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Rapport intérimaire - Rapport No. 279, Novembre 1991

Cas no 1567 (Argentine) - Date de la plainte: 07-NOV. -90 - Clos

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  1. 680. Les allégations formulées dans ce cas contre le gouvernement de l'Argentine figurent dans des communications de l'Association du personnel de direction des Chemins de fer argentins et de l'administration générale des ports (APDFA), en date du 7 novembre 1990 et de janvier 1991; dans des communications de la Confédération des travailleurs de l'éducation de la République d'Argentine (CTERA), en date des 19 novembre 1990 et 22 janvier 1991; dans une communication de l'Association des travailleurs de l'Etat (ATE), en date du 5 décembre 1990; dans des communications de la Confédération mondiale du travail (CMT), en date du 15 janvier et du 15 février 1991, et dans des communications de l'Association argentine du personnel navigant aérien (AAA), en date des 14 décembre 1990 et 19 février 1991. Le gouvernement a adressé ses observations dans une communication en date du 20 août 1991.
  2. 681. L'Argentine a ratifié la convention (no 87) sur la liberté syndicale et la protection du droit syndical, 1948, ainsi que la convention (no 98) sur le droit d'organisation et de négociation collective, 1949.

A. Allégations des plaignants

A. Allégations des plaignants
  1. 682. Dans sa communication en date du 7 novembre 1990, l'APDFA allègue que le décret no 1757/90 du 5 juillet 1990 constitue, en ses articles 56, 57, 59, 60, 65, 67, 68, 69 et 70, une atteinte au droit de cette association de négocier librement les salaires et les conditions de travail des salariés qu'elle représente, et ce en violation des dispositions des conventions nos 98 et 154.
  2. 683. L'APDFA signale qu'en septembre 1989 a été promulguée la loi no 23697, connue sous le nom de loi d'urgence économique, dont l'article premier dispose qu'il existe une "situation de danger collectif engendrée par la gravité des conditions économiques et sociales dont souffre la nation". L'article 44 de cette loi autorise le pouvoir exécutif à "réviser les régimes de l'emploi, dans la fonction publique ou ailleurs ... en vue de corriger les facteurs qui pourraient porter atteinte aux objectifs d'efficacité et de productivité ...". Cependant, le même texte dispose que, "entre autres moyens, la convocation ou la création d'instances de négociation collective ... permettront de conclure des accords paritaires en vue de la mise en oeuvre des dispositions du présent article". Cela limite les risques de décision unilatérale de la part de l'exécutif, car il est expressément établi que toute "révision" éventuelle des conventions collectives devait faire l'objet d'un accord paritaire. Cela est également prévu par l'article 45 de ladite loi.
  3. 684. Les plaignants soulignent que le décret no 1757/90 reprend le thème de la nécessité de corriger les facteurs qui peuvent porter atteinte aux objectifs d'efficacité et de productivité du travail dans les entreprises publiques, bien que le décret souligne que ces objectifs doivent être réalisés "dans le cadre légal en vigueur, en préservant la négociation collective comme instrument approprié régissant les relations professionnelles". Toutefois, en dépit de cette affirmation, le décret affirme ensuite que "pour faciliter la procédure de négociation (SIC), il s'avère nécessaire de suspendre les dispositions qui contreviennent aux objectifs d'efficacité et de productivité, jusqu'à ce que de nouveaux accords soient conclus".
  4. 685. En outre, le chapitre III du décret (intitulé "De la politique salariale") prive les représentants patronaux au sein des commissions de négociation de toute latitude d'action pour conclure des accords salariaux avec la représentation syndicale. Les salaires doivent être strictement ajustés sur les augmentations salariales accordées unilatéralement par le pouvoir exécutif dans l'administration publique nationale. Autrement dit, c'est le pouvoir exécutif qui, indirectement, fixe la rémunération des travailleurs du secteur relevant des conventions collectives, ce qui interdit de fait toute possibilité de négociation, sauf si on considère comme négociation le fait de fixer les salaires inférieures à ce "plafond" (articles 56 à 59 du décret).
  5. 686. Les plaignants indiquent que le chapitre IV (intitulé "Des conventions collectives du travail") prévoit l'ouverture immédiate de négociations pour renouveler les conventions, ce qui ne semble pas appeler d'objection (article 64). En revanche, ce qui est critiquable, c'est que le décret prétend fixer un délai impératif pour la conclusion des conventions, faute de quoi "le pouvoir exécutif national décrétera les mesures voulues pour assurer l'application des dispositions de l'article 44 de la loi no 23697".
  6. 687. Selon l'APDFA, l'article 67 du décret no 1757/90 constitue le cas le plus flagrant de violation du droit des syndicats de recourir à la négociation collective, étant donné que, sous couvert d'un prétendu "caractère transitoire", il est dérogé aux dispositions conventionnelles supposées "nuire à la productivité" ou qui paralysent ou entravent "le pouvoir de direction et d'administration de l'employeur".
  7. 688. Les plaignants concluent qu'est ainsi mise en place la procédure suivante dans laquelle l'Etat intervient comme juge et partie: a) le gouvernement définit son plan économique et fixe la politique d'ajustement; b) les dirigeants des entreprises publiques, nommés par le gouvernement, désignent les dispositions de la convention collective qui entravent "l'efficacité et la productivité"; c) le syndicat interessé a un délai de cinq jours pour formuler les "observations" qu'il estime pertinentes, son silence étant interprété comme un "consentement"; d) le ministère du Travail et de la Sécurité sociale - qui est sous la tutelle administrative de l'Etat - se prononce définitivement sur la dérogation aux dispositions conventionnelles en question. En résumé, l'Etat fixe la politique économique; l'Etat employeur propose de modifier les conventions collectives; et l'Etat en tant qu'autorité administrative tranche à propos des éventuelles "observations" formulées par le syndicat intéressé.
  8. 689. Dans une autre communication de janvier 1991, l'APDFA commente l'application concrète du décret no 1757/90 à certaines conventions collectives, et en particulier à la convention collective no 433/75 dont il a été décidé de suspendre l'article 3 qui énumérait les catégories professionnelles représentées par l'association auprès de l'entreprise des Chemins de fer argentins. La suspension de l'article en question a été demandée par le président en exercice de la Commission technique consultative de la politique salariale du secteur public. L'APDFA a contesté cette demande dans le délai légal de cinq jours; mais elle a été déboutée et l'article 3 de la convention a été suspendu par sentence arbitrale jusqu'à la date d'enregistrement des nouvelles conventions collectives du travail.
  9. 690. L'APDFA est un syndicat catégoriel qui représente le personnel de direction et d'encadrement des Chemins de fer argentins, de l'Administration générale des ports et de l'Institut des services sociaux du personnel des chemins de fer. L'application du décret no 1757/90 à la convention collective no 433/75 est une violation caractérisée du principe de la liberté syndicale. En effet, étant donné que ce syndicat est un syndicat catégoriel et que l'article 3 de la convention collective spécifiait les catégories professionnelles que ce syndicat représentait dans la négociation collective, la suspension de cet article de la convention collective prive en pratique ce syndicat de toute représentation.
  10. 691. Par une communication en date du 19 novembre 1990, la CTERA déclare qu'elle a demandé, le 25 août 1989, au ministère du Travail et de la Sécurité sociale de mettre en place une convention collective de secteur afin de créer un cadre de dialogue sur le régime salarial, les conditions et l'organisation du travail et autres questions qui s'y rapportent, ainsi que sur les avantages sociaux et professionnels.
  11. 692. La CTERA et les autorités provinciales de l'éducation, réunies au sein d'une commission nationale préparatoire, ont demandé au ministère du Travail et de la Sécurité sociale de mettre au point des instruments juridiques pour préparer l'élaboration officielle et l'entrée en vigueur d'une convention nationale des travailleurs de l'éducation. Dans une décision officielle, le ministère du Travail s'est prononcé défavorablement, expliquant que pour mettre au point la convention collective du secteur de l'éducation il fallait au préalable que le Congrès adopte une loi spéciale.
  12. 693. Les plaignants ajoutent que, malgré cette décision du ministère du Travail, le renvoi devant le Congrès du projet de loi sur les conventions collectives des travailleurs de l'éducation de la République argentine a été entravé et ajourné, ce qui constitue autant d'obstacles à l'entrée en vigueur de ce texte, en opposition aux recommandations du ministère du Travail lui-même, ainsi qu'aux prescriptions de la Direction générale des relations professionnelles.
  13. 694. Les plaignants ajoutent que le projet de loi sur les conventions collectives des travailleurs de l'éducation a été élaboré par une commission instituée conformément à la résolution no 55 du 24 janvier 1990 du ministère de l'Education. Cette commission comprenait les représentants de ce ministère et de toutes les autorités éducatives de la République, des fonctionnaires du ministère de l'Economie, les représentants du Conseil de la fonction publique et ceux de la CTERA. Elle était présidée par un fonctionnaire du ministère du Travail qui a annoncé que ladite commission était dissoute sans qu'intervienne une résolution de révocation. Selon les plaignants, on peut déduire de cette révocation que la base sur laquelle avait été créée la commission en question, c'est-à-dire l'instauration du dialogue, se trouve invalidée, ce qui a créé un profond malaise parmi les travailleurs de l'éducation.
  14. 695. La CTERA a adressé une autre communication en date du 22 janvier 1991 dans laquelle elle confirme dans tous ses termes la plainte présentée dans sa communication précédente.
  15. 696. Dans sa communication du 5 décembre 1990, l'ATE dénonce également le décret no 1757/90 dont les articles 56, 57, 59, 60, 65, 67, 68, 69 et 70 constituent une atteinte flagrante au droit de cette organisation de négocier librement les salaires et les conditions de travail des salariés qu'elle représente. Le plaignant indique que le gouvernement, loin "d'encourager et de promouvoir le développement et l'utilisation les plus larges de procédures de négociation volontaire de conventions collectives", ainsi que le stipule l'article 4 de la convention no 98, entend nier le résultat de l'exercice de la volonté autonome des partenaires sociaux en niant de façon illégale et arbitraire les acquis sociaux obtenus par les travailleurs après de longues années de lutte. Ainsi se renouvelle - bien qu'avec des méthodes plus subtiles - la vieille politique des gouvernements autocratiques consistant à fixer autoritairement les salaires et à ôter aux partenaires sociaux toute possibilité de négociation.
  16. 697. La CMT, dans une communication en date du 15 janvier 1991, appuie la plainte déposée par l'ATE et estime que le décret no 1757/90 constitue une violation des conventions nos 98 et 154. Même si l'on admet que la réforme de l'Etat tendant à plus de rationalité et d'efficacité est un objectif partagé, les droits fondamentaux des travailleurs et de leurs organisations ne peuvent ni ne doivent être méconnus dans les modalités, les méthodes et les garanties mises en place. Cette méconnaissance risque en effet d'introduire l'arbitraire; l'injustice et l'aggravation des problèmes sociaux, dont des licenciements massifs, y compris de délégués syndicaux, font en effet courir un grave risque d'instabilité et d'arbitraire et aggravent en outre une situation socio-économique déjà difficile.
  17. 698. Dans une autre communication en date du 15 février 1991, la CMT fournit des informations sur le licenciement de délégués syndicaux d'agents de l'Etat dont on trouvera ci-après les noms et les fonctions: M. Juan Carlos Piccini, contrôleur interne au syndicat (Institut des oeuvres sociales) - dont le mandat est expiré; MM. José Alberto Ibáñez, secrétaire syndical, Carlos Alberto Leonardi, secrétaire à la presse, et José Alberto Duarte, premier adjoint (Fichier national des personnes), Roberto Angel Pardo, secrétaire à la presse (Oeuvres sociales des travaux publics), Héctor Ricardo Piñeiro, contrôleur interne au syndicat, et Enrique Muzzio, contrôleur interne au syndicat (Institut national du cinéma); MM. Patricio Prassolo, secrétaire général, Eduardo Silva, secrétaire syndical, et Favio Bruno, secrétaire à l'organisation (Secrétariat d'Etat à la culture - Théâtre Cervantes) et Mme Sandra Solari, secrétaire à l'organisation (Sous-secrétariat d'Etat à l'industrie et au commerce). La CMT conclut sa communication en qualifiant ces licenciements d'atteinte aux droits syndicaux et en demandant la réintégration de ces délégués.
  18. 699. L'AAA, dans des communications en date du 14 décembre 1990 et du 19 février 1991, fait siens et appuie pleinement les arguments avancés à propos de ces dispositions du décret no 1757/90 et de son application pratique à la négociation collective dans le secteur public.

B. Réponse du gouvernement

B. Réponse du gouvernement
  1. 700. Dans sa communication en date du 20 août 1991, le gouvernement commente le décret no 1757 et la sentence arbitrale no 9/90 suspendant l'application de certaines dispositions des conventions collectives de la circulation aérienne. Il indique que les problèmes qui ont motivé les plaintes présentées pour ce secteur ne se posent plus, étant donné qu'aussi bien l'AAA que l'Association des pilotes de lignes aériennes (APLA, qui ne figure pas comme plaignant dans ce cas) ont conclu de nouvelles conventions collectives avec leur employeur, Aerolíneas Argentinas, société anonyme (qui succède à Aerolíneas Argentinas, société d'Etat), lesdites conventions ayant été homologuées par le ministère du Travail.
  2. 701. Le gouvernement explique les raisons de droit et de fait qui ont motivé le décret no 1757/90 et indique que la République argentine connaît depuis longtemps une grave crise économique qui est en partie due à l'ampleur d'un déficit budgétaire provoqué, entre autres, par la taille importante du secteur public et par les subventions aux entreprises publiques de l'Etat. C'est dans ce contexte qu'a été pris le décret no 1757/90, le 5 juillet 1990, en vertu duquel, de manière transitoire et jusqu'à ce que les nouvelles conventions collectives soient officialisées, ont été privées d'effet les dispositions des conventions en vigueur risquant d'affecter la productivité et l'efficacité. La loi no 23696 a déclaré une situation d'urgence économique de l'Etat, considérant que cette urgence constitue un cas de force majeure applicable aux accords en vigueur conclus dans le secteur public.
  3. 702. Dans le cas particulier d'Aerolíneas Argentinas, il incombait au ministère du Travail de se prononcer, sur proposition de l'entreprise, sur la période pendant laquelle devaient être suspendues les dispositions conventionnelles. En conséquence, il a pris la décision no 9/90 par laquelle certaines dispositions de la convention collective de ce secteur étaient suspendues "de façon provisoire". Ainsi, la suspension des dispositions de la convention collective en question, qui résulte de ladite décision, n'est rien d'autre que l'application d'un ensemble cohérent de règles visant à un objectif légitime, à savoir la sortie de l'état d'urgence économique.
  4. 703. Dans ce contexte, poursuit le gouvernement, il est important de souligner que la procédure prévue par la loi no 14250 sur la négociation collective n'a pas été annulée, mais qu'au contraire elle est pleinement en vigueur, comme le prévoit l'article 64 du décret no 1757/90. La suspension est seulement provisoire et prendra fin à la conclusion d'une nouvelle convention, ce qui est pleinement justifié par la politique de stabilisation et de lutte contre l'inflation.
  5. 704. D'autre part, le gouvernement croit opportun de signaler que la Cour suprême de justice, dans un arrêt du 7 août 1990, "SOENGAS, Héctor Ricardo et consorts contre les Chemins de fer argentins, a soutenu une fois de plus la doctrine qui veut que "dans les situations d'urgence sociale ou économique le pouvoir de réglementer les droits des individus peut être exercé avec plus de fermeté que dans les périodes calmes et normales", ajoutant que "la question ne pouvait être tranchée sans un examen préalable des diverses dispositions contenues dans une convention collective, comme celles qui fixent les conditions de travail, les obligations, ou les barèmes salariaux et qui pourraient avoir perdu toute signification à la suite d'une très grave inflation ou à cause d'une situation de crise généralisée et qui se trouveraient, de ce fait, dépendre de l'ordre économique".
  6. 705. Le gouvernement réaffirme qu'à l'heure actuelle les nouvelles conventions collectives ont déjà été signées par l'entreprise de transport aérien et l'organisation syndicale plaignante, ce qui fait que l'application de la décision ministérielle et du décret no 1757/90, motivée par la crise économique déjà mentionnée, a été de très courte durée.
  7. 706. Enfin, la communication du gouvernement conclut qu'il faut signaler qu'en République argentine le principe de la séparation des pouvoirs propre au système démocratique est pleinement en vigueur. En conséquence, le contrôle judiciaire des actes du gouvernement ou de la constitutionnalité des lois et décrets fonctionne pleinement lorsque les personnes - physiques ou juridiques - considèrent que leurs droits sont enfreints, la décision ultime incombant aux tribunaux.

C. Conclusions du comité

C. Conclusions du comité
  1. 707. Le comité note que les allégations présentées dans ce cas se réfèrent à la promulgation du décret no 1757/90 qui s'inspire de la nécessité de corriger les facteurs pouvant diminuer l'efficacité et la productivité du travail dans le secteur public, dans le cadre de la loi no 23696 sur l'urgence économique. Ainsi, les allégations concernent les limites ou "plafonds" imposés par l'exécutif aux augmentations salariales obtenus par la négociation de conventions collectives; le délai impératif imposé pour conclure un accord après le début des négociations et, dans le cas contraire, le pouvoir qu'a l'exécutif de prendre certaines mesures pour atteindre les objectifs d'efficacité et de productivité; l'article 67 du décret no 1757/90 en vertu duquel les dispositions conventionnelles peuvent être suspendues si elles contreviennent à la productivité et empêchent ou entravent l'administration de l'entreprise, comme cela s'est produit pour l'article 3 de la convention collective no 433/75 qui énumérait les catégories professionnelles représentées par l'APDFA face aux Chemins de fer argentins, privant pratiquement le syndicat en question de toute représentation.
  2. 708. Les autres allégations présentées dans ce cas reposent sur certains obstacles administratifs et législatifs opposés à la négociation d'un accord collectif national dans le secteur de l'éducation, en vue duquel avait été créée une commission multipartite chargée d'élaborer une législation qui sous-tende l'accord national en question. Il est allégué que ladite commission a été dissoute unilatéralement par le représentant du ministère du Travail sans qu'une résolution administrative ait été prise à cet effet, empêchant ainsi d'aboutir à l'établissement d'une convention collective dans le secteur. En outre, le comité observe que d'autres allégations se réfèrent au licenciement de délégués syndicaux du personnel de l'Etat, au nom de la politique de rationalisation et d'efficacité. Leurs noms sont les suivants: Juan Carlos Piccini, José Alberto Ibáñez, Carlos Alberto Leonardi, José Alberto Duarte, Roberto Angel Pardo, Héctor Ricardo Piñeiro, Enrique Muzzio, Patricio Prassolo, Eduardo Silva, Favio Bruno et Sandra Solari.
  3. 709. Le comité prend note des informations fournies par le gouvernement, et en particulier du fait que le pays traverse une grave crise économique en partie due à l'extension du secteur public et aux subventions versées aux entreprises de l'Etat; ce contexte a conduit à la promulgation du décret no 1757 en vue, et à titre provisoire (jusqu'à la conclusion de nouvelles conventions dans le secteur public), de rechercher une efficacité et une productivité permettant à l'Etat de rationaliser son fonctionnement et de sortir de la situation d'urgence économique dans laquelle il se trouve.
  4. 710. Le comité note en outre qu'en vertu de l'article 67 du décret no 1757/90 l'Etat peut suspendre certaines dispositions des conventions collectives en vigueur qui diminuent la productivité et l'efficacité, considérant que l'état d'urgence économique constitue un cas de force majeure applicable aux conventions en vigueur dans le secteur public, et ce jusqu'à la conclusion d'un nouveau contrat collectif. Il note également que le gouvernement affirme que le décret no 1757/90, du fait de son caractère provisoire et de ses buts précis, n'annule pas la procédure prévue par la législation pour régir normalement la négociation collective mais que, bien au contraire, celle-ci conserve toute sa validité comme le prévoit l'article 64 du décret en question.
  5. 711. D'autre part, le comité note que le gouvernement souligne que la décision finale touchant l'application de ce décret incombe au pouvoir judiciaire et que quiconque s'estime lésé peut saisir les tribunaux.
  6. 712. A propos des mesures prises par le gouvernement en vue d'une rationalisation du secteur public dans le cadre de l'état d'urgence économique décrété par la loi no 32696, le comité appelle l'attention du gouvernement sur le principe selon lequel l'exercice des prérogatives de la puissance publique en matière financière d'une manière qui a pour effet d'empêcher le respect des conventions collectives conclues par des organismes publics est incompatible avec le principe de la liberté de négociation collective. (Voir, à ce sujet, par exemple, 234e rapport, cas no 1173 (Canada-Colombie-Britannique, paragr. 87.). Cependant, le comité note que le décret no 1757/90 prévoit que les objectifs d'efficacité et de productivité du travail dans les entreprises publiques doivent être atteints dans le cadre légal en vigueur, en préservant la négociation collective comme instrument approprié pour régir les relations professionnelles, et que la suspension de certaines dispositions des conventions collectives déjà signées qui s'opposent aux objectifs mentionnés a un caractère temporaire, c'est-à-dire jusqu'à ce qu'un nouvel accord collectif soit négocié, mais que ces derniers doivent être négociés en conformité avec la politique salariale du gouvernement pour la fonction publique (articles 56 à 59 du décret).
  7. 713. Dans ces conditions, le comité souhaite souligner que, même si la négociation collective volontaire représente un aspect important des droits syndicaux, il a accepté que dans certaines circonstances, pour des raisons impérieuses, les gouvernements puissent décider que la situation économique d'un pays exige des mesures de stabilisation ne permettant pas de fixer librement, par négociation collective, les taux de salaire. (Voir 106e rapport, cas no 541 (Argentine, paragr. 16), et 110e rapport, cas no 561 (Uruguay), paragr. 225.).
  8. 714. A cet égard, le comité de même que la Commission d'experts pour l'application des conventions et recommandations ont souligné que si, au nom d'une politique de stabilisation, un gouvernement considère que, pour des raisons impérieuses, le taux des salaires ne peut être fixé librement (ou dans ce cas particulier sans dépasser certains "plafonds") par voie de négociation collective, une telle restriction devrait être appliquée comme une mesure d'exception, limitée à l'indispensable, ne devrait pas excéder une période raisonnable et devrait être accompagnée de garanties appropriées en vue de protéger le niveau de vie des travailleurs. Il convient d'attacher d'autant plus d'importance à ce principe que, par suite de limitations successives, on aboutit parfois à une suspension de longue durée des négociations salariales contraire à la promotion de la négociation collective volontaire. (Voir paragr. 315 de l'Etude d'ensemble de la Commission d'experts sur la liberté syndicale et la négociation collective, 69e session de la Conférence internationale du Travail, 1983, et 233e rapport, cas nos 1183 et 1205 (Chili), paragr. 482.).
  9. 715. En ce qui concerne les allégations précises sur la suspension de l'article 3 de la convention collective no 433/75 qui énumérait les catégories représentées par l'APDFA devant l'entreprise des Chemins de fer argentins, les allégations relatives aux obstacles administratifs et législatifs opposés à la négociation d'un accord collectif national dans le secteur de l'éducation et à la dissolution de la commission multipartite créée pour rédiger une législation permettant la négociation de l'accord en question, et les allégations relatives au licenciement au nom d'une politique de rationalité et d'efficacité de représentants du personnel du secteur public mentionnées dans un paragraphe précédent, le comité observe que le gouvernement n'a pas envoyé ses observations. En conséquence, il lui demande de les lui faire parvenir aussi rapidement que possible afin qu'il puisse se prononcer en connaissance de cause et en tenant compte des circonstances particulières de chaque situation.

Recommandation du comité

Recommandation du comité
  1. 716. Au vu des conclusions intérimaires qui précèdent, le comité invite le Conseil d'administration à adopter les recommandations suivantes:
    • a) Le comité, tout en prenant note des circonstances particulières d'urgence économique que traverse le pays et qui ont donné lieu aux restrictions à la négociation collective par le décret no 1757/90, rappelle au gouvernement le principe qu'il a toujours soutenu, suivant lequel dans les situations d'urgence économique, les restrictions à la négociation collective devraient seulement être appliquées, pour des raisons impérieuses, comme des mesures d'exception, limitées à l'indispensable, ne devraient pas excéder une période raisonnable et devraient être accompagnées de garanties appropriées en vue de protéger le niveau de vie des travailleurs.
    • b) Le comité demande au gouvernement de lui adresser ses observations sur les allégations relatives à la suspension de l'article 3 de la convention collective no 433/75, sur les obstacles administratifs et législatifs à la négociation d'un accord collectif national dans le secteur de l'éducation et sur le licenciement des représentants du personnel du secteur public.
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