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Rapport intérimaire - Rapport No. 313, Mars 1999

Cas no 1880 (Pérou) - Date de la plainte: 09-AVR. -96 - Clos

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151. Le comité a examiné ce cas à ses sessions de novembre 1997 et de juin 1998, et il a présenté à ces deux occasions un rapport intérimaire au Conseil d'administration. (Voir 308e et 310e rapport, paragr. 577 à 596 et 517 à 544, respectivement approuvés par le Conseil d'administration à sa 270e session (novembre 1997) et à sa 272e session (juin 1998).)

  1. 151. Le comité a examiné ce cas à ses sessions de novembre 1997 et de juin 1998, et il a présenté à ces deux occasions un rapport intérimaire au Conseil d'administration. (Voir 308e et 310e rapport, paragr. 577 à 596 et 517 à 544, respectivement approuvés par le Conseil d'administration à sa 270e session (novembre 1997) et à sa 272e session (juin 1998).)
  2. 152. Le gouvernement a envoyé de nouvelles observations dans une communication datée du 13 octobre 1998.
  3. 153. Le Pérou a ratifié la convention (no 87) sur la liberté syndicale et la protection du droit syndical, 1948, ainsi que la convention (no 98) sur le droit d'organisation et de négociation collective, 1949.

A. Examen antérieur du cas

A. Examen antérieur du cas
  1. 154. A l'issue de la session du comité de novembre 1997, certaines allégations sont restées en instance. Elles concernaient plusieurs actes de discrimination et d'ingérence antisyndicales qui auraient été commis par les entreprises Electro Ucayali SA, Servicio Público de Electricidad del Oriente SA, Electro Sur Este SA et Electrosur SA, ainsi que des entraves à la négociation collective, qui auraient été le fait de l'entreprise Electro Ucayali SA.
  2. 155. Lors de son dernier examen du cas, le comité avait formulé les recommandations suivantes (voir 310e rapport, paragr. 544):
    • a) Déplorant qu'en ce qui concerne les allégations de discrimination et d'ingérence antisyndicales au sein des entreprises Electro Ucayali SA, Servicio Público de Electricidad del Oriente et Electro Sur Este SA, le gouvernement n'ait pas envoyé de commentaires précis, qu'il n'ait pas effectué d'enquête et qu'il se soit contenté d'invoquer l'existence d'une législation interdisant les actes de discrimination antisyndicale et donnant la possibilité aux personnes lésées d'engager des recours judiciaires, le comité prie instamment le gouvernement, une nouvelle fois, de procéder immédiatement à une enquête sur les allégations, et de prendre toutes les mesures nécessaires pour remédier à ces actes graves de discrimination antisyndicale. Le comité demande au gouvernement de le tenir informé à cet égard.
    • b) Le comité espère recevoir sans tarder du gouvernement le texte de tous les accords collectifs conclus au sein de l'entreprise Electro Ucayali SA. Il lui demande de les transmettre de manière urgente.
    • c) En ce qui concerne le licenciement du dirigeant syndical M. Walter Linares Sanz (entreprise Electro Sur SA), le comité prie instamment le gouvernement de procéder à une enquête approfondie et de le tenir informé à ce sujet.
    • d) S'agissant de la suspension, depuis le 30 juin 1992, du versement des indemnités de déplacement au dirigeant syndical, M. Guillermo Barrueta Gómez, par l'entreprise Electro Sur Este SA, le comité demande au gouvernement de le tenir informé de l'issue, quant au fond, du pourvoi en cassation intenté par l'entreprise Electro Sur Este SA.
    • e) Le comité demande au gouvernement de faire en sorte que tous les cas de discrimination antisyndicale -- y compris ceux présentés au comité -- puissent être examinés au moyen de procédures rapides et efficaces.

B. Réponse du gouvernement

B. Réponse du gouvernement
  1. 156. Dans sa communication du 13 octobre 1998, le gouvernement déclare qu'il souscrit aux remarques du comité en ce sens qu'en ratifiant la convention no 98 l'Etat péruvien s'est engagé à garantir l'application des articles 1 et 2 de cet instrument, lesquels prévoient que tous les travailleurs doivent bénéficier d'une protection adéquate contre tous actes de discrimination tendant à porter atteinte à la liberté syndicale dans le cadre de leur emploi, et que leurs organisations doivent bénéficier d'une protection adéquate contre tous actes d'ingérence de la part des employeurs. De même, il pense, à l'instar du comité, que la protection mentionnée doit non seulement être incorporée dans la législation, mais également se traduire dans les faits. C'est la raison pour laquelle le gouvernement réitère les observations formulées antérieurement, selon lesquelles les actes de discrimination antisyndicale sont proscrits par la législation péruvienne, dans la Constitution de l'Etat, dans le Code pénal, dans la loi sur les relations collectives de travail (décret-loi no 25593) et son règlement d'application adopté en vertu du décret suprême no 011-92-TR. Les deux derniers textes législatifs cités font actuellement l'objet d'une révision, en vue de les rendre plus conformes aux conventions et traités internationaux rectifiés par le Pérou.
  2. 157. Le gouvernement ajoute qu'en outre il convient de mentionner que l'article 4 du décret-loi no 25593, la loi sur les relations collectives de travail, garantit la protection de la liberté syndicale en ces termes: "l'Etat, les employeurs et leurs représentants devront s'abstenir de tous actes tendant à limiter, restreindre ou porter atteinte, de quelque manière que ce soit, au droit syndical des travailleurs, et d'intervenir de quelque manière que ce soit dans la création, l'administration ou le financement des organisations syndicales". De même, en vertu de différents textes législatifs, les sujets de droit qui s'estiment lésés ont la possibilité d'engager des recours judiciaires pour faire valoir leurs droits en tant que travailleurs.
  3. 158. En ce qui concerne l'enquête sur les actes de discrimination et d'ingérence antisyndicales, demandée par le comité, le gouvernement précise que toute décision concernant les procès en cours relève de la compétence exclusive du pouvoir judiciaire et que, par conséquent, toute espèce d'intervention de sa part constituerait une atteinte à l'indépendance et à l'autonomie des magistrats dans l'exercice de leur fonction juridictionnelle. Cela étant, il informera le comité de l'issue des procès en question en temps opportun.
  4. 159. Le gouvernement indique que des conventions collectives ont été signées entre l'entreprise Electro Ucayali SA et le Syndicat unique des travailleurs de l'électricité d'Electro Ucayali SA, pour les périodes de 1996 à 1997 et de 1997 à 1998; ainsi qu'entre la société Electrocentro SA et la Fédération des travailleurs de l'électricité du Pérou, convention pour la période de 1995 à 1996 et applicable aux travailleurs de la société Electro Ucayali SA.
  5. 160. En ce qui concerne le licenciement du dirigeant syndical Walter Linares Sanz, le gouvernement déclare que cette mesure fait suite, conformément au règlement intérieur de l'entreprise Electro Sur SA, à une faute grave commise par le travailleur en question. Aux termes de l'article 32 du décret-loi no 25593, la loi sur les relations collectives de travail, l'immunité syndicale protège certains travailleurs contre toutes mesures de licenciement ou de transfert dans un autre établissement de la même entreprise, appliquées sans motif valable dûment établi ou contre leur gré. Dans le présent cas, il semble que le licenciement était motivé par la commission des fautes graves suivantes: manquement à ses obligations professionnelles, transmission de fausses informations à l'employeur et infraction grave à la discipline. En conséquence, ce licenciement est valable, bien que ce travailleur soit un dirigeant syndical et jouisse de l'immunité syndicale. La véracité des allégations faites par l'entreprise Electro Sur SA pour motiver le licenciement ou non relève de la compétence exclusive du pouvoir judiciaire. Dans le présent cas, la procédure judiciaire est entamée, et elle est toujours en cours. En conséquence, les recours internes n'ayant pas été épuisés, le plaignant peut difficilement saisir le comité ou le gouvernement péruvien à propos de violations présumées des droits syndicaux qui n'ont aucun fondement.
  6. 161. Quant à la suspension du versement des indemnités de déplacement au dirigeant syndical M. Guillermo Barrueta Gómez, le pouvoir judiciaire ne s'est pas encore prononcé dans le pourvoi en cassation. A cet égard, le gouvernement transmettra au comité l'arrêt de la Cour suprême de justice de la République dès qu'il sera rendu.
  7. 162. Le gouvernement signale qu'il ressort de ce qui précède qu'il a agi dans le respect des dispositions de la convention no 98 de l'Organisation internationale du Travail et qu'à aucun moment il n'a tenté de faire obstacle aux droits d'organisation et de négociation collective.

C. Conclusions du comité

C. Conclusions du comité
  1. 163. Le comité note que les questions restées en instance dans le cadre de la présente plainte se rapportent à plusieurs actes de discrimination et d'ingérence antisyndicales de la part des entreprises Electro Ucayali SA, Servicio Público de Electricidad del Oriente SA, Electro Sur Este SA et Electro Sur SA, ainsi qu'à des entraves à la négociation collective de la part de l'entreprise Electro Ucayali SA.
  2. 164. En ce qui concerne les actes présumés de discrimination et d'ingérence antisyndicales, le comité constate que la réponse du gouvernement ne contient aucun élément nouveau par rapport à la réponse déjà envoyée à l'occasion du premier examen du cas, si ce n'est la déclaration selon laquelle, étant donné que les décisions judiciaires relatives aux procès en cours sont de la compétence exclusive du pouvoir judiciaire, tout type d'ingérence de la part du gouvernement (il est fait allusion à une éventuelle enquête administrative) constituerait une atteinte à l'indépendance et à l'autonomie des magistrats dans l'exercice de leur fonction juridictionnelle. Le comité fait observer au gouvernement que les allégations en question datent de 1997, et il constate que ce dernier n'a pas communiqué d'informations spécifiques sur d'éventuelles procédures judiciaires engagées. Dans ces conditions, le comité ne peut que réitérer ses conclusions antérieures, lesquelles sont reproduites ci-après (voir 310e rapport, paragr. 537 à 540):
  3. Le comité note que les allégations relatives à des actes de discrimination antisyndicale restées en instance à l'issue de sa précédente session sont les suivantes:
  4. -- agissements antisyndicaux et actes d'ingérence divers à l'encontre du Syndicat unique des travailleurs de l'électricité de Ucayali SA en vue d'éliminer toute action syndicale par licenciements antisyndicaux, coercition et menaces à l'encontre de travailleurs membres d'un syndicat;
  5. -- subordination -- de la part de l'entreprise Electro Ucayali SA -- de l'octroi d'un contrat de travail à durée indéterminée au renoncement des travailleurs à l'appartenance au Syndicat unique des travailleurs de l'électricité de Ucayali SA;
  6. -- transfert de la plupart des travailleurs affiliés au syndicat susmentionné, qui dépendent de l'entreprise Electrocentro SA, à des lieux de travail autres que ceux désignés sur les contrats de travail;
  7. -- hostilité et entraves à l'action syndicale, ingérence dans la vie interne du syndicat, intimidation de dirigeants syndicaux et tentative de création d'une autre organisation syndicale pour se soustraire aux obligations découlant de conventions collectives antérieures;
  8. -- licenciement collectif de 19 travailleurs syndiqués et exercice de pressions de la part de l'entreprise sur les travailleurs affiliés au syndicat afin que ceux-ci renoncent à leur appartenance, en menaçant de faire figurer leur nom sur la liste des licenciements collectifs (en conséquence de ces événements, le syndicat a été effacé du registre, étant donné que le nombre de travailleurs syndiqués est descendu à moins de 20, effectif minimal fixé par la loi);
  9. -- renvoi sans juste motif, par la Empresa de Servicio Público de Electricidad del Oriente SA, du dirigeant syndical M. Jaime Tuesta Linares;
  10. -- campagne systématique de menaces de licenciements et d'agissements à l'encontre des dirigeants syndicaux et du personnel syndiqué de l'entreprise Electro Sur Este SA, suscitant de graves difficultés au Syndicat unique des travailleurs d'Electro Sur Este Abancay; plus précisément: 1) le dirigeant syndical, M. Moisés Zegara Ancalla, a été transféré dans un autre établissement; 2) l'entreprise Electro Sur Este SA (Sub-regional Puno) a menacé de renvoi le dirigeant syndical M. Adriel Villafuerte Collado, avant de le suspendre pour trente jours sans solde;
  11. -- menaces de sanctions et de renvois, à l'encontre des dirigeants syndicaux du Syndicat unique des travailleurs de l'électricité de Tacna et ses assimilés, de la part de l'entreprise Electro Sur SA qui considère que les dirigeants syndicaux ont commis des fautes graves du fait qu'ils n'ont pas renoncé à exiger l'exécution d'une sentence judiciaire ferme favorable aux travailleurs, portant sur des augmentations de salaires dues à 111 travailleurs.
  12. (...) Le comité déplore profondément que les autorités n'aient pas procédé à une enquête sur les allégations et que le gouvernement -- sans faire parvenir d'observations spécifiques -- se contente d'invoquer à nouveau l'existence de normes protégeant la liberté syndicale et portant sur les recours judiciaires, ou invoque le fait que les organisations plaignantes n'ont pas fourni des preuves suffisantes. A cet égard, le comité souligne que "le gouvernement a la responsabilité de prévenir tous actes de discrimination antisyndicale". (Voir Recueil de décisions et de principes du Comité de la liberté syndicale, quatrième édition, 1996, paragr. 738.) De même, le comité signale à l'attention du gouvernement que, "lorsqu'elles sont saisies de plaintes pour discrimination antisyndicale, les instances compétentes doivent mener immédiatement une enquête et prendre les mesures nécessaires pour remédier aux conséquences des actes de discrimination antisyndicale qui auront été constatées". (Voir Recueil, op. cit., paragr. 754.) De plus, "le respect des principes de la liberté syndicale exige que les travailleurs qui estiment avoir subi des préjudices en raison de leurs activités syndicales disposent de moyens de recours expéditifs, peu coûteux et tout à fait impartiaux". (Voir Recueil, op. cit., paragr. 741.) Dans ces conditions, le comité prie instamment une nouvelle fois le gouvernement de diligenter immédiatement une enquête sur les allégations de discrimination antisyndicale au sein des entreprises Electro Ucayali SA, Servicio Público de Electricidad del Oriente SA et Electro Sur Este SA, et de prendre toutes les mesures nécessaires pour remédier à ces actes graves de discrimination antisyndicale. Le comité demande au gouvernement de le tenir informé à cet égard.
  13. 165. En ce qui concerne les informations demandées concernant les accords collectifs conclus par l'entreprise Electro Ucayali SA, le comité prend note des trois accords collectifs conclus, y compris celui concernant la période de 1998.
  14. 166. Quant au licenciement du dirigeant syndical M. Walter Linares Sanz (entreprise Electro Sur SA), le comité note que, selon le gouvernement, l'entreprise justifie cette mesure en invoquant les fautes graves suivantes: manquement aux obligations professionnelles, transmission de fausses informations à l'employeur et infraction grave à la discipline, et que la procédure judiciaire en cours n'est pas encore achevée. Le comité demande au gouvernement de lui faire parvenir le texte du jugement correspondant dès que celui-ci sera rendu.
  15. 167. S'agissant de la suspension du versement des indemnités de déplacement de M. Guillermo Barrueta Gómez, au titre de ses activités syndicales, le comité prend note du fait que le gouvernement transmettra l'arrêt de la Cour suprême de justice dès qu'il sera rendu, et il attend cette décision.

Recommandation du comité

Recommandation du comité
  1. 168. Au vu des conclusions intérimaires qui précèdent, le comité invite le Conseil d'administration à approuver les recommandations suivantes:
    • a) Déplorant qu'en ce qui concerne les allégations de discrimination et d'ingérence antisyndicales au sein des entreprises Electro Ucayali SA, Servicio Público de electricidad del Oriente et Electro Este SA, le gouvernement n'ait pas effectué d'enquête et qu'il se contente d'invoquer l'existence d'une législation interdisant les actes de discrimination et d'ingérence antisyndicales et accordant la possibilité aux personnes lésées le droit d'engager des recours judiciaires, le comité prie instamment le gouvernement, une nouvelle fois, de diligenter immédiatement une enquête sur ces allégations, et de prendre toutes les mesures nécessaires pour remédier à ces actes graves de discrimination antisyndicale au cas où ils seraient prouvés. Le comité demande au gouvernement de le tenir informé à cet égard.
    • b) En ce qui concerne le licenciement du dirigeant syndical M. Walter Linares Sanz (entreprise Electro Sur SA) et la suspension, depuis le 30 juin 1992, du versement, au titre de ses activités syndicales, des indemnités de déplacement du dirigeant syndical M. Guillermo Barrueta Gómez, par l'entreprise Electro Sur Este SA, le comité demande au gouvernement de le tenir informé de l'issue des procès en cours.
    • c) Le comité demande, à nouveau, au gouvernement de faire en sorte que tous les cas de discrimination antisyndicale -- y compris ceux présentés au comité -- puissent être examinés au moyen de procédures rapides et efficaces.
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