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Rapport où le comité demande à être informé de l’évolution de la situation - Rapport No. 322, Juin 2000

Cas no 1964 (Colombie) - Date de la plainte: 15-AVR. -98 - Clos

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69. Le comité a examiné ce cas à sa session de novembre 1999 où il a présenté un rapport intérimaire au Conseil d'administration. (Voir 319e rapport, paragr. 157 à 169, approuvé par le Conseil d'administration à sa 276e session (mars 1999).)

  1. 69. Le comité a examiné ce cas à sa session de novembre 1999 où il a présenté un rapport intérimaire au Conseil d'administration. (Voir 319e rapport, paragr. 157 à 169, approuvé par le Conseil d'administration à sa 276e session (mars 1999).)
  2. 70. Le gouvernement a fait parvenir ses observations par des communications en date des 9 mars et 9 mai 2000.
  3. 71. La Colombie a ratifié la convention (no 87) sur la liberté syndicale et la protection du droit syndical, 1948, ainsi que la convention (no 98) sur le droit d'organisation et de négociation collective, 1949.

A. Examen antérieur du cas

A. Examen antérieur du cas
  1. 72. A sa session de novembre 1999, le comité a formulé les recommandations suivantes à propos des allégations restées en suspens qui portaient sur des actes d'ingérence et de discrimination antisyndicales ainsi que sur des actes d'intimidation et sur le non-respect, par l'entreprise CONALVIDRIOS SA, de certaines clauses de la convention collective applicable (voir 319e rapport, paragr. 169):
    • a) Le comité demande au gouvernement de faire en sorte qu'une enquête détaillée soit menée au sujet de chacune des allégations formulées par l'organisation plaignante (sauf en ce qui concerne les aides économiques et les cotisations syndicales par affilié) et de l'en tenir informé sans délai.
    • b) le comité prie le gouvernement de lui envoyer sans délai ses informations sur les récentes nouvelles allégations contenues dans la communication de l'organisation plaignante en date du 2 octobre 1999.
  2. 73. Les allégations en suspens qui avaient été présentées par l'organisation plaignante (SINTRAVIDRICOL) ainsi que les allégations présentées dans une communication du 2 octobre 1999 sont reproduites ci-dessous:
    • -- l'entreprise CONALVIDRIOS SA, après avoir engagé, le 4 septembre 1994, au poste de directeur des ressources humaines un ancien fonctionnaire du ministère du Travail (Directeur régional du travail et de la sécurité sociale de Cundinamarca), a mené une politique antisyndicale, au détriment de la participation du syndicat aux comités paritaires (relations professionnelles, santé au travail, sports et restaurant), prévus par la convention collective; le ministère du Travail en a été informé;
    • -- l'entreprise a mené une politique antisyndicale visant à réduire le nombre de membres du syndicat, octroyant à ceux qui le quittaient des avantages tels que des prêts, des avancements, des primes, sans compter que certains de ces avantages touchent à des prestations prévues dans le cadre de la loi, comme les congés ou les prêts au logement prévus par la convention collective; à la suite de ces mesures, près de 200 travailleurs qui étaient syndiqués ont quitté le syndicat; en agissant ainsi, l'entreprise cherche à faire du syndicat une organisation minoritaire qui, en vertu de la législation colombienne, perdrait un nombre important de garanties, notamment en termes de pouvoir de représentation des travailleurs vis-à-vis de l'employeur; le ministère du Travail en a été informé;
    • -- le ministère du Travail, en vertu des décrets nos 0072 et 0073 qu'il a promulgués le 18 janvier 1995, a annulé certaines décisions administratives antérieures qui portaient enregistrement des comités de direction du syndicat. Cette mesure n'a pas été notifiée en temps voulu ni comme il se doit aux représentants de l'organisation syndicale. Une fois ces décisions administratives adoptées, l'entreprise CONALVIDRIOS SA, dans un premier temps, a licencié six dirigeants syndicaux, puis 14 autres. La personne qui a procédé au licenciement de ces travailleurs est celle-là même qui a promulgué les décrets susmentionnés, à savoir le directeur des ressources humaines de l'entreprise (ancien fonctionnaire du ministère du Travail), qui a usé de tout son pouvoir, le ministère du Travail manquant à son devoir d'impartialité à cette occasion;
    • -- l'entreprise n'a pas renouvelé les congés syndicaux prévus par la convention collective;
    • -- lorsque le syndicat convoque les travailleurs à des assemblées, l'entreprise organise des jeux, fêtes, manifestations sportives ou autres et, si un travailleur syndiqué participe à une de ces assemblées, il est immédiatement licencié; les travailleurs syndiqués vivent constamment dans l'angoisse de perdre leur emploi; la violation des droits de l'homme est manifeste, les dirigeants syndicaux ne pouvant discuter avec leurs compagnons sans risquer d'être transférés à un autre poste de travail ou dans une autre équipe; les autorités et la justice colombiennes n'ont rien fait à ce sujet;
    • -- l'entreprise confisque aux travailleurs les bulletins que distribue le syndicat, ce qui constitue une atteinte à la liberté d'expression; c'est ainsi qu'il est arrivé que les gardes de l'entreprise lâchent les chiens sur des dirigeants syndicaux qui, à l'entrée de l'établissement, distribuaient des bulletins d'information, mettant ainsi en danger la vie de ces derniers;
    • -- l'entreprise a déposé des plaintes contre le président et le secrétaire de la direction nationale du syndicat pour calomnies et injures, mais elle n'a pas pu présenter d'éléments de preuves à l'appui de ses allégations. A l'heure actuelle, le syndicat a plus de 100 actions judiciaires en cours (plaintes, recours ordinaires et spéciaux pour non-respect de l'immunité syndicale, et une action pénale intentée auprès du bureau du Procureur général no 68 de Santafé de Bogotá, laquelle est en cours d'instruction). Selon l'organisation plaignante, les autorités judiciaires et administratives chargées des questions relatives au travail ont connaissance de tous ces faits; néanmoins, à ce jour, le ministère du Travail n'a pris aucune des mesures qui s'imposent;
    • -- l'entreprise a également déposé une plainte contre sept dirigeants du comité de direction du syndicat de la section de Soacha, pour des délits présumés d'irrégularités de procédures, de falsification d'identité et de falsification de documents. Le syndicat a, pour sa part, déposé une plainte pénale contre quatre administrateurs de l'entreprise pour délit de persécution antisyndicale (art. 272 du Code pénal);
    • -- l'organisation plaignante joint en annexe une copie de l'arrêt de la Cour suprême de justice du 21 janvier 1997, dans lequel celle-ci reconnaît que l'entreprise CONALVIDRIOS SA a exercé des pressions sur les travailleurs afin de les amener à quitter le syndicat et ordonne à l'entreprise de "s'abstenir à l'avenir de tout acte visant à la préparation ou à l'organisation du renoncement des travailleurs à se syndiquer ou de toute conduite tendant à inciter les travailleurs à quitter le syndicat de l'entreprise...";
    • -- dans les entreprises du groupe Santo Domingo, il n'a pas été possible d'élire un comité de direction complet, et les travailleurs craignent donc d'être licenciés immédiatement (il existe plusieurs cas dans lesquels la justice s'était prononcée en faveur de travailleurs protégés par l'immunité syndicale qui avaient été licenciés mais, peu de temps après, l'entreprise a de nouveau licencié ces personnes pour des motifs infondés);
    • -- six permis, prévus par la convention applicable et obligatoire, avaient été demandés suffisamment à l'avance à l'entreprise pour assister à l'Assemblée nationale de délégués qui se tenait du 20 au 26 septembre 1999. L'entreprise n'en a accordés que trois, ce qui a empêché la section de Buga de participer à cette assemblée;
    • -- à la section de Buga, cela fait plus de trois ans qu'un comité de direction n'a pu être élu, les travailleurs craignant d'être licenciés s'ils se portent candidats.

B. Réponse du gouvernement

B. Réponse du gouvernement
  1. 74. Dans sa communication du 9 mars 2000, le gouvernement déclare que, le 2 novembre 1999, le ministère du Travail et de la Sécurité sociale a entamé une enquête administrative sur les allégations du SINTRAVIDRICOL, notamment sur celles en date du 2 octobre 1999. Les réclamations qui ont fait l'objet de l'enquête administrative et qui concordent avec celles des intéressés portent sur les points suivants:
    • -- plusieurs dirigeants syndicaux ont été licenciés en 1995, 1996, 1997 et 1998;
    • -- les permis syndicaux ne sont pas tous accordés;
    • -- en cas de procédure disciplinaire, les travailleurs syndiqués ne peuvent pas bénéficier de services consultatifs;
    • -- depuis 1994, l'entreprise ne reconnaît pas les fonctions de certains comités prévus dans la convention collective qui s'efforcent de résoudre les problèmes qui touchent les travailleurs, et elle n'autorise pas l'exercice de ces fonctions;
    • -- la diffusion d'informations à l'intention des travailleurs syndiqués est interdite;
    • -- les dirigeants syndicaux ne peuvent pas circuler librement dans les ateliers;
    • -- la direction de CONALVIDRIOS SA ne reconnaît pas les dirigeants syndicaux en tant que représentants des travailleurs syndiqués;
    • -- des travailleurs syndiqués qui ont perdu leur emploi n'ont pas reçu les indemnisations prévues par la convention et la loi.
  2. 75. Le gouvernement ajoute que l'enquête a été menée afin de vérifier les allégations formulées par l'organisation plaignante, laquelle reprend tous les éléments de sa plainte initiale, sauf en ce qui concerne les aides économiques et les cotisations syndicales par affilié, aspects qui ont fait l'objet d'un désistement. L'Unité spéciale d'inspection, de surveillance et de contrôle du travail a mené l'enquête sur les faits suivants:
    • -- l'entreprise aurait mené une politique antisyndicale visant à réduire le nombre de membres du syndicat, octroyant à ceux qui en démissionnaient des avantages tels que des prêts, des avancements, des primes; cela est d'autant plus grave que certains de ces avantages touchent à des prestations prévues par la loi, comme les congés ou les prêts au logement prévus par la convention collective. A la suite de ces mesures, près de 200 travailleurs qui étaient syndiqués ont quitté le syndicat;
    • -- des dirigeants syndicaux ont été licenciés à la suite des décrets nos 0072 et 0073 du 18 janvier 1995 en vertu desquels certaines décisions administratives antérieures qui portaient enregistrement des comités de direction du syndicat ont été annulées;
    • -- lorsque le syndicat convoque les travailleurs à des assemblées, l'entreprise organise des jeux, fêtes, manifestations sportives ou autres et, si un travailleur syndiqué participe à une assemblée, il est immédiatement licencié;
    • -- conformément à l'arrêt de la Cour suprême de justice du 21 janvier 1997, il est ordonné à l'entreprise de "s'abstenir à l'avenir de tout acte visant à la préparation ou à l'organisation du renoncement des travailleurs à se syndiquer ou de toute conduite tendant à inciter les travailleurs à quitter le syndicat de l'entreprise...".
  3. 76. Dans sa communication du 9 mai 2000, le gouvernement indique que le ministère du Travail et de la Sécurité sociale a chargé la Direction territoriale de Cundinamarca de mener à terme les enquêtes administratives du travail sur les faits pour lesquels le SINTRAVIDRICOL a maintenu sa plainte. Les autorités ont décidé, par résolution no 0661 du 3 mai 2000, de s'abstenir de prendre toute mesure administrative contre la société CONALVIDRIOS pour les raisons suivantes: a) il appartient aux juridictions ordinaires du travail de statuer si les licenciements ont été décidés pour cause juste; b) en ce qui concerne les refus de permis syndical, la reconnaissance de l'organisation syndicale, la paralysie de certains comités prévus dans la convention collective, les différentes entraves au bon fonctionnement des relations professionnelles et la violation du droit de syndicalisation, les plaignants n'ont pas apporté de preuves au soutien de leurs allégations. Les délais pour se pourvoir en révision ou en appel contre la résolution en question ne sont pas prescrits si les plaignants décident d'intenter un tel recours.
  4. 77. Le gouvernement précise que le syndicat SINTRAVIDRICOL peut saisir la juridiction ordinaire du travail ou la justice pénale pour violation de la liberté syndicale, ou encore, s'il estime que CONALVIDRIOS SA a enfreint des droits fondamentaux, d'intenter une action en amparo. Par conséquent, le SINTRAVIDRICOL dispose de plusieurs possibilités pour faire valoir ses droits s'il estime qu'ils risquent d'être violés.

C. Conclusions du comité

C. Conclusions du comité
  1. 78. Le comité note que l'organisation plaignante a fait état d'actes d'ingérence et de discrimination antisyndicales commis par la direction de l'entreprise CONALVIDRIOS SA, ainsi que du non-respect par la même entreprise de certaines clauses de la convention collective applicable. A ce sujet, dans son examen antérieur du cas, le comité avait demandé au gouvernement de faire en sorte qu'une enquête détaillée soit menée au sujet de chacune des allégations formulées par l'organisation plaignante et de l'en tenir informé sans délai.
  2. 79. Le comité prend bonne note des informations du gouvernement, à savoir que le ministère du Travail et de la Sécurité sociale a mené une enquête administrative à propos des allégations présentées par le syndicat SINTRAVIDRICOL, et que les autorités ont décidé, par résolution no 0661 du 3 mai 2000, de s'abstenir de prendre toute mesure administrative contre la société CONALVIDRIOS, parce qu'il appartient aux juridictions ordinaires du travail de statuer si les licenciements ont été décidés pour cause juste et, en ce qui concerne les refus de permis syndical, la reconnaissance de l'organisation syndicale, la paralysie de certains comités prévus dans la convention collective, les différentes entraves au bon fonctionnement des relations professionnelles et la violation du droit de syndicalisation, parce que les plaignants n'ont pas apporté de preuves au soutien de leurs allégations. Les délais pour se pourvoir en révision ou en appel contre la résolution en question ne sont pas prescrits si les plaignants décident d'intenter un tel recours.
  3. 80. Le comité souligne que l'organisation plaignante a présenté sa plainte initiale dans des communications d'avril et de mai 1998, et il déplore profondément que, jusqu'à une date toute récente, durant une période de deux ans pendant laquelle il n'a pas communiqué d'observations suffisamment détaillées, le gouvernement se soit borné à répondre qu'il appartient à la justice de se prononcer sur le licenciement de 20 dirigeants syndicaux et à indiquer que les preuves relatives à ces allégations n'ont pas été apportées. Le comité rappelle que nul ne doit être licencié ou faire l'objet de mesures préjudiciables en matière d'emploi en raison de son affiliation syndicale ou de l'exercice d'activités syndicales légitimes, et que les affaires soulevant des questions de discrimination antisyndicale contraire à la convention no 98 devraient être examinées promptement afin que les mesures correctives nécessaires puissent être réellement efficaces; une lenteur excessive dans le traitement des cas de discrimination antisyndicale et, en particulier l'absence de jugement pendant un long délai dans les procès relatifs à la réintégration des dirigeants syndicaux licenciés équivaut à un déni de justice et, par conséquent, à une violation des droits syndicaux des intéressés. (Voir Recueil de décisions et de principes du Comité de la liberté syndicale, quatrième édition, 1996, paragr. 748-749.). Dans ces conditions, le comité souligne que les dirigeants syndicaux licenciés peuvent intenter les recours judiciaires appropriés et demande au gouvernement de le tenir informé des suites de tous recours intentés contre la résolution ministérielle no 0661 du 3 mai 2000.
  4. 81. Enfin, le comité observe que, selon le gouvernement, le syndicat SINTRAVIDRICOL a la possibilité de recourir à la juridiction ordinaire du travail ou à la justice pénale pour violation de la liberté syndicale, ou encore d'intenter un recours en amparo, s'il estime que l'entreprise CONALVIDRIOS SA a violé des droits fondamentaux. Dans ces conditions, tout en observant que l'organisation plaignante fait état de plus de 100 recours judiciaires, notamment pour violations du droit syndical, dans lesquels la justice se serait déjà prononcée, le comité prie le gouvernement de l'informer de toute décision judiciaire qui sera ou qui a été prise au sujet des allégations présentées par l'organisation plaignante.

Recommandation du comité

Recommandation du comité
  1. 82. Au vu des conclusions qui précèdent, le comité invite le Conseil d'administration à approuver les recommandations suivantes:
    • a) Déplorant profondément qu'en dépit du temps écoulé depuis la présentation des allégations qui font l'objet du présent cas (avril 1998) le gouvernement n'ait pas communiqué de réponse suffisamment détaillée et qu'il se soit borné à répondre qu'il appartient à la justice de se prononcer sur le licenciement de 20 dirigeants syndicaux et à indiquer que les preuves relatives à ces allégations n'avaient pas été apportées, le comité souligne que les dirigeants syndicaux licenciés peuvent intenter les recours judiciaires appropriés et demande au gouvernement de le tenir informé des suites de tous recours intentés contre la résolution ministérielle no 0661 du 3 mai 2000.
    • b) Le comité prie le gouvernement de l'informer de toute décision judiciaire qui a été ou sera prise au sujet des allégations présentées par l'organisation plaignante.
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