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Rapport définitif - Rapport No. 253, Novembre 1987

Cas no 1340 (Maroc) - Date de la plainte: 27-JUIN -85 - Clos

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  1. 171. La présente affaire a déjà fait l'objet de la part du comité d'un rapport intérimaire figurant aux paragraphes 555 à 569 de son 243e rapport adopté par le Conseil d'administration à sa session de février 1986.
  2. 172. En ses sessions de novembre 1986 et de mai 1987, le comité a ajourné l'examen du cas pour lequel il n'avait pas reçu toutes les informations qu'il attendait du gouvernement. Il a signalé au paragraphe 13 de son 251e rapport, approuvé par le Conseil d'administration en mai 1987, qu'étant donné le temps écoulé depuis le dernier examen du cas il attirait l'attention du gouvernement sur le fait que, conformément à la règle de procédure établie au paragraphe 17 de son 127e rapport approuvé par le Conseil d'administration, il pourrait présenter un rapport sur le fond de l'affaire en instance à sa prochaine session, même si les informations attendues du gouvernement n'étaient pas reçues à temps.
  3. 173. Depuis lors le gouvernement n'a toujours pas transmis toutes les informations demandées. Le comité se propose donc d'examiner l'affaire en tenant compte de tous les éléments qui sont à sa disposition actuellement.
  4. 174. Le Maroc n'a pas ratifié la convention (no 87) sur la liberté syndicale et la protection du droit syndical, 1948. En revanche, il a ratifié la convention (no 98) sur le droit d'organisation et de négociation collective, 1949.

A. Examen antérieur du cas

A. Examen antérieur du cas
  1. 175. Lors de son dernier examen du cas, à sa session du mois de février 1986, le comité, ayant tenu compte des observations présentées par les plaignants dans des communications datées des 27 et 29 juin 1985 et par le gouvernement dans des communications datées du 27 novembre 1985 et 23 janvier 1986, avait observé que 11 personnes avaient été condamnées à des peines de deux à quatre mois d'emprisonnement pour fait de grève, à la suite d'un conflit du travail qui avait éclaté entre les mineurs d'Al Hammam et la direction de la mine appartenant à l'Omnium nord-africain en juin 1985.
  2. 176. Le comité avait observé que les versions des plaignants et du gouvernement relatives à ce conflit étaient contradictoires. En effet, selon les plaignants, des mineurs ayant été injustement accusés d'avoir égaré des explosifs avaient été emprisonnés puis relâchés après que les explosifs qui avaient disparu eussent été retrouvés. Par la suite, les responsables syndicaux de la mine ayant vainement demandé à la direction de créer un service de contrôle de la circulation et de la manipulation des explosifs avaient décidé, face au refus de la direction de créer un tel service, de déclencher un arrêt de travail à partir du 6 juin 1985. La direction s'était refusée à négocier et avait rétorqué en faisant procéder à l'arrestation de plusieurs membres du bureau syndical de la mine, ainsi qu'à celle d'un certain nombre de militants syndicaux. Elle avait également recruté de nouveaux travailleurs pour remplacer les grévistes.
  3. 177. En revanche, selon le gouvernement, premièrement le conflit avait été réglé à la suite d'un accord intervenu entre les parties, deuxièmement, s'il était exact que 11 grévistes avaient été condamnés à des peines d'emprisonnement de deux à quatre mois, les raisons de ces condamnations tenaient à ce que les mineurs qui étaient à l'origine de la plainte avaient attaqué la mine et contraint les autres mineurs qui poursuivaient le travail à s'associer à leur action de grève. Toujours d'après le gouvernement, les forces publiques étaient intervenues pour rétablir l'ordre et les principaux responsables de la situation avaient été déférés en justice.
  4. 178. Dans ces conditions, à sa session de février 1986, le comité avait recommandé au Conseil d'administration d'observer que, d'après le gouvernement, le conflit du travail à l'origine de la plainte avait trouvé une solution à la satisfaction des parties. Il avait cependant regretté que 11 personnes aient été condamnées à des peines d'emprisonnement à l'occasion d'une grève. Afin de se prononcer en toute connaissance de cause, il avait prié le gouvernement de transmettre le texte des jugements rendus dans cette affaire et de fournir des informations sur les conséquences de la condamnation des grévistes à l'égard de leur emploi. En tout état de cause le comité avait rappelé l'importance qu'il attachait à la grève comme moyen légitime de défense des intérêts économiques et sociaux des travailleurs. Il avait souligné que l'utilisation d'une main-d'oeuvre étrangère à l'entreprise pour remplacer les grévistes comportait un risque d'atteinte au droit de grève. Enfin, il avait indiqué que, face à un mouvement de grève, les autorités publiques ne devaient recourir à la force publique que dans des situations où l'ordre public était sérieusement menacé.

B. Evolution ultérieure du cas

B. Evolution ultérieure du cas
  1. 179. A sa session de novembre 1986 (voir paragr. 10 de son 246e rapport), le comité avait noté que, dans une communication du 17 octobre 1986, le gouvernement indiquait que les travailleurs de la mine d'Al Hammam poursuivis pour trouble de l'ordre public et entrave à la liberté du travail et condamnés en dernier ressort à des peines d'emprisonnement, avaient été licenciés par leur employeur pour faute lourde sanctionnée pénalement par les juridictions compétentes. Le gouvernement ajoutait que l'employeur leur avait toutefois consenti une prime spéciale suite à leur licenciement. Regrettant que la copie des jugements condamnant les grévistes n'ait pas été communiquée le comité avait à nouveau demandé au gouvernement de transmettre la copie desdits jugements pour lui permettre de se prononcer dans cette affaire en pleine connaissance de cause.
  2. 180. Depuis lors le gouvernement n'a toujours pas fourni la copie des jugements en question.

C. Conclusions du comité

C. Conclusions du comité
  1. 181. Le comité rappelle une fois encore que le but de l'ensemble de la procédure instituée à l'OIT pour l'examen des allégations en violation de la liberté syndicale est d'assurer le respect des libertés syndicales en droit comme en fait. Si la procédure protège les gouvernements contre des accusations déraisonnables ceux-ci doivent reconnaître à leur tour l'importance qu'il y a, pour leur propre réputation, à ce qu'ils présentent, en vue d'un examen objectif, des réponses détaillées aux allégations formulées à leur encontre. Il a toujours été admis que les réponses des gouvernements contre lesquels des plaintes étaient présentées ne devaient pas se limiter à des observations de caractère général. (voir premier rapport du Comité, paragr. 31)
  2. 182. Dans le présent cas le comité ne peut que regretter à nouveau que, malgré ses demandes réitérées, le gouvernement n'ait toujours pas communiqué les décisions de justice qui ont été prononcées contre les membres du bureau syndical de la mine condamnés à des peines de deux à quatre mois d'emprisonnement à l'occasion d'une grève. En l'absence de ces décisions, le comité n'est pas en mesure de se prononcer sur le caractère pacifique ou non de la grève en question, ni sur les faits précis pour lesquels les syndicalistes ont été jugés et condamnés.
  3. 183. Néanmoins, le comité se doit de rappeler sur le plan des principes que son opinion constante a toujours été que les autorités ne devraient pas recourir à des mesures d'emprisonnement pour le simple fait d'avoir organisé ou participé à une grève pacifique, et que la protection contre les actes de discrimination antisyndicale doit notamment s'appliquer en ce qui concerne les actes ayant pour but de congédier un travailleur. Le comité estime qu'une protection contre des actes de représailles pour fait de grève serait particulièrement souhaitable en ce qui concerne les délégués syndicaux étant donné que, pour pouvoir remplir leurs fonctions en pleine indépendance, ils doivent avoir la garantie qu'ils ne subiront pas de préjudices en raison du mandat qu'ils détiennent. De l'avis du comité par contre une législation qui permet dans la pratique aux employeurs, à condition qu'ils versent l'indemnité prévue par la loi en cas de licenciement, de licencier un travailleur, même si le motif réel de cette mesure est son affiliation ou son activité syndicale, ne constitue pas une protection suffisante contre les actes de discrimination antisyndicale visés par la convention no 98 ratifiée par le Maroc.

Recommandation du comité

Recommandation du comité
  1. 184. Au vu des conclusions qui précèdent, le comité invite le Conseil d'administration à approuver les recommandations suivantes:
    • a) Le comité attire l'attention du gouvernement sur la nécessité de coopérer pleinement à la procédure en transmettant sans délai toutes les informations demandées, y compris les jugements.
    • b) Le comité demande au gouvernement de s'efforcer d'obtenir la réintégration dans leur emploi des mineurs qui auraient été licenciés pour faits de grève et de le tenir informé des résultats auxquels il sera parvenu. c) Le comité rappelle le principe selon lequel les autorités ne devraient pas recourir à des mesures d'emprisonnement pour le simple fait d'avoir organisé ou participé à une grève pacifique.
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