ILO-en-strap
NORMLEX
Information System on International Labour Standards

Rapport intérimaire - Rapport No. 254, Mars 1988

Cas no 1417 (Brésil) - Date de la plainte: 25-JUIN -87 - Clos

Afficher en : Anglais - Espagnol

  1. 493. La plainte de la Confédération internationale des syndicats libres figure dans une communication du 25 juin 1987. La CISL a présenté de nouvelles allégations dans une communication du 26 octobre 1987. Le gouvernement a envoyé ses observations dans une communication du 25 janvier 1988.
  2. 494. Le Brésil n'a pas ratifié la convention (no 87) sur la liberté syndicale et la protection du droit syndical, 1948; en revanche, il a ratifié la convention (no 98) sur le droit d'organisation et de négociation collective, 1949.

A. Allégations de l'organisation plaignante

A. Allégations de l'organisation plaignante
  1. 495. Dans sa communication du 25 juin 1987, la confédération plaignante allègue que, pour empêcher les travailleurs du secteur maritime d'exercer leur droit de grève, le gouvernement a ordonné aux troupes de la marine brésilienne d'occuper tous les ports, enfermant ainsi les grévistes sur leur lieu de travail. En outre, les travailleurs des raffineries de pétrole de l'entreprise Petrobas ayant annoncé un arrêt de travail d'une journée, l'armée brésilienne ainsi que la police fédérale et la police militaire de divers Etats ont occupé les raffineries avec des chars de combat. Ces événements s'inscrivent dans un contexte de baisse du pouvoir d'achat des travailleurs de 60 pour cent due à la politique salariale du gouvernement.
  2. 496. Dans sa communication du 26 octobre 1987, la confédération plaignante allègue l'assassinat de Mauro Pires, dirigeant du Syndicat des conducteurs de véhicules et assimilés de San Andrès, le 4 septembre 1987, des coups et blessures portés contre le dirigeant syndical José Barbosa dos Santos par deux personnes qui ont ensuite pris la fuite en voiture, attentat dont l'intéressé est sorti indemne, et des menaces de mort contre le dirigeant Paulo Pereira proférées par téléphone. Une des hypothèses avancées pour expliquer les faits allégués serait l'existence d'un groupe armé paramilitaire levé par les employeurs pour éliminer les militants du Syndicat des conducteurs de véhicules et assimilés.

B. Réponse du gouvernement

B. Réponse du gouvernement
  1. 497. Dans sa communication du 25 janvier 1988, le gouvernement déclare que les activités des travailleurs du secteur pétrolier et du secteur maritime sont, aux termes de la loi, des activités essentielles, puisqu'elles visent à approvisionner le pays en combustibles et en denrées alimentaires, et que les activités maritimes et portuaires sont des activités intéressant la sécurité nationale.
  2. 498. Le gouvernement précise que, dans le cas de l'entreprise Petrobas, en situation de "grève dissimulée", les travailleurs occupaient les postes de travail et paralysaient les activités. La présence de l'armée a donc eu pour objet de protéger le patrimoine de l'entreprise (patrimoine public puisqu'il s'agit d'une entreprise d'économie mixte) et de garantir l'accès des non-grévistes à leurs postes de travail. Toutefois, il n'y a pas eu d'incidents impliquant les dirigeants syndicaux ou les grévistes.
  3. 499. En ce qui concerne les travailleurs maritimes, il a été fait appel à la marine de guerre pour protéger les installations portuaires, qui sont patrimoine public, et pour garantir l'approvisionnement des diverses villes ainsi que l'accès des non-grévistes à leur travail, des accords particuliers ayant d'ailleurs été conclus avec certaines entreprises. Dans ce cas non plus il n'y a pas eu d'incidents. Il faut signaler aussi que la grève a été déclarée illégale par la juridiction du travail.

C. Conclusions du comité

C. Conclusions du comité
  1. 500. Le comité observe, dans la présente plainte, que la confédération plaignante allègue que des grèves annoncées ou déclenchées dans le secteur pétrolier et dans le secteur portuaire et maritime ont été réprimées par les forces armées, qui ont occupé les installations des entreprises en cause.
  2. 501. Le gouvernement rétorque qu'il s'agit d'activités essentielles et que l'intervention de l'armée et de la marine a visé à protéger les installations des entreprises, à assurer l'approvisionnement des villes et à garantir la liberté du travail. A cet égard, le comité observe qu'aux termes de la législation en vigueur, et plus particulièrement de l'article 1 du décret-loi no 1632 du 4 août 1978, "intéressent la sécurité nationale, parmi les activités essentielles où la grève est interdite par la Constitution, les activités relatives aux services ... de l'industrie pétrolière ... et aux manutentions portuaires ...".
  3. 502. Le comité a signalé à maintes reprises (voir, par exemple, 226e rapport, cas no 1166 (Honduras), paragr. 343) que, la grève étant l'un des moyens essentiels dont les travailleurs et leurs organisations disposent pour défendre leurs intérêts professionnels, elle ne peut être interdite ou soumise à des restrictions importantes que dans la fonction publique et dans les services essentiels au sens strict du terme; par fonctionnaires publics, il ne faut entendre que ceux qui agissent en tant qu'organes de la puissance publique, et les services essentiels doivent être compris comme ceux dont l'interruption mettrait en danger, dans l'ensemble ou dans une partie de la population, la vie, la sécurité ou la santé de la personne. En effet, si la législation retenait une définition trop extensive de la fonction publique ou des services essentiels, le principe relatif aux secteurs d'activité dans lesquels la grève peut être limitée,(voire interdite, perdrait tout son sens. Or les travailleurs des entreprises pétrolières ou des docks ne sont pas des fonctionnaires publics au sens défini plus haut et n'exercent pas non plus une activité essentielle au sens strict du terme. (Voir, par exemple, Liberté syndicale et négociation collective, Etude d'ensemble de la Commission d'experts pour l'application des convention et recommandations, Conférence internationale du Travail, 69e session, 1983, rapport III (partie 4 B), paragr. 214, et 233e rapport du comité, cas no 1225 (Brésil), paragr. 668.) Dans ces conditions, le comité considère que l'interdiction de la grève dans le secteur pétrolier et dans les ports édictée par le décret-loi no 1632 du 4 août 1978 est contraire aux principes de la liberté syndicale.
  4. 503. Enfin, le comité observe que le gouvernement n'a pas répondu aux allégations contenues dans la communication de la CISL du 26 octobre 1987 relatives, notamment, à l'assassinat du dirigeant syndical Mauro Pires.

Recommandation du comité

Recommandation du comité
  1. 504. Au vu des conclusions intérimaires qui précèdent, le comité invite le Conseil d'administration à approuver les recommandations suivantes:
    • a) Le comité demande au gouvernement de prendre des mesures en vue de modifier la législation, en particulier le décret-loi no 1632 du 4 août 1978, de sorte que la liste des activités où la grève est interdite soit circonscrite aux services essentiels au sens strict du terme (à savoir les services dont l'interruption mettrait en danger, dans l'ensemble ou dans une partie de la population, la vie, la sécurité ou la santé de la personne).
    • b) Le comité demande au gouvernement de répondre aux allégations contenues dans la communication de la CISL du 26 octobre 1987 relatives, notamment, à l'assassinat du dirigeant syndical Mauro Pires.
© Copyright and permissions 1996-2024 International Labour Organization (ILO) | Privacy policy | Disclaimer