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- en particulier, à des actions de grève; des restrictions à l’exercice du droit de grève dont, notamment, l’intervention du ministre du Travail et de l’Emploi pour mettre fin à la grève.
- 848 La plainte a été présentée par l’Association des travailleurs de la Société des automobiles Toyota aux Philippines (TMPCWA) dans une communication datée du 24 février 2003. Le plaignant a également joint copies des documents relatifs aux procédures mises en œuvre auprès des instances judiciaires et autorités nationales compétentes en matière de relations du travail.
- 849 Le gouvernement a répondu dans une communication datée du 25 juin 2003 et reçue le 12 août 2003.
- 850 Les Philippines ont ratifié la convention (nº 87) sur la liberté syndicale et la protection du droit syndical, 1948, et la convention (nº 98) sur le droit d’organisation et de négociation collective, 1949.
A. Allégations du plaignant
A. Allégations du plaignant - 851. Dans sa communication, la TMPCWA décrit brièvement les structures de l’association, expose les faits qui ont conduit à sa plainte et présente plusieurs allégations spécifiques.
- Brève description de l’association
- 852. La TMPCWA est une organisation indépendante de travailleurs dûment enregistrée auprès du ministère du Travail et de l’Emploi (DOLE). Elle n’est affiliée à aucune organisation nationale ou internationale. Les membres du syndicat font partie des travailleurs de la base employés dans deux usines de la Société des automobiles Toyota (Philippines).
- 853. Le 4 février 1999, la TMPCWA dépose une demande visant à organiser une élection d’accréditation afin d’être reconnue en tant qu’agent unique et exclusif habilité à négocier au nom des travailleurs de la base de deux usines de la Société des automobiles Toyota (Philippines). Vivement contestée par l’entreprise, cette demande est rejetée par le médiateur-arbitre du Bureau des relations du travail. Suite à un appel interjeté par la TMPCWA, une décision du ministre du Travail et de l’Emploi en date du 25 juin 1999 autorise la tenue de l’élection, la Société des automobiles Toyota (Philippines) cherchant ensuite à obtenir une révision de cette décision par toutes les voies procédurales existantes. L’élection a finalement lieu le 8 mars 2000.
- 854. Les résultats de l’élection ont été les suivants: 1 063 suffrages exprimés sur 1 100 employés concernés; 105 votes «contestés» au motif que les 105 employés votants étaient considérés comme personnel d’encadrement et qu’ils ne pouvaient pas, en vertu des dispositions pertinentes du Code du travail, faire partie d’un syndicat de travailleurs de la base; 503 votes en faveur de la TMPCWA et 440 contre. Considérant avoir satisfait aux conditions requises en matière de quorum et de majorité, la TMPCWA présente une demande d’accréditation en tant que négociateur exclusif de tous les travailleurs de la base employés par la Société des automobiles Toyota (Philippines). L’entreprise s’oppose à l’accréditation en faisant valoir, qu’à son avis, les 105 votes contestés devraient être considérés comme votes valables, en particulier aux fins de la détermination du quorum, et soumet la question au médiateur-arbitre. Dans une décision datée du 12 mai 2000, ce dernier juge que les 105 votes en question doivent être exclus du décompte des voix et reconnaît la TMPCWA en tant que négociateur exclusif. Ayant fait appel de la décision, l’entreprise est déboutée de sa demande par le ministre du Travail et de l’Emploi qui confirme l’accréditation dans une décision datée du 19 octobre 2000.
- 855. Suite à la confirmation des résultats du vote d’accréditation, la TMPCWA présente un projet de convention collective à la Société des automobiles Toyota (Philippines) le 26 octobre 2000. Cette dernière ne répond ni à cette demande ni à la lettre de relance que l’association lui adresse par la suite.
- 856. Entre-temps, l’entreprise dépose une requête en réexamen auprès du ministre du Travail et de l’Emploi après avoir été déboutée de l’appel qu’elle a interjeté sur les résultats du vote d’accréditation. Ceci provoque la notification d’une ordonnance émanant du Cabinet du ministre dans laquelle les parties sont invitées à participer à une audition de «clarification» fixée au 21 février 2001. La TMPCWA qui a pris la décision de se rendre à l’invitation décide aussi d’organiser une réunion pacifique devant le bâtiment du ministère du Travail et de l’Emploi, le même jour, pour manifester sa déception quant à la décision prise. L’audition a finalement lieu le 22 février et une autre audition est convoquée le lendemain. Les réunions organisées par la TMPCWA se tiennent du 21 au 23 février 2001. S’agissant des 22 et 23 février 2001, à tout le moins, il ressort des documents soumis par la TMPCWA qu’elle a informé l’entreprise que ses membres affiliés assisteraient aux auditions et participeraient à la réunion et qu’ils n’iraient donc pas travailler. En échange, la TMPCWA suggérait que les travailleurs concernés viennent travailler pendant leurs jours de repos.
- 857. Leur participation à la réunion organisée par la TMPCWA entraîne le licenciement de 227 travailleurs syndiqués et dirigeants syndicaux par la Société des automobiles Toyota (Philippines) le 16 mars 2001, ainsi que la suspension de 64 autres membres syndiqués pour une période de trente jours. Le même jour, une décision définitive prise par le ministre du Travail et de l’Emploi confirme l’accréditation de la TMPCWA en tant qu’agent exclusif de négociation.
- 858. Jugeant que ces licenciements et suspensions sont illégales, la TMPCWA décide de déposer un préavis de grève. Afin de donner suffisamment de temps à la direction de l’entreprise pour revenir sur ses décisions, le syndicat ne lance pas immédiatement l’ordre de grève mais le remplace par une action de protestation. Les décisions n’étant pas annulées, la TMPCWA déclenche une grève légale et pacifique le 28 mars 2001.
- 859. A la demande de la Société des automobiles Toyota (Philippines), la Commission nationale des relations du travail, un organisme tripartite, émet une «injonction restrictive temporaire» le 4 avril 2001, fournissant ainsi à l’entreprise les éléments de justification nécessaires pour disperser les participants à la grève. Le 9 avril 2001, alors que la plupart des participants étaient rentrés chez eux, un groupe d’environ 100 policiers et agents de sécurité disperse brutalement les grévistes et confisque sans ménagement tout le matériel leur servant à mener cette action. Dans le même temps, les travailleurs non grévistes et les membres de la direction sont raccompagnés sous escorte dans les usines de la société.
- 860. Le 10 avril 2001, conformément à l’article 263(g) du Code du travail, le ministre du Travail et de l’Emploi soumet le conflit à l’arbitrage obligatoire de la Commission nationale des relations du travail et enjoint aux travailleurs concernés de reprendre le travail. Les membres du syndicat obéissent à l’injonction, mais contestent la décision du ministre du Travail et de l’Emploi devant la Cour suprême. La Cour confirme la décision ministérielle.
- 861. La TMPCWA conteste la compétence de la Commission nationale des relations du travail dans ce conflit et ne présente donc pas sa position quant au fond de l’affaire. Le 9 août 2001, la commission remet sa décision dont copie a été communiquée par le plaignant. Elle y déclare que les actions menées du 21 au 23 février 2001 équivalent à des actions de grève illégales au motif que l’association n’a pas respecté les conditions et procédures applicables à l’organisation d’une grève (présentation d’un préavis de trente ou quinze jours; observation d’un délai de réflexion; vote et présentation des résultats au ministère du Travail et de l’Emploi au moins sept jours avant la grève). Organisée par la TMPCWA les 23 et 28 mai 2001, une autre grève est aussi déclarée illégale au motif qu’il n’a pas été tenu compte de l’injonction contenue dans la décision du ministre du Travail et de l’Emploi du 10 avril 2001. La commission confirme le licenciement des 227 travailleurs au motif que leur absence du travail est préjudiciable à l’intérêt de l’entreprise et qu’ils ont participé de manière concomitante aux actions de grève illégales de février 2001. Elle ordonne le versement d’indemnités équivalant à un mois de salaire par année de service aux travailleurs. En outre, et conformément à l’article 264(a) du Code du travail, la commission déclare que 15 dirigeants syndicaux (dont certains font partie du groupe des 227 travailleurs licenciés) sont déchus de leur emploi au motif qu’ils ont été les meneurs des grèves illégales du 21 au 23 février et des 23 et 28 mai 2001. L’entreprise applique la décision en licenciant plus de la moitié des travailleurs syndiqués, y compris tous les dirigeants syndicaux. En outre, elle dépose trois dossiers d’inculpation contre plusieurs travailleurs syndiqués et dirigeants syndicaux pour coercition. Les personnes concernées obtiennent de rester en liberté provisoire moyennant le versement d’une caution. Les plaintes sont en instance auprès des tribunaux métropolitains de première instance. Par ailleurs, la Cour d’appel a adressé une injonction préliminaire au syndicat pour qu’il demande que soit entamé le processus des négociations collectives.
- 862. En général, le plaignant allègue que le gouvernement n’a pas été en mesure de faire effectivement respecter les conventions no 87 et no 98 auxquelles il est partie. Qui plus est, le gouvernement a aussi pris des mesures qui portent atteinte au droit d’organisation et de négociation collective.
- Ingérence abusive de la direction de Toyota
- dans le droit d’organisation
- 863. Les travailleurs de la Société des automobiles Toyota (Philippines) n’ont pas pu effectivement exercer leur droit syndical. Ainsi, il a fallu plus de dix ans aux travailleurs de l’entreprise pour constituer un syndicat dûment reconnu par le gouvernement. Dès le moment où les travailleurs ont décidé de constituer un syndicat, la direction de l’entreprise a systématiquement manifesté son opposition en déposant des requêtes demandant l’annulation de l’enregistrement du syndicat. Elle a même été appuyée par le gouvernement lorsque ce dernier a annulé l’enregistrement du deuxième syndicat que les travailleurs avaient essayé de constituer. A ce stade et au vu des documents soumis par la TMPCWA, il y a lieu de préciser que la Société des automobiles Toyota (Philippines) a cherché à faire annuler l’enregistrement du plaignant le 11 mars 1999. A l’appui de sa requête, la société a argué de ce que la TMPCWA était en fait antérieurement connue sous le nom de Syndicat des employés et des travailleurs de la Société des automobiles Toyota aux Philippines (TMPCEWU) dont l’enregistrement avait été annulé par le ministère du Travail et de l’Emploi conformément à l’article 239 du Code du travail. Le 30 septembre 1999, le ministère rejetait la requête de l’entreprise, confirmant ainsi l’enregistrement de la TMPCWA.
- Refus de négocier collectivement
- 864. Bien que la TMPCWA ait été dûment accréditée en tant qu’agent exclusif de négociation, la direction de l’entreprise a refusé de négocier avec elle.
- Discrimination antisyndicale
- 865. Le gouvernement n’a accordé aucune protection aux membres de la TMPCWA lorsqu’ils ont été illégalement licenciés. Ces licenciements sont intervenus avec l’appui du ministère du Travail et de l’Emploi par le biais de la Commission nationale des relations du travail.
- Restrictions au droit de réunion
- 866. Le droit d’organiser des manifestations pacifiques est un élément essentiel des droits syndicaux. Ce droit a été violé par la Société des automobiles Toyota (Philippines) avec le soutien du gouvernement. Ainsi, la TMPCWA a conduit des actions de protestation les 21, 22 et 23 février 2001 pour manifester sa préoccupation quant à la tenue d’auditions sur son accréditation en tant que négociateur exclusif et en a notifié l’entreprise dans les conditions et délais prescrits. La Société des automobiles Toyota (Philippines) n’en a pourtant pas moins déclaré que ces actions constituaient un arrêt de travail préjudiciable à l’intérêt de l’entreprise et a illégalement licencié ceux qui y avaient participé.
- Atteinte au droit de grève
- 867. Lorsque la grève a été déclenchée, le premier acte de l’entreprise a été de déposer une requête auprès de la Commission nationale des relations du travail pour que cet organisme émette une «injonction restrictive temporaire». La demande a été admise et a ultérieurement abouti à la dispersion des grévistes avec l’aide de la police.
- 868. Le droit de grève en tant qu’arme légitime de l’activité syndicale a été effectivement limité lorsque, conformément à l’article 263(g), le Cabinet du ministère du Travail et de l’Emploi a assumé la juridiction du conflit, bien que le groupe d’industrie Toyota ne soit pas indispensable à l’intérêt national. L’effet de cette ordonnance a été de mettre un terme à la grève puisque les travailleurs ont reçu l’ordre de reprendre le travail. Sur la base de cette décision, l’entreprise a opéré une sélection en autorisant certains travailleurs à reprendre le travail et en refusant de réintégrer ceux qu’elle avait précédemment licenciés. L’exercice du droit de grève a de nouveau été violé lorsque plusieurs membres du syndicat ont été inculpés de coercition. La TMPCWA soutient que ses membres ne devraient pas être passibles de sanctions pénales pour le seul fait d’avoir organisé une grève pacifique ou d’y avoir participé.
- 869. Le plaignant conclut en invitant le comité à recommander la réintégration des travailleurs illégalement licenciés dans leur emploi, la reconnaissance de la TMPCWA en tant qu’agent exclusif de négociation et le démarrage des négociations collectives ainsi que le retrait des accusations portées à l’encontre de certains membres du syndicat devant le tribunal pénal.
B. Réponse du gouvernement
B. Réponse du gouvernement - 870. D’emblée, le gouvernement précise qu’il fonde sa réponse sur les dispositions applicables du Code du travail, telles qu’amendées, et sur la jurisprudence pertinente de la Cour suprême. Il déclare en outre que, en vertu de l’engagement qu’il a pris d’observer les dispositions des conventions no 87 et no 98, il fait appliquer la loi sur le droit d’organisation et de négociation collective de façon à ne porter atteinte ni aux droits des travailleurs ni à ceux des employeurs. Ceci étant, lorsqu’il lui est demandé d’intervenir dans un conflit du travail, il ne rend une décision que sur la base des éléments de preuve qui lui sont présentés.
- 871. S’agissant des allégations spécifiques et, en premier lieu, de l’allégation d’ingérence abusive par la direction de la Société des automobiles Toyota (Philippines), le gouvernement souligne qu’il n’autorise aucune forme d’ingérence de la part d’un employeur dans les affaires internes d’un syndicat. Dans ce contexte, le gouvernement veille au strict respect des dispositions de l’article 246 du Code du travail relatives à l’interdiction de se livrer à une discrimination antisyndicale et de s’ingérer dans l’exercice du droit d’organisation des travailleurs. S’agissant de l’annulation de l’enregistrement d’un syndicat particulier par le ministère du Travail et de l’Emploi, cet acte ne constitue pas un acte d’ingérence étant donné qu’il est exécuté en stricte conformité avec les articles 238 et 239 du Code du travail et seulement dans le cas où les éléments de preuve présentés justifient ladite annulation.
- 872. S’agissant du refus de négocier collectivement, la politique du gouvernement est d’encourager la libre négociation. Par ailleurs, sauf dans le cas où le ministre du Travail et de l’Emploi exerce sa juridiction à propos d’un conflit du travail, le ministère du même nom ne peut obliger les parties à conclure une convention collective, a fortiori lorsque subsistent entre elles des questions controversées non résolues. Toute partie lésée peut présenter une requête devant le tribunal compétent.
- 873. S’agissant de la discrimination antisyndicale, le gouvernement fait observer que, dans le cadre de l’exercice des prérogatives de la direction, une grande latitude est laissée à l’employeur pour administrer ses affaires et qu’il a les pouvoirs nécessaires pour déterminer quelles sont les actions préjudiciables à ses intérêts. Dans ces conditions et s’il n’est pas interdit stricto sensu de tenir des manifestations pacifiques, lorsque cette action entraîne un arrêt de travail pouvant être préjudiciable à l’intérêt de l’employeur, ce dernier est autorisé à recourir à des mesures radicales pour protéger son droit. En outre, le gouvernement précise que, dans le cas examiné, la Commission nationale des relations du travail a maintenu le licenciement des participants à la manifestation pacifique en se fondant sur les solides éléments de preuve qui lui avaient été présentés.
- 874. S’agissant enfin du droit de grève, le gouvernement souligne que la réunion pacifique alléguée organisée par le syndicat du 21 au 23 février 2001 était illégale en raison de vices de procédure. Le gouvernement fait observer que toute activité concertée, liée à un conflit du travail, qui aboutit à des arrêts de travail est considérée par la loi comme une action de grève. Le Code du travail stipule les conditions dans lesquelles le droit de grève peut s’exercer, conditions qui consistent à observer plusieurs procédures raisonnables comme celle de soumettre la décision de déclencher une grève au vote des membres du syndicat (art. 263 du Code du travail). Le gouvernement précise que la Cour suprême a statué en rendant obligatoire l’organisation d’un vote avant de déclencher une grève parce que de nombreuses grèves désastreuses avaient été déclenchées par le passé du seul fait de l’insistance de groupes minoritaires au sein d’un syndicat. Le gouvernement fait valoir que la TMPCWA a failli à l’obligation de soumettre l’ordre de grève à un vote avant de tenir effectivement la réunion pacifique alléguée et que ce manquement constitue un cas de violation flagrante de la loi. S’agissant de l’intervention du ministre du Travail et de l’Emploi, le gouvernement souhaite réitérer que la compétence du ministre se fonde sur l’article 263 du Code du travail. Au titre de cette disposition, le ministre du Travail et de l’Emploi peut porter un conflit causant ou susceptible de causer une grève ou un lock-out dans «une branche d’activité indispensable à l’intérêt national» devant la Commission nationale des relations du travail pour arbitrage obligatoire. Lorsque le ministre exerce les pouvoirs qui lui sont conférés en vertu de cet article, «tous les employés grévistes ou participant au lock-out reprendront immédiatement le travail et l’employeur fera immédiatement redémarrer les activités de l’entreprise et réintègrera tous les travailleurs aux mêmes conditions que celles qui prévalaient avant la grève ou le lock-out».
- 875. S’agissant des poursuites pénales engagées contre certains membres de la TMPCWA, le gouvernement relève que le tribunal compétent a été saisi de la question. En conséquence de quoi, l’affaire étant en cours d’instance, le gouvernement s’abstient de tout commentaire afin de ne pas influencer la Cour.
C. Conclusions du comité
C. Conclusions du comité - 876. Le comité note que la TMPCWA allègue le non-respect des conventions no 87 et no 98 par le gouvernement. A l’appui de cette allégation, le plaignant déclare qu’un certain nombre de violations ont été commises par la Société des automobiles Toyota (Philippines), avec l’appui du gouvernement, et par le gouvernement lui-même. Le comité note que le gouvernement affirme, en revanche, qu’il a pleinement respecté les deux conventions et qu’il s’est strictement conformé à la législation nationale applicable. Le comité a pris note à cet égard de la déclaration du gouvernement selon laquelle ce dernier a fondé ses observations sur le Code du travail et les décisions pertinentes de la Cour suprême.
- 877. Le comité note que les actions et décisions mises en cause par le plaignant découlent du recours à diverses procédures, et à l’application du Code du travail par les pouvoirs publics et les autorités compétentes en matière de relations du travail. Le comité est donc amené à examiner la compatibilité de la législation nationale avec les principes de la liberté syndicale et les conventions no 87 et no 98. La question de la compatibilité se pose essentiellement à deux titres: l’accréditation du syndicat en tant que négociateur exclusif et l’exercice du droit de grève par les travailleurs. A ce stade, le comité doit rappeler que ces deux points avaient déjà été soulevés lorsqu’il avait examiné les deux dernières plaintes présentées contre le gouvernement des Philippines (cas no 1826 et no 2195).
- 878. S’agissant du processus d’accréditation, le comité note qu’il a fallu plus d’une année pour organiser l’élection et une année supplémentaire pour que le plaignant soit reconnu et accrédité comme agent exclusif de négociation au sein de la Société des automobiles Toyota. Le comité note que ces retards découlent des divers appels, requêtes et demandes déposés par l’entreprise auprès des autorités compétentes en matière de relations du travail et, en particulier, auprès du ministre du Travail et de l’Emploi à qui revient la décision finale.
- 879. Dans ces conditions, le comité est d’avis qu’il convient de se référer aux principes de la liberté syndicale qu’il a rappelés dans son examen du cas no 1826 ainsi qu’à certaines des conclusions y figurant. Ainsi, dans des cas précédents, il a déclaré qu’il n’est pas nécessairement incompatible avec la convention no 98 de prévoir la délivrance d’un certificat au syndicat le plus représentatif dans une unité donnée pour le reconnaître comme agent exclusif de négociation au nom de cette unité, mais qu’il faut encore veiller à assurer un certain nombre de garanties, y compris l’octroi du certificat par un organisme indépendant. [Voir 302e rapport, paragr. 407, et le Recueil de décisions et de principes du Comité de la liberté syndicale, quatrième édition, 1996, paragr. 834.] Le comité renouvelle donc la demande qu’il a déjà adressée au gouvernement pour l’inviter à reconsidérer les dispositions législatives pertinentes en vue de mettre en place un cadre législatif qui garantisse une procédure équitable, indépendante et rapide d’accréditation ainsi qu’une protection adéquate contre les actes d’ingérence des employeurs dans ce domaine. [Voir 326e rapport, paragr. 139.] Le comité demande au gouvernement de le tenir informé de la situation à cet égard.
- 880. S’agissant de l’absence de réponse à la proposition de négociation collective, le comité note qu’elle est liée à la mise en cause des résultats du vote d’accréditation par la Société des automobiles Toyota (Philippines). Néanmoins, le comité souhaite rappeler les principes suivants, eu égard au commentaire du gouvernement observant qu’il ne pouvait obliger les parties à conclure une convention collective, en particulier lorsque subsistent entre elles des questions controversées non résolues, et qu’une requête pouvait être déposée auprès du tribunal compétent. Le comité reconnaît qu’aucune disposition de l’article 4 de la convention no 98 n’impose à aucun gouvernement l’obligation de recourir à des mesures de contrainte pour obliger les parties à négocier avec une organisation déterminée, mesures qui auraient clairement pour effet de transformer le caractère de telles négociations. [Voir Recueil, op. cit., paragr. 846.] En revanche, le comité doit rappeler l’importance qu’il accorde à l’obligation de négocier de bonne foi pour le maintien d’un développement harmonieux des relations professionnelles. [Voir Recueil, op. cit., paragr. 814.] En outre, le principe selon lequel les employeurs comme les syndicats doivent négocier de bonne foi et s’efforcer de parvenir à un accord suppose que soit évité tout retard injustifié dans le déroulement des négociations. [Voir Recueil, op. cit., paragr. 816.] Dans ces circonstances, étant donné que la TMPCWA a été reconnue et confirmée en tant qu’agent exclusif de négociation, le comité veut croire que le gouvernement ne ménagera aucun effort pour assurer que le syndicat et la Société des automobiles Toyota (Philippines) négocient de bonne foi en vue de parvenir à un accord. Il demande au gouvernement de le tenir informé de la situation.
- 881. S’agissant maintenant de la question de l’exercice du droit de grève, le comité note que, dans ce cas, le problème est essentiellement lié à l’intervention du ministre du Travail et de l’Emploi en vertu de l’article 263(g) du Code du travail, d’une part, et, d’autre part, au licenciement de travailleurs au motif de leur participation à une grève déclarée illégale en vertu de la législation nationale ainsi qu’aux poursuites pénales engagées contre certains syndicalistes.
- 882. Pour ce qui est de l’intervention du ministre du Travail et de l’Emploi, le comité note qu’elle résulte de la grève organisée le 28 mars 2001, suite au licenciement de 227 travailleurs. Le comité note que la légalité de cette grève n’a pas été mise en cause. En fait, un préavis de grève a été déposé par le syndicat le 28 février 2001 et la grève a été déclenchée un mois plus tard. Le comité note, comme il l’a fait lors de l’examen du cas no 2195, que l’article 263(g) autorise le ministre du Travail et de l’Emploi à soumettre un conflit à une procédure d’arbitrage obligatoire, mettant ainsi fin à une grève, dans des situations n’impliquant pas les services essentiels ou une crise nationale aiguë. La disposition en cause confère de tels pouvoirs au ministre lorsque il/elle estime qu’existe «un conflit du travail causant ou susceptible de causer une grève ou un lock-out dans une branche d’activité indispensable à l’intérêt national». [Voir 329e rapport, paragr. 736.]
- 883. Le comité note que, selon de récentes informations communiquées par le gouvernement dans le cas no 2195, le ministère du Travail et de l’Emploi a soumis une proposition d’amendement à l’article 263(g) aux commissions traitant des questions du travail, du Sénat et de la Chambre des représentants; cette proposition limiterait l’intervention du ministère du Travail et de l’Emploi aux litiges touchant «les services essentiels». Tenant compte de cette information, le comité souhaite souligner les principes de la liberté syndicale qu’il a déjà rappelés dans l’examen du cas no 2195. Pour déterminer les cas dans lesquels une grève pourrait être interdite, le critère à retenir est l’existence d’une menace évidente et imminente pour la vie, la sécurité et la santé dans tout ou partie de la population. [Voir Recueil, op. cit., paragr. 540 et 545.]. En outre, lorsque, dans un secteur important de l’économie, un arrêt total et prolongé du travail peut provoquer une situation telle que la vie, la santé ou la sécurité de la population peuvent être mises en danger, il semble légitime qu’un ordre de reprise du travail soit applicable à une catégorie de personnes déterminée en cas de grève dont l’étendue et la durée pourraient provoquer une telle situation. Par contre, exiger la reprise du travail en dehors de tels cas est contraire aux principes de la liberté syndicale. [Voir Recueil, op. cit., paragr. 572.] En conséquence, à l’instar de la Commission d’experts sur l’application des conventions et recommandations, le comité demande instamment au gouvernement de poursuivre les mesures prises pour amender l’article 263(g) du Code du travail pour le rendre pleinement conforme aux principes de la liberté syndicale. Le comité demande au gouvernement de le tenir informé à cet égard.
- 884. S’agissant des sanctions imposées aux 227 travailleurs, à savoir la perte de leur emploi, le comité souhaite souligner les éléments ci-après. Premièrement, au vu de la décision de la Commission nationale des relations du travail, la raison de ces licenciements a été l’absence du travail des travailleurs concernés pour cause de participation aux réunions du 21 au 23 février 2001 et la perte en résultant pour l’entreprise. Deuxièmement, le comité a pris dûment note de ce que ces réunions ont été considérées par la Commission nationale des relations du travail comme des grèves illégales au motif du non-respect des diverses conditions de procédure applicables aux actions de grève au titre de l’article 263(c) du Code du travail. Le comité note aussi que le plaignant déclare que ces réunions étaient pacifiques et que cette allégation n’est pas contestée par le gouvernement qui, dans sa réponse, se réfère même au maintien du «licenciement des participants à la manifestation pacifique».
- 885. De surcroît, le comité note que les dirigeants syndicaux ont fait l’objet d’autres types de mesure malgré le fait que certains d’entre eux faisaient partie du groupe des 227 travailleurs licenciés. Ainsi, 15 dirigeants syndicaux ont été déclarés déchus de leur emploi par la Commission nationale des relations du travail au titre de l’article 264(a) du Code du travail. Le comité note que, en vertu de l’article 272 du Code du travail, toute personne enfreignant l’article 264 est condamnée au versement d’une amende et/ou à une peine de prison. En outre, des poursuites pénales ont été intentées par l’entreprise contre certains dirigeants syndicaux. A cet égard, le comité ne peut, sur la base des informations dont il dispose, ni déterminer l’identité des dirigeants syndicaux concernés ni les raisons pour lesquelles ces poursuites ont été engagées bien qu’il soit probable que les motifs d’inculpation aient été présentés au titre de l’article 272 du Code du travail. La TMPCWA allègue que les poursuites découlent de l’organisation d’une grève pacifique et le gouvernement n’a pas relevé cette allégation.
- 886. Au vu des considérations qui précèdent, le comité rappelle que les sanctions, telles que des licenciements massifs liés aux actions de grève, doivent, à son avis, rester proportionnées à la faute ou au délit commis. [Voir 329e rapport, paragr. 738.] En outre, nul ne devrait pouvoir être privé de liberté ou faire l’objet de sanctions pénales pour le simple fait d’avoir organisé une grève pacifique ou d’y avoir participé. [Voir Recueil, op. cit., paragr. 602.] Tout en rappelant qu’il a considéré, dans le passé, que l’obligation de donner préavis à l’employeur avant de déclencher une grève et celle de prendre la décision de faire grève au scrutin secret étaient acceptables, il considère que les licenciements des 227 travailleurs et des dirigeants syndicaux entraînent de graves conséquences pour les travailleurs concernés. Le comité rappelle en outre que, pour ce qui est des cas des dirigeants syndicaux déclarés déchus de leur emploi par la Commission nationale des relations du travail, il a toujours considéré que les sanctions pour fait de grève ne devraient être possibles que lorsque les interdictions y relatives sont conformes aux principes de la liberté syndicale. [Voir 329e rapport, paragr. 738.] Il note à cet égard que la mesure a été décidée par la commission aussi au motif que l’organisation de la grève des 23 et 28 mai 2001 enfreignait l’ordonnance émise par le ministre du Travail et de l’Emploi le 10 avril 2001. Comme indiqué ci-dessus, une telle ordonnance n’est pas conforme aux principes de la liberté syndicale et les dirigeants syndicaux ne peuvent donc pas être sanctionnés pour ne pas s’y être conformés. Intenter des poursuites pénales pour avoir organisé une grève pacifique et y avoir participé constitue aussi une mesure disproportionnée. Comme la commission d’experts, le comité note de nouveau que l’origine du problème tient aux dispositions du Code du travail prévoyant des sanctions disproportionnées pour cause de participation à une grève illégale.
- 887. Le comité note que les actions entreprises en février 2001 ont été considérées comme des grèves illégales. Toutefois, ayant à l’esprit les graves conséquences des licenciements pour les travailleurs concernés, le comité demande au gouvernement d’engager des discussions afin d’examiner une éventuelle réintégration dans leur précédent emploi des 227 travailleurs de la Société des automobiles Toyota (Philippines) ainsi que des dirigeants syndicaux, non inclus dans le groupe des 227 travailleurs, qui ont été déclarés déchus de leur emploi par la Commission nationale des relations du travail sans discrimination fondée sur leurs activités syndicales. Si une intégration n’est pas possible, une compensation adéquate devrait être versée aux travailleurs concernés. Le comité demande au gouvernement de le tenir informé de la situation ainsi que de toute mesure visant à faire cesser les poursuites pénales intentées contre certains syndicalistes et dirigeants syndicaux.
- 888. Enfin, concernant l’allégation selon laquelle les travailleurs ayant participé à la grève ont été brutalement dispersés par la police le 9 avril 2001, allégation laissée sans réponse par le gouvernement, le comité doit faire observer que les autorités ne doivent avoir recours à la force publique que dans des situations présentant un caractère de gravité et où l’ordre public serait sérieusement menacé. [Voir Recueil, op. cit., paragr. 580.]
- 889. Au vu des considérations qui précèdent et des similitudes présentées avec celles qui ont été formulées dans les examens des cas no 1826 et no 2195, le comité considère que le cadre législatif actuel n’est pas propice à l’instauration de relations professionnelles harmonieuses et qu’il existe des difficultés récurrentes quant au processus d’accréditation et à l’exercice du droit de grève. De l’avis du comité, ces difficultés découlent du fait que les organisations d’employeurs et de travailleurs peuvent avoir recours de façon assez systématique aux pouvoirs publics (instances judiciaires, administratives et autorités compétentes en matière de relations du travail) pour régler des questions ayant trait à leurs relations de travail. Le comité estime que le système de relations professionnelles existant ne suffit pas pour promouvoir le dialogue entre les partenaires sociaux. Il suggère donc de prendre les mesures nécessaires pour refondre le chapitre 5 (sur les relations professionnelles) du Code du travail en vue d’instaurer des relations professionnelles plus harmonieuses en veillant, en particulier, à ce que les négociations collectives soient conduites de bonne foi.
Recommandation du comité
Recommandation du comité- 890. Au vu des conclusions qui précèdent, le comité invite le Conseil d’administration à approuver les recommandations suivantes:
- a) Afin que la législation nationale soit pleinement conforme aux principes de la liberté syndicale et de la négociation collective et aux dispositions des conventions ratifiées par les Philippines, le comité demande au gouvernement:
- i) d’amender les dispositions législatives pertinentes en vue de mettre en place un cadre législatif qui garantisse une procédure équitable, indépendante et rapide d’accréditation ainsi qu’une protection adéquate contre les actes d’ingérence des employeurs dans ce domaine;
- ii) de poursuivre les mesures qu’il a déjà prévues en vue d’amender les dispositions pertinentes du Code du travail, et notamment l’article 263(g), relatives à l’exercice du droit de grève. Le comité demande au gouvernement de le tenir informé de l’évolution de la situation.
- b) S’agissant du principe de la négociation de bonne foi, le comité veut croire que le gouvernement ne ménagera aucun effort pour que la TMPCWA et la Société des automobiles Toyota (Philippines) engagent des négociations collectives de bonne foi pour parvenir à un accord. Il demande au gouvernement de le tenir informé de la situation.
- c) Notant que les actions de février 2001 ont été considérées comme des grèves illégales, le comité demande néanmoins au gouvernement, compte tenu des graves conséquences des licenciements pour les travailleurs concernés, d’engager des discussions en vue d’étudier l’éventuelle réintégration dans leur précédent emploi des 227 travailleurs de la Société des automobiles Toyota (Philippines) ainsi que des dirigeants syndicaux déclarés déchus de leur emploi par la Commission nationale des relations du travail et non inclus dans le groupe des 227 travailleurs, sans discrimination fondée sur leurs activités syndicales. Si une réintégration n’est pas possible, une compensation adéquate devrait être versée aux travailleurs concernés. Le comité demande au gouvernement de le tenir informé de cette situation ainsi que de toute mesure visant à faire cesser les poursuites pénales intentées contre certains dirigeants syndicaux.
- d) Le comité demande au gouvernement d'examiner la possibilité qu'une mission consultative ait lieu en ce qui concerne ce cas.