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Rapport intérimaire - Rapport No. 264, Mars 1989

Cas no 1454 (Nicaragua) - Date de la plainte: 07-JUIN -88 - Clos

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  1. 2. Le comité est saisi de différentes plaintes en violation de la liberté syndicale et du droit d'association au Nicaragua déposées par la Confédération mondiale du Travail (CMT) et la Confédération internationale des syndicats libres (CISL), ainsi que par l'Organisation internationale des employeurs (OIE), et d'une plainte relative à la non-observation par le Nicaragua des convention (no 87) sur la liberté syndicale et la protection du droit syndical, 1948, (no 98) sur le droit d'organisation et de négociation collective, 1949, (no 144) sur les consultations tripartites relatives aux normes internationales du travail, 1976, présentée par plusieurs délégués employeurs à la 73e session (1987) de la Conférence, en vertu de l'article 26 de la Constitution de l'OIT.
  2. 3. Le comité soumet à l'approbation du Conseil d'administration un rapport sur ces cas en instance et la plainte présentée en vertu de l'article 26 de la Constitution de l'OIT.
  3. 4. Depuis plusieurs années, le Comité de la liberté syndicale est saisi de diverses plaintes en violation de la liberté syndicale et du droit d'organisation au Nicaragua. D'autre part, dans une communication du 17 juin 1987, plusieurs délégués employeurs à la 73e session (1987) de la Conférence internationale du Travail ont présenté une plainte en vertu de l'article 26 de la Constitution de l'OIT contre le gouvernement du Nicaragua pour violation de la convention (no 87) sur la liberté syndicale et la protection du droit syndical, 1948, de la convention (no 98) sur le droit d'organisation et de négociation collective, 1949, et de la convention (no 144) sur les consultations tripartites relatives aux normes internationales du travail, 1976.
  4. 5. Le comité a examiné ces affaires à plusieurs reprises et, pour la dernière fois, en novembre 1988 (voir 261e rapport, approuvé par le Conseil d'administration à sa 241e session de novembre 1988), sur la base des informations recueillies sur place du 29 septembre au 4 octobre 1988 par une mission d'étude dirigée par M. Fernando Uribe Restrepo, membre de la Commission d'experts pour l'application des conventions et recommandations.
  5. 6. Depuis lors, l'Organisation internationale des employeurs (OIE) a soumis de nouvelles allégations dans des communications des 22 décembre 1988 et 23 janvier 1989. Le gouvernement a transmis des observations dans des communications des 3 janvier ainsi que des 3, 8, 13, 15 et 16 février 1989.

A. Examen antérieur des cas

A. Examen antérieur des cas
  1. 7. Lors de son examen des cas en novembre 1988, le Conseil d'administration avait approuvé les recommandations suivantes du comité:
    • "a) Le comité prend note du rapport de la mission d'étude effectuée au Nicaragua ainsi que des facilités que les autorités ont accordées au représentant du Directeur général pour mener à bien sa mission. Il déplore cependant que le représentant du Directeur général n'ait pas reçu l'autorisation de rencontrer l'une des personnes détenues avec laquelle la mission avait demandé de s'entretenir.
    • b) Le comité demande au gouvernement de fournir une copie du texte du jugement qui sera rendu dans le cas de syndicalistes de la CUS actuellement détenus au système pénitentiaire "Zona franca" de Managua.
    • c) Le comité demande au gouvernement d'envisager l'adoption de mesures d'amnistie ou de réduction de peines en faveur de MM. Milton Silva Gaitán et Arcadio Ortíz Espinoza, syndicalistes qui avaient été condamnés à des peines de cinq et six ans de prison.
    • d) Le comité demande à la Confédération mondiale du travail de fournir des informations complémentaires sur les circonstances de l'arrestation de MM. Anastasio Jimenez Maldonado, Justino Rivera, Eva Gonzales et Eleazar Marenco.
    • e) Le comité demande au gouvernement de fournir des informations détaillées sur l'arrestation des syndicalistes Luis Alfaro Centeno, Pastor García Matey, Mariano Romero Melgare, Dámaso Gonzáles Sánchez, Jesús Cardenas Ordónez, Rafael Ordónez Melgara et Miguel Valdivia (faits concrets à l'origine des arrestations, texte des jugements, lieu de détention).
    • f) Concernant les arrestations opérées à l'occasion d'une grève de la faim déclenchée par le Congrès permanent des travailleurs, le comité rappelle à l'attention du gouvernement que l'arrestation par les autorités de syndicalistes contre lesquels aucun chef d'inculpation n'est relevé entraîne des restrictions à la liberté syndicale et que les gouvernements devraient prendre des dispositions afin que les autorités reçoivent des instructions appropriées pour prévenir le risque que comportent pour les activités syndicales les mesures d'arrestation.
    • g) Au sujet des assauts menés contre des locaux syndicaux et des menaces exercées contre des syndicalistes, le comité rappelle que de tels agissements créent un climat de crainte parmi les syndicalistes fort préjudiciable à l'exercice des activités syndicales et que les autorités, lorsqu'elles sont informées de tels faits, devraient sans tarder faire procéder à une enquête pour déterminer les responsabilités afin que les coupables soient sanctionnés.
    • h) Au sujet des mesures prises à la suite de la manifestation de Nandaime, le comité estime, compte tenu du caractère politique de cette manifestation, qu'il appartient à d'autres instances internationales jouissant d'une compétence générale en matière de droits de l'homme d'examiner cette affaire.
    • i) Au sujet de la confiscation de biens, le comité estime que ces mesures semblent avoir frappé particulièrement les dirigeants et membres du COSEP. Il considère que l'ensemble des dispositions relatives à l'indemnisation des confiscations de terres devraient être revues pour assurer une compensation réelle et juste des pertes subies par les propriétaires, et que le gouvernement devrait rouvrir les dossiers d'indemnisation à la demande des personnes qui estiment avoir été spoliées.
    • j) Au sujet de la condamnation de M. Alegría, le comité exprime sa préoccupation devant la procédure suivie dans cette affaire et devant l'extrême sévérité de la peine prononcée en première instance. Le comité exprime le ferme espoir que la Cour d'appel de Managua réexaminera ce cas avec toute l'attention et l'indépendance nécessaires. Il demande au gouvernement de fournir une copie de l'arrêt de la Cour d'appel lorsqu'il sera prononcé.
    • k) En ce qui concerne les libertés publiques liées à l'exercice des droits syndicaux, le comité note que des restrictions excessivement sévères subsistent encore et il demande donc au gouvernement de mettre à profit le processus de paix engagé au Nicaragua pour adopter une législation garantissant pleinement l'exercice des libertés publiques et élargissant les garanties judiciaires.
    • l) Au sujet des consultations tripartites en matière de normes internationales du travail, le comité demande au gouvernement de constituer et de réunir le plus vite possible une commission consultative en la matière et d'y associer toutes les organisations d'employeurs et de travailleurs. Il lui demande de fournir des informations sur la constitution et les réunions de cette commission.
    • m) Au sujet de la législation syndicale, le comité demande instamment au gouvernement d'associer l'ensemble des organisations de travailleurs et d'employeurs ainsi que, comme le gouvernement l'a déjà accepté, le BIT à l'élaboration du nouveau Code du travail qu'il entend préparer, et il exprime le ferme espoir que le gouvernement pourra faire état très prochainement de progrès substantiels sur une nouvelle législation conforme aux conventions nos 87 et 98.
    • n) Compte tenu des conclusions ainsi formulées, le comité observe que la situation des organisations d'employeurs et de travailleurs au Nicaragua pose des problèmes importants en relation avec plusieurs principes fondamentaux en matière de liberté d'association et de liberté syndicale. Le comité estime donc que le gouvernement doit prendre dans les délais les plus brefs des mesures concrètes pour appliquer pleinement les conventions sur la liberté syndicale qu'il a ratifiées. Ces mesures devraient couvrir d'un côté l'ensemble des problèmes qui se posent en droit et qui concernent aussi bien la préparation d'un nouveau Code du travail que l'adoption d'une législation garantissant le plein exercice des libertés publiques. Ces mesures d'ordre juridique devraient être accompagnées de mesures concernant des situations de fait, telles que, en premier lieu, la libération des dirigeants d'organisations d'employeurs et de travailleurs actuellement détenus. Au cas où le gouvernement ne fournirait pas, d'ici la prochaine session du comité en février 1989, des informations prouvant un changement d'attitude en ces domaines et une volonté manifeste de réaliser des progrès dans la situation des organisations d'employeurs et de travailleurs et de leurs dirigeants et membres, le comité se verrait dans la nécessité de remettre l'affaire au Conseil d'administration, en lui recommandant la constitution d'une commission d'enquête, conformément à l'article 26, paragraphe 3, de la Constitution."

B. Nouvelles allégations

B. Nouvelles allégations
  1. 8. Dans sa communication du 22 décembre 1988, l'OIE allègue que le 13 octobre 1988 le ministère de l'Intérieur a interdit, pour une durée illimitée, le programme radiodiffusé par le Conseil supérieur de l'entreprise privée (COSEP), intitulé "Le Nicaraguayen" sur les ondes de Radio Mundial. Selon l'OIE, ce programme passe en revue les faits saillants de la situation économique et sociale du pays et suggère les solutions possibles auxquelles le COSEP et ses membres désirent collaborer.
  2. 9. L'OIE signale en outre que, le 2 novembre 1988, également sur ordre du ministère de l'Intérieur, le programme "Seis en Punto" diffusé sur les ondes de Radio Corporación a été interdit sans limitation de durée. L'OIE précise que le directeur de Radio Corporación et du programme interdit est M. José Castillo Oseja, membre en vue du COSEP qui a déjà été victime du régime à plusieurs reprises et notamment de voies de fait de la part du ministre de l'Intérieur le 29 avril 1988.
  3. 10. L'OIE rappelle que Radio Corporación, Radio Católica, Radio Noticias et Radio Mundial avaient déjà été fermées en mai 1988 et que Radio Corporación et Radio Mundial ainsi que huit autres radios avaient été menacées de fermeture en juillet 1988. De plus, La Prensa, déjà fermée pour deux semaines en juillet 1988, est régulièrement menacée de nouvelles fermetures. Ces faits prouvent, selon l'OIE, que l'attitude répressive du gouvernement en matière d'information reste inchangée.
  4. 11. Concernant le cas de M. Mario Alegría, directeur d'un institut de recherche du COSEP, condamné à seize ans de prison, l'OIE proteste contre le fait que, outre que l'instruction n'a pas respecté les droits de la défense, par exemple en recueillant des aveux des accusés dans des conditions illégales, sa détention se prolonge sans que la juridiction d'appel saisie de son recours ait statué, bien que les délais fixés par le Code de procédure pénale soient largement écoulés.
  5. 12. Dans sa communication du 23 janvier 1989, l'OIE allègue que le 9 janvier 1989 le gouvernement a ordonné la fermeture, sans limitation de durée, du programme Cinco en punto, diffusé par Radio Corporación. Le programme est accusé d'avoir transmis des nouvelles concernant le licenciement de fonctionnaires du ministère de l'Intérieur. Selon l'OIE, les nouvelles en question avaient déjà été transmises par des radios progouvernementales sans qu'en soit ordonnée la fermeture. L'OIE ajoute que, devant l'évidence de cette mesure arbitraire, le gouvernement a été obligé de rapporter cette mesure.

C. Réponses du gouvernement

C. Réponses du gouvernement
  1. 13. Dans sa communication du 3 janvier 1989, le gouvernement déclare souhaiter informer le comité de l'exécution d'un ensemble de mesures qui ont été prises dans le pays comme l'expression concrète de la souplesse du gouvernement et du désir qui l'anime de promouvoir une amélioration des relations existant entre les différents secteurs et forces sociales, économiques et politiques de la société nicaraguayenne.
  2. 14. Dans ce contexte, le gouvernement et les autorités supérieures du travail ont gardé à l'esprit les recommandations et suggestions formulées par le Conseil d'administration à sa session de novembre 1988, ainsi que les opinions avancées par la mission d'étude qui s'est rendue au Nicaragua. Ainsi, le gouvernement fait état de diverses mesures qui ont été adoptées pendant le mois de décembre 1988.
  3. 15. Le gouvernement signale tout d'abord que, malgré la nature strictement politique de l'affaire et la culpabilité prouvée de l'intéressé, il a décidé de remettre en liberté M. Carlos Humbres. Le gouvernement a ainsi démontré sa souplesse et sa volonté politique de réaliser la paix, dans l'esprit que ce geste sera apprécié par les secteurs qui se sont prêtés au projet d'agression contre le Nicaragua. Il s'agit là d'une vive expression du désir de la Révolution d'établir un cadre de consensus national dans lequel toutes les forces du pays pourraient apporter leur contribution à la reconstruction de la nation.
  4. 16. Dans le même esprit, le gouvernement a également remis en liberté les personnes qui avaient été impliquées dans la violation des lois sur l'ordre public pendant les événements de Nandaime. Ces libérations doivent aussi être considérées comme l'expression concrète de la souplesse du gouvernement et de sa disposition à soutenir et approfondir un dialogue politique avec tous les secteurs de la nation dans la recherche d'un consensus en vue d'affronter les tâches de reconstruction de la patrie qui souffre actuellement des effets économiques de la guerre d'agression et de l'ouragan Juana. Bien qu'il n'y ait aucun doute quant au fait que les lois aient été violées par les intéressés, le gouvernement a estimé nécessaire de faire des pas concrets pour créer un climat national en vue d'un dialogue mûr et constructif.
  5. 17. Le gouvernement ajoute que, dans son message pour l'année nouvelle, le Président de la République a lancé un nouvel appel à tous les secteurs économiques, sociaux et politiques du pays pour réaliser un dialogue effectif sur la base du projet mutuel afin qu'ils assument, dans une perspective patriotique, les tâches et responsabilités qui découlent de la reconstruction nationale en ce moment.
  6. 18. Par ailleurs, les autorités du travail préparent actuellement quelques réformes législatives qui permettraient de corriger de façon définitive quelques problèmes de compatibilité entre la législation nationale et les conventions internationales du travail. Ces réformes législatives seront mises en oeuvre indépendamment du fait que les efforts pour modifier toute la législation du travail par un nouveau Code du travail représenteront évidemment une tâche de plus grande envergure dans laquelle doivent être menées à bien diverses étapes de travail liées aux consultations avec les organisations d'employeurs et de travailleurs et les discussions à l'Assemblée nationale. Le gouvernement a l'intention de tenir le BIT informé de la progression des efforts entrepris pour la modification de certaines dispositions que la commission d'experts et la mission d'étude avaient suggéré d'amender.
  7. 19. Le gouvernement estime que, de cette manière et dans le cadre des efforts nationaux qu'il déploie pour trouver des possibilités de dialogue constructif et de consensus entre les divers secteurs, il donne des réponses concrètes aux opinions, suggestions et critères que le Conseil d'administration et d'autres instances de l'OIT ont présentés aux autorités. Le gouvernement réitère sa volonté de continuer à approfondir la recherche de points d'accord entre les différents secteurs et de consolider ainsi les diverses expressions du tripartisme qui existent actuellement au Nicaragua. Conformément à sa pratique, le gouvernement tiendra l'OIT informée des résultats qui seront obtenus.
  8. 20. Dans ses communications des 3 et 8 février 1989, le gouvernement précise qu'il existe actuellement quatre projets de Code du travail élaborés l'un par le gouvernement et les autres par divers mouvements d'opposition (partis politiques et une centrale syndicale). Ces projets seront présentés pour discussion et approbation éventuelle lors de la prochaine session parlementaire. La discussion du Code du travail occupe une place prépondérante dans l'ordre du jour de la prochaine session de l'Assemblée nationale. Celle-ci a entrepris des consultations avec les organisations d'employeurs et de travailleurs du pays. L'approbation du nouveau Code du travail a été déclarée prioritaire par l'Assemblée et constitue un point de l'ordre du jour de la session 1989-90.
  9. 21. Le gouvernement ajoute que le ministère du Travail met en oeuvre un organisme de concertation institutionnelle, entre les travailleurs et les employeurs sans aucune distinction, pour discuter de manière plus rapide les problèmes sociaux qui les concernent.
  10. 22. Le gouvernement précise, au sujet de l'application de la convention no 144, que depuis le mois de janvier 1989, le processus de consultations tripartites s'est approfondi dans le cadre de la concertation nationale. Le Président de la République, le ministre de l'Industrie, de l'Economie et du Commerce et le ministre du Développement agricole et de la Réforme agraire se sont entretenus avec tous les groupements d'employeurs des secteurs de l'industrie, du commerce et de l'agriculture. Ils se sont également réunis avec les centrales syndicales en vue de définir le cadre d'intégration à la reconstruction économique du pays. Ces rencontres ont abouti à un ensemble de garanties politiques et juridiques à l'activité des entreprises privées, à la formation d'entreprises mixtes à capital privé et étatique et à la création de mécanismes permanents de consultation avec ces agents de l'activité économique nationale. Le gouvernement estime que ces initiatives ont créé un climat nouveau de confiance. Le COSEP, par son dirigeant M. Gurdían, a conseillé à ses affiliés de participer à tous les dialogues et réunions avec les autorités du gouvernement dans la recherche de formules d'accord et de concertation.
  11. 23. Au sujet des confiscations de terres à des employeurs privés, le gouvernement indique que l'application des mesures juridiques de confiscation a été réduite depuis 1986. En 1986, 460 propriétés ont été visées, en 1987, 150 et en 1988 seulement 6. Dans son message devant l'Assemblée nationale du 30 janvier 1989, le Président de la République a annoncé qu'il n'y aurait plus de confiscations de terres car une première étape de la réforme agraire a été conclue et que l'on doit maintenant consolider l'exploitation productive de la terre redistribuée au bénéfice de 120.000 familles paysannes. Le gouvernement indique que la structure actuelle des terres est la suivante: propriété privée (grands propriétaires, coopératives, petits et moyens producteurs): 82 pour cent; secteur étatique: 13 pour cent; terres sans cultures: 5 pour cent.
  12. 24. Dans le cadre de la concertation nationale, défini par le gouvernement pour 1989 et dans un but de reconstruction économique du pays une fois que la guerre a décliné en intensité, le Président de la République a annoncé aux producteurs et entrepreneurs l'octroi d'une "sécurité juridique" sur les propriétés afin de créer un plus grand climat de confiance mutuelle et une crédibilité réciproque. Ce climat est illustré concrètement par la décision du gouvernement et du consortium privé Nicaragua Sugar de résoudre leurs divergences liées à la mise sous contrôle de l'exploitation San Antonio. Le gouvernement a accordé une compensation réaliste aux propriétaires et un ensemble de garanties et d'appuis aux autres entreprises productrices de biens et de services appartenant au même groupe économique.
  13. 25. Le gouvernement rappelle à cet égard que, dans plusieurs cas, le Comité de la liberté syndicale a considéré que "les affaires qui mettent en cause les normes juridiques relatives à la possession et à la propriété des terres ne concernent pas l'exercice des droits syndicaux".
  14. 26. Pour ce qui est de la fermeture des bulletins d'information "Le Nicaraguayen" et "Seis en Punto" par résolution du 31 janvier 1989, la Direction des moyens de communication du ministère de l'Intérieur a accueilli favorablement la demande d'ouverture de ces deux programmes, en réexaminant les cas conformément aux lois en vigueur.
  15. 27. Dans sa communication du 13 février 1988, le gouvernement signale que, dans le cadre des efforts systématiques qu'il déploie pour créer les conditions de coexistence et d'harmonie sociales entre tous les secteurs économiques et qui se sont intensifiés au cours des dernières semaines, les autorités du ministère du Travail présidées par le ministre ont demandé au Président de la République d'examiner spécialement les circonstances et l'état actuel du procès intenté contre M. Alegría afin d'étudier l'application d'une mesure qui, tout en respectant l'ordre juridique national et la pleine indépendance des pouvoirs de l'Etat, permettrait de concrétiser la volonté de conciliation qui anime le gouvernement, indépendamment des éléments de culpabitilité de M. Alegría. Des examens identiques sont faits en ce qui concerne le cas de M. Guillermo Quant, également du COSEP, condamné pour activités d'espionnage. Le gouvernement informera le comité des décisions prochaines qui émaneront de la présidence de la République ou d'autres pouvoirs de l'Etat et qui sans doute pourraient être adoptées dans les jours prochains.
  16. 28. Dans sa communication du 15 février 1989, le gouvernement indique que M. Felipe Martinez, dirigeant de la CUS, a été libéré la dernière semaine de janvier.
  17. 29. Au sujet du tripartisme, le gouvernement déclare prendre les mesures nécessaires pour créer au mois de mars une commission spéciale de consultations tripartites. Le premier thème abordé sera celui de la convention sur l'hygiène et la sécurité adoptée récemment par la Conférence.
  18. 30. Au sujet de la préparation du Code du travail, déjà évoqué dans ses communications précédentes, le gouvernement déclare que les autorités du travail ont donné dans l'élaboration du nouveau Code une importance spéciale aux garanties et sécurités juridiques pour le plein exercice des libertés syndicales. Le gouvernement confirme qu'il demandera l'assistance technique du BIT.
  19. 31. En outre, le gouvernement ajoute que les accords conclus entre les chefs d'Etat d'Amérique centrale, les 13 et 14 février, ont élargi le cadre politique nécessaire pour approfondir un ensemble de mesures tendant à concrétiser efficacement la concertation nationale de tous les secteurs pour la reconstruction économique du pays. Comme conséquence directe de la volonté de paix du gouvernement et des accords en question sera adoptée, dans les prochains jours, une large amnistie qui comprendra le rapatriement ou le retour au pays des éléments liés aux activités armées contre la nation.
  20. 32. Dans sa communication du 16 février 1989, le gouvernement déclare que le 14 février le sommet des Présidents centraméricains a adopté une série d'accords qui auront de profondes répercussions sur la solution des différents problèmes qui ont fait l'objet d'allégations devant le comité. Ces mesures d'ordre politique interne, proposées par le gouvernement pour contribuer à la paix dans la région, concernent toute la gamme des relations juridiques et économiques entre les différents secteurs du pays et le gouvernement. Ainsi, la modification de la loi électorale, la révision des lois sur les moyens de communication, la modification de la composition du Tribunal suprême électoral et l'avancement des élections nationales présidentielles et législatives ainsi que des élections municipales constituent des pas fondamentaux qui ont des conséquences directes sur les contradictions naturelles et les problèmes existant entre les secteurs sociaux et le gouvernement, ouvrant de nouvelles voies de consultation et de compréhension entre ces secteurs. Dans ces conditions, le gouvernement estime important que le comité propose des formules de conciliation dans la conjoncture actuelle afin que soient accordés des délais pour examiner le déroulement de l'application des accords et leur répercussion dans le domaine du travail, au moins jusqu'en juin 1989, avant de proposer des initiatives qui, telle une commission d'enquête, ne bénéficieraient en rien au processus de réconciliation mais qui, au contraire, introduiraient des éléments de tensions.

D. Conclusions du comité

D. Conclusions du comité
  1. 33. Le comité a pris note des réponses apportées par le gouvernement aux diverses recommandations qu'il avait formulées lors de sa session de novembre 1988, mais il doit observer que ces réponses ne couvrent pas certains des points les plus importants qui avaient été soulevés par le comité.
  2. 34. En ce qui concerne l'aspect législatif des cas dont il est saisi, le comité note que le gouvernement prépare actuellement la modification de certaines dispositions législatives qui avaient fait l'objet de commentaires de la Commission d'experts pour l'application des conventions et recommandations dont il tiendra informé le BIT. En outre, les travaux déjà entrepris pour l'adoption d'un nouveau Code du travail se poursuivent. Le comité note en particulier que quatre projets de code seront discutés lors de la prochaine session parlementaire et que, selon le gouvernement, des consultations ont été entreprises avec les organisations d'employeurs et de travailleurs. Le comité note également que, selon le gouvernement, une assistance technique du BIT sera demandée pour la préparation du code. Il note la déclaration du gouvernement selon laquelle une importance spéciale a été donnée dans le projet de code du travail aux garanties et sécurités juridiques pour le plein exercice des libertés syndicales. Le comité rappelle à cet égard l'urgence de l'adoption d'une législation syndicale conforme aux conventions nos 87 et 98 et l'intérêt d'associer dans la préparation de cette législation l'ensemble des organisations de travailleurs et d'employeurs ainsi que le BIT.
  3. 35. Le comité relève que le gouvernement n'a pas fourni d'informations sur les mesures qu'il envisageait de prendre pour adopter une législation garantissant pleinement l'exercice des libertés publiques et élargissant les garanties judiciaires, comme il le lui avait recommandé en novembre 1988.
  4. 36. Le comité prend note des efforts dont a fait état le gouvernement pour consolider le tripartisme et créer un organisme de concertation institutionnelle. Il note en particulier que le gouvernement envisage la création d'une commission spéciale de consultations tripartites qui examinera les questions liées aux normes internationales du travail dès le mois de mars 1989. Le comité demande au gouvernement de fournir des informations précises sur la composition de cette commission et sur l'évolution de ses travaux.
  5. 37. Pour ce qui est des confiscations de terres, le comité prend note des informations fournies par le gouvernement sur la diminution du nombre de ces mesures depuis 1986 et de la déclaration du Président de la République selon laquelle il n'y aurait plus de confiscations de terres. Le comité exprime à nouveau l'espoir que le gouvernement rouvrira les dossiers d'indemnisation à la demande des personnes qui estiment avoir été spoliées.
  6. 38. Au sujet de la fermeture de bulletins d'informations radiophoniques, le comité note que, selon le gouvernement, ces programmes ont été rouverts. Le comité doit exprimer sa préoccupation devant la fréquence des mesures de suspension des organes de presse. Il rappelle l'importance du droit des organisations d'employeurs et de travailleurs d'exprimer des opinions par la voie de la presse.
  7. 39. Pour ce qui concerne les allégations relatives à des détentions, le comité prend note de la libération des personnes qui avaient été arrêtées à la suite d'une manifestation organisée à Nandaime en juillet 1988, à propos de laquelle le comité avait toutefois estimé qu'à cause de son caractère politique elle n'entrait pas dans la compétence du comité. Le gouvernement n'a pas fourni en revanche de réponses aux demandes d'informations adressées par le comité sur la situation de certains syndicalistes détenus. Le comité note que le gouvernement déclare vouloir adopter dans les prochains jours une large amnistie. Il exprime le ferme espoir que cette amnistie couvrira l'ensemble des dirigeants d'organisations d'employeurs et de travailleurs détenus, et il prie le gouvernement de fournir des informations détaillées sur la portée de cette mesure et les personnes concernées par l'amnistie. Le comité note également la déclaration du gouvernement selon laquelle le dossier de M. Alegría, directeur d'un institut du COSEP, a été soumis au Président de la République en vue d'un examen spécial, et il formule le voeu que ceci sera suivi par la rapide mise en liberté de M. Alegría.
  8. 40. Ayant ainsi examiné les diverses questions en instance dans la présente affaire, le comité note avec intérêt que les accords conclus lors du tout récent sommet des chefs d'Etat d'Amérique centrale devraient, s'ils sont suivis d'effets, aboutir à des progrès dans la situation générale au Nicaragua, ce qui pourrait entraîner une évolution positive des questions dont est saisi le comité.
  9. 41. Le comité est conscient qu'en raison de la date extrêmement récente de ces accords le gouvernement n'a pas pu encore fournir d'informations faisant état de mesures concrètes prises à la suite du sommet des chefs d'Etat d'Amérique centrale. Le comité exprime le ferme espoir que ces accords pourront être mis en oeuvre dans les plus brefs délais et que leur application aura des répercussions favorables et immédiates sur l'application des conventions sur la liberté syndicale, tant en fait qu'en droit. Le comité rappelle à cet égard que les mesures que doit prendre le gouvernement pour assurer cette application doivent couvrir la préparation et l'adoption d'un nouveau Code du travail ainsi que d'une législation garantissant pleinement l'exercice des libertés publiques, ainsi que la libération des dirigeants d'organisations d'employeurs et de travailleurs à laquelle le comité attache une importance toute particulière. Le comité demande donc au gouvernement de fournir le plus rapidement possible des informations précises, concrètes et détaillées sur les mesures qui sont prises en ce sens. Entre-temps, le comité invite le Conseil d'administration à charger le Directeur général de prendre les mesures préparatoires appropriées pour que le Conseil soit saisi, dès sa prochaine session, de propositions relatives à la composition d'une commission d'enquête et aux arrangements financiers nécessaires aux travaux de celle-ci au cas où le comité et le Conseil estimeraient insatisfaisantes les informations fournies par le gouvernement et où le Conseil déciderait en conséquence de constituer une telle commission.

Recommandation du comité

Recommandation du comité
  1. 42. Au vu des conclusions intérimaires qui précèdent, le comité invite le Conseil d'administration à approuver les recommandations suivantes:
    • a) Au sujet de l'aspect législatif des cas, le comité note que le gouvernement prépare la modification de certaines dispositions législatives et que quatre projets de code du travail seront discutés par l'Assemblée nationale lors de la prochaine session parlementaire. Le comité rappelle l'urgence de l'adoption d'une nouvelle législation syndicale conforme aux conventions nos 87 et 98 et l'intérêt d'associer dans sa préparation l'ensemble des organisations d'employeurs et de travailleurs ainsi que le BIT.
    • b) Au sujet de l'exercice des libertés publiques et des garanties judiciaires, le comité insiste auprès du gouvernement pour qu'une législation garantissant pleinement ces libertés et élargissant les garanties judiciaires soit adoptée dans les plus brefs délais, et lui demande de fournir des informations sur les mesures qu'il entend prendre à cet égard.
    • c) Au sujet des consultations tripartites, le comité note que le gouvernement envisage la création d'une commission spéciale qui examinera les questions liées aux normes internationales du travail dès le mois de mars 1989. Il demande au gouvernement de fournir des informations précises sur la composition de cette commission et sur l'évolution de ses travaux.
    • d) Au sujet des confiscations de terres, le comité exprime à nouveau l'espoir que le gouvernement rouvrira les dossiers d'indemnisation à la demande des personnes qui estiment avoir été spoliées.
    • e) Au sujet de la fermeture de bulletins d'informations radiophoniques, le comité, tout en notant que, selon le gouvernement, ces programmes ont été rouverts, doit exprimer sa préoccupation devant la fréquence des mesures de suspension des organes de presse. Il rappelle l'importance du droit des organisations d'employeurs et de travailleurs d'exprimer des opinions par voie de presse.
    • f) Au sujet des détentions de dirigeants d'organisations d'employeurs et de travailleurs, le comité note que le gouvernement déclare vouloir adopter une large amnistie dans les jours qui viennent. Le comité exprime le ferme espoir que l'amnistie annoncée couvrira l'ensemble des dirigeants d'organisations d'employeurs et de travailleurs détenus. Il prie le gouvernement de fournir des informations détaillées sur la portée de cette mesure et les personnes concernées par l'amnistie. Il note également la déclaration du gouvernement selon laquelle le dossier de M. Alegría, directeur d'un institut du COSEP, a été soumis au Président de la République, et il formule le voeu que ceci sera suivi par la rapide mise en liberté de M. Alegría.
    • g) Ayant ainsi examiné les diverses questions en instance dans la présente affaire, le comité note avec intérêt que les accords conclus lors du tout récent sommet des chefs d'Etat d'Amérique centrale devraient, s'ils sont suivis d'effets, aboutir à des progrès dans la situation générale au Nicaragua, ce qui pourrait entraîner une évolution positive des questions dont est saisi le comité.
    • h) Le comité est conscient qu'en raison de la date extrêmement récente de ces accords, le gouvernement n'a pas pu encore fournir d'informations faisant état de mesures concrètes prises à la suite du sommet des chefs d'Etat d'Amérique centrale. Le comité exprime le ferme espoir que ces accords pourront être mis en oeuvre dans les plus brefs délais et que leur application aura des répercussions favorables et immédiates sur l'application des conventions sur la liberté syndicale, tant en fait qu'en droit. Le comité rappelle à cet égard que les mesures que doit prendre le gouvernement pour assurer cette application doivent couvrir la préparation et l'adoption d'un nouveau Code du travail ainsi que d'une législation garantissant pleinement l'exercice des libertés publiques ainsi que la libération des dirigeants d'organisations d'employeurs et de travailleurs à laquelle le comité attache une importance toute particulière. Le comité demande donc au gouvernement de fournir le plus rapidement possible des informations précises, concrètes et détaillées sur les mesures qui sont prises en ce sens. Entre-temps, le comité invite le Conseil d'administration à charger le Directeur général de prendre les mesures préparatoires appropriées pour que le Conseil soit saisi, dès sa prochaine session, de propositions relatives à la composition d'une commission d'enquête et aux arrangements financiers nécessaires aux travaux de celle-ci au cas où le comité et le Conseil estimeraient insatisfaisantes les informations fournies par le gouvernement et où le Conseil déciderait en conséquence de constituer une telle commission.
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