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Rapport intérimaire - Rapport No. 310, Juin 1998

Cas no 1773 (Indonésie) - Date de la plainte: 20-AVR. -94 - Clos

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432. Le comité a examiné ce cas à ses sessions de mars 1995 (voir 297e rapport, paragr. 484-537, approuvé par le Conseil d'administration à sa 262e session (mars-avril 1995)), mars 1996 (voir 302e rapport, paragr. 447-479, approuvé par le Conseil d'administration à sa 265e session (mars 1996)), novembre 1996 (voir 305e rapport, paragr. 327-371, approuvé par le Conseil d'adminis-tration à sa 267e session (novembre 1996)) et novembre 1997 (voir 308e rapport, paragr. 404-450, approuvé par le Conseil d'administration à sa 270e session (novembre 1997)), où il a présenté des conclusions intérimaires.

  1. 432. Le comité a examiné ce cas à ses sessions de mars 1995 (voir 297e rapport, paragr. 484-537, approuvé par le Conseil d'administration à sa 262e session (mars-avril 1995)), mars 1996 (voir 302e rapport, paragr. 447-479, approuvé par le Conseil d'administration à sa 265e session (mars 1996)), novembre 1996 (voir 305e rapport, paragr. 327-371, approuvé par le Conseil d'adminis-tration à sa 267e session (novembre 1996)) et novembre 1997 (voir 308e rapport, paragr. 404-450, approuvé par le Conseil d'administration à sa 270e session (novembre 1997)), où il a présenté des conclusions intérimaires.
  2. 433. L'Union internationale des travailleurs de l'alimentation, de l'agriculture, de l'hôtellerie-restauration, du tabac et des branches connexes (UITA) a présenté de nouvelles allégations dans une communication datée du 6 novembre 1997. La Confédération mondiale du travail (CMT) a fait de même dans une communication datée du 10 mars 1998. La CMT a présenté des informations complémentaires dans une communication en date du 25 mai 1998.
  3. 434. Le gouvernement a fourni ses observations dans une communication datée du 16 février 1998.
  4. 435. L'Indonésie n'a pas ratifié la convention (no 87) sur la liberté syndicale et la protection du droit syndical, 1948. En revanche, elle a ratifié la convention (no 98) sur le droit d'organisation et de négociation collective, 1949.

A. Examen antérieur du cas

A. Examen antérieur du cas
  1. 436. Lors de son précédent examen du cas, le comité avait examiné de très graves allégations de violation continue des droits syndicaux en Indonésie concernant le déni du droit des travailleurs de constituer des organisations de leur choix, l'ingérence persistante des autorités publiques, des militaires et des employeurs dans les activités syndicales, et les restrictions apportées sans cesse à la négociation collective et à l'exercice du droit de grève. Le cas traitait aussi de graves allégations relatives au meurtre, à la disparition, à l'arrestation et à la détention d'un certain nombre de dirigeants syndicaux et de travailleurs.
  2. 437. Le comité avait profondément déploré le fait que les autorités indonésiennes n'avaient pratiquement adopté aucune mesure pour redresser la situation. Au contraire, la gravité des nouvelles allégations l'avait conduit à estimer que la situation générale des travailleurs en Indonésie n'avait pas évolué et se caractérisait toujours par des violations de plus en plus graves, en droit et en pratique, des droits fondamentaux de l'homme et des principes de la liberté syndicale.
  3. 438. A sa session de novembre 1997, au vu des conclusions intérimaires du comité, le Conseil d'administration avait approuvé les recommandations suivantes:
  4. a. Le comité exprime sa profonde préoccupation du fait qu'aucune action n'ait été entreprise par le gouvernement afin de remédier à la situation des travailleurs indonésiens, laquelle se caractérise par des violations graves et continues des droits fondamentaux et syndicaux ainsi que des violations des principes de la liberté syndicale en fait et en droit.
  5. b. Le comité rappelle que la législation indonésienne, qui impose une situation de monopole syndical en exigeant l'accord du SBSI pour l'enregistrement de tout autre syndicat, énonce des obligations qui sont si contraignantes qu'elles constituent une limitation majeure de la liberté syndicale. Le comité prie donc à nouveau instamment le gouvernement d'éliminer ce type d'obstacle afin de garantir que le droit des travailleurs de s'organiser et de négocier collectivement soit pleinement reconnu en droit et en pratique, et de le tenir informé à cet égard.
  6. c. En ce qui concerne spécifiquement le SBSI, le comité demande à nouveau instamment au gouvernement de prendre les mesures nécessaires pour faire en sorte que le SBSI soit enregistré sans autre délai afin qu'il puisse exercer ses activités syndicales légitimes. Le comité prie le gouvernement de le tenir informé à cet égard.
  7. d. Le comité prie instamment le gouvernement d'ouvrir une enquête indépendante pour établir clairement les raisons du licenciement de M. Mulyono et, s'il apparaît que celui-ci a été licencié au motif d'activités syndicales légitimes, de prendre rapidement toutes les mesures nécessaires pour lui permettre de demander sa réintégration dans son poste, s'il le souhaite. Le comité prie le gouvernement de le tenir informé à cet égard.
  8. e. Le comité prie instamment le gouvernement d'indiquer immédiatement si les seize travailleurs qui ont été licenciés de l'entreprise Southern Cross Textile Industry en avril 1993 étaient membres du SBSI et, si tel est le cas, de faire en sorte qu'ils soient réintégrés dans leurs postes, s'ils le souhaitent. Le comité prie le gouvernement de le tenir informé à cet égard.
  9. f. Le comité prie instamment le gouvernement de fournir rapidement des informations sur: i) le sort de MM. Mahammad Ali, 19 ans (PT Peridoni) et Mulyadi, 24 ans (PT Ganda Seribu), qui auraient été placés en détention à la suite des événements survenus à Medan en avril 1994; et ii) l'issue des procès de MM. Icang et Suryandi. Le comité prie le gouvernement de le tenir informé à cet égard.
  10. g. Tout en notant que le gouvernement déclare s'attendre à ce que l'enquête concernant le meurtre de Mme Marsinah soit résolue sous peu et que le responsable soit puni en conséquence, le comité demande au gouvernement de fournir des informations sur la suite de ce cas dans les meilleurs délais. De plus, le comité prie instamment le gouvernement d'ouvrir une enquête judiciaire indépendante sur le meurtre de Mme Marsinah qui a eu lieu voilà plus de quatre ans en vue de sanctionner les personnes responsables; il prie le gouvernement de le tenir informé du résultat de cette enquête.
  11. h. Rappelant l'importance du principe d'un procès rapide et équitable par une instance indépendante et impartiale, et estimant que les accusations portées et les mesures prises contre M. Pakpahan, sous prétexte d'activités subversives alléguées, sont liées à ses activités syndicales, le comité prie instamment le gouvernement de tout mettre en oeuvre pour abandonner les charges pénales à l'encontre de M. Pakpahan en rapport avec les événements d'avril 1994 survenus à Medan et ceux survenus à Jakarta en juillet 1996 et qu'il soit libéré. Le comité appelle une nouvelle fois le gouvernement à faire en sorte que M. Pakpahan puisse librement exercer ses activités syndicales légitimes dès qu'il pourra quitter l'hôpital. Le comité prie le gouvernement de le tenir informé à cet égard.
  12. i. Le comité prie à nouveau le gouvernement de fournir des informations sur: i) neuf membres du bureau de la branche de Riau du SBSI placés en détention au début d'août 1996 et, dans le cas où ces personnes seraient toujours en détention, de prendre les mesures nécessaires pour leur libération immédiate; ii) MM. Rekson Silaban, directeur de recherche, Santosa, coordinateur régional, Mehbob, membre du personnel de l'Institut d'aide juridique, tous membres du bureau du SBSI qui ont été interrogés et accusés d'avoir fomenté les événements de juillet 1996, et de prendre les mesures nécessaires pour que les charges retenues contre eux soient rapidement abandonnées; et iii) toutes les mesures antisyndicales dirigées contre les membres du bureau et les militants du SBSI à la suite des événements survenus en juillet 1996, notamment les mesures d'arrestation, d'interrogatoire et d'accusation dont ces personnes ont fait l'objet.
  13. j. Le comité prie instamment le gouvernement de fournir des informations sur la situation de Mme Dita Sari et de M. Coen Pontoh, deux responsables de syndicats indépendants qui auraient été arrêtés et emprisonnés à la suite de leur participation à une action directe, et de prendre les mesures nécessaires pour les faire relâcher immédiatement s'ils sont encore en prison.
  14. k. Le comité invite le gouvernement à fournir des informations sur l'allégation selon laquelle 18 travailleurs contractuels auraient été licenciés de l'entreprise PT Pelangi Selaras Indonesia (PT PSI) à Medan le 11 juillet 1997 pour leur appartenance au SBSI. Il prie instamment le gouvernement de prendre les mesures nécessaires pour veiller à ce que ces 18 travailleurs soient dûment réintégrés s'ils sont effectivement membres du SBSI.
  15. l. Pour pouvoir se prononcer en pleine connaissance des faits, le comité prie le SBSI de fournir un complément d'informations sur: i) les violences physiques dont MM. Aryanto et Rozali ont fait l'objet; ii) les motifs de l'arrestation de M. Asipto Parangun-Agin; iii) le contenu du tract distribué par M. Farid Mu'adz concernant le droit de grève; iv) les actes de discrimination antisyndicale à l'encontre de sept travailleurs de PT Tris Delata Agindo, qui auraient été contraints de renoncer à leur affiliation au SBSI; et v) les actes de vandalisme commis contre l'enseigne du SBSI à Medan et à Binjai.
  16. m. Le comité appelle l'attention de la Commission d'experts pour l'application des conventions et recommandations sur les aspects législatifs du cas en rapport avec la convention no 98.
  17. B. Nouvelles allégations des plaignants
  18. 439. Dans sa communication du 6 novembre 1997, l'UITA affirme que le 19 septembre 1997 deux responsables de l'UITA -- Ma Wei Pin et Greg Sword, respectivement secrétaire et président de l'Organisation régionale Asie/Pacifique de l'UITA -- ont été détenus par la police alors qu'ils assistaient au 2e Congrès de la Confédération syndicale indépendante SBSI à Jakarta. Après que des policiers en tenue anti-émeute eurent interrompu le congrès syndical, Ma Wei Pin et Greg Sword furent emmenés au commissariat de police central de Jakarta et gardés ensuite sous la surveillance de policiers jusqu'au moment où ils furent conduits sous escorte, le 21 septembre 1997, à l'aéroport, d'où ils retournèrent en Australie. Aucune accusation n'a été portée contre eux, et ils n'ont pas été informés de la raison de leur détention.
  19. 440. L'UITA explique que Ma Wei Pin et Greg Sword (qui est également secrétaire national de la Fédération nationale des travailleurs d'Australie et vice-président du Conseil des syndicats australiens (ACTU) assistaient au congrès du SBSI pour faire part de l'appui de l'UITA à la défense de la liberté syndicale en Indonésie et de sa solidarité avec le président du SBSI, Muchtar Pakpahan, qui attend actuellement d'être jugé de prétendue "subversion", accusations pour lesquelles il pourrait être condamné à la peine capitale. L'UITA affirme que la détention de ces dirigeants ainsi que les mesures prises par la police à l'encontre d'un congrès syndical pacifique constituent une violation grave des droits démocratiques fondamentaux et des droits syndicaux. De plus, les mesures prises par le gouvernement violent également le droit de l'UITA, en tant qu'organisation internationale de travailleurs, d'avoir des réunions et de consulter des organisations de travailleurs en Indonésie. Ces mesures constituent une violation flagrante de la liberté syndicale tant du SBSI, dont la Fédération de l'alimentation, des boissons, du tourisme, de l'hôtellerie-restauration est affiliée à l'UITA, que de l'UITA même.
  20. 441. Dans sa communication du 10 mars 1998, la CMT déclare qu'elle a été informée par son affilié, le SBSI, de l'arrestation et de la détention des dirigeants du syndicat indépendant suivants: Mme Farah Diba (chef du Département du travail pour les femmes et les enfants du SBSI); M. Yudi Rahmat (vice-président du Conseil national du SBSI); M. Yudi Hermanto (président du SBSI à Padang); M. Sukirman (membre du SBSI de Lampung); M. Sanusi (membre du SBSI de Tanjung Priok-Jakarat) et MM. Seno, Mahmut et Sumantri (militants de la section locale du SBSI à Serang, Java-Ouest).
  21. 442. La CMT allègue plus précisément que Mme Diba a été arrêtée par la police régionale de Jakarta (POLDA) le 8 mars 1998 pour avoir organisé une manifestation sur la voie publique dans le cadre de la campagne de protestation que le SBSI mène contre l'augmentation des prix du riz et en faveur de conditions de vie convenables pour les travailleurs. Selon M. Aritonang, porte-parole de la police de Jakarta, elle sera accusée, en vertu de l'article 510 du Code pénal, d'avoir dirigé une manifestation non autorisée. L'article 510 prévoit une peine maximale de deux semaines d'emprisonnement. MM. Rahmat et Harmanto ont été arrêtés le 9 mars 1998 pour avoir tenu une réunion illégale et distribué des lettres de protestation au public. Ils n'ont pas été accusés formellement, mais la CMT craint que leurs cas soient considérés comme relevant de la loi, tristement célèbre, sur les activités subversives qui prévoit la peine maximale de la condamnation à mort. Comme MM. Sukirman et Sanusi, ils ont été arrêtés le 10 mars 1998 et attendent actuellement d'être interrogés par la police. M. Sukirman a été arrêté parce qu'il essayait de créer une section du SBSI au niveau de l'usine à Lampung Utara (Sud de Sumatra). Enfin, MM. Seno, Mahmut et Sumantri ont été arrêtés le 10 mars 1998 vers 1 heure du matin par la police de la ville de Serang. La police a confisqué des documents du SBSI en leur possession. Le SBSI ne dispose pas d'autres informations à leur sujet.
  22. 443. La CMT affirme que les violations des droits syndicaux en Indonésie n'ont pas seulement été systématiques, mais aussi particulièrement brutales. Au cours des derniers mois, la répression antisyndicale s'est intensifiée dans le contexte de la réélection du Président Suharto et de la crise financière persistante que connaît le pays, crise qui a conduit à une mobilisation sociale croissante des travailleurs, des étudiants, des organisations non gouvernementales et de la société civile dans son ensemble. La CMT souligne que c'est dans ce contexte que le SBSI a mené une campagne pour obtenir sa reconnaissance, ainsi que la libération du président Muchtar Pakpahan, et pour mettre un terme aux licenciements massifs des travailleurs, au népotisme et à la corruption en Indonésie. La dernière recrudescence de la répression dirigée contre des dirigeants du SBSI dans l'exercice de leurs activités syndicales légitimes constitue une fois de plus une violation des engagements du gouvernement envers l'OIT. La CMT conclut en insistant sur la nécessité d'obtenir la libération immédiate de tous ces syndicalistes détenus et le respect des principes de la liberté syndicale par le gouvernement.
  23. 444. Enfin, dans une communication datée du 25 mai 1998, la CMT indique que M. Muchtar Pakpahan a été libéré par le gouvernement indonésien ainsi qu'un certain nombre d'autres dirigeants et membres du SBSI.
  24. C. Nouvelle réponse du gouvernement
  25. Obstacles législatifs empêchant les travailleurs de constituer des organisations de leur choix (308e rapport, paragr. 450 b))
  26. 445. Le gouvernement déclare que les lois et réglementations du travail existantes assurent de manière adéquate une protection du droit d'organisation et du droit de négocier collectivement des travailleurs. Qui plus est, afin de faciliter l'expansion des syndicats, le ministre de la Main-d'oeuvre a émis le règlement no 1 du 17 janvier 1994. En vertu de ce règlement, les travailleurs peuvent constituer un syndicat indépendant et démocratique dans chaque entreprise respectivement, librement et sans aucune exigence concernant l'affiliation à un autre syndicat. Selon les données disponibles en décembre 1997, 1 230 syndicats indépendants avaient été formés au niveau de l'entreprise. Le syndicat d'entreprise nouvellement créé est uniquement tenu de fournir des informations sur son organisation et les membres de son bureau au ministère de la Main-d'oeuvre. Une fois le syndicat constitué, celui-ci est habilité à exercer ses fonctions et à négocier avec les employeurs pour exercer ses fonctions et à négocier avec les employeurs pour rédiger des conventions collectives. Le gouvernement relève en outre que les articles 27 à 35 de la nouvelle loi du travail no 25 de 1997 disposent notamment que: chaque travailleur a le droit d'organiser librement et de s'affilier à un syndicat; chaque syndicat d'entreprise est formé par les travailleurs et pour les travailleurs d'une manière démocratique sur la base du secteur d'industrie; les employeurs n'ont pas le droit de limiter la création de syndicats; et un syndicat a pour fonctions principales d'élaborer des conventions collectives de travail et de représenter les travailleurs dans le cadre du règlement des conflits du travail.
  27. Informations concernant M. Mulyono (308e rapport, paragr. 450 d))
  28. 446. Le gouvernement rappelle que M. Mulyono a été licencié le 6 mai 1994, aux motifs qu'il ne pouvait s'entendre avec son supérieur et qu'il causait souvent des perturbations du fait de son influence sur les autres travailleurs. Le gouvernement ajoute qu'un conciliateur du ministère de la Main-d'oeuvre a tenté de résoudre cette affaire de manière pacifique en invitant les parties à dialoguer. Les propositions du conciliateur ont été acceptées par M. Mulyono, mais pas par l'entreprise. Il a donc été suggéré que la société fasse recours devant la Commission régionale de règlement des conflits. Le 28 septembre 1994, cette commission a décidé d'autoriser l'entreprise à licencier M. Mulyono avec effet à compter du 19 septembre 1994. Sur la base de l'acccord conclu entre les parties, M. Mulyono a accepté la somme de 400 000 roupies à titre de dédommagement, somme qui devait être versée par l'entreprise au plus tard le 26 septembre 1994. De l'avis du gouvernement, le cas de la cessation d'emploi de M. Mulyono par la société PT Golden Overseas Textile est en conséquence réglé.
  29. Situation dans l'entreprise Southern Cross Textile Industry (308e rapport, paragr. 450 e))
  30. 447. Le gouvernement réitère qu'en 1993 l'entreprise PT Southern Cross Textile Industry (SCTI), sise à Jakarta, employait 1 500 travailleurs et que, depuis 1974, la SPSI s'est établie dans cette entreprise. Au début d'avril 1993, des négociations ont eu lieu entre la SPSI et l'employeur en vue d'une augmentation annuelle de salaire pour le 30 mai 1993. A cette période, la troisième convention collective de travail entrait dans sa deuxième année. Tandis que les négociations étaient en cours, le 19 avril 1993, entre 14 et 18 heures, un groupe de travailleurs a forcé les autres travailleurs à faire grève pour une augmentation de salaire. Le gouvernement réitère que, afin d'éviter toute inconduite et tout acte de destruction, l'employeur et la SPSI se sont entendus pour poursuivre les négociations hors des locaux de l'entreprise. Le gouvernement déclare qu'au début de la soirée du 22 avril 1993 et jusqu'au lendemain vers 11 h 30 un groupe de travailleurs a tenu les portes de l'établissement fermées, empêchant les autres de se rendre à leur travail. Devant cette situation, la direction de l'entreprise a licencié 16 travailleurs.
  31. Enquête du gouvernement sur la mort de Mme Marsinah (308e rapport, paragr. 450 g))
  32. 448. En ce qui concerne la mort de Mme Marsinah, le gouvernement indique que cet homicide reste un mystère. Le gouvernement rappelle que Mme Marsinah, une jeune militante syndicaliste, a pris part à un mouvement de grève les 3 et 4 mai 1993 dans l'entreprise PT Catur Putera Surya (CPS) à Sidoarjo, Surabaya, Est de Java. Le 5 mai 1993, Mme Marsinah n'est pas apparue à son lieu de travail. Son corps a été retrouvé par la suite le 8 mai 1993 dans la jungle de Nganjuk (Est de Java, à environ 85 km de Surabaya). En raison de la date de la grève et du décès de Mme Marsinah, de nombreuses personnes, la presse, les ONG et même certains organismes diplomatiques étaient tout à fait convaincus que le décès de Mme Marsinah était dû à sa participation à la grève. De plus, à ce moment-là, les agences de presse étrangères ont exercé une forte pression qui a, dans une certaine mesure, influencé la police et les tribunaux en les laissant penser que le meurtrier était l'employeur de l'entreprise concernée. Le tribunal régional de Sidoarjo a décidé de condamner les suspects à des peines de prison, à savoir M. Yudi Susanto (propriétaire de l'entreprise) à sept mois, M. Yudi Astono (directeur général de PT CPS, bureau de Porong) à quatre ans, M. Bambang Wuryantoro (chef de division, responsable général), M. Hidayat (caissier et président de l'unité de la SPSI), M. As Prayogo (sécurité) et M. Suwono (sécurité) à 12 ans chacun, M. Karyaono Wongso (chef de division, contrôle de la maintenance) et M. Suprapto (garde) à 13 ans chacun. Un appel ayant été interjeté, le tribunal de Surabaya a jugé M. Yudi Susanto non coupable à la différence des autres suspects. Néanmoins, à la fin de mai 1995, la Cour suprême a déclaré tous les suspects non coupables. Le gouvernement déclare que, depuis lors, il a rouvert l'enquête pour connaître l'idendité réelle du meurtrier de Mme Marsinah. Il espère que le cas sera bientôt résolu et que le coupable sera puni en conséquence.
  33. Information concernant M. Muchtar Pakpahan (308e rapport, paragr. 450 h))
  34. 449. Le gouvernement insiste une nouvelle fois sur le fait que les accusations portées contre M. Pakpahan en rapport avec l'émeute du 27 juillet 1996 sont liées principalement à son poste de président du comité directeur du MARI (Majelis Aksi Rakyat Indonesia) ou Conseil du peuple indonésien pour l'action et non pas simplement à son poste de président du SBSI. Le gouvernement fait remarquer qu'il est accusé d'avoir violé la loi no 11/PNPS/1963 sur les activités subversives, article 1 (3). Ce cas n'a donc pas de rapport avec les questions syndicales mais est de nature politique.

D. Conclusions du comité

D. Conclusions du comité
  1. 450. Tout d'abord, le comité doit exprimer la profonde préoccupation quant au fait que le gouvernement n'a pas répondu du tout à certaines allégations ou n'a répondu que d'une manière superficielle à certaines autres en se bornant à réitérer les informations fournies antérieurement. Le comité rappelle au gouvernement que le but des procédures instituées par l'Organisation internationale du Travail pour l'examen des allégations relatives à des violations des libertés syndicales est d'assurer le respect des libertés syndicales en droit comme en fait. Bien que ces procédures protègent les gouvernements contre des accusations déraisonnables, ceux-ci doivent reconnaître à leur tour l'importance qu'il y a à ce qu'ils présentent, en vue d'un examen objectif, des réponses bien détaillées sur les allégations présentées contre eux. (Voir premier rapport du comité, paragr. 31.) Le comité demande par conséquent instamment au gouvernement de veiller à l'avenir, lorsqu'il répond à des allégations présentées contre lui, de fournir des observations complètes, détaillées et pertinentes qui se réfèrent aux allégations figurant dans la plainte afin que le comité puisse procéder à l'examen de ces questions en pleine connaissance et conscience de tous les faits.
  2. 451. Le comité rappelle que ce cas traite de très graves allégations de violation continue des droits syndicaux en Indonésie concernant le déni du droit des travailleurs de constituer des organisations de leur choix, l'ingérence persistante des pouvoirs publics, des militaires et des employeurs dans les activités syndicales, les restrictions permanentes à la négociation collective et à l'exercice du droit de grève ainsi que divers actes de discrimination antisyndicale, y compris les licenciements. En outre, le comité rappelle sa profonde préoccupation devant l'extrême gravité des allégations relatives au meurtre, à la disparition, à l'arrestation et à la détention d'un certain nombre de dirigeants syndicaux et de travailleurs.
  3. 452. Le comité rappelle que, outre ses quatre précédents examens de ce cas, il a déjà examiné au cours des dernières années deux autres plaintes contre l'Indonésie portant sur des allégations de même nature et aussi graves. (Voir 265e rapport, cas no 1431, paragr. 104-137; 295e rapport, cas no 1756, paragr. 398-429.) Le comité se réfère également à la mission de contacts directs ayant eu lieu en Indonésie en novembre 1993, aux longs débats ayant eu lieu au sein de la Commission de la Conférence sur l'application des normes en 1994, en 1995 et en 1997 et aux nombreux commentaires de la Commission d'experts pour l'application des conventions et recommandations à ce sujet.
  4. 453. Dans ces conditions, tout en notant avec intérêt que certaines mesures positives ont été récemment adoptées par les autorités indonésiennes en ce qui concerne la liberté syndicale, le comité, vu la gravité des nouvelles allégations, estime que la situation générale des travailleurs de l'Indonésie se caractérise toujours par des atteintes graves aux droits fondamentaux de l'homme et par des violations des principes de la liberté syndicale en droit comme en pratique revêtant notamment la forme d'arrestations, d'emprisonnements et de harcèlement de travailleurs et de dirigeants syndicaux.
  5. 454. En ce qui concerne la question des obstacles législatifs empêchant les travailleurs de constituer des organisations de leur choix, le comité note que le gouvernement se borne, dans une large mesure, à répéter les informations fournies dans son rapport antérieur, à savoir que les travailleurs peuvent librement constituer un syndicat indépendant et démocratique au niveau de l'entreprise sur la base du règlement ministériel no 1 du 17 janvier 1994. Selon les données disponibles en décembre 1997, il existe environ 1 230 syndicats de ce type au niveau de l'entreprise qui, en outre, ne sont pas tenus d'être affiliés à un autre syndicat. Le gouvernement ajoute que la nouvelle loi du travail reconnaît, notamment, le droit de chaque travailleur à s'organiser librement.
  6. 455. Le comité note toutefois que l'article 33 de cette nouvelle loi sur les questions de main-d'oeuvre, qui a été promulguée le 3 octobre 1997 et qui prendra effet le 1er octobre 1998, stipule qu' "un syndicat de travailleurs d'entreprise et une association de syndicats de travailleurs doivent être enregistrés auprès du gouvernement conformément aux lois en vigueur" et que cette nouvelle loi ne semble contenir aucune disposition abrogeant le règlement ministériel no 03/MEN/1993 qui prévoit que, pour être enregistré, un syndicat doit compter au moins 100 unités au niveau de l'entreprise, 25 organisations au niveau du district et cinq organisations au niveau provincial ou, au choix, au moins 10 000 membres dans toute l'Indonésie (art. 2 a)). L'article 2 b) du même règlement prévoit qu'une fédération doit compter au moins dix syndicats répondant à ces critères pour pouvoir être enregistré. Le comité se voit par conséquent obligé de rappeler une fois de plus au gouvernement que le système indonésien d'enregistrement des syndicats au plan national comporte des conditions si rigoureuses qu'elles constituent une restriction majeure à la liberté syndicale, étant donné que très peu de syndicats peuvent voir leur création légalement reconnue. Par ailleurs, le comité doit souligner avec force que la prescription légale, selon laquelle un syndicat doit obtenir la recommandation de la Serikat Pekerja Seluruh Indonesia (SPSI) pour être légalement reconnu (selon les dispositions de l'article 2 c) du règlement ministériel no 03/MEN/1993), constitue un obstacle à la libre constitution d'organisations et est donc contraire à la liberté syndicale. Le comité déplore que la loi sur les questions de main-d'oeuvre du 3 octobre 1997 n'élimine pas les obstacles juridiques susmentionnés qui dénient aux travailleurs le droit de créer des organisations de leur choix et constituent par conséquent une violation flagrante de l'un des principes les plus élémentaires de la liberté syndicale.
  7. 456. Par ailleurs, le comité note avec regret que les obstacles juridiques décrits au paragraphe précédent constituent encore un obstacle majeur à la négociation collective puisque, en vertu de l'article 48 1) de la loi sur les questions de main-d'oeuvre de 1997, une convention collective de travail ne peut être élaborée que par un employeur et un syndicat de travailleurs enregistré. Le comité souligne par conséquent, tout comme la Commission d'experts pour l'application des conventions et recommandations (voir, par exemple, observations, rapport III, partie 1A, 1998, pp. 255-257) et la Commission de l'application des normes de la Conférence (CIT, 85e session, 1997, Compte rendu provisoire no 19, pp. 113 à 121), que la limitation à la libre négociation collective imposée par le règlement no 03/MEN/1993 sur les syndicats enregistrés dans l'entreprise, au niveau du district et au niveau de la province, constitue une violation flagrante du principe de la négociation collective libre et volontaire inscrite dans l'article 4 de la convention no 98 ratifiée par l'Indonésie.
  8. 457. Dans ces conditions, le comité demande à nouveau instamment au gouvernement d'éliminer de tels obstacles (tels que l'article 2 a), b) et c) du règlement ministériel no 03/MEN/1993) afin de faire en sorte que le droit des travailleurs de s'organiser et de négocier collectivement soit entièrement reconnu en droit comme en pratique, et de le tenir informé à cet égard.
  9. 458. Abordant le cas spécifique du Serikat Buruh Sejahtera Indonesia (SBSI), qui attend d'être enregistré depuis plus de cinq ans, le comité regrette vivement que le gouvernement ne mentionne même pas cette question très grave dans sa réponse. Pour sa part, le comité rappelle qu'il avait observé lors des précédents examens de ce cas (voir 297e rapport, paragr. 530; 302e rapport, paragr. 472; 305e rapport, paragr. 363, et 308e rapport, paragr. 437) que, même si les conditions juridiques de l'enregistrement sont très rigoureuses et constituent un sérieux obstacle à la liberté syndicale, le SBSI les a toutes remplies hormis l'obtention de la recommandation de la SPSI qui, de toute manière, n'est pas une exigence légitime puisqu'elle est contraire aux principes de la liberté syndicale. Le comité insiste donc sur le fait que toute attitude gouvernementale qui favoriserait une organisation, en l'occurrence la SPSI, ou qui empêcherait les travailleurs de constituer des organisations de leur choix, est un acte de discrimination antisyndicale et est contraire aux principes de la liberté syndicale. Le comité demande donc instamment au gouvernement de prendre les mesures nécessaires pour faire en sorte que le SBSI soit autorisé à être enregistré sans retard en tant que confédération syndicale afin de lui permettre d'exercer ses activités syndicales légitimes. Il demande au gouvernement de fournir des informations sur tout progrès obtenu en la matière.
  10. 459. En ce qui concerne l'enquête de M. Mulyono, qui a été licencié par l'entreprise PT Golden Overseas Textile il y a quatre ans (6 mai 1994), le gouvernement répond que cette question est réglée, car M. Mulyono a accepté, aux termes de l'accord conclu entre les parties, la somme de 400 000 roupies en tant que dédommagement pour la résiliation de son contrat de travail par l'entreprise. Tout en prenant note que M. Mulyono a accepté le dédommagement en septembre 1994, le comité relève qu'il n'apparaît pas qu'une protection suffisante contre les actes de discrimination antisyndicale visés par la convention no 98 soit accordée par une législation permettant en pratique aux employeurs, à condition de verser l'indemnité prévue par la loi pour tous les cas de licenciement injustifié, de licencier un travailleur si le motif réel en est son affiliation ou son activité syndicale. (Voir Recueil de décisions et de principes du Comité de la liberté syndicale, quatrième édition, 1996, paragr. 707.)
  11. 460. Quant à l'allégation d'actes de discrimination antisyndicale contre les travailleurs de l'entreprise Southern Cross Textile Company (SCTI), affiliés au SBSI, le comité rappelle que la diffusion de la circulaire, par laquelle cette société indiquait que des mesures seraient prises contre tout travailleur membre du SBSI ou oeuvrant ouvertement ou non pour le SBSI, remonte à cinq ans et demi (décembre 1992). Le comité se voit donc à nouveau dans l'obligation de rappeler que la convention (no 98) sur le droit d'organisation et de négociation collective, 1949, ratifiée par l'Indonésie prévoit que les travailleurs doivent bénéficier d'une protection adéquate contre le congédiement ou tout autre acte préjudiciable en raison de son affiliation syndicale. Notant que le gouvernement se contente de répéter sa déclaration précédente selon laquelle 16 travailleurs ont été licenciés de la SCTI en avril 1993, le comité demande instamment au gouvernement de veiller à ce que les travailleurs licenciés membres du SBSI soient réintégrés à leur poste ou dans un poste alternatif similaire s'ils le souhaitent et, si cela n'est pas possible du fait de la longue période de temps écoulée, de veiller à ce qu'ils soient dûment indemnisés. Le comité demande au gouvernement de le tenir informé à cet égard.
  12. 461. Au sujet de l'arrestation et de la détention de travailleurs impliqués dans les événements d'avril 1994 à Medan, le comité déplore que le gouvernement n'ait toujours fourni aucune information en ce qui concerne MM. Mohammad Ali (PT Perindoni) et Mulyadi (PT Ganda Seribu) qui auraient été arrêtés et détenus en relation avec les événements de Medan. Le comité déplore en outre que le gouvernement n'ait pas fourni les informations demandées par le comité à quatre reprises et qui concernent l'issue des procès de MM. Icang et Suryandi, dont l'arrestation serait en rapport avec les événements survenus à Medan au printemps 1994. Ces personnes ont été accusées d'avoir organisé des rassemblements illégaux -- sans l'autorisation appropriée. Le comité prie donc une fois de plus le gouvernement de fournir rapidement des informations sur: i) MM. Mohammad Ali (PT Perindoni) et Mulyadi (PT Ganda Seribu); et ii) l'issue des procédures concernant MM. Icang et Suryandi, qui auraient été placés en détention en relation avec les événements survenus à Medan en avril 1994. Le comité prie le gouvernement de le tenir informé à cet égard.
  13. 462. En ce qui concerne l'enquête sur la mort de Mme Marsinah, une militante syndicaliste, qui a eu lieu il y a plus de cinq ans, le comité déplore profondément que les circonstances de son décès n'ont pas encore été élucidées par une enquête gouvernementale sur l'affaire qui a commencé en juin 1995. A cet égard, le comité appelle l'attention du gouvernement sur le fait que l'absence de jugements contre les coupables entraîne une impunité de fait qui renforce le climat de violence et d'insécurité, et qui est donc extrêmement dommageable pour l'exercice des droits syndicaux. Par ailleurs, l'assassinat ou la disparition de dirigeants syndicaux et de syndicalistes ou de lésions graves infligées à des dirigeants syndicaux et des syndicalistes exigent l'ouverture d'enquêtes judiciaires indépendantes en vue de faire pleinement et à bref délai la lumière sur les faits et les circonstances dans lesquelles se sont produits ces faits, et ainsi, dans la mesure du possible, de déterminer les responsabilités, de sanctionner les coupables et d'empêcher que de tels faits se reproduisent. (Voir Recueil, op. cit., paragr. 51 et 55.) Le comité regrette profondément de noter que le gouvernement n'a rendu compte d'aucun progrès réalisé dans le cadre de son enquête pour faire la lumière sur cet incident extrêmement grave, et il demande instamment au gouvernement d'ouvrir sans tarder une enquête judiciaire indépendante sur l'homicide de Mme Marsinah, qui a eu lieu il y a plus de cinq ans, afin d'identifier et de punir les coupables. Le comité demande au gouvernement de le tenir informé des résultats de cette enquête.
  14. 463. En ce qui concerne la situation spécifique de M. Muchtar Pakpahan, le comité avait noté au cours de l'examen antérieur de ce cas qu'il existait deux séries d'allégations relatives à cette affaire. Premièrement, bien que la Cour suprême eût annulé en septembre 1995 deux décisions rendues par les instances inférieures contre M. Pakpahan sur le chef d'accusation d'incitation de travailleurs à l'émeute à Medan, en avril 1994, ce qui avait conduit à sa libération après avoir passé plus de neuf mois en prison, le comité avait été gravement préoccupé d'apprendre que, le 25 octobre 1996, la Cour suprême avait annulé sa précédente décision et avait condamné M. Pakpahan à quatre années d'emprisonnement sur le même chef d'accusation pour lequel il avait été antérieurement libéré. Notant que la décision de la Cour suprême a été influencée par des facteurs politiques ainsi que par des rivalités de personnes au sein de la Cour, le comité avait déploré ces événements et avait prié instamment le gouvernement de faire tout ce qui était en son pouvoir pour que les charges retenues contre M. Pakpahan en rapport avec les événements d'avril 1994 soient abandonnées. Regrettant profondément que le gouvernement n'a encore fourni aucune observation à ce sujet, le comité demande à nouveau instamment au gouvernement d'abandonner les charges susmentionnées retenues contre M. Pakpahan.
  15. 464. En outre, le comité avait noté, durant son examen antérieur de ce cas, que, si le récent procès de M. Pakpahan, accusé de subversion le 2 août 1996 en rapport avec les émeutes qui s'étaient produites en juillet 1996 à Jakarta, avait été différé en raison de l'état de santé de M. Pakpahan, les charges dont il faisait l'objet n'avaient pas été abandonnées. Le comité avait exprimé sa plus profonde préoccupation du fait qu'une accusation de subversion peut être punie de la peine capitale. De plus, le comité avait déploré que le gouvernement n'eût pas commenté les longues explications de l'organisation plaignante sur les raisons pour lesquelles la procédure du procès qui s'était ouvert le 12 décembre 1996 n'avait pas satisfait aux normes internationalement admises pour un procès rapide et équitable et, à cette occasion, le comité avait rappelé au gouvernement la grande importance qu'il a toujours attachée à ce que, dans tous les cas, y compris lorsque des syndicalistes sont accusés de délits politiques ou de droit commun, les personnes en question soient jugées promptement par une autorité judiciaire impartiale et indépendante. Le comité déplore que le gouvernement ne fasse que reprendre les informations déjà fournies, à savoir que les charges retenues contre M. Pakpahan en rapport avec les émeutes du 27 juillet 1996 n'étaient pas liées à sa fonction de président du SBSI. Pour sa part, le comité estime toujours que les événements susmentionnés complètent le tableau d'une discrimination antisyndicale active de la part du gouvernement à l'égard de M. Pakpahan et que les accusations portées et les mesures prises contre M. Pakpahan, sous prétexte d'activités subversives alléguées, sont liées à ses activités syndicales. Par conséquent, le comité demande de nouveau instamment au gouvernement de tout mettre en oeuvre pour abandonner les charges pénales pesant contre M. Pakpahan en rapport avec les événements survenus à Jakarta en juillet 1996, de garantir qu'il puisse exercer librement ses activités syndicales légitimes. Le comité demande au gouvernement de lever également toutes les charges qui seraient encore retenues contre les autres dirigeants et militants du SBSI. Le comité prie le gouvernement de l'informer d'urgence de l'évolution de ces affaires.
  16. 465. En outre, le comité déplore à nouveau que le gouvernement n'ait toujours pas fourni d'informations en ce qui concerne les allégations de mesures antisyndicales dirigées contre les membres du bureau du SBSI après les événements de juillet 1996, dont leur arrestation, leur mise en détention et leur interrogatoire par la police ou les militaires. Le comité rappelle une fois encore que, même si des personnes exerçant des activités syndicales ou une fonction dirigeante dans un syndicat ne peuvent revendiquer une immunité sur le plan du droit pénal ordinaire, le harcèlement, l'arrestation ou la mise en détention de dirigeants syndicaux pour des activités liées à l'exercice des droits syndicaux sont contraires aux principes de la liberté syndicale. Le comité prie donc de nouveau instamment le gouvernement de fournir des informations sur: i) neuf membres du bureau de la branche de Riau du SBSI placés en détention au début d'août 1996 et, dans le cas où ces personnes seraient toujours en détention, de prendre les mesures nécessaires pour leur libération immédiate; ii) MM. Rekson Silaban, directeur de recherche, Santosa, coordinateur régional, Mehbob, membre du personnel de l'Institut d'aide juridique, tous membres du bureau du SBSI, qui ont été interrogés et accusés d'avoir fomenté les événements de juillet 1996, et de prendre les mesures nécessaires pour que les charges retenues contre eux soient rapidement abandonnées; et iii) toutes les mesures antisyndicales dirigées contre les membres du bureau et les militants du SBSI à la suite des événements survenus en juillet 1996, notamment les arrestations, interrogatoires et accusations dont ces personnes ont fait l'objet.
  17. 466. En outre, le comité regrette vivement que le gouvernement n'ait pas encore répondu aux dernières allégations selon lesquelles Mme Dita Sari et M. Coen Pontoh, deux responsables syndicaux des organisations syndicales indépendantes Pusat Perjuangan Buruh Indonesia (PPBI) et Serikat Tani Nasional (STN), ont été condamnés respectivement à de lourdes peines de prison pour avoir pris part à un mouvement de grève dans la ville de Surabaya le 8 juillet 1996. Le comité rappelle que, au nombre des raisons de cette action, on peut citer des revendications traditionnelles ayant trait au travail ainsi que des demandes tendant à faire annuler des lois strictes sur le plan de la sécurité et à faire cesser l'intervention des militaires dans les affaires relatives au travail. Des unités de la police et de l'armée sont néanmoins intervenues et ont violemment réprimé le mouvement de grève; à la suite de cette intervention, Mme Dita Sari et M. Coen Pontoh ont été arrêtés, incarcérés et condamnés à quatre et six années d'emprisonnement, respectivement, le 22 avril 1997. Le comité appelle une fois de plus l'attention du gouvernement sur le principe selon lequel les autorités ne devraient avoir recours à la force publique dans des cas de mouvements de grève que dans des situations présentant un caractère de gravité et où l'ordre public serait sérieusement menacé. Par ailleurs, nul ne devrait pouvoir être privé de liberté ni faire l'objet de sanctions pénales pour le simple fait d'avoir organisé une grève pacifique ou d'y avoir participé. (Voir Recueil, op. cit., paragr. 580 et 602.) Etant donné que ces principes ne semblent pas avoir été respectés dans le présent cas, le comité ne peut que conclure que le gouvernement n'a pas pu démontrer que les mesures prises à l'encontre de ces deux militants syndicaux ne découlent en aucune manière de leurs activités syndicales légitimes. Le comité prie donc instamment le gouvernement de fournir des informations sur la situation de ces deux militants syndicaux et de prendre les mesures appropriées pour les faire relâcher immédiatement s'ils sont encore en prison.
  18. 467. Regrettant profondément que le gouvernement n'ait pas répondu à l'allégation selon laquelle 18 travailleurs contractuels ont été licenciés de l'entreprise PT Pelangi Selaras Indonesia à Medan le 11 juillet 1997 en raison de leur appartenance au SBSI, le comité invite de nouveau le gouvernement à fournir sans retard cette information; s'il apparaît que ces 18 travailleurs contractuels sont membres du SBSI, le comité prie instamment le gouvernement de prendre les mesures nécessaires pour veiller à ce qu'ils soient dûment réintégrés dans leur poste.
  19. 468. De plus, le comité prie le gouvernement de lui fournir sans tarder ses observations sur les allégations les plus récentes présentées par l'UITA dans une communication datée du 6 novembre 1997 concernant la détention, le 19 septembre 1997, du secrétaire et du président de l'Organisation régionale Asie/Pacifique de l'UITA. Le comité prie en outre le gouvernement de répondre aux allégations présentées par la CMT dans une communication datée du 10 mars 1998 concernant l'arrestation et la détention en mars 1998 de huit dirigeants et activistes du SBSI en raison de leurs activités syndicales légitimes.
  20. 469. En ce qui concerne l'allégation de violations de la liberté syndicale signalées par le SBSI dans sa communication datée du 11 juin 1996, le comité avait demandé à l'organisation plaignante de fournir des informations supplémentaires compte tenu des profondes divergences entre la version des plaignants et celle du gouvernement. Notant que cette information n'a toujours pas été fournie et afin d'être à même de se prononcer sur cette question en pleine connaissance des faits, le comité demande une nouvelle fois au SBSI de fournir des informations complémentaires sur: i) les violences physiques dont MM. Aryanto et Rozali ont fait l'objet; ii) les motifs de l'arrestation de M. Asipto Parangun-Agin; iii) le contenu du tract distribué par M. Farid Mu'adz concernant le droit de grève; iv) les actes de discrimination antisyndicale à l'encontre de sept travailleurs de PT Tris Delata Agindo, qui auraient été contraints à renoncer à leur affiliation au SBSI; et v) les actes de vandalisme commis contre l'enseigne du SBSI à Medan et à Binjai.
  21. 470. Le comité relève d'une communication de la CMT en date du 25 mai 1998 que M. Muchtar Pakpahan, président du SBSI et certains dirigeants et membres du SBSI viennent récemment d'être libérés de prison. Le comité prie le gouvernement de communiquer le nom de tous les autres dirigeants et membres du SBSI ainsi libérés. Le comité prend note avec intérêt de ces développements qui constituent un pas important et positif en direction de la liberté syndicale en Indonésie. Le comité exprime le ferme espoir que ceci constitue les premières d'une série de mesures qui seront prises par le gouvernement pour améliorer la situation syndicale en Indonésie et pour garantir le plein respect des principes de la liberté syndicale.
  22. 471. Le comité appelle l'attention de la commission d'experts sur les aspects législatifs de ce cas en rapport avec l'application de la convention no 98.
  23. 472. Enfin, le comité note que l'article 35 de la nouvelle loi sur les questions de main-d'oeuvre, qui entrera en vigueur le 1er octobre 1998, stipule que les "dispositions relatives aux syndicats de travailleurs feront l'objet d'autres dispositions légales". Le comité croit donc comprendre que des questions relatives au droit syndical seront réglementées plus en détail par la promulgation d'autres dispositions, règlements ministériels ou dispositions similaires. Le comité espère donc que ces nouvelles dispositions ou nouveaux règlements respecteront pleinement les principes de la liberté syndicale. A cet égard, le comité suggère au gouvernement de faire appel à l'assistance technique du BIT en vue de l'aider à assurer que son nouveau projet de législation réponde aux principes de liberté syndicale.

Recommandation du comité

Recommandation du comité
  1. 473. Au vu des conclusions intérimaires qui précèdent, le comité invite le Conseil d'administration à approuver les recommandations suivantes:
    • a) Tout en notant avec intérêt que certaines mesures positives ont été récemment adoptées par les autorités indonésiennes, le comité est profondément préoccupé quant au fait que la situation des travailleurs indonésiens se caractérise encore par des violations graves des droits fondamentaux et syndicaux ainsi que des violations des principes de la liberté syndicale en fait et en droit.
    • b) Le comité rappelle que la législation indonésienne, qui impose une situation de monopole syndical en exigeant l'accord de la SPSI pour l'enregistrement de tout autre syndicat, énonce des obligations qui sont si contraignantes qu'elles constituent une limitation majeure de la liberté syndicale. Le comité demande donc à nouveau au gouvernement d'éliminer ce type d'obstacles (tels que l'article 2 a), b) et c) du règlement ministériel no PER-03/MEN/1993) afin de garantir que le droit des travailleurs de s'organiser et de négocier collectivement soit pleinement reconnu en droit et en pratique, et de le tenir informé à cet égard.
    • c) En ce qui concerne spécifiquement le SBSI, le comité demande à nouveau instamment au gouvernement de prendre les mesures nécessaires pour faire en sorte que le SBSI soit enregistré sans autre retard afin qu'il puisse exercer ses activités syndicales légitimes. Le comité prie le gouvernement de le tenir informé à cet égard.
    • d) Le comité prie instamment le gouvernement de veiller à ce que les seize travailleurs qui ont été licenciés de l'entreprise Southern Cross Textile Industry en avril 1993 soient réintégrés dans leurs postes ou dans des postes similaires, s'ils le souhaitent, et si cela n'est pas possible du fait de la longue période de temps écoulée de veiller à ce qu'ils soient dûment indemnisés. Le comité prie le gouvernement de le tenir informé à cet égard.
    • e) Le comité prie instamment le gouvernement de fournir rapidement des informations sur: i) le sort de MM. Mohammad Ali (PT Perindoni) et Mulyadi (PT Ganda Seribu) qui auraient été placés en détention à la suite des événements survenus à Medan en avril 1994; et ii) l'issue des procès de MM. Icang et Suryandi. Le comité prie le gouvernement de le tenir informé à cet égard.
    • f) Le comité prie instamment le gouvernement d'ouvrir sans délai une enquête judiciaire indépendante sur le meurtre de Mme Marsinah, une militante syndicaliste, qui a eu lieu voilà plus de cinq ans, en vue d'identifier et de sanctionner les coupables. Il prie le gouvernement de le tenir informé du résultat de cette enquête.
    • g) Rappelant l'importance du principe d'un procès rapide et équitable par une instance indépendante et impartiale, et estimant que les accusations portées et les mesures prises contre M. Pakpahan, sous le prétexte d'activités subversives alléguées, sont liées à ses activités syndicales, le comité prie instamment le gouvernement de tout mettre en oeuvre pour abandonner les charges pénales à l'encontre de M. Pakpahan en rapport avec les événements d'avril 1994 survenus à Medan et ceux survenus à Jakarta en juillet 1996. Le comité appelle une nouvelle fois le gouvernement à faire en sorte que M. Pakpahan puisse librement exercer ses activités syndicales légitimes. Le comité demande au gouvernement de lever également les charges qui seraient encore retenues contre les autres dirigeants et militants du SBSI. Le comité prie le gouvernement de le tenir informé à cet égard et de considérer ces questions comme urgentes.
    • h) Le comité prie à nouveau le gouvernement de fournir des informations sur: i) neuf membres du bureau de la branche de Riau du SBSI placés en détention au début d'août 1996 et, dans le cas où ces personnes seraient toujours en détention, de prendre les mesures nécessaires pour leur libération immédiate; ii) MM. Rekson Silaban, directeur de recherche, Santosa, coordinateur régional, Mehbob, membre du personnel de l'Institut d'aide juridique, tous membres du bureau du SBSI qui ont été interrogés et accusés d'avoir fomenté les événements de juillet 1996, et de prendre les mesures nécessaires pour que les charges retenues contre eux soient rapidement abandonnées; et iii) toutes les mesures antisyndicales dirigées contre les membres du bureau et les militants du SBSI à la suite des événements survenus en juillet 1996, notamment les arrestations, interrogatoires et accusations dont ces personnes ont fait l'objet.
    • i) Le comité prie de nouveau instamment le gouvernement de fournir des informations sur la situation de Mme Dita Sari et de M. Coen Pontoh, deux responsables de syndicats indépendants qui auraient été arrêtés et emprisonnés à la suite de leur participation à un mouvement de grève, et de prendre les mesures nécessaires pour les faire relâcher immédiatement s'ils sont encore en prison.
    • j) Le comité invite le gouvernement à fournir sans retard des informations sur l'allégation selon laquelle 18 travailleurs contractuels auraient été licenciés de l'entreprise Pelangi Selaras Indonesia (PT PSI) à Medan le 11 juillet 1997 pour leur appartenance au SBSI. Il prie instamment le gouvernement de prendre les mesures nécessaires pour veiller à ce que ces 18 travailleurs soient dûment réintégrés s'ils sont effectivement membres du SBSI.
    • k) Le comité demande au gouvernement de fournir rapidement des informations sur: la détention alléguée de deux responsables de l'UITA le 19 septembre 1997; et ii) l'arrestation et la détention alléguées de huit dirigeants et activistes du SBSI les 8, 9 et 10 mars 1998.
    • l) Pour pouvoir se prononcer en pleine connaissance des faits, le comité prie le SBSI de fournir un complément d'informations sur: i) les violences physiques dont MM. Aryanto et Rozali ont fait l'objet; ii) les motifs de l'arrestation de M. Asipto Parangun-Agin; iii) le contenu du tract distribué par M. Farid Mu'adz concernant le droit de grève; iv) les actes de discrimination antisyndicale à l'encontre de sept travailleurs de PT Tris Delata Agindo, qui auraient été contraints de renoncer à leur affiliation au SBSI; et v) les actes de vandalisme commis contre l'enseigne du SBSI à Medan et à Binjai.
    • m) Notant avec intérêt que M. Muchtar Pakpahan, président du SBSI, a été libéré de prison le 25 mai 1998, le comité prie le gouvernement de communiquer le nom des autres dirigeants et militants du SBSI également relâchés.
    • n) Le comité appelle l'attention de la Commission d'experts pour l'application des conventions et recommandations sur les aspects législatifs du cas en rapport avec la convention no 98.
    • o) Notant que des questions concernant le droit syndical des travailleurs seront réglementées plus en détail par la promulgation de nouvelles dispositions légales en vertu de la nouvelle loi sur les questions de main-d'oeuvre, le comité suggère au gouvernement d'utiliser l'assistance technique du BIT en vue d'assurer que son nouveau projet de législation réponde pleinement aux principes de liberté syndicale.
    • p) Le comité prie le gouvernement de donner l'assurance que les récentes décisions de libération de certains dirigeants et membres syndicaux constituent les premières d'une série de mesures qui seront prises pour améliorer la situation syndicale en Indonésie et garantir le plein respect des principes de la liberté syndicale.
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