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Rapport où le comité demande à être informé de l’évolution de la situation - Rapport No. 284, Novembre 1992

Cas no 1517 (Inde) - Date de la plainte: 09-DÉC. -89 - Clos

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  1. 443. Le comité a déjà examiné ce cas, présenté par la Fédération des associations de visiteurs médicaux de l'Inde (FMRAI), à sa réunion de mai 1991, où il a présenté au Conseil d'administration des conclusions intérimaires. (278e rapport, paragr. 309 à 346, approuvé par le Conseil d'administration à sa 250e session (mai-juin 1991).)
  2. 444. La fédération plaignante a communiqué de nouvelles informations dans une lettre reçue le 2 septembre 1991. Le gouvernement a transmis des observations complémentaires sur ce cas dans une communication du 12 août 1992.
  3. 445. L'Inde n'a ratifié ni la convention (no 87) sur la liberté syndicale et la protection du droit syndical, 1948, ni la convention (no 98) sur le droit d'organisation et de négociation collective, 1949.

A. Examen antérieur du cas

A. Examen antérieur du cas
  1. 446. La FMRAI avait allégué qu'une société pharmaceutique d'Etat, l'Indian Drugs and Pharmaceuticals Ltd. (IDPL), avait exercé des représailles contre la fédération, ses membres et ses dirigeants qui s'étaient attaqués à la corruption; la société se serait livrée à des agissements antisyndicaux suivants: i) mutation en juin 1989 de 20 dirigeants et militants syndicaux, malgré un accord avec l'entreprise; ii) lock-out le 20 août 1989 des membres du syndicat à Calcutta après qu'ils eurent condamné les tentatives de la direction pour créer un syndicat rival; iii) déclaration unilatérale d'illégalité d'une grève légale décidée le 21 août 1989; iv) sanctions sous forme de retenues de salaire contre des travailleurs ayant participé aux mouvements de grève des 21 août et 5 octobre 1989; v) brimades et vexations (blâmes) infligées aux membres et aux dirigeants; vi) refus d'accorder aux dirigeants le droit de prendre des congés pour s'acquitter de leurs obligations syndicales malgré un échange de lettres d'avril 1985 garantissant ces congés spéciaux; vii) suspension unilatérale en septembre 1989 des réunions d'un comité interne des griefs; et viii) révocation unilatérale le 12 octobre 1989, au début des négociations salariales de 1989, de l'accréditation de la fédération et substitution par une "organisation fantoche" nouvellement créée appelée le Syndicat des travailleurs sur le terrain de l'IDPL.
  2. 447. Le gouvernement avait fait valoir les arguments suivants: s'agissant en premier lieu des allégations relatives aux mutations discriminatoires de militants, l'échange de lettres évoqué par le syndicat ne constituait pas un "accord", ce que la FMRAI avait d'ailleurs reconnu lors de poursuites intentées devant la Haute Cour de l'Andhra Pradesh; en deuxième lieu, le lock-out du bureau de l'IDPL à Calcutta se justifiait par le désordre qui régnait alors et par des menaces sérieuses de violence; en troisième lieu, s'agissant du préavis de grève déposé par la FMRAI, la société avait, conformément aux dispositions de la loi de 1947 sur les différends du travail, porté ce cas devant l'instance gouvernementale de conciliation; or le syndicat ne s'était pas présenté à l'audience de conciliation (le gouvernement avait précisé à ce sujet que les grèves étaient illégales tant que la procédure de conciliation était en cours); en quatrième lieu, la déduction de huit jours de salaire pour participation à des grèves illégales était nécessaire pour maintenir la discipline chez les salariés de la société et elle était conforme à la loi sur le paiement des salaires; en cinquième lieu, le blâme était la procédure normale suivie pour ceux qui étaient accusés d'avoir violé des règlements de la société, et il était inexact de prétendre que la direction avait intimidé les responsables et les militants de la FMRAI; en sixième lieu, s'il était vrai que, par le passé, certains travailleurs avaient obtenu des congés supplémentaires à titre officieux pour participer à des tâches syndicales, cet avantage avait été supprimé parce que la FMRAI ne représentait plus la majorité des visiteurs médicaux employés par la société et que le syndicat nouvellement reconnu n'avait pas réclamé cet avantage; en septième lieu, c'était en raison de ce manque de représentativité de la FMRAI que le Syndicat des travailleurs sur le terrain (Field Workers' Union) avait participé aux activités des comités des griefs; enfin, il était inexact de dire que la société avait cessé de reconnaître la FMRAI, alors que la majorité des visiteurs médicaux avait choisi de s'affilier à un autre syndicat accrédité et que la société devait traiter avec la nouvelle organisation.
  3. 448. A sa session de mai-juin 1991, au vu des conclusions intérimaires du comité, le Conseil d'administration avait approuvé les recommandations suivantes:
    • a) Le comité demande au plaignant de fournir dès que possible tous les renseignements en sa possession en ce qui concerne: i) les postes qu'occupaient dans le syndicat les travailleurs mutés en juin 1989 par la direction de l'IDPL; ii) le nombre de travailleurs qui ont refusé le transfert et ont subi des sanctions disciplinaires ou ont été congédiés à cause de ce refus; iii) toute preuve démontrant que les mutations constituaient des actes de discrimination antisyndicale; et iv) les circonstances du lock-out survenu en août 1989 au bureau de l'IDPL à Calcutta.
    • b) Le comité demande au gouvernement de fournir dès que possible des renseignements additionnels suivants: i) les circonstances du lock-out survenu en août 1989 au bureau de l'IDPL à Calcutta; ii) l'issue des procédures judiciaires intentées pour contester les déductions de huit jours de salaire imposées aux travailleurs ayant participé aux grèves des mois d'août et octobre 1989; iii) les dispositions de la loi sur les salaires qui auraient justifié les déductions de salaire; et iv) les preuves démontrant que la majorité des travailleurs de l'IDPL sont membres du Syndicat des travailleurs sur le terrain.
    • c) Le gouvernement devrait sérieusement envisager d'adopter un texte de loi instituant une procédure impartiale pour déterminer la représentativité des syndicats et garantir une protection appropriée des syndicats minoritaires et concurrents.

B. Informations complémentaires de la fédération plaignante

B. Informations complémentaires de la fédération plaignante
  1. 449. Dans une lettre reçue le 2 septembre 1991, la FMRAI communique les informations demandées par le comité: i) sauf pour deux d'entre eux, les travailleurs mutés en juin 1989 étaient tous membres ou responsables de comités locaux et présidents de sections de la FMRAI; ii) trois travailleurs qui avaient refusé la mutation ont apparemment donné leur démission, dix autres qui l'avaient refusée ont été licenciés, sept l'ont acceptée sous les pressions exercées et un fait l'objet d'une suspension sans solde jusqu'à ce que son cas ait été examiné par la Haute Cour de Calcutta; iii) l'absence de tout licenciement collectif antérieur dans l'entreprise avant le début des protestations de la FMRAI contre les agissements de l'IDPL prouve que ces mutations étaient de nature antisyndicale, d'autant plus qu'elles ne touchent que des militants de la FMRAI et que la direction n'a mené aucune enquête préalable avant de les décider; iv) la fédération communique un exemplaire d'une décision prise par la huitième Chambre de la Cour de Calcutta le 21 septembre 1989 dans l'affaire no m/786/89 selon laquelle, d'après le rapport de police, il ne s'est produit aucun trouble de l'ordre public sur les lieux, ce qui prouve que la raison donnée par le gouvernement pour justifier le lock-out d'août 1989 était inexacte. En outre, ajoute la fédération plaignante, la Haute Cour a déclaré le 20 février 1990 que la retenue par l'IDPL de huit jours de salaire pour une journée de grève était illégale et a ordonné le remboursement des sept jours de salaire retenus à tort. Selon le Code de discipline dans l'industrie du gouvernement du Bihâr, communiqué par la FMRAI, le retrait de l'accréditation syndicale par l'employeur est subordonné à l'approbation préalable de la Commission tripartite permanente, dont la décision est sans appel. Ce code précise également que, lorsqu'il y a plusieurs syndicats, celui qui prétend à l'accréditation doit avoir été enregistré depuis au moins un an. La fédération plaignante allègue donc que l'accréditation par l'IDPL du Syndicat des travailleurs sur le terrain était irrégulière puisqu'elle s'est produite avant même l'enregistrement du syndicat.

C. Réponse complémentaire du gouvernement

C. Réponse complémentaire du gouvernement
  1. 450. Le gouvernement joint les observations de la direction de l'IDPL à sa lettre du 12 août 1992. La société en cause dans cette affaire fait tout d'abord remarquer que la FMRAI aurait dû fournir une liste des travailleurs protégés par un statut spécial si elle souhaitait bénéficier des garanties offertes par la loi de 1947 sur les différends du travail. Ces travailleurs ont été mutés conformément à leur statut, ce qu'a confirmé la Haute Cour de l'Andhra Pradesh en appel. Les chiffres donnés par la direction au sujet des mutations correspondent à peu près à ceux fournis par la FMRAI: neuf ont accepté (apparemment les sept cités par la fédération plaignante et les deux non-syndicalistes) et quatorze ont refusé, dont trois ont démissionné et un est en congé de maladie, tandis que les dix autres ont été licenciés à la suite d'une procédure disciplinaire; trois ont fait appel de cette décision de licenciement; l'un de ces appels a été rejeté par la Cour en février 1992 et deux sont encore en instance. La direction nie que les mutations soient des mesures de rétorsion ou aient un caractère antisyndical: elles répondaient à un souci essentiel de gestion et visaient à renforcer les activités commerciales de la société.
  2. 451. En réponse aux demandes faites par le comité lors de son dernier examen du cas, le gouvernement donne les précisions suivantes: i) le lock-out d'août 1990 au bureau de l'IDPL à Calcutta a été décidé pour réagir aux graves troubles de l'ordre public provoqués par certains membres de la FMRAI qui s'opposaient aux mutations (le gouvernement joint un exemplaire de la plainte déposée par la direction de Calcutta auprès de la police, selon laquelle 50 à 60 membres de la FMRAI ont pénétré dans les locaux de la société en criant des slogans et en placardant des affiches, s'en prenant verbalement et physiquement aux membres du personnel, cassant les tables, les verres et les chaises et saccageant documents et bureaux; le magistrat local a ordonné à la police de prendre les mesures de sûreté nécessaires, et notamment de garder les locaux; le lock-out a duré du 20 août au 20 novembre 1989); ii) la Haute Cour a enjoint à la direction de rembourser la part des salaires retenue à cause de la grève d'un jour; tout en se conformant à cette décision, la société a interjeté appel; iii) l'article 9 de la loi de 1936 sur les salaires (copie fournie) autorise les retenues salariales en cas d'absence du travailleur de son poste; iv) la FMRAI a attaqué devant la Haute Cour de Patna l'accord conclu par la direction avec le Syndicat des travailleurs sur le terrain, syndicat qui était enregistré; or le tribunal a jugé que les entités qui ne sont pas parties à un accord avaient la faculté de porter la question devant les autorités du travail; la FMRAI ne l'ayant pas fait, la direction en conclut qu'elle ne dispose que de maigres effectifs.
  3. 452. En ce qui concerne la recommandation du comité faite au paragraphe 346 c), le gouvernement déclare qu'il n'existe pas de législation générale sur l'accréditation des syndicats par la direction des entreprises, et que les projets de loi déposés respectivement en 1978 et 1988 à ce sujet n'ont pas été adoptés. A sa session d'avril 1990, la Conférence indienne tripartite sur le travail a recommandé l'examen par une commission bipartite d'une réforme du système des relations professionnelles, mais les membres de ce comité n'ont pu se mettre d'accord dans leur rapport sur de nombreuses questions importantes. Le ministre du Travail fédéral et celui de l'Etat examinent actuellement la question en vue de l'élaboration d'un projet de loi. Le point litigieux semble être la vérification des effectifs des syndicats par le biais des cotisations retenues à la source ou des votes à scrutin secret.

D. Conclusions du comité

D. Conclusions du comité
  1. 453. La présente plainte porte sur des allégations de discrimination antisyndicale (mutations, licenciements, retenues de salaires pour une grève d'un jour et reconnaissance d'un syndicat rival) de la part de la direction de l'entreprise Indian Drugs and Pharmaceuticals Ltd. (IDPL). Ces actes discriminatoires avaient été pris, selon les plaignants, par mesure de rétorsion contre les tentatives du syndicat visant à mettre à jour les agissements déloyaux et malhonnêtes de l'IDPL. Le gouvernement déclare que les mutations ont répondu à un souci de gestion et que les licenciements ont résulté d'une procédure disciplinaire faisant suite au refus d'accepter ces mutations.
  2. 454. Le comité note que la direction s'est conformée à une décision de justice lui enjoignant de rembourser les salaires retenus en raison d'une grève d'un jour et demande au gouvernement de le tenir informé des résultats de l'appel interjeté contre cette décision par la direction.
  3. 455. Le comité note également que, parmi les travailleurs mutés, dix ont refusé cette mutation et ont été licenciés, deux d'entre eux ayant fait appel de cette décision; ces appels sont en cours d'examen. D'après les informations complémentaires communiquées par les parties, il apparaît au comité que ces mutations et licenciements, de même que le lock-out de Calcutta, visaient un syndicat précis, la FMRAI et les relations de l'entreprise avec l'autre syndicat confirment cette situation. Le comité attire l'attention du gouvernement sur la nécessité d'assurer une protection adéquate contre les actes de discrimination antisyndicale.
  4. 456. Le gouvernement ne soumet aucun élément (tel que des listes de retenues de cotisations à la source ou l'organisation d'un scrutin) prouvant que la majorité des travailleurs de l'IDPL ont adhéré au syndicat rival qui a conclu un accord sur la révision des salaires avec la direction, mais affirme simplement que la FMRAI n'a pas suivi l'avis de la Haute Cour de Patna, qui lui suggérait de porter le différend devant les autorités du travail compétentes. Cette situation conduit le comité à conclure - comme il l'a déjà fait dans son premier examen du cas - que la législation nationale devrait prévoir la reconnaissance aux fins de la négociation collective des organisations représentatives des travailleurs employés dans une unité de négociation. Dans le passé, le comité a déclaré que, afin d'encourager le développement harmonieux des négociations collectives et d'éviter les conflits, on devrait toujours appliquer, lorsqu'elles existent, les procédures destinées à désigner les syndicats les plus représentatifs aux fins de négociation collective quand on ne sait pas clairement par quels syndicats les travailleurs désirent être représentés. Au cas où ces procédures feraient défaut, les autorités devraient, le cas échéant, examiner la possibilité d'instituer des règles objectives à cet égard. (Recueil, paragr. 244.)
  5. 457. Comme le gouvernement reconnaît que la loi de 1947 sur les conflits du travail ne prévoit ni l'accréditation ni le retrait de l'accréditation des syndicats à cette fin et qu'il déclare que les diverses tentatives de réforme du système de relations professionnelles ont abouti à l'examen actuel de la question par le ministère du Travail fédéral et celui de l'Etat, le comité lui demande de le tenir informé de l'évolution des travaux tendant à l'adoption de cette réforme. Il s'agit là pour le comité d'un point essentiel, car ce cas précis montre que, en l'absence d'une procédure objective de vérification de la représentation majoritaire, il est possible à un syndicat qui a été privé de son accréditation, telle la FMRAI, d'alléguer qu'il n'a pas perdu en fait sa position majoritaire ou qu'il l'a perdue uniquement à cause de manoeuvres déloyales de l'employeur.

Recommandation du comité

Recommandation du comité
  1. 458. Au vu des conclusions qui précèdent, le comité invite le Conseil d'administration à approuver les recommandations suivantes:
    • a) Le comité invite instamment à nouveau le gouvernement à envisager d'adopter un texte de loi instituant une procédure objective pour déterminer la représentativité des syndicats dans le cadre de l'examen actuel de cette question par le ministère du Travail fédéral et par celui de l'Etat.
    • b) Le comité demande au gouvernement de le tenir informé de l'évolution des travaux tendant à l'adoption de cette loi.
    • c) Le comité demande au gouvernement de le tenir informé des résultats de l'appel interjeté par la direction de l'entreprise Indian Drugs and Pharmaceuticals Ltd. au sujet du remboursement des salaires retenus.
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