298. Les plaintes qui font l'objet du présent cas figurent dans des communications de la Centrale latino-américaine des travailleurs (CLAT) en date du 4 novembre 1994 (cas no 1811) et de la Confédération internationale des syndicats libres (CISL) en date du 17 janvier 1995 (cas no 1816).
- 298. Les plaintes qui font l'objet du présent cas figurent dans des communications de la Centrale latino-américaine des travailleurs (CLAT) en date du 4 novembre 1994 (cas no 1811) et de la Confédération internationale des syndicats libres (CISL) en date du 17 janvier 1995 (cas no 1816).
- 299. En l'absence de réponse du gouvernement sur ces allégations, le comité avait ajourné l'examen de ces cas et, à sa session de juin 1995, le comité avait appelé l'attention du gouvernement sur le fait que, conformément à la règle de procédure établie au paragraphe 17 de son 127e rapport, approuvé par le Conseil d'administration à sa 184e session (novembre 1971), il pourrait présenter un rapport sur le fond de ces affaires à sa prochaine session, même si les informations et observations demandées n'étaient pas reçues à temps (voir 299e rapport, approuvé par le Conseil d'administration à sa 263e session (mai-juin 1995), paragr. 8). A ce jour, aucune information n'a été reçue du gouvernement.
- 300. Le Paraguay a ratifié la convention (no 87) sur la liberté syndicale et la protection du droit syndical, 1948, ainsi que la convention (no 98) sur le droit d'organisation et de négociation collective, 1949.
A. Allégations de l'organisation plaignante
A. Allégations de l'organisation plaignante
- Cas no 1811
- 301 Dans sa communication du 4 novembre 1994, la Centrale latino-américaine des travailleurs (CLAT), après avoir fait état des nombreuses et graves violations de la législation du travail par l'entreprise "Empresa Cafetera Eximpora SA" (durée du travail excessive, emploi d'enfants et de personnes âgées, salaires inférieurs au salaire minimum, etc.), a dénoncé les violations suivantes des droits syndicaux commises au détriment du syndicat des travailleurs de cette entreprise:
- - licenciement collectif de 200 membres du syndicat en 1992, au moment où celui-ci faisait pression en faveur de la signature d'une convention collective;
- - déclaration d'illégalité d'une grève entreprise en juin 1993, les grévistes ayant barré l'accès à l'entreprise;
- - menaces de mort adressées en 1993 aux dirigeants syndicaux Jacinto Areco et Ramón Luis Vázquez;
- - licenciement de l'épouse d'un dirigeant syndical, Mme Hilda Duarte, ainsi que de MM. Cirilo Silva et Florentín Aguero, des syndicalistes accusés de destruction de biens de l'entreprise;
- - défaut de respect d'un accord, signé par l'entreprise en avril 1994 à la suite d'une grève de la faim, dans lequel l'entreprise s'était engagée à verser les arriérés de salaires et à réintégrer des travailleurs licenciés, y compris des dirigeants. A l'époque de la plainte un grand nombre d'entre eux n'avait pas encore été réintégrés;
- - arrestation et jugement de six militants et dirigeants syndicaux accusés d'avoir porté atteinte à la propriété privée, d'avoir procédé à des enlèvements et d'avoir proféré des menaces de mort;
- - introduction au domicile de M. Roque Jacinto Areco, ancien secrétaire général du syndicat, de deux paquets de cocaïne dans le dessein d'impliquer le syndicat dans une affaire de trafic de drogue;
- - refus de la garde privée de l'entreprise en mars 1994 d'autoriser l'accès dans l'entreprise à un dirigeant syndical, Ceferino Quiñones, venu enquêter sur le licenciement de trois travailleuses, et leur expulsion violente de leur domicile;
- - licenciement injustifié en avril 1994 de M. Ramón Luis Vázquez, secrétaire général du syndicat, ainsi que de son épouse, et expulsion de cette famille du logement concédé par l'entreprise aux travailleurs.
- Cas no 1816
- 302 Dans sa communication du 17 janvier 1995, la Confédération internationale des syndicats libres (CISL) allègue qu'après la constitution du Syndicat des travailleurs de "Teledifusora Paraguaya", qui avait engagé un dialogue avec l'entreprise, celle-ci a procédé illégalement au licenciement collectif, sans motif valable, de 25 travailleurs dont les dirigeants syndicaux suivants: Blanca Lila Fernández, secrétaire général; Alejandro Chamorro, secrétaire général adjoint; Silvio Cuevas, secrétaire à la communication; Marta Giménez, secrétaire aux finances; Dante Daniel Melgarejo, secrétaire à l'éducation; Arnaldo González, secrétaire à l'organisation; Aníbal Colman, secrétaire aux conflits. En outre, la menace de nouveaux licenciements a été brandie si les travailleurs adhéraient au syndicat.
- 303 La CISL ajoute par ailleurs que les travailleurs de l'entreprise Paraguay Refrescos SA, concessionnaire de Coca Cola au Paraguay, se sont mis en grève pour exiger le respect de certaines clauses de leur convention collective, protester contre le licenciement d'un dirigeant syndical et réclamer des ajustements des salaires auxquels l'entreprise n'avait pas procédé. Selon la CISL, des policiers étaient postés dans l'entreprise; ils sortaient de temps à autre pour réprimer les grévistes qui manifestaient, dans le respect de la légalité, leur mécontentement. De même, le 5 janvier 1995, vers midi, un contingent de policiers avait attaqué de manière brutale et injustifiée une manifestation de protestation de travailleurs en grève. La police avait tiré des balles d'acier qui avaient blessé plusieurs manifestants en diverses parties du corps, certains ayant même été blessés à la tête.
B. Conclusions du comité
B. Conclusions du comité
- 304. Tout d'abord, le comité regrette profondément que le gouvernement n'ait pas communiqué les observations demandées sur les graves allégations présentées, en dépit du temps écoulé depuis le dépôt des plaintes et bien qu'il ait été invité à formuler ses commentaires et observations à plusieurs reprises, y compris par un appel pressant.
- 305. Dans ces conditions et conformément à la règle de procédure applicable (voir le paragraphe 17 de son 127e rapport, approuvé par le Conseil d'administration à sa 184e session (novembre 1971)), le comité se voit dans l'obligation de présenter un rapport sur le fond de ces affaires sans pouvoir tenir compte des informations du gouvernement.
- 306. Le comité rappelle au gouvernement que le but de l'ensemble de la procédure instituée est d'assurer le respect des libertés syndicales en droit comme en fait. Si la procédure protège les gouvernements contre des accusations déraisonnables, ceux-ci doivent reconnaître à leur tour l'importance qu'il y a, à ce qu'ils présentent, en vue d'un examen objectif, des réponses détaillées et portant sur des faits précis, aux allégations détaillées, et portant sur des faits précis, formulées à leur encontre (voir le paragraphe 31 du premier rapport, approuvé par le Conseil d'administration en mars 1952).
- 307. En ce qui concerne le cas no 1811, le comité souligne la gravité des allégations qui ont trait à diverses violations de droits syndicaux dans l'entreprise "Empresa Cafetera Eximpora SA", dans un contexte de graves manquements à la législation du travail. S'agissant de la déclaration d'illégalité d'une grève en juin 1993, due au fait que les grévistes avaient barré l'accès à l'entreprise, le comité rappelle que le droit de grève doit s'exercer dans le respect de la liberté du travail des non-grévistes prévue par la législation nationale, ainsi que du droit de la direction de l'entreprise de pénétrer dans les locaux.
- 308. S'agissant de l'arrestation de six dirigeants syndicaux accusés d'atteinte à la propriété privée, d'avoir procédé à un enlèvement et d'avoir proféré des menaces de mort, et du jugement les concernant, le comité demande au gouvernement de le tenir informé du résultat du procès et de lui communiquer le texte du jugement afin qu'il puisse se prononcer sur les faits qui sont reprochés aux dirigeants syndicaux en pleine connaissance de cause.
- 309. En ce qui concerne les autres allégations (licenciement de militants et de dirigeants syndicaux et expulsion de ceux-ci de leur domicile, défaut de respect d'un accord signé par l'entreprise, tentative d'implication d'un dirigeant syndical dans une affaire de trafic de drogue et refus de laisser pénétrer dans l'entreprise un dirigeant syndical qui voulait s'acquitter de fonctions syndicales), le comité demande au gouvernement d'ouvrir immédiatement une enquête afin de préciser les responsabilités et de sanctionner toute violation des droits syndicaux et de prendre rapidement les mesures nécessaires pour que les militants et les dirigeants syndicaux licenciés en raison de leurs activités syndicales légitimes puissent être réintégrés dans leur poste de travail. De même, le comité appelle l'attention du gouvernement sur le fait que nul ne devrait être licencié ou faire l'objet d'actes de discrimination antisyndicale en raison des ses activités syndicales légitimes, et il demande au gouvernement d'assurer à l'avenir le respect de ce principe et de le tenir informé du résultat de l'enquête mentionnée.
- 310. En ce qui concerne le cas no 1816, le comité considère que le licenciement collectif de 25 travailleurs, dont sept dirigeants du Syndicat des travailleurs de "Teledifusora Paraguay" après que le syndicat eut été constitué et eut engagé un dialogue avec l'entreprise, de même que la menace de licenciement brandie contre ceux qui décideraient d'adhérer au syndicat, constituent de graves violations de l'article 1 de la convention no 98, ratifiée par le Paraguay, aux termes duquel:
- 1. Les travailleurs doivent bénéficier d'une protection adéquate contre tous actes de discrimination tendant à porter atteinte à la liberté syndicale en matière d'emploi.
- 2. Une telle protection doit notamment s'appliquer en ce qui concerne les actes ayant pour but de:
- a) subordonner l'emploi d'un tavailleur à la condition qu'il ne s'affilie pas à un syndicat ou cesse de faire partie d'un syndicat;
- b) congédier un travailleur ou lui porter préjudice par tous autres moyens, en raison de son affiliation syndicale ou de sa participation à des activités syndicales en dehors des heures de travail ou, avec le consentement de l'employeur, durant les heures de travail.
- Par conséquent, le comité demande au gouvernement de veiller à ce que les 25 militants et dirigeants syndicaux licenciés soient réintégrés, d'empêcher tout nouvel acte de discrimination antisyndicale et de le tenir informé à cet égard.
- 311. S'agissant de la présence de la police dans l'entreprise "Paraguay Refrescos SA" pendant la grève qui s'y est déroulée et des personnes blessées à la suite des tirs de la police lors d'une manifestation de protestation, le comité déplore ces faits regrettables et demande qu'une enquête judiciaire soit ouverte pour déterminer les responsabilités et sanctionner les coupables. Le comité demande au gouvernement de le tenir informé à cet égard et signale à son attention que "les autorités ne devraient recourir à la force publique en cas de grève que si l'ordre public est réellement menacé. Le comité considère aussi que l'intervention de la force publique devrait être proportionnée à la menace pour l'ordre public qu'il convient de contrôler et que les gouvernements devraient prendre des dispositions pour que les autorités compétentes reçoivent des instructions appropriées en vue de supprimer le danger qu'impliquent les excès de violence lorsqu'il s'agit de contrôler des manifestations qui pourraient troubler l'ordre public." (Voir 278e rapport, cas no 1541 (Pérou), paragr. 255.)
Recommandation du comité
Recommandation du comité
- 312. Au vu des conclusions qui précèdent, le comité invite le Conseil d'administration à approuver les recommandations suivantes:
- a) En ce qui concerne les allégations relatives à l'entreprise "Empresa Cafetera Eximpora SA":
- - le comité demande au gouvernement, afin de déterminer les responsabilités et de sanctionner toute violation de la législation, de diligenter d'urgence les enquêtes sur les allégations relatives au licenciement de militants et de dirigeants syndicaux et à leur expulsion de leur domicile, à des menaces de mort, au défaut de respect d'un accord signé par l'entreprise, à la tentative d'implication d'un dirigeant syndical dans une affaire de trafic de drogue et au refus de laisser pénétrer dans l'entreprise un dirigeant syndical qui voulait s'acquitter de fonctions syndicales. Le comité demande au gouvernement de le tenir informé du résultat de ces enquêtes;
- - le comité demande au gouvernement de prendre rapidement les mesures nécessaires pour que les militants et les dirigeants syndicaux licenciés en raison de leurs activités syndicales légitimes puissent être réintégrés dans leur poste de travail et d'assurer à l'avenir le respect du principe selon lequel nul ne devrait être licencié ou faire l'objet d'actes de discrimination en raison de ses activités syndicales légitimes;
- - le comité demande au gouvernement de communiquer le texte du jugement qui sera rendu concernant les six dirigeants syndicaux mentionnés dans la plainte de la CLAT afin qu'il puisse se prononcer sur les faits qui leur sont reprochés en pleine connaissance de cause. Le comité demande également au gouvernement de le tenir informé du résultat du procès.
- b) En ce qui concerne les allégations relatives à l'entreprise "Teledifusora Paraguay", le comité demande au gouvernement de veiller à ce que les 25 militants ou dirigeants syndicaux licenciés soient réintégrés, d'empêcher tout nouvel acte de discrimination antisyndicale et de le tenir informé à cet égard.
- c) Concernant la présence de la police dans l'entreprise "Paraguay Refrescos SA" pendant la grève qui s'y est déroulée et aux personnes blessées par balles, le comité déplore ces faits regrettables et demande qu'une enquête judiciaire soit ouverte pour déterminer les responsabilités et sanctionner les coupables. Le comité demande au gouvernement de le tenir informé à cet égard.