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Rapport définitif - Rapport No. 307, Juin 1997

Cas no 1898 (Guatemala) - Date de la plainte: 11-JUIL.-96 - Clos

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317. La plainte figure dans une communication de la Centrale latino-américaine des travailleurs datée du 11 juillet 1996. Le gouvernement a envoyé ses observations par une communication du 8 avril 1997.

  1. 317. La plainte figure dans une communication de la Centrale latino-américaine des travailleurs datée du 11 juillet 1996. Le gouvernement a envoyé ses observations par une communication du 8 avril 1997.
  2. 318. Le Guatemala a ratifié la convention (no 87) sur la liberté syndicale et la protection du droit syndical, 1948, ainsi que la convention (no 98) sur le droit d'organisation et de négociation collective, 1949.

A. Allégations de l'organisation plaignante

A. Allégations de l'organisation plaignante
  1. 319. Dans sa communication du 11 juillet 1996, la Centrale latino-américaine des travailleurs (CLAT) allègue que le décret no 35-96 du Congrès de la République du Guatemala portant réformes de la loi syndicale et de la réglementation de la grève des travailleurs de l'Etat contient des dispositions contraires à la Constitution nationale et aux conventions nos 87 et 98 de l'OIT. L'organisation plaignante a annexé à sa plainte une copie du décret no 35-96 de mai 1996, dont la teneur suit:
  2. Article 1. L'article 1 du décret no 71-86 du Congrès de la République est modifié comme suit:
  3. Article 1. Droit d'organisation syndicale. Les travailleurs de l'Etat et de ses entités décentralisées et autonomes pourront exercer leur droit à la liberté syndicale et à la grève, conformément aux dispositions de la présente loi, à l'exception des forces armées et de la police.
  4. Article 2. L'article 4 du décret no 71-86 du Congrès de la République est modifié comme suit:
  5. Article 4. Procédures. Pour l'exercice du droit de grève des travailleurs de l'Etat et de ses entités décentralisées et autonomes, les procédures établies par la présente loi devront être observées, tout comme, à titre complémentaire, ce que prescrit le Code du travail dans la mesure où il est applicable et ne contrevient aux dispositions suivantes:
  6. a) La procédure directe de conciliation obligatoire sera utilisée pour traiter des pactes et conventions collectifs de conditions de travail, en tenant toujours compte pour résoudre les conflits des possibilités légales des recettes et dépenses du budget de l'Etat et, selon le cas, des entités décentralisées et autonomes dont il s'agit. Cette procédure sera considérée comme épuisée si aucun accord n'est intervenu dans un délai de trente jours à partir de la requête de la partie intéressée, à moins que les parties décident de prolonger ce délai.
  7. b) S'il n'est pas démontré que la procédure directe a été épuisée, les formalités pour le déclenchement du conflit n'auront pas été remplies, et le juge devra d'office prendre les mesures nécessaires pour remédier à ce genre de situation extrême.
  8. c) Une fois que l'exigence ci-dessus aura été respectée, le juge se résoudra immédiatement à faire suivre leur cours à la requête et au cahier de revendications et prendra connaissance du conflit en cours, dans l'unique but de veiller à ce qu'aucune des parties usent de représailles contre une autre ou l'empêche d'exercer ses droits.
  9. Les sanctions aux infractions du travail ou celles qui impliquent l'exercice de droits contenus dans la loi ne constituent pas des actes de représailles. En Conférence, les travailleurs pourront faire valoir que leur relation de travail a pris fin sans autorisation judiciaire lorsqu'il existe des motifs de licenciement indirect imputables à l'Etat ou en cas de destitution, les travailleurs conservant leur droit de réclamer les indemnités qui pourraient leur revenir aux termes de la loi en faisant usage des procédures légales.
  10. Ne constitue pas non plus des actes de représailles de la part de l'Etat ou de ses entités décentralisées ou autonomes l'annulation de nominations ou de contrats de travail dans les cas suivants:
  11. c.1) quand le travailleur fait l'objet d'un licenciement justifié; et
  12. c.2) dans les cas de grèves déclarées ayant effectivement lieu, quel que soit leur nom, dès lors qu'elles ont pour conséquence l'abandon ou la suspension du travail sous une forme collective ou qu'elles affectent des services publics déclarés essentiels par la présente loi.
  13. Dans de tels cas, les autorités de l'Etat et de ses entités décentralisées et autonomes habilitées à nommer aux emplois conserveront la faculté d'annuler les nominations et les contrats de travail, sans qu'il puisse y avoir une responsabilité de leur part et sans qu'une autorisation judiciaire préalable soit nécessaire.
  14. d) Aux fins de ce qui est établi par la Constitution politique de la République du Guatemala, sont déclarés essentiels les services publics suivants:
  15. d.1) les hôpitaux, centres et postes de santé, ainsi que les services publics d'hygiène et d'entretien de la propreté;
  16. d.2) les services de navigation aérienne, les services téléphoniques, télégraphiques et postaux;
  17. d.3) l'administration de la justice et ses institutions auxiliaires;
  18. d.4) tous les types de transports publics urbains et périphériques de l'Etat et des municipalités;
  19. d.5) les services d'approvisionnement en eau pour la population et la production; la fabrication, le transport et la distribution d'énergie électrique et de combustibles en général; et
  20. d.6) les services de sécurité publique.
  21. e) Une fois que les procédures de conciliation ont été épuisées sans que l'on ait pu arriver à un arrangement ou à une convention, le règlement des conflits collectifs de caractère socio-économique dans lesquels sont impliqués des travailleurs qui assurent des services publics essentiels doit être soumis à l'arbitrage obligatoire prévu au chapitre III, titre 12, du Code du travail. Dans ce cas, le juge n'est pas obligé de se prononcer sur la légalité de la grève.
  22. Le droit de grève des travailleurs de l'Etat et de ses entités décentralisées et autonomes reste soumis à ce qui est prévu par cette loi et par le Code du travail, exception faite des services publics essentiels mentionnés dans le présent article, qui ne devront être touchés dans aucun cas.
  23. f) Outre les sanctions professionnelles qui pourront être imposées à ceux qui participeront aux grèves énumérées dans les cas de grève cités à l'alinéa c) du présent article, les contrevenants devront répondre de leurs responsabilités pénales et civiles.
  24. g) Sont formellement interdites les grèves motivées par la solidarité intersyndicale ou la solidarité avec des mouvements organisés par des comités ad hoc ou pour des intérêts étrangers à des revendications socio-économiques.
  25. Article 3. Le présent décret entrera en vigueur le jour suivant sa publication dans le Journal officiel.
  26. B. Réponse du gouvernement
  27. 320. Dans sa communication du 8 avril 1997, le gouvernement convient qu'en date du 27 mai 1996 le décret no 35-96 du Congrès de la République du Guatemala a été publié au Journal officiel. Ce décret modifie le décret no 71-86 relatif à la loi syndicale et à la réglementation des grèves des travailleurs de l'Etat. Les organisations syndicales du Guatemala ont condamné publiquement cet acte du pouvoir législatif estimant que ces réformes limitaient le droit d'organisation et de négociation collective, et elles ont porté plainte devant la Cour constitutionnelle le 6 juin 1996 en faisant valoir que le décret no 35-96 du Congrès de la République était inconstitutionnel. La Cour constitutionnelle a statué le 13 janvier 1997 déclarant que la plainte en inconstitutionnalité n'était pas fondée, condamnant la partie plaignante aux frais et dépens et imposant une amende aux avocats auxiliaires. Cette décision a été notifiée aux intéressés en date du 4 février 1997.

C. Conclusions du comité

C. Conclusions du comité
  1. 321. Le comité constate que dans le présent cas l'organisation plaignante allègue que le décret no 35-96 contient des dispositions contraires à la Constitution nationale et aux convention nos 87 et 98 de l'OIT. Le gouvernement a répondu que la Cour constitutionnelle a débouté les organisations syndicales de leur requête pour inconstitutionnalité. Le comité rappelle qu'il n'est pas compétent pour se prononcer sur le fait que les normes légales nationales sont ou non en conformité avec la Constitution nationale. En revanche, il a pour tâche d'examiner les normes nationales en vigueur à la lumière des principes de la liberté syndicale et des conventions ratifiées en la matière.
  2. 322. A cet égard, le comité constate que le décret no 35-96 exclut les forces armées et la police du droit d'organisation syndicale et de grève (art. 1er), impose l'utilisation de la procédure directe des conciliations pour traiter des pactes et conventions collectives et un délai de trente jours pour que le conflit collectif puisse être porté devant l'autorité judiciaire (art. 2 a), b) et c)), interdit la grève dans certains services qualifiés d'essentiels (art. 2c)), et soumet ces services à l'arbitrage obligatoire. Enfin, il interdit les grèves de solidarité.
  3. 323. Le comité estime que l'exclusion des forces armées et de la police des droits d'organisation syndicale et de grève n'est pas contraire aux principes de la liberté syndicale, puisque l'article 9, paragraphe 1, de la convention no 87 déclare que "la mesure dans laquelle les garanties prévues par la présente convention s'appliqueront aux forces armées et à la police sera déterminée par la législation nationale".
  4. 324. Pour ce qui est de l'imposition légale de la conciliation dans le cadre de la négociation collective dans le secteur public, même pendant un délai de trente jours, le comité estime que l'on ne saurait considérer comme attentatoire à la liberté syndicale une législation prévoyant le recours aux procédures de conciliation et d'arbitrage volontaire dans les conflits collectifs du travail en tant que condition préalable à une déclaration de grève. (Voir Recueil de décisions et de principes du Comité de la liberté syndicale, quatrième édition, 1996, paragr. 500.) Dans ces conditions, le comité estime que ces dispositions ne violent pas les principes de la liberté syndicale.
  5. 325. En revanche, le comité est d'avis que la grève est désormais interdite dans quelques services qui ne sont pas essentiels au sens strict du terme (c'est-à-dire des services dont l'interruption mettrait en danger, dans l'ensemble ou dans une partie de la population, la vie, la sécurité ou la santé de la personne) (voir Recueil, op. cit., paragr. 526) tels que les services postaux, les services de transport ou de production, de transport ou de distribution de combustibles. (Voir Recueil, op. cit., paragr. 545.) De même, il a considéré qu'une interdiction générale des grèves de solidarité risque d'être abusive et que les travailleurs devraient pouvoir avoir recours à de tels mouvements pour autant que la grève initiale qu'ils soutiennent soit elle-même légitime (voir Recueil, op. cit., paragr. 486) et que l'interdiction des grèves non liées à un conflit collectif auquel les travailleurs ou le syndicat seraient parties est contraire aux principes de la liberté syndicale. (Voir Recueil, op. cit. paragr. 489.)
  6. 326. Dans ces conditions, le comité prie le gouvernement de prendre des mesures en vue de modifier la législation de manière que: 1) la grève ne soit interdite que dans les services essentiels dans le sens strict du terme; et 2) qu'il n'y ait pas recours à une interdiction générale des grèves de solidarité et que soient respectés les principes mentionnés dans le paragraphe précédent.
  7. 327. Le comité soumet ce cas à l'attention de la Commission d'experts pour l'application des conventions et recommandations.

Recommandation du comité

Recommandation du comité
  1. 328. Au vu des conclusions qui précèdent, le comité invite le Conseil d'administration à approuver les recommandations suivantes:
    • a) Le comité prie le gouvernement de prendre des mesures en vue de modifier la législation de manière que: 1) la grève ne soit interdite que dans les services essentiels dans le sens strict du terme; et 2) qu'il n'y ait pas recours à une interdiction générale des grèves de solidarité et que soient respectés les principes mentionnés dans les conclusions.
    • b) Le comité soumet ce cas à l'attention de la Commission d'experts pour l'application des conventions et recommandations.
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