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Rapport où le comité demande à être informé de l’évolution de la situation - Rapport No. 295, Novembre 1994

Cas no 1756 (Indonésie) - Date de la plainte: 21-DÉC. -93 - Clos

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  1. 398. Le Syndicat indonésien du progrès (Serikat Buruh Sejahtera Indonesia, SBSI) a présenté une plainte en violation de la liberté syndicale contre le gouvernement de l'Indonésie dans des communications en date des 21 décembre 1993 et 13 janvier 1994. La Confédération mondiale du travail a appuyé cette plainte dans une communication datée du 11 février 1994.
  2. 399. Le gouvernement a fait parvenir ses observations et commentaires dans des communications datées des 23 mars, 10 et 23 mai 1994.
  3. 400. L'Indonésie a ratifié la convention (no 98) sur le droit d'organisation et de négociation collective, 1949; en revanche, elle n'a pas ratifié la convention (no 87) sur la liberté syndicale et la protection du droit syndical, 1948.

A. Allégations de l'organisation plaignante

A. Allégations de l'organisation plaignante
  1. 401. Dans sa communication en date du 21 décembre 1993, l'organisation plaignante soulève quatre questions alléguant des violations de droits syndicaux, de discrimination antisyndicale et d'ingérence des pouvoirs publics, des forces armées et de police.
  2. 402. Premièrement, la plainte du Syndicat indonésien du progrès (SBSI) porte sur le fait que sept de ses dirigeants ont été licenciés par une entreprise privée, la PT. Tambaksari Jalmorejo, dans la province de Medan, pour avoir constitué une unité du SBSI dans cette entreprise le 2 juin 1993. Les sept travailleurs concernés sont les suivants: M. Sugiono (président), M. Evendi Sibuea (vice-président), Mme Umiyati (deuxième vice-présidente), M. Abdul Maha (secrétaire), Mme Nurhasanah (secrétaire adjointe), M. Mustafa (trésorier) et Mme Tuginem (trésorier adjoint). Le 9 juin 1993, un fonctionnaire du ministère de la Main-d'oeuvre s'est rendu dans l'entreprise et a proposé à M. Sugiono de démissionner du SBSI pour créer une unité de Serikat Pekerja Seluruh Indonesia ou Union syndicale d'Indonésie (SPSI) au sein de l'entreprise, qui est le seul syndicat reconnu par les pouvoirs publics. Devant le refus de M. Sugiono, le fonctionnaire a rencontré la direction de l'entreprise. Les sept personnes susmentionnées ont été informées qu'elles étaient licenciées dans une lettre datée du 14 juin 1993 signée du chef du personnel, qui déclarait notamment, en rapport avec la création de l'unité du SBSI dans l'entreprise: "... nous déplorons que cette création ait eu lieu à notre insu. Etant donné que cette organisation n'a pas été créée conformément à la procédure en vigueur, nous refusons de la reconnaître. Nous décidons donc de mettre fin à votre emploi à partir du 14 juin 1993". Ce même jour, tous les travailleurs de l'entreprise se sont mis en grève pour protester contre les licenciements. Selon l'organisation plaignante, le chef du bureau de Medan du ministère de la Main-d'oeuvre a approuvé indirectement les licenciements. En rapport avec ces événements, le 17 juin 1993, MM. Amosi Telaumbanua et Soniman Lafau, respectivement président et vice-président de la section du SBSI de Medan, ont été arrêtés et battus; leur détention a duré dix jours au quartier général militaire de Medan. Les autorités militaires les ont accusés d'avoir fomenté une grève. Le SBSI a, à cet égard, déposé plainte devant le tribunal de Medan.
  3. 403. Deuxièmement, le SBSI soumet deux lettres prouvant l'ingérence des pouvoirs publics dans les affaires syndicales et le favoritisme à l'égard de la SPSI. La première lettre, datée du 11 juin 1993, émanant du Directeur des affaires sociales et politiques de la Province du Nord de Sumatra, donne pour consigne aux chefs des districts de Simalungun et de Pematang Siantar d'exclure les membres et les militants du SBSI. Se référant aux tentatives du SBSI de constituer des unités dans les districts susmentionnés, la lettre poursuit: "A cet égard, vous êtes tenus de prendre les mesures suivantes: 2) a) de veiller à ce qu'aucun fonctionnaire du gouvernement local ne participe à cette organisation; b) d'éviter de servir cette organisation et d'en reconnaître l'existence, de régler la question en coordination avec les organismes apparentés; 3) les mesures adoptées pour le règlement de la question devront être en conformité avec la politique du gouvernement qui consiste à reconnaître la SPSI ...". La seconde communication, datée du 30 juin 1993, est une lettre émanant du conseil régional de la SPSI adressée à ses conseils locaux de Simalungun et de Pematang Siantar, reprenant la lettre susmentionnée et donnant les instructions suivantes: "A cet égard, vous êtes priés de prendre les mesures suivantes: 1) examiner cette lettre et organiser une coordination avec les autorités locales afin de prendre les devants sur la création prévue du SBSI dans votre zone; 2) signaler sans délai au conseil régional de la SPSI et aux autorités compétentes de la Province du Nord de Sumatra si des unités du SBSI ont été créées et de faire rapport sur leurs activités; 3) respecter les directives contenues dans la lettre de la Direction des affaires sociales et politiques de la province du Nord de Sumatra dans toutes les mesures que vous prendrez à cet effet."
  4. 404. Troisièmement, le SBSI allègue que le chef de la police a empêché la tenue de son premier congrès national, prévu du 29 juillet au 2 août 1993, quand bien même toutes les formalités avaient été remplies. L'organisation plaignante avait demandé l'autorisation d'organiser son congrès dans des lettres des 5, 22 et 26 juillet. Elle a reçu des autorités policières la lettre suivante, datée du 28 juillet 1993: "Vous êtes informés par la présente que votre demande est rejetée pour non-conformité avec les exigences en la matière et avec les recommandations des ministères de la Main-d'oeuvre et de l'Intérieur; les activités prévues sont donc annulées."
  5. 405. Quatrièmement, l'organisation plaignante affirme que les autorités locales de Jombang ont refusé de renouveler la carte d'identité de M. Adi Wyono, président de la section de Jombang du SBSI, tant qu'il n'aura pas démissionné du SBSI.
  6. 406. Dans sa communication du 13 janvier 1994, l'organisation plaignante présente deux nouvelles allégations de violation des droits syndicaux en précisant que, dans deux cas distincts, 14 travailleurs au total ont été licenciés pour leur affiliation au SBSI. A Bandar Lumpung, 11 travailleurs appartenant à la direction locale du SBSI ont été licenciés le 27 décembre 1993 à l'entreprise Bumi Waras, où le SBSI compte 600 membres. Les travailleurs licenciés sont les suivants: Ujang Komara (président); Sontris Wibowo (vice-président); Deliman (secrétaire); Asdiana (secrétaire adjoint); Sobirin (trésorier); Hanifah (trésorier adjoint); Sabirin, Julianto and Ersondy (coordinateurs); Dodi and Umar (membres du personnel). Quatre d'entre eux (Ujang Komara, Sontris Wibowo, Deliman et Sabirin) ont aussi été interrogés à trois reprises (le 8 janvier, de 12 h 30 à 20 h 30; le 11 janvier de 9 heures à 18 heures; le 12 janvier à partir de 9 heures) et intimidés par la police et des militaires pour qu'ils démissionnent du SBSI. De même, à Bandar Lumpung, trois dirigeants du SBSI ont été licenciés par l'entreprise CV Sinar Laut le 27 décembre 1993, en raison de leur affiliation syndicale, à savoir MM. Irwantanto (président) et Nawi (trésorier), et Mme Lita (secrétaire).
  7. 407. La Confédération mondiale du travail, dans sa communication du 11 février 1994, appuie l'ensemble des allégations susmentionnées.

B. Réponse du gouvernement

B. Réponse du gouvernement
  1. 408. Dans sa communication du 23 mars 1994, le gouvernement précise, en rapport avec les licenciements prononcés dans l'entreprise Tambaksari Jalmorejo, que les sept travailleurs intéressés ont été licenciés en raison de la détérioration des relations entre la direction et ces mêmes personnes. Des entretiens bipartites avaient eu lieu avec les travailleurs antérieurement aux licenciements pour discuter de la situation; comme les travailleurs semblaient satisfaits de la discussion et acceptaient la situation, l'employeur a demandé au Comité du règlement des conflits du travail de la province de Medan l'autorisation de les licencier. Tenant compte du fait que les relations de travail n'étaient plus harmonieuses, le comité a donné son autorisation et la décision a pris effet le 14 juin 1993. Les sept travailleurs ont accepté la décision et leur entreprise leur a versé une indemnisation proportionnelle à leur ancienneté dans l'entreprise.
  2. 409. Dans sa communication datée du 23 mai 1994, le gouvernement déclare, en réponse à la deuxième allégation, que le SBSI n'est pas une organisation de travailleurs car il ne remplit pas les conditions fixées par la législation indonésienne pour être reconnu en tant que tel. En ce qui concerne l'interdiction de la tenue du Congrès du SBSI, le gouvernement déclare qu'il n'a jamais autorisé le prétendu "Congrès national" et qu'une telle autorisation est obligatoire, selon la loi. S'agissant du non-renouvellement de la carte d'identité de M. Adi Wyono, le gouvernement indique qu'il n'a pas été possible de lui délivrer cette carte car l'intéressé n'a pas été en mesure de produire une lettre de son lieu de résidence antérieur (Riau).
  3. 410. En ce qui concerne la situation de l'entreprise CV Bumi Waras, le gouvernement déclare dans sa communication du 10 mai 1994 qu'un syndicat a été créé dans cette entreprise en 1981 et qu'une première convention collective signée en 1983 permettait à l'employeur d'assigner et de transférer les travailleurs à diverses unités de l'entreprise selon ses besoins. L'employeur avait constaté au cours des trois mois précédents une baisse de la productivité attribuée à la conduite de certains travailleurs, qui ont alors reçu un avertissement écrit. La situation ne s'étant pas améliorée, en janvier 1994, l'employeur a offert aux 16 travailleurs un transfert dans d'autres unités avec les mêmes salaires et avantages; le 4 janvier, sept d'entre eux ont accepté l'offre et les neuf autres l'ont déclinée. L'employeur a demandé l'autorisation au ministère de la Main-d'oeuvre de les licencier conformément à la loi no 12/1964 sur la cessation de la relation de travail dans les entreprises privées. Le 7 janvier, M. Ujang Komara a organisé une grève en présentant diverses revendications. Le ministère de la Main-d'oeuvre a tenté de fournir sa médiation dans le conflit et a proposé un règlement basé sur le bipartisme, mais sans succès. L'affaire a été ensuite portée devant le bureau régional du Comité du règlement des différends du travail qui a organisé des rencontres les 9, 16, 21, 23 et 28 février. Le 9 mars, le bureau régional a accordé à l'employeur l'autorisation de licencier les neuf travailleurs sur la base de leur refus d'être transférés. L'employeur a dû leur verser leur salaire pour janvier 1994 et leur compensation au titre du congé annuel pour 1993. M. Dodi Tirto a démissionné depuis le 17 janvier et a reçu une indemnisation intégrale.
  4. 411. En ce qui concerne la situation dans l'entreprise CV Sinar Laut, le gouvernement fait remarquer que le licenciement des trois travailleurs n'a jamais été porté à la connaissance des autorités et il fournit les informations suivantes: M. Irwantanto a démissionné de l'entreprise au début de 1994, Mme Lita n'est jamais revenue dans l'entreprise depuis le début de 1994 et est, semble-t-il, retournée dans son village; selon les informations dont disposent le gouvernement et l'employeur, il n'existe pas de travailleur du nom de Nawi dans l'entreprise. Le gouvernement ajoute qu'un syndicat existe à CV Sinar Laut depuis 1985 et que la première convention collective a été signée en 1987.

C. Conclusions du comité

C. Conclusions du comité
  1. 412. Le gouvernement note que les allégations formulées dans le présent cas soulèvent plusieurs questions graves d'application des principes de la liberté syndicale.
  2. 413. En ce qui concerne le licenciement de sept travailleurs de l'entreprise Tambaksari Jalmorejo, le comité note que les preuves présentées, notamment la lettre du 14 juin 1993 du chef du personnel avisant des travailleurs de leur licenciement, démontrent de façon claire que ces travailleurs ont été licenciés pour avoir voulu créer une unité du SBSI au sein de l'entreprise. Le comité rappelle qu'un des principes les plus élémentaires de la liberté syndicale est que les travailleurs et les employeurs ont le droit de créer les organisations de leur choix et que la convention no 98 prévoit qu'une protection doit s'appliquer en ce qui concerne les actes ayant pour but de congédier un travailleur ou de lui porter préjudice en raison de son affiliation syndicale. Par conséquent, le comité estime que les travailleurs concernés devraient être réintégrés dans leur poste de travail.
  3. 414. De l'avis du comité, les entretiens bipartites et la procédure administrative de l'autorisation de licenciement, qui, selon le gouvernement, a conduit à un règlement dans le présent cas, n'accordent pas une protection adéquate aux travailleurs contre les actes de discrimination antisyndicale puisqu'il apparaît que la législation actuellement en vigueur permet à un employeur d'invoquer une simple "absence d'harmonie dans la relation de travail" pour justifier le licenciement de travailleurs qui souhaitent seulement exercer un droit fondamental dans le respect des principes de la liberté syndicale. Le comité a déjà indiqué qu'"il n'apparaît pas qu'une protection suffisante contre les actes de discrimination antisyndicale visés par la convention no 98 soit accordée par une législation permettant en pratique aux employeurs, à condition de verser l'indemnité prévue par la loi pour tous les cas de licenciement injustifié, de licencier un travailleur, même si le motif réel en est son affiliation ou son activité syndicale". (Recueil de décisions et de principes du Comité de la liberté syndicale, troisième édition, 1985, paragr. 547.) Le comité se réfère aussi aux recommandations faites dans le rapport de la mission de contacts directs qui a eu lieu en Indonésie en novembre 1993 et qui a formulé, entre autres, à cet égard les recommandations suivantes:
    • a) ... Des mesures devraient être prises dans la loi et dans la pratique pour garantir aux travailleurs une protection effective contre les actes de discrimination antisyndicale et les actes d'ingérence des employeurs:
      • - en codifiant et en simplifiant les dispositions en vigueur à ce sujet;
      • - en adoptant des dispositions tendant à faciliter la fourniture de preuves;
      • - en renforçant les sanctions prévues pour les violations de dispositions portant sur la discrimination antisyndicale et l'ingérence;
      • - en rationalisant et renforçant les mesures d'application; ...
        • (Rapport de la commission d'experts, CIT, 81e session, 1994, p. 287.) Le comité se réfère aussi à la discussion approfondie tenue sur ce sujet au sein de la Commission de l'application des normes de la Conférence internationale du Travail en 1994 (CIT, 81e session, Compte rendu provisoire no 25, pp. 107-109). Le comité note que le gouvernement a manifesté sa volonté de modifier sa législation du travail et que, à cette fin, il a demandé et obtenu l'assistance technique du Bureau; en conséquence, il demande instamment au gouvernement d'adopter rapidement, et ce en consultation avec toutes les parties intéressées, y compris l'organisation plaignante nationale, un cadre législatif accordant une protection adéquate aux travailleurs contre les actes de discrimination antisyndicale et de veiller à ce que ces mesures soient effectivement appliquées dans la pratique.
      • 415. Le comité note, en outre, que le gouvernement n'a fourni aucune réponse sur les autres événements survenus à Medan en relation avec ces licenciements, à savoir les allégations concernant l'arrestation de deux dirigeants du SBSI, MM. Amosi Telambanua et Soniman Lafau, et les mauvais traitements qu'ils auraient subis, et que l'organisation plaignante a porté plainte à cet égard. Le comité demande au gouvernement de le tenir informé de la situation des syndicalistes détenus ainsi que des résultats sur toute enquête entreprise au sujet des mauvais traitements qui leur auraient été infligés.
    • 416. En ce qui concerne l'allégation d'ingérence dans les affaires syndicales et de favoritisme envers la SPSI, le comité constate tout d'abord que le gouvernement se contente de répondre que le SBSI n'est pas une organisation de travailleurs car il ne satisfait pas aux exigences prévues par la législation indonésienne. Le comité rappelle à cet égard que, si les organisations de travailleurs doivent respecter la légalité, la législation nationale ne doit pas porter atteinte ni être appliquée de manière à porter atteinte aux principes de la liberté syndicale. Ceci signifie notamment, comme souligné plus haut; que les travailleurs devraient avoir le droit de constituer des organisations de leur choix ainsi que celui de s'affilier à ces organisations. Deuxièmement, le comité rappelle que la discrimination à l'égard d'un syndicat donné met en cause le droit des travailleurs de créer des organisations de leur choix et de s'y affilier. (Recueil, op. cit., paragr. 252.) Il relève que, par la lettre du 11 juin 1993 susmentionnée, le chef de la Direction des affaires sociales et politiques a donné ouvertement ordre aux autorités locales d'empêcher la création d'unités du SBSI et de se conformer à la politique gouvernementale qui consiste à ne reconnaître que la SPSI. Le comité observe en outre que cette lettre, qui normalement devrait faire l'objet d'une circulation interne, a été transmise, entre autres, au président du conseil régional de la SPSI; par ailleurs, la lettre du 30 juin 1993 du conseil régional de la SPSI adressée au conseil national, qui devrait aussi faire l'objet d'une distribution interne entre les dirigeants syndicaux régionaux et locaux, a aussi été adressée au gouverneur de la Province du Nord de Sumatra ainsi qu'au chef du bureau régional du ministère de la Main-d'oeuvre. Le comité considère à tout le moins que cela démontre une étroite relation de travail entre la SPSI et les autorités du travail et autres. Soulignant l'importance qu'il attache à la Résolution de 1952 concernant l'indépendance du mouvement syndical, le comité demande instamment au gouvernement de s'abstenir de faire preuve de favoritisme ou, au contraire, de discrimination à l'égard d'un syndicat donné et lui demande d'adopter une attitude neutre lorsqu'il traite avec les organisations d'employeurs et de travailleurs afin qu'elles soient toutes placées sur un pied d'égalité.
  4. 417. En ce qui concerne l'interdiction de la tenue du congrès national du SBSI, le gouvernement répond que la demande de l'organisation a été rejetée "pour non-conformité avec les exigences légales", sans toutefois préciser quelles sont ces exigences. Le comité note, à cet égard, que si les organisations de travailleurs doivent, comme tous les autres groupes et personnes, se conformer aux dispositions générales relatives aux réunions publiques, la liberté de réunion syndicale constitue l'un des éléments fondamentaux des droits syndicaux. (Recueil, ibid., paragr. 140.) Le comité rappelle aussi que les mesures prises par les autorités pour faire respecter la légalité ne devrait en aucune manière avoir pour effet d'empêcher les organisations de travailleurs et d'employeurs de tenir leur congrès annuel (Recueil, ibid., paragr. 144), et que les organisations de travailleurs et d'employeurs devraient avoir le droit de tenir des congrès sans autorisation préalable et d'en rédiger les ordres du jour en pleine liberté. (Recueil, ibid., paragr. 145.) Le comité demande au gouvernement d'autoriser la tenue sans entrave du Congrès du SBSI et d'adopter toutes les mesures nécessaires ainsi que de donner les instructions afin qu'à l'avenir les organisations d'employeurs et de travailleurs ne soient pas gênées dans la préparation, l'organisation et la tenue de congrès et d'autres réunions.
  5. 418. S'agissant des raisons de la non-délivrance de la carte d'identité de M. Adi Wyono, président de la section du SBSI à Jombang, le comité note que les témoignages sont contradictoires. Selon l'organisation plaignante, le refus était motivé par le fait qu'il était membre du SBSI et que les autorités ont exercé des pressions pour obtenir sa démission, alors que le gouvernement précise que la raison était qu'il n'a pas pu fournir un certain document. Le comité rappelle, d'une manière générale, que les autorités ne devraient pas retenir des documents officiels en raison de l'appartenance d'une personne à une organisation d'employeurs ou de travailleurs car ces documents sont parfois nécessaires pour d'importantes activités, comme par exemple l'obtention ou la conservation d'un emploi. Ceci est encore plus important pour les personnes investies d'une responsabilité dans cette organisation dans la mesure où le refus peut les empêcher d'exercer leurs fonctions, comme par exemple de se rendre à une réunion officielle. Le comité demande donc au gouvernement de prendre les mesures nécessaires pour faire en sorte que, une fois fournies tous les documents exigés, la nouvelle carte d'identité soit délivrée sans retard à M. Adi Wyono.
  6. 419. Pour ce qui est des licenciements prononcés dans l'entreprise CV Bumi Waras à Bandar Lumpung, le comité note, d'après les informations disponibles, qu'un différend du travail, dont les raisons exactes ne sont pas données, a éclaté dans cette entreprise. Il semble aussi que l'employeur, conformément à la loi et à la convention collective, ait obtenu l'autorisation de licencier neuf travailleurs ayant refusé un transfert. A partir des informations dont il dispose, le comité n'est pas en mesure de déterminer de façon définitive si ces travailleurs ont été licenciés en raison de leur affiliation au SBSI et de leurs activités syndicales ou s'il a été mis un terme à la relation de travail selon les dispositions légales et contractuelles en vigueur.
  7. 420. Le comité note cependant que le gouvernement ne fournit aucune réponse aux allégations concernant l'interrogatoire et les actes d'intimidation à l'encontre de quatre travailleurs par la police et des militaires en relation avec ces événements. Le comité note que le rapport de la mission de contacts directs de 1993 avait constaté la gravité de ce problème en Indonésie et formulé des recommandations précises à cet égard en déclarant que le gouvernement devrait prendre des mesures "propres à éviter au maximum l'intervention de la police et des forces armées en cas de conflits du travail et, de façon plus générale, pour tout ce qui concerne le travail". (Rapport de la commission d'experts de 1994, p. 287.) Le comité rappelle, en outre, que "l'arrestation de dirigeants syndicaux et de syndicalistes dans l'exercice d'activités syndicales légitimes (même si c'est pour une courte période) constitue une violation des principes de la liberté syndicale". (Recueil, ibid., paragr. 88.) Le comité demande instamment au gouvernement de prendre les mesures nécessaires et de donner des instructions pour prévenir la répétition de tels incidents à l'avenir.
  8. 421. En ce qui concerne les licenciements survenus dans l'entreprise CV Sinar Laut, le comité note que l'organisation plaignante se contente d'indiquer que les trois personnes en question ont été licenciées en raison de leur appartenance au SBSI, sans fournir d'autres détails ou de preuves sur les circonstances de leur licenciement. Au vu des informations fournies par le gouvernement (une démission, une personne absente, un salarié inconnu), le comité n'est pas en mesure de déterminer si ces licenciements ont constitué des violations des droits syndicaux ni s'il a été mis fin à la relation de travail conformément aux dispositions légales et contractuelles en vigueur à ce moment.
  9. 422. Au-delà des événements précis en cause dans le présent cas, le comité est dans l'obligation de faire observer que les allégations révèlent, d'un point de vue plus général, une situation de monopole syndical de fait et une ingérence massive de la police et des forces armées dans les questions concernant le travail. Le comité exprime son inquiétude devant la situation, notamment compte tenu du fait que la commission d'experts a formulé des observations depuis de nombreuses années sur certaines de ces questions dans son rapport annuel; ces observations à leur tour ont fait l'objet de discussions approfondies au sein de la Commission de l'application des normes de la Conférence, y compris lors de la session de juin 1994 de la Conférence internationale du Travail. Notant que le gouvernement a demandé et obtenu l'assistance d'une mission de contacts directs du BIT, dont le rapport a abordé ces problèmes et formulé des recommandations précises en vue de les résoudre, le comité espère que le gouvernement poursuivra sa coopération avec l'OIT sur ces questions et qu'il continuera d'utiliser son assistance technique en vue, dans un proche avenir, d'harmoniser sa législation et sa pratique avec les principes de la liberté syndicale.

Recommandation du comité

Recommandation du comité
  1. 423. Vu les conclusions qui précèdent, le comité invite le Conseil d'administration à approuver les recommandations suivantes:
    • a) Le comité demande instamment au gouvernement d'adopter rapidement, et ce en consultation avec toutes les parties intéressées, y compris l'organisation plaignante nationale, un cadre législatif accordant une protection adéquate aux travailleurs contre les actes de discrimination antisyndicale et de prendre toutes les mesures nécessaires pour faire en sorte que ces mesures soient effectivement appliquées dans la pratique. Le comité estime que les travailleurs de l'entreprise Tambaksari Jalmorejo, congédiés pour des raisons antisyndicales, devraient être réintégrés dans leur poste de travail.
    • b) Le comité demande au gouvernement de le tenir informé de la situation des syndicalistes détenus, MM. Amosi Telambanua et Soniman Lafau, ainsi que des résultats sur toute enquête entreprise au sujet des mauvais traitements qui leur auraient été infligés.
    • c) Le comité demande instamment au gouvernement de s'abstenir de faire preuve de favoritisme ou de discrimination envers un syndicat donné et l'invite à adopter une attitude neutre lorsqu'il traite avec les organisations d'employeurs et de travailleurs afin qu'elles soient placées sur un pied d'égalité.
    • d) Le comité demande au gouvernement d'autoriser la tenue sans entrave du Congrès du SBSI et d'adopter les mesures nécessaires, ainsi que de donner des instructions afin qu'à l'avenir les organisations de travailleurs puissent organiser et tenir leurs congrès et autres réunions en toute liberté.
    • e) Le comité demande au gouvernement de prendre toutes les mesures nécessaires, une fois fournis les documents requis, pour délivrer une nouvelle carte d'identité à M. Adi Wyono.
    • f) Le comité demande instamment au gouvernement d'adopter les mesures nécessaires et de donner des instructions pour prévenir l'arrestation et la détention de dirigeants syndicaux et de syndicalistes lorsqu'ils exercent légitimement leurs activités syndicales.
    • g) Le comité invite le gouvernement à poursuivre sa coopération avec l'OIT dans les questions du travail et à continuer à utiliser son assistance technique en vue d'harmoniser, dans un proche avenir, sa législation et sa pratique avec les principes de la liberté syndicale.
    • h) Le comité attire l'attention de la commission d'experts sur les aspects législatifs du cas qui concernent la convention no 98.
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