieurement ont été annulées, les deux parties se voyant refuser le droit d'en négocier d'autres. Certains syndicats ont perdu beaucoup de membres, des problèmes de recrutement se sont posés (des renseignements sont fournis au sujet des fluctuations des effectifs syndicaux au cours de la période de syndicalisme volontaire) et la possibilité est maintenant offerte aux syndicats de regagner le terrain perdu.
  7. 99. Le gouvernement déclare aussi que l'insertion des clauses d'affiliation syndicale n'est plus une question négociable entre les employeurs et les syndicats, mais doit être tranchée au moyen d'un scrutin, syndicat par syndicat: elle est d'autant plus nécessaire que la loi adoptée en 1984 signifiait la perte de la garantie de l'arbitrage obligatoire et que la soumission à l'arbitrage des conflits non réglés requiert maintenant le consentement des deux parties. La méthode qui vient d'être adoptée en Nouvelle-Zélande pour l'insertion de clauses d'affiliation syndicale est peut-être bien nouvelle mais, selon le gouvernement, elle n'est pas incompatible avec la liberté syndicale car elle est conforme au principe selon lequel il appartient aux syndicats de déterminer eux-mêmes la base de leurs effectifs. Elle n'entre pas non plus en contradiction avec l'opinion de la Commission d'experts pour l'application des conventions et recommandations qui a jugé inacceptable l'obligation d'affiliation à un syndicat édictée par la loi, mais a considéré comme acceptables des dispositions législatives qui permettaient aux parties liées par des instruments régissant les relations professionnelles d'imposer à leurs membres des clauses de sécurité syndicale.
  8. 100. En ce qui concerne le système de scrutin, le gouvernement décrit les procédures relatives au droit de participer au vote ainsi que les mesures visant à faciliter une plus grande participation (notamment notification écrite aux membres et publicité dans la presse), et il fournit des indications sur le rôle des scrutateurs et des fonctionnaires ministériels dans le contrôle des élections. Il signale que des dispositions semblables à celles qui existaient dans le cadre du système des clauses préférentielles sont en vigueur au sujet des enquêtes sur un scrutin, tout en soulignant qu'aucune demande d'enquête de ce genre n'a jamais été reçue. Il déclare que, s'il a été décidé que les scrutins auraient lieu dans le cadre de réunions (alors que la législation antérieure prévoyait la possibilité d'un scrutin postal), c'est pour que les votants puissent être mieux informés de la question soumise au vote; il n'a pas été prévu de scrutin au niveau de l'entreprise ou de l'établissement car cela ne cadrerait pas avec les structures actuelles des relations professionnelles en Nouvelle-Zélande, où la plupart des syndicats sont organisés sur la base du district. Enfin, toujours en ce qui concerne le scrutin, le gouvernement déclare que la majorité requise (au moins 50 pour cent des suffrages valides exprimés) est la même que dans le système des clauses préférentielles.
  9. 101. Pour ce qui est de l'exemption de l'affiliation à un syndicat pour des motifs de conscience ou en raison d'une conviction personnelle profonde, le gouvernement indique qu'une nouvelle audition est prévue en cas de fraude, d'erreur ou de production d'un nouvel élément de preuve important, et qu'un recours est possible pour des motifs de droit uniquement. Il souligne qu'aux termes de la loi les membres du tribunal d'exemption doivent avoir de l'expérience en matière de convictions religieuses, de droits de l'homme ou de relations professionnelles mais que, comme cette instance n'a été créée que tout récemment, on ne sait pas encore dans quel esprit elle interprétera la législation.
  10. 102. La réponse du gouvernement évoque aussi la question de la discrimination, déclarant que les dispositions nouvelles visent à assurer la neutralité en prévision de décisions des syndicats en faveur d'une affiliation syndicale de type volontaire, tandis que d'autres dispositions sont les mêmes que dans le système des clauses préférentielles. Il relève aussi que les pouvoirs d'exécution ont été retirés au ministère du Travail et relèvent maintenant des attributions des syndicats, et que les dispositions relatives à la fixation du montant des cotisations formulées à l'époque du syndicalisme volontaire ont été maintenues de préférence à la formule prévue par le système des clauses préférentielles, dans laquelle les cotisations représentaient 1 pour cent du salaire minimum.

C. Opinions de la Fédération néo-zélandaise du travail

C. Opinions de la Fédération néo-zélandaise du travail
  1. 103. Dans la communication qu'elle a présentée par l'intermédiaire du gouvernement, la Fédération néo-zélandaise du travail souligne qu'elle n'accepte pas les allégations selon lesquelles la législation en cause serait incompatible avec le principe de la liberté syndicale et, tout en observant qu'il est des aspects qu'elle aurait préféré voir traités différemment, elle se déclare en faveur du principe dont s'inspire cette législation, celui de la prise de décision démocratique.
  2. 104. En ce qui concerne les dispositions transitoires, la Fédération du travail estime que, par essence, elles visent simplement à rétablir dans les sentences des dispositions qui étaient librement négociées avant 1983 et dont la négation, pendant la période d'affiliation syndicale volontaire, était elle-même en contradiction avec les principes de l'OIT relatifs à la liberté syndicale.
  3. 105. La fédération souligne que les principes de l'OIT garantissent le droit pour les travailleurs d'adhérer à l'organisation de leur choix, mais non le droit de ne pas adhérer à un syndicat, et que le seul principe que l'on puisse invoquer en ce qui concerne les clauses de sécurité syndicale est celui qui vise à empêcher que de telles clauses soient imposées par la loi: toutefois, une loi peut fort bien en faciliter l'adoption, et c'est ce que fait la loi néo-zélandaise.
  4. 106. Quant à l'idée selon laquelle le système risquerait de créer un monopole syndical par suite des avantages découlant de l'enregistrement conformément à la loi, la fédération souligne:
    • a) qu'il reste possible de constituer des syndicats non enregistrés et que les travailleurs sont libres d'y adhérer;
    • b) que le droit pour les syndicats enregistrés de contraindre les employeurs à recourir à l'arbitrage a été supprimé et est remplacé par une règle consensuelle dont la fédération estime qu'elle rend la situation de ces syndicats semblable à celle des syndicats non enregistrés en ce qui concerne la négociation collective;
    • c) qu'une clause d'affiliation syndicale ne peut exister que si la majorité des travailleurs y est favorable: si elle ne l'était pas, la capacité du syndicat de maintenir son monopole en serait affectée. En outre, la fédération ne voit pas la logique de la distinction qui est établie entre les dispositions applicables au niveau de l'établissement ou au niveau de la branche et elle souligne que le fait que les travailleurs soient organisés (et les sentences rendues) à l'échelon de la profession ou de la branche reflète la réalité des relations professionnelles en Nouvelle-Zélande. Elle juge aussi que la principale raison d'être de la plainte est qu'elle vise à briser ces structures traditionnelles pour les remplacer par un système fondé sur l'établissement qui, selon elle, serait contraire aux intérêts des travailleurs néo-zélandais.
  5. 107. Selon la Fédération du travail, la loi énonce, en ce qui concerne les statuts syndicaux, des prescriptions démocratiques qui visent à garantir que les organisations soient bien représentatives. Il est aussi d'autres dispositions qui permettent de contester la sphère d'affiliation des organisations de travailleurs, qu'elles soient déjà établies ou viennent d'être créées. L'enregistrement sans restrictions pourrait, d'après elle, aboutir à un morcellement et on risquerait de voir se multiplier les "syndicats du patron", ce qui serait désastreux pour les intérêts des travailleurs. La possibilité de contester la sphère d'affiliation actuelle des syndicats devant une juridiction indépendante (le Tribunal d'arbitrage) constitue, toujours selon la fédération, un moyen rationnel et acceptable de traiter la question des droits de négociation des syndicats.
  6. 108. La Fédération du travail appelle aussi l'attention sur le fait que, au cours de la période postérieure à 1977, la question des clauses préférentielles a donné lieu à des scrutins auxquels ont participé 67 pour cent des syndicats, représentant 81 pour cent de l'ensemble des effectifs syndicaux et que les résultats ont été favorables dans des proportions écrasantes au maintien des clauses d'affiliation syndicale dans les sentences.

D. Conclusions du comité

D. Conclusions du comité
  1. 109. Le comité prend note des informations fournies par le plaignant et de la réponse du gouvernement, ainsi que de l'opinion de la Fédération néo-zélandaise du travail qui lui est parvenue par l'intermédiaire du gouvernement.
  2. 110. La plainte a trait aux modifications qu'a introduites dans la loi sur les relations professionnelles de la Nouvelle-Zélande un texte (connu sous son titre de projet de loi sur l'affiliation syndicale) qui a été adopté le 1er juillet 1985. Il semble que ce texte visait notamment à rétablir une formule de sécurité syndicale d'un type semblable au système de la clause préférentielle qui existait en Nouvelle-Zélande avant l'adoption en 1984 d'un système d'affiliation volontaire.
  3. 111. Selon le comité, les principaux problèmes soulevés par la plainte concernent:
    • a) l'insertion en vertu de la loi, pendant une période transitoire de 18 mois, d'une clause d'affiliation syndicale (imposant à tous les travailleurs de la branche visée par une convention ou une sentence de devenir membres d'un syndicat) dans toutes les sentences et conventions collectives qui contenaient précédemment une clause préférentielle;
    • b) le système institué par la loi selon lequel les décisions ultérieures seront prises par les travailleurs au sujet du maintien ou non de la clause d'affiliation syndicale, y compris les dispositions relatives au scrutin;
    • c) l'absence de choix réel alléguée, dans le système introduit, quant au syndicat auquel les travailleurs entendent appartenir.
  4. 112. En examinant ces questions, le comité a pris note de l'opinion exprimée par la Commission d'experts pour l'application des conventions et recommandations au sujet des clauses de sécurité syndicale en général (voir Liberté syndicale et négociation collective - Etude d'ensemble de la Commission d'experts pour l'application des conventions et recommandations, 1983, pp. 48-50, paragr. 144 et 145) et en particulier de la formule de sécurité syndicale en vigueur en Nouvelle-Zélande à l'époque de l'étude, c'est-à-dire du système des clauses préférentielles (Etude d'ensemble, paragr. 144, note 6). Il a aussi consulté le rapport que le gouvernement de la Nouvelle-Zélande a soumis, en vertu de l'article 19 de la Constitution de l'OIT, aux fins d'examen par la commission d'experts, dans le cadre de cette étude.
  5. 113. A ce sujet, le comité a noté en premier lieu que la commission d'experts a déclaré que le principe posé par l'article 2 de la convention no 87 "laisse à la pratique et à la réglementation de chaque Etat le soin de décider s'il convient de garantir aux travailleurs ... le droit de ne pas adhérer à une organisation professionnelle ou, au contraire, d'autoriser et, le cas échéant, de réglementer l'utilisation des clauses et pratiques de sécurité syndicale". (Voir Etude d'ensemble ... 1983, p. 48, paragr. 142.) En second lieu, la commission d'experts a présenté des informations sur différents types de clauses de sécurité syndicale (y compris celle qui existait en Nouvelle-Zélande sous le nom de clause préférentielle) et sur leur fonctionnement. Troisièmement, le comité souhaite souligner que la commission d'experts a mis l'accent sur la distinction à établir entre les clauses de sécurité syndicale que la loi autorise (y compris la clause préférentielle existant en Nouvelle-Zélande) et celles que la loi impose. C'est cette dernière catégorie de clauses - celles qui sont imposées par la loi - que la commission d'experts a jugées semblables dans leurs résultats aux clauses établissant un monopole syndical et incompatibles avec le droit des travailleurs de constituer les organisations de leur choix et de s'y affilier.
  6. 114. Il semble donc nécessaire d'étudier si (et, dans l'affirmative, dans quelle mesure) les modifications introduites par la loi de 1985 en Nouvelle-Zélande au sujet des clauses d'affiliation syndicale impliquent l'imposition par la loi d'un système qui, en fait, s'apparente à un monopole syndical.
  7. 115. Le comité note que l'une des modifications introduites par la loi de 1985 consiste en ce que, en vertu de ses dispositions, des clauses d'affiliation syndicale seront obligatoirement insérées, pour une période initiale de 18 mois à compter du 1er juillet 1985, dans les sentences et les conventions collectives qui contenaient précédemment des clauses préférentielles (clauses dont la suppression en 1984 avait aussi été effectuée par la voie législative).
  8. 116. A cet égard, le comité a pris note des indications fournies par le gouvernement au sujet des dispositions de la loi qui permettent aux syndicats concernés de procéder à un scrutin auprès de leurs membres au sujet des clauses d'affiliation syndicale, même pendant la période initiale où ces clauses sont imposées par la loi, ainsi que du fait qu'une fédération syndicale regroupant sept syndicats a effectivement demandé à organiser un tel scrutin. En même temps, le comité note que, en l'absence d'un accord entre les parties, il n'est plus possible en Nouvelle-Zélande de recourir à l'arbitrage obligatoire pour faire en sorte qu'une sentence ayant force obligatoire soit rendue au sujet de ces clauses, et que le principal fondement légal de l'application de ces clauses pendant la période transitoire considérée est donc l'obligation faite par la loi de les imposer.
  9. 117. Il apparaît donc au comité que, pour ce qui est de la période transitoire, cette mesure est en contradiction avec le principe énoncé par la commission d'experts, puisqu'elle oblige en fait tous les travailleurs d'une branche à appartenir au syndicat qui, jusqu'en 1984, bénéficiait d'une clause préférentielle, mais pour lequel pareille clause n'était pas en vigueur pendant la période précédant immédiatement la promulgation de la loi. Cette mesure a été prise en l'absence de toute négociation entre les parties et sans leur accord et, en cela, elle constitue une intervention législative imposant le système de la clause préférentielle qui est contraire aux principes de la liberté syndicale.
  10. 118. En ce qui concerne les périodes où la loi n'imposait pas l'insertion de clauses d'affiliation syndicale, le comité a pris note des déclarations du gouvernement relatives à l'approbation par les membres des syndicats, au cours de la période postérieure à 1977, des clauses de sécurité syndicale en vigueur dans le cadre du système des clauses préférentielles; il a pris note également des informations contenues dans le rapport que le gouvernement a soumis à la commission d'experts à l'occasion de l'étude d'ensemble de 1983 sur la liberté syndicale et la négociation collective selon lesquelles, à la fin de 1981, il avait été procédé à 195 scrutins (dont 37 par la poste) portant sur 1.199 sentences et intéressant quelque 400.000 travailleurs (80 pour cent de l'ensemble des effectifs syndicaux), et 84 pour cent des votants (environ 33 pour cent des effectifs) s'étaient prononcés en faveur de la clause préférentielle. Le comité note que la législation prévoit qu'un vote doit avoir lieu à intervalles ne dépassant pas trois ans au sujet des clauses de sécurité syndicale qui font l'objet de la loi modificatrice de 1985.
  11. 119. S'agissant de ces questions de procédure de vote, le comité ne peut que relever la diminution des possibilités de vote résultant de la suppression de la disposition relative aux scrutins postaux. Tout en prenant note des déclarations du gouvernement figurant dans le rapport précité de 1983 et dans sa communication au comité au sujet de la préférence des travailleurs pour les scrutins organisés dans le cadre de réunions, le comité rappelle, à l'attention du gouvernement, que les questions de cette nature ne devraient faire l'objet d'intervention du gouvernement que pour assurer le respect des règles démocratiques au sein du mouvement syndical. (Voir Recueil de décisions et de principes du Comité de la liberté syndicale du Conseil d'administration du BIT, paragr. 452; 197e rapport, cas no 917 (Costa Rica), paragr. 195; cas no 127 (Brésil), paragr. 359; 201e rapport, cas no 842 (Argentine), paragr. 47; 202e rapport, cas no 947 (Grèce), paragr. 240.)
  12. 120. Le comité estime qu'une approche similaire devrait être adoptée en ce qui concerne la détermination du niveau auquel les décisions seront prises, mais il note à cet égard, d'après le gouvernement et la Fédération du travail, que le choix de scrutins organisés au niveau de la branche est en harmonie avec le système de relations professionnelles de la Nouvelle-Zélande. Le comité ne considère pas que ce choix soit de nature à entraver le processus devant aboutir à une décision au sujet des clauses d'affiliation syndicale. Il est aussi convaincu, eu égard aux informations dont il dispose au sujet du droit de participer au vote, des règles en matière d'exemption et du mécanisme de contrôle électoral, que les autres aspects de la procédure de scrutin prévue par les dispositions en vigueur ne soulèvent pas de questions relatives à la liberté syndicale qui appellent un examen plus approfondi.
  13. 121. En ce qui concerne le droit pour les travailleurs de s'affilier aux organisations de leur choix, le comité note que le droit des syndicats enregistrés d'obtenir l'insertion de clauses de sécurité syndicale dans les sentences arbitrales obligatoires, qui a fait l'objet des observations de la Commission d'experts pour l'application des conventions et recommandations citées par le plaignant, n'existe plus et a été remplacé par les dispositions de la loi de 1985 concernant le règlement de ces questions par scrutin. Le comité note aussi l'explication donnée par le gouvernement et l'opinion de la Fédération néo-zélandaise du travail selon lesquelles le droit de s'affilier à un syndicat est garanti par la loi et que rien n'empêche les travailleurs de constituer des associations non enregistrées, même lorsqu'une clause d'affiliation syndicale a été acceptée par la majorité des travailleurs.
  14. 122. Au sujet de l'ensemble de la question, le comité a étudié attentivement le principe cité par le plaignant, à savoir que "... lorsqu'un travailleur, tout en ayant légalement la possibilité de s'affilier à un autre syndicat est] cependant contraint - par la législation - de devenir membre d'un syndicat déterminé pour conserver son emploi, cette obligation semble incompatible avec son droit de s'affilier à une organisation de son choix" (Recueil, p. 54, paragr. 248; 65e rapport du comité, cas no 266, paragr. 60; 83e rapport du comité, cas no 303, paragr. 190 et 193), et il saisit cette occasion d'appeler à nouveau l'attention sur l'importance qu'il attache à ce principe. S'agissant du présent cas, la question qui se pose est celle de savoir si la clause d'affiliation syndicale préférentielle, telle qu'elle fonctionne en Nouvelle-Zélande, enfreint ce principe. Comme il a déjà été indiqué, le comité n'a pas à examiner la situation (qui existait jusqu'à 1984) où ces clauses étaient insérées par des sentences arbitrales obligatoires, mais celle qui existera en application de la loi de 1985. A cet égard, le comité estime que le fait qu'un travailleur pourra être tenu de s'affilier à un syndicat déterminé découlera, après l'expiration de la période initiale pendant laquelle les clauses de sécurité syndicale auront été insérées obligatoirement, d'une décision prise par les travailleurs eux-mêmes à l'issue d'un scrutin mené conformément à la loi, et non d'une quelconque obligation légale. Autrement dit, après l'expiration de la période transitoire de 18 mois, la loi de 1985 ne fait que créer le cadre dans lequel ces décisions pourront être prises, à savoir par scrutin. Le caractère facultatif de cette disposition et la possibilité qu'elle crée pour les travailleurs de participer à la décision conduisent le comité à conclure dans ce cas que le système de scrutin ainsi mis en place par la loi pour la période après l'expiration de la période transitoire n'est donc pas en conflit avec le principe de la liberté syndicale.

Recommandation du comité

Recommandation du comité
  1. 123. Dans ces conditions, le comité recommande au Conseil d'administration d'approuver le présent rapport et, en particulier, les conclusions suivantes concernant les questions soulevées dans la plainte:
    • a) Le comité prend note de l'opinion exprimée par la Commission d'experts pour l'application des conventions et recommandations concernant les clauses de sécurité syndicale énoncées au paragraphe 113 ci-dessus.
    • b) La façon dont les clauses d'affiliation syndicale obligatoire sont imposées pendant la période de 18 mois courant à partir du 1er juillet 1985 par la loi modificatrice de 1985 sur les relations professionnelles n'est pas en conformité avec le principe selon lequel les travailleurs devraient pouvoir constituer des organisations de leur choix et s'y affilier.
    • c) En ce qui concerne la procédure prescrite pour les scrutins sur l'adoption des clauses de sécurité syndicale en application de la loi, après la période transitoire, le comité rappelle, à l'attention du gouvernement, que les questions de cette nature ne devraient faire l'objet d'une intervention du gouvernement que pour assurer le respect des règles démocratiques au sein du mouvement syndical et, à cet égard, i) il relève la diminution des possibilités de vote résultant de la suppression de la disposition relative aux scrutins postaux; ii) il considère que le choix d'un système de scrutins organisés au niveau de la branche n'est pas de nature à entraver le processus devant aboutir à une décision au sujet des clauses d'affiliation syndicale et n'est donc pas en conflit avec les principes de la liberté syndicale.
    • d) Au sujet du système de scrutin concernant les clauses de sécurité syndicale qui sera créé par la loi après l'expiration de la période transitoire de 18 mois, la loi crée un cadre permettant de prendre une décision au sujet des clauses de sécurité syndicale au moyen de la participation des travailleurs à des scrutins. Le système de scrutin ainsi créé par la loi n'est, en conséquence, pas en conflit avec les principes de la liberté syndicale.
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