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Rapport intérimaire - Rapport No. 277, Mars 1991

Cas no 1542 (Malaisie) - Date de la plainte: 24-JUIL.-90 - Clos

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  1. 383. La Fédération internationale des organisations de travailleurs de la métallurgie (FIOM) a présenté une plainte en violation des droits syndicaux contre le gouvernement de la Malaisie dans une communication du 24 juillet 1990. Le gouvernement a envoyé le 9 janvier 1991 ses observations sur cette affaire.
  2. 384. La Malaisie n'a pas ratifié la convention (no 87) sur la liberté syndicale et la protection du droit syndical, 1948; par contre, elle a ratifié la convention (no 98) sur le droit d'organisation et de négociation collective, 1949.

A. Allégations de la fédération plaignante

A. Allégations de la fédération plaignante
  1. 385. Les allégations présentées par la FIOM concernent le refus des autorités de reconnaître la liberté d'association aux employés d'une société japonaise située en Malaisie, la société Hitachi Consumer Products.
  2. 386. La société Hitachi possède une usine en Malaisie qui fait partie du département des produits électriques grand public de la société et qui fabrique des composants des magnétoscopes. L'usine emploie 1.300 personnes dont 85 pour cent de femmes.
  3. 387. Les travailleurs de cette usine ont choisi d'adhérer au Syndicat des travailleurs de l'industrie électrique (EIWU) et d'être représentés par cette organisation. La société a rejeté la demande de reconnaissance syndicale et a licencié huit travailleurs qui avaient milité en faveur de la syndicalisation du personnel. Cela a conduit à une grève de tout le personnel de l'usine qui a duré du 18 au 22 juin 1990.
  4. 388. Alors que la grève était en cours, le gouvernement a annoncé qu'il considérait que les salariés d'Hitachi appartenaient à l'industrie électronique et non électrique. Selon la loi malaisienne, cela signifie qu'ils n'ont pas le droit d'être membres de l'EIWU.
  5. 389. Cette prise de position du gouvernement a conduit à l'annulation de l'ordre de grève. Afin d'être réengagés, tous les travailleurs ont dû signer une lettre d'excuses adressée à la société. Vingt et un travailleurs n'ont pas été réengagés. La fédération plaignante allègue que cette mesure est liée aux activités qu'ils ont menées pour le compte du syndicat.
  6. 390. Selon la fédération plaignante, les travailleurs de l'usine ont rejeté les différentes tentatives de création d'un syndicat d'entreprise et continuent d'affirmer leur préférence pour l'adhésion à l'EIWU. La FIOM souligne également que l'EIWU a organisé avec succès les travailleurs d'établissements similaires, par exemple à l'usine Mitsumi Electronics de Batu Pakat qui assure la production de composants électroniques pour des équipements audio et des ordinateurs.
  7. 391. Enfin, la FIOM fait référence aux plaintes qu'elle a présentées à plusieurs reprises devant le comité à la suite du refus répété du gouvernement de permettre aux travailleurs de l'industrie électronique de créer le syndicat de leur choix ou d'y adhérer. La présente plainte n'est qu'une nouvelle conséquence de ce refus.

B. Réponse du gouvernement

B. Réponse du gouvernement
  1. 392. Dans sa réponse, le gouvernement déclare que la législation de la Malaisie protège le droit des travailleurs de créer un syndicat de leur choix et d'y adhérer, sous réserve que le syndicat en question soit suffisamment représentatif. Cette clause de sauvegarde est énoncée dans les articles 4 et 5 de la loi de 1967 sur les relations professionnelles et dans la Constitution de la Malaisie.
  2. 393. Pour ce qui est de leur structure, les syndicats de Malaisie sont organisés sur la base de regroupements homogènes en fonction de l'activité, de la profession ou du secteur, cela afin d'encourager le développement ordonné des syndicats. Il est primordial de s'assurer que les syndicats sont en mesure de bien comprendre les questions de gestion et de prendre en compte les conditions sociales et économiques du pays.
  3. 394. La structure de base de chaque syndicat est essentiellement déterminée par leurs propres statuts et règles. Dans le cas de l'EIWU, ce syndicat est ouvert aux travailleurs des entreprises fabriquant des produits électriques "complets et finis" tels que des aspirateurs, des ventilateurs, des réfrigérateurs et des postes de télévision.
  4. 395. Conformément à la loi de 1959 sur les syndicats, le directeur général des syndicats a le pouvoir de déterminer la nature des activités de chaque établissement, afin de vérifier que les travailleurs qui y sont occupés répondent bien aux règles d'adhésion à un syndicat donné.
  5. 396. Dans le présent cas, la direction de la société a posé au directeur général la question de la compétence de l'EIWU pour représenter son personnel. La question a été examinée attentivement par les responsables du département qui ont écouté les thèses des deux parties, le syndicat et l'employeur. Sur la base de cet examen, il a été établi que la société fabrique trois types de produits: des transformateurs de retour du spot, des bobines de déviation et des accordeurs électroniques. Ce sont tous des composants de postes de télévision. Il ne s'agit pas de produits électriques complets et finis comme le prévoient les statuts du syndicat. En conséquence, le directeur général a estimé que ce syndicat ne pouvait pas représenter les travailleurs occupés par la société. Cette décision a été prise en toute objectivité et sur la base des faits. Il en va de même pour la décision relative aux travailleurs de l'usine Matsumi de Batu Pakat. Cette dernière décision ne peut être considérée comme un précédent contraignant jouant en faveur des employés d'Hitachi puisque les produits fabriqués par les deux sociétés sont différents.
  6. 397. Il est donc clair que, dans le présent cas, le vrai problème n'est pas de savoir si les travailleurs de l'usine Hitachi se sont vu refuser le droit de se syndiquer, mais plutôt s'ils répondent aux règles d'adhésion à l'EIWU. Après un examen approfondi, le directeur général a estimé que non. Cela ne signifie pas que ces travailleurs n'aient pas le droit de créer un syndicat ou d'adhérer au syndicat s'ils le souhaitent.

C. Conclusions du comité

C. Conclusions du comité
  1. 398. Le comité rappelle que c'est la sixième fois depuis 1977 qu'il est saisi d'allégations relatives au refus des autorités de reconnaître le droit des travailleurs de l'industrie électronique de la Malaisie de créer le syndicat de leur choix ou d'y adhérer: cas no 879 (177e rapport du comité, paragr. 88-113, approuvé par le Conseil d'administration à sa 205e session, février-mars 1978); cas no 911 (190e rapport du comité, paragr. 410-429, approuvé par le Conseil d'administration à sa 209e session, février-mars 1979, et 202e rapport du comité, paragr. 122-142, approuvé par le Conseil d'administration à sa 213e session, mai-juin 1980); cas no 1022 (211e rapport du comité, paragr. 515-525, approuvé par le Conseil d'administration à sa 218e session, novembre 1981, 217e rapport du comité, paragr. 379-388, approuvé par le Conseil d'administration à sa 220e session, mai-juin 1982, et 218e rapport du comité, paragr. 18, approuvé par le Conseil d'administration à sa 221e session, novembre 1982); cas no 1380 (248e rapport du comité, paragr. 363-380, approuvé par le Conseil d'administration à sa 235e session, mars 1987, et 265e rapport du comité, paragr. 17, approuvé par le Conseil d'administration à sa 243e session, mai-juin 1989); et cas no 1480 (265e rapport du comité, paragr. 550-587, approuvé par le Conseil d'administration à sa 243e session, mai-juin 1989, 270e rapport du comité, paragr. 109-123, approuvé par le Conseil d'administration à sa 245e session, février 1990, et 272e rapport du comité, paragr. 22, approuvé par le Conseil d'administration à sa 246e session, mai-juin 1990).
  2. 399. Dans chacun des cinq cas précédents, le comité a demandé au gouvernement de prendre des mesures pour mettre la législation et la pratique en conformité avec le principe selon lequel le choix du syndicat auquel les travailleurs désirent adhérer doit leur appartenir, ce que le gouvernement a régulièrement négligé de faire.
  3. 400. Dans le présent cas, le gouvernement déclare que la raison pour laquelle les salariés de la société Hitachi Consumer Products se sont vu refuser le droit d'adhérer à l'EIWU est que le directeur général des syndicats a, après un examen approfondi, décidé qu'ils ne répondaient pas aux règles d'adhésion de ce syndicat.
  4. 401. Le comité est conscient du fait que le droit de créer le syndicat de son choix ou d'y adhérer, tel qu'il est garanti par les principes de la liberté syndicale, est conditionné par les statuts de l'organisation en cause. Cependant, cela sous-entend que ces statuts sont le résultat de la liberté de choix des membres du syndicat telle qu'elle est garantie par l'article 3 de la convention no 87. Tel n'est pas le cas ici. L'EIWU s'efforce depuis plusieurs années d'obtenir le droit d'accepter les travailleurs de l'industrie électronique. Elle s'est vu refuser ce droit par une loi que le comité a constamment déclarée comme incompatible avec les principes de la liberté syndicale.
  5. 402. En tout état de cause, même si les règles d'adhésion à l'EIWU étaient le résultat de procédures conformes aux principes de la liberté syndicale, l'interprétation de ces règles devrait relever des autorités judiciaires et non d'une autorité administrative telle que le directeur général des syndicats.
  6. 403. Au vu de ce qui précède, le comité ne peut qu'inviter une nouvelle fois le gouvernement à élaborer une législation qui donne à tous les travailleurs, y compris ceux de l'industrie électronique, le droit de créer l'organisation de leur choix et d'y adhérer, tel qu'il est garanti par les principes de la liberté syndicale. Il souhaite également réitérer sa précédente suggestion invitant le gouvernement à utiliser l'assistance technique du BIT pour mettre sa législation et sa pratique en pleine conformité avec les principes de la liberté syndicale.
  7. 404. Dans le présent cas, la fédération plaignante a allégué que huit des salariés de la société Hitachi Consumer Products ont été licenciés en raison de leurs activités syndicales pour le compte de l'EIWU. Elle a également allégué que 21 travailleurs n'ont pas été réengagés à la suite de la grève de juin 1990, ici encore en raison de leurs activités syndicales. Le gouvernement n'a répondu à aucune de ces allégations. Ces allégations faisant état du licenciement de militants syndicaux, le comité invite le gouvernement à envoyer ses observations sur cet aspect du cas à brève échéance.

Recommandation du comité

Recommandation du comité
  1. 405. Au vu des conclusions intérimaires qui précèdent, le comité invite le Conseil d'administration à approuver les recommandations suivantes:
    • a) Le comité invite le gouvernement à introduire une législation amendant la loi de 1959 sur les syndicats afin de garantir à tous les travailleurs, y compris ceux de l'industrie électronique, le droit de créer des organisations de leur choix et d'y adhérer, tel qu'il est garanti par les principes de la liberté syndicale. La législation devrait également être amendée afin de garantir que la responsabilité de l'interprétation des statuts des syndicats relève des autorités judiciaires et non administratives.
    • b) Le comité suggère au gouvernement d'utiliser l'assistance technique du BIT pour mettre sa législation et sa pratique en pleine conformité avec les principes de la liberté syndicale.
    • c) Le comité invite le gouvernement à fournir une réponse complète aux allégations concernant le licenciement de huit travailleurs pour leurs activités syndicales au nom de l'EIWU et le non-réengagement de 21 travailleurs à la suite de la grève de juin 1990, également en raison de leurs activités syndicales. Ces observations devraient être fournies le plus rapidement possible afin de permettre au comité d'examiner ce cas à sa prochaine réunion.
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