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Rapport intérimaire - Rapport No. 335, Novembre 2004

Cas no 2317 (République de Moldova) - Date de la plainte: 20-JANV.-04 - Clos

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  1. 1043. La Fédération des syndicats des employés de la fonction publique (SINDASP) a fait parvenir sa plainte dans des communications datées du 20 janvier 2004. La Confédération des syndicats de la République de Moldova (CSRM) a présenté des allégations similaires dans des communications datées des 20 novembre 2003, 29 janvier, 5 mars, 9 avril et 30 juin 2004. La Fédération nationale des syndicats des travailleurs de l’alimentation et de l’agriculture (AGROINDSIND) a envoyé d’autres allégations concernant ce cas dans des communications datées des 10 et 25 juin 2004. La Confédération internationale des syndicats libres (CISL), la Confédération générale des syndicats (GCTU), l’Union internationale des travailleurs de l’alimentation, de l’agriculture, de l’hôtellerie-restauration, du tabac et des branches connexes (IUF) et l’Internationale des services publics se sont associées à la plainte dans des communications datées des 30 avril, 1er et 7 juin, et 5 septembre 2004, respectivement. L’ISP et l’IUF ont fourni de nouvelles informations dans des communications datées des 11 et 21 octobre 2004.
  2. 1044. Le gouvernement a fait parvenir ses observations dans des communications datées des 10 mai, 22 juin et 11 octobre 2004.
  3. 1045. La République de Moldova a ratifié la convention (nº 87) sur la liberté syndicale et la protection du droit syndical, 1948, et la convention (nº 98) sur le droit d’organisation et de négociation collective, 1949.

A. Allégations des organisations plaignantes

A. Allégations des organisations plaignantes
  1. 1046. Dans ses communications datées du 20 janvier 2004, la Fédération des syndicats des employés de la fonction publique (SINDASP), l’une des organisations affiliées à la Confédération des syndicats de la République de Moldova (CSRM), allègue que, en octobre 2003, le président du groupe parlementaire communiste a enjoint aux employés de l’administration publique des niveaux national, régional et local de quitter la SINDASP pour se joindre au syndicat «Solidaritate», qui est soutenu par le Parti communiste. L’organisation plaignante indique que, à la date de la présentation de la plainte, les organisations syndicales de six districts et certaines organisations de la municipalité de Chisinau ont été forcées de quitter la SINDASP et de s’affilier au syndicat «Solidaritate». La désaffiliation s’est faite en l’absence d’un représentant de la SINDASP et n’a pas été déclarée officiellement à la SINDASP, ce qui est contraire aux règlements de la SINDASP. L’organisation plaignante allègue que la CSRM a informé le Président de la République de Moldova et le Premier secrétaire du Parti communiste de la situation. Aucune réponse n’avait été reçue à la date de présentation de la plainte.
  2. 1047. La CSRM a présenté des allégations similaires dans des communications datées des 20 novembre 2003, 29 janvier, 5 mars, 9 avril et 30 juin 2004. Dans sa communication du 29 janvier 2004, l’organisation plaignante indique que la période de transition vers une économie de marché au sein de la République de Moldova a engendré un mouvement antisyndicaliste, les syndicats étant considérés comme des obstacles à une telle transition. L’organisation plaignante indique que, sous la pression des pouvoirs publics, les employeurs ont adopté une tactique antisyndicaliste qui consiste à s’opposer à la création d’organisations syndicales. A cet égard, la CSRM souligne que la direction du Collège écologique et du lycée «Mircea Eliade» s’est opposée à la création de syndicats dans ces établissements.
  3. 1048. Selon la CSRM, les intentions antisyndicalistes des pouvoirs publics transparaissent dans les dispositions législatives qu’ils tentent actuellement d’adopter. L’organisation plaignante mentionne la proposition de modification de l’article 11 de la loi sur les syndicats, qui permettrait d’interdire ou de suspendre les activités des syndicats pour les motifs énoncés dans la loi aux fins de la prévention d’activités extrémistes. En outre, le projet de loi sur les organisations non commerciales contient un article qui habiliterait le registraire à vérifier les documents des syndicats, à prendre part aux actions entreprises par les syndicats, etc. Le même projet de loi prévoit également que les syndicats seraient tenus de rendre compte annuellement de leurs activités au registraire et de présenter des rapports annuels par écrit à cet effet. D’autre part, le registraire aurait le droit d’intenter une procédure de dissolution d’une organisation syndicale.
  4. 1049. La CSRM allègue de plus que les décisions et dispositions législatives sont adoptées bien souvent sans avoir fait l’objet de consultations auprès des syndicats ou de discussions à la Commission républicaine pour la négociation collective. En outre, l’organisation plaignante indique que la commission a été créée par décret présidentiel et n’est donc pas un organisme permanent. Les pouvoirs publics ou les employeurs ne tiennent pas toujours compte de ses décisions.
  5. 1050. L’organisation plaignante allègue que les pouvoirs publics ont également adopté un plan d’action pour assurer l’affiliation des membres de la CSRM au syndicat «Solidaritate». Selon ce plan d’action, les membres du syndicat devaient être menacés de congédiement s’ils ne changeaient pas leur affiliation syndicale. Le plan prévoyait également la création de conseils syndicaux de district et la convocation de conférences extraordinaires pour examiner la question de la désaffiliation de la SINDASP et de l’affiliation au syndicat «Solidaritate». L’organisation plaignante allègue que, pour mettre en œuvre ce plan d’action, des réunions syndicales ont été présidées par des représentants de l’Etat dans les districts d’Ocnita, Briceni et Edinet. D’autre part, avant la conférence de la SINDASP du 17 octobre 2003, les autorités locales ont distribué aux chefs syndicaux des instructions sur les mesures à prendre pour assurer la désaffiliation de la SINDASP et l’affiliation au syndicat contrôlé par le gouvernement.
  6. 1051. Par ailleurs, la CSRM mentionne des cas de désaffiliation parmi ses membres pour réaffiliation aux syndicats soutenus par les pouvoirs publics. A cet égard, la CSRM cite les syndicats suivants, qui faisaient partie de ses membres et qui, sous la pression des pouvoirs publics et des employeurs, ont changé d’affiliation, soit: la Fédération des syndicats des travailleurs de l’industrie chimique et de l’énergie, la Fédération «Moldsindcoopcomet», le Syndicat «Raut» et le Syndicat des travailleurs du cadastre, de la géodésie et de la géologie «SindGeoCad».
  7. 1052. Dans sa communication du 5 mars 2004, la CSRM fournit des précisions complémentaires au sujet de l’ingérence présumée des pouvoirs publics dans les activités syndicales de ses organisations affiliées – la Fédération nationale des syndicats des travailleurs de l’alimentation et de l’agriculture de la Moldova (AGROINDSIND), l’Union de l’éducation et de la science et la SINDASP.
  8. 1053. En ce qui a trait à l’AGROINDSIND (dans sa communication du 10 juin 2004, l’AGROINDSIND formule la même plainte), l’organisation plaignante allègue que des représentants de l’Etat et employeurs tentent de la démanteler depuis le début de 2002. La raison de cette ingérence systématique dans les activités de l’AGROINDSIND tient à son refus, le 19 février 2002, de s’associer à une déclaration d’appui à l’action gouvernementale. Lors de la réunion au Parlement, le président du Parlement a désigné comme ennemis tous les syndicats qui refusaient d’endosser cette déclaration. Deux jours plus tard, le 21 février 2002, deux inspecteurs de l’impôt se sont présentés au siège de l’AGROINDSIND, soi-disant pour une vérification routinière de «certains aspects des activités financières de l’AGROINDSIND». Ils étaient accompagnés d’un représentant du Service du renseignement et de la sécurité de la République de Moldova. Les vérifications ont duré du 13 mars au 7 juin 2002, date à laquelle une enquête criminelle a été entreprise à l’encontre du syndicat. L’AGROINDSIND n’a toutefois pas été informée de cette décision avant le 25 août 2002. Le 20 août, un enquêteur du Bureau du procureur s’est présenté au siège du syndicat porteur d’une demande enjoignant la production des documents financiers de la Fédération. L’organisation plaignante indique que, depuis lors, rien n’indique que la moindre enquête soit en cours. Les documents financiers saisis le 20 août 2002 n’ont pas été rendus à la fédération. Le 5 septembre 2002, la conférence nationale de l’AGROINDSIND a débattu du rapport du Comité de vérification de la fédération, qui confirmait le bien-fondé des dépenses, et l’a approuvé. L’organisation plaignante souligne que ce fait démontre que les activités financières de la Fédération sont en ordre et sont approuvées par ses membres, et que les pouvoirs publics devraient donc mettre un terme à leur enquête. Dans sa communication du 21 octobre 2004, l’IUF mentionne qu’aucune information sur le progrès du cas n’a été présentée au syndicat AGROINSIND depuis le dépôt des poursuites, en juin 2002. L’IUF considère que ces poursuites constituent un moyen supplémentaire visant à saper le syndicat et à intimider ses membres. Selon l’IUF, l’incapacité du Bureau du Procureur à établir le bien-fondé des accusations après une aussi longue période ne fait que souligner le fait qu’elles ne sont pas fondées. L’IUF a officiellement demandé au gouvernement de Moldova de classer l’affaire et de fournir les explications nécessaires au syndicat AGROINSIND. Toutefois, ni l’IUF ni AGROINSIND n’ont reçu de réponse.
  9. 1054. Selon la CSRM, devant l’échec de leurs tentatives d’intimidation de la direction de l’AGROINDSIND, à coup d’enquêtes menées par le Service du renseignement et de la sécurité, le Bureau du procureur et le Service d’inspection de l’impôt, les pouvoirs publics ont changé de stratégie et s’emploient maintenant à pousser les membres de l’AGROINDSIND à changer d’affiliation au profit du syndicat «Solidaritate», syndicat soutenu par le gouvernement. S’y emploient les pouvoirs publics et les employeurs agissant sous la pression des pouvoirs publics.
  10. 1055. La CSRM allègue que, le 13 novembre 2003, par suite des pressions exercées sur des militants par le directeur de Viorika-Cosmetics Ltd. et par le ministère de l’Agriculture, le comité syndical de l’entreprise a voté en faveur d’un changement d’affiliation au profit du syndicat «Solidaritate».
  11. 1056. En outre, le 13 novembre 2003, lors de la conférence des producteurs de vin, le directeur général de la société d’Etat «Moldova-Vin», M. Mironesku, a donné ordre aux directeurs de vignobles de «travailler» les syndicats locaux pour qu’ils consentent à quitter l’AGROINDSIND pour se joindre au syndicat «Solidaritate». Des formulaires ont été remis aux directeurs des entreprises viticoles pour la convocation de réunions syndicales sur la question de la désaffiliation de l’AGROINDSIND. M. Mironesku s’est entretenu personnellement avec les présidents de certains syndicats du secteur de l’industrie du vin au sujet de la nécessité de quitter l’AGROINDSIND.
  12. 1057. La CSRM allègue que les faits suivants se sont produits après cette réunion. Le 22 décembre 2003, le directeur de la société viticole Kozhushna a sommé les membres du comité syndical de quitter l’AGROINDSIND et de se joindre au syndicat «Solidaritate». En janvier 2004, un représentant de la société d’Etat «Moldova-Vin» s’est présenté au siège de la vinerie Mileshti-Mish et a exigé que tout le personnel quitte l’AGROINDSIND d’ici telle date et se joigne au syndicat «Solidaritate». Le 13 janvier 2004, au siège de la Barza Alba Brandy Factory Ltd., le comité syndical (et non la conférence comme le prescrivent les règlements régissant les syndicats) a pris la décision de quitter l’AGROINDSIND après en avoir reçu l’instruction du directeur de l’entreprise. Le 16 janvier 2004, la conférence du syndicat de la société Balti Drinks a également voté en faveur de la désaffiliation de l’AGROINDSIND, sous la pression des dix-huit membres du conseil de gestion présents. En janvier 2004, des représentants de la société d’Etat «Moldova-Vin» ont fait pression sur le vice-président du comité syndical de la Chambre nationale des producteurs de vin et des viticulteurs. Le directeur général de l’entreprise a exigé que le syndicat quitte l’AGROINDSIND pour se joindre au syndicat «Solidaritate» d’ici le 31 janvier. Le plaignant indique que trois des trente-neuf comités syndicaux de coopératives vinicoles avaient décidé de céder à ces pressions et de quitter l’AGROINDSIND.
  13. 1058. Le plaignant allègue que le directeur général de la société d’Etat «Moldova-Vin» a avoué au président de l’AGROINDSIND, M. Porchesku, qu’il faisait lui-même l’objet de pressions de la part du Premier ministre de la République de Moldova, lequel réclamait régulièrement des rapports d’étape concrets sur la question.
  14. 1059. Le 27 janvier 2004, dans l’intention de diviser encore davantage l’AGROINDSIND, le gouvernement de la Moldova a destitué le président de l’AGROINDSIND, M. Porchesku, de ses fonctions au sein du bureau exécutif de la société d’Etat «Moldova-Vin» et a nommé à sa place le président du syndicat «Solidaritate».
  15. 1060. Par ailleurs, la CSRM allègue que les dirigeants des administrations locales usent également de tactiques contre l’AGROINDSIND. En décembre 2003 et janvier 2004, le président du district d’Ungheni a tenu plusieurs réunions avec les dirigeants du syndicat local membre de l’AGROINDSIND, au cours desquelles il a pressé ces derniers de changer d’affiliation au profit du syndicat «Solidaritate». Le 16 janvier 2004, lors d’une réunion avec le président du syndicat local membre de l’AGROINDSIND, le président du district de Calarasi a souligné la nécessité d’un changement d’affiliation au profit du syndicat «Solidaritate». En dépit du refus opposé par le président du syndicat, la proposition du président du district de Calarasi a été présentée à la réunion des travailleurs de l’usine de machines agricoles et a été adoptée, sous la pression de la direction. Quelques mois auparavant, le 13 août 2003, les mêmes travailleurs avaient décidé à l’unanimité que leur syndicat resterait membre de l’AGROINDSIND.
  16. 1061. Le 23 janvier 2004, le conseil municipal de Balti a eu une réunion avec les directeurs et les comptables de diverses sociétés, au cours de laquelle le maire et son adjoint les ont exhortés à travailler par le canal du syndicat «Solidaritate». Les directeurs de la société «Barza Alba» et de la Compagnie des boissons ont été félicités pour avoir changé d’affiliation, de l’AGROINDSIND au syndicat «Solidaritate». Lors de la même réunion, l’adjoint au maire de Balti a été élu vice-président du conseil syndical interrégional du syndicat «Solidaritate».
  17. 1062. En ce qui a trait à l’Union de l’éducation et de la science, la CSRM allègue que, en novembre 2003, le chef du Service d’éducation, de la jeunesse et des sports du conseil du district de Floresti a convoqué les membres du conseil à une réunion au cours de laquelle il leur a ordonné de signer des documents approuvant l’affiliation au syndicat «Solidaritate». Ceux qui y étaient opposés ont été menacés de démission forcée.
  18. 1063. Le 12 janvier 2004, sur instructions du chef de Gagauzia, le chef de l’administration générale de l’éducation, de la jeunesse et des sports de Gagauzia a convoqué les directeurs des établissements d’enseignement et les présidents des comités syndicaux de la région à une réunion avec le président du syndicat «Solidaritate», M. Lashku, qui a exhorté les syndicats à se désaffilier de l’Union de l’éducation et de la science pour se joindre au syndicat «Solidaritate».
  19. 1064. Le 23 janvier 2004, l’adjoint au maire de la municipalité de Balti et le chef du Service municipal de l’éducation, de la jeunesse et des sports a convoqué les directeurs et les présidents des comités syndicaux des écoles nos 2, 3, 4, 5, 6, 7, 9, 10, 11, 13, 14, 15 et 18 à une réunion au cours de laquelle il les a exhortés de changer d’affiliation au profit du syndicat «Solidaritate».
  20. 1065. Le 4 février 2004, les dirigeants syndicaux des districts d’Ocnita ont également été convoqués à des réunions avec les directeurs d’établissement d’enseignement au cours desquelles on leur a demandé de changer d’affiliation au profit du syndicat «Solidaritate». Sous la pression du Service de l’éducation, de la jeunesse et des sports d’Ocnita, le syndicat a tenu une conférence extraordinaire le 10 février 2004. Les deux tiers des cinquante délégués présents, dont les directeurs d’établissement d’enseignement, ont voté en faveur du changement d’affiliation au profit du syndicat «Solidaritate». Officiellement, tous les syndicats des travailleurs dans les établissements d’enseignement du district d’Ocnita font désormais partie du syndicat «Solidaritate», mais aucun n’a été informé de cette décision.
  21. 1066. Pour ce qui concerne la SINDASP, la CSRM allègue que les autorités locales ont fait pression, utilisant différents moyens (entretiens, appels téléphoniques et lettres) sur les dirigeants syndicaux pour qu’ils changent d’affiliation au profit du syndicat «Solidaritate».
  22. 1067. Dans sa communication du 9 avril 2004, la CSRM allègue que le gouvernement confère des privilèges au syndicat «Solidaritate», en faisant participer des représentants de cette organisation aux travaux de certains conseils tripartites, tout en excluant des représentants de la CSRM. Par exemple, en vertu de la décision gouvernementale no 74 du 30 janvier 2004, le président du syndicat «Solidaritate» est devenu membre du conseil responsable de la remise de prix, au nom du gouvernement, en reconnaissance de réalisations accomplies en matière de qualité, de productivité et de compétitivité. En vertu de la décision gouvernementale no 270 du 17 mars 2004, le président du syndicat «Solidaritate» est également devenu membre du Conseil des affaires économiques auprès du Premier ministre. En outre, le président du syndicat «Viitorul», qui fait partie du syndicat «Solidaritate», a été nommé par le gouvernement membre du groupe de travail chargé de la réorganisation du lycée «B.P. Hasdeu».
  23. 1068. Par ailleurs, la CSRM allègue que, le 10 mars 2004, le vice-président du district de Rezina a ordonné aux maires de prendre toutes les mesures nécessaires pour que les syndicats affiliés à l’Union de l’éducation et de la science deviennent membres de «Viitorul». A cet effet, des copies du procès verbal des réunions syndicales à tenir sur la question de l’affiliation ont été distribuées aux personnes présentes à la réunion, pour être remises ultérieurement aux directeurs d’école figurant parmi les dirigeants syndicaux. A la suite de cette réunion, les directeurs de plusieurs écoles de Balti ont tenu des réunions avec les travailleurs, auxquels ils ont remis des documents attestant du changement d’affiliation syndicale. La même chose s’est produite dans le district d’Edinet.
  24. 1069. Dans sa communication du 30 juin 2004, la CSRM allègue qu’il y a eu ingérence dans les activités du syndicat «Sanatate» – l’une de ses organisations affiliées. Le plaignant indique que, le 25 mai 2004, le ministre de la Santé a enjoint aux directeurs des établissements médicosanitaires de faire immédiatement le nécessaire pour que les organisations syndicales du secteur de la santé (par ailleurs affiliées au syndicat «Sanatate») se joignent au syndicat «Solidaritate». Sous la pression du ministre, la décision de changer d’affiliation a été prise le 27 mai 2004, durant une réunion du personnel du ministère de la Santé. Dans sa communication du 11 octobre 2004, l’ISP fournit plusieurs documents au soutien des allégations d’ingérence dans les activités du syndicat «Sanatate», et notamment la copie d’une «Déclaration» du ministère de la Santé, en date du 1er juin 2004, où ce dernier suggère que le ministère de la Santé adopte une «position constructive, indépendante, et prenne ses distances par rapport à l’orientation prônée par les dirigeants de la CSRM».
  25. 1070. Dans ses communications des 25 juin et 16 juillet 2004, l’AGROINDSIND a fourni des précisions complémentaires au sujet des allégations d’ingérence dans ses activités. En particulier, elle allègue que la direction de l’entreprise «Moldcarton» tente actuellement de convaincre ses travailleurs de réclamer le remboursement des cotisations syndicales qui ont été déduites de leur salaire au cours des trois dernières années, mais qui n’ont jamais été remises au syndicat. En dépit de deux décisions judiciaires obligeant l’entreprise à virer les cotisations syndicales déduites mais non remises au syndicat, la direction de l’entreprise a imprimé et distribué aux travailleurs une demande de remboursement des cotisations déduites.
  26. 1071. D’autre part, le plaignant allègue que, le 11 mars 2004, le directeur de «Mileshti-Mish» a empêché des représentants d’organisations syndicales internationales – la CISL et l’IUF – ainsi que le président et deux autres représentants de l’AGROINDSIND, de prendre part à la réunion syndicale qui a eu lieu dans les locaux de l’entreprise. L’IUF corrobore cette allégation dans sa communication du 21 octobre 2004.
  27. 1072. Finalement, l’AGROINDSIND indique que, le 29 juin 2004, une nouvelle centrale syndicale regroupant les industries alimentaires et affiliée au syndicat «Solidaritate» a été créée sous l’égide des pouvoirs publics et des employeurs. Sous la pression des employeurs, les organisations syndicales des entreprises suivantes se sont jointes à la nouvelle centrale, soit: «Tutun CTC», «Aroma», «Cricova», «Barza Alba», «Franzeluta» et l’usine de produits alimentaires de la municipalité de Balti.
  28. B. Réponses du gouvernement
  29. 1073. Dans ses communications des 10 mai, 22 juin et 11 octobre 2004, le gouvernement indique que, grâce à l’existence de deux confédérations nationales de syndicats, les organisations syndicales peuvent faire leur propre choix en définissant leurs relations avec les fédérations affiliées et en adhérant à l’une ou l’autre des structures existantes de façon démocratique. En qualité de partenaire social, le gouvernement traite ces confédérations sur un pied d’égalité et, en aucun cas, ne donne la priorité à l’une ou l’autre dans les relations de partenariat social. Les deux confédérations sont membres, sur un pied d’égalité, de la Commission nationale pour les consultations et les négociations collectives et ont pris part aux négociations de la convention collective au niveau national pour les années 2001, 2002, 2003 et 2004. En outre, les représentants des deux organisations ont pris une part égale à la rédaction de lois, de décisions et de règlements. A titre de partenaires sociaux, les deux organisations sont reconnues par toutes les structures de l’Etat et par les associations patronales. Les présidents des confédérations participent chaque année à la Conférence internationale du Travail.
  30. 1074. S’agissant de l’allégation selon laquelle certains privilèges ont été conférés au syndicat «Solidaritate», en autorisant ses représentants à participer aux travaux de certains conseils tripartites, le gouvernement confirme que seuls des représentants de «Solidaritate» ont été invités aux travaux du Conseil chargé d’accorder des dotations gouvernementales pour les résultats obtenus en matière de qualité, de productivité et de concurrence, du Conseil des affaires économiques auprès du Premier ministre, et du Conseil départemental AGROINSIND «Moldova-Vin». Le gouvernement déclare toutefois que les représentants de «Solidaritate» ont été choisis parce que les conseils en question s’occupaient des secteurs de l’économie représentés par «Solidaritate».
  31. 1075. En ce qui a trait aux allégations précises d’ingérence dans les activités de la CSRM, le gouvernement indique que le processus par lequel les organisations syndicales passent d’un secteur à un autre ou d’une confédération à une autre s’accomplit en fonction de leur seule volonté et liberté de choix. Le gouvernement n’a dissous ni suspendu, pour raison administrative, aucune organisation syndicale membre de l’une ou l’autre des deux confédérations.
  32. 1076. Le gouvernement indique que ni la Fédération des syndicats des employés de la fonction publique (SINDASP) ni la Confédération des syndicats de la République de Moldova (CSRM) n’ont contesté la décision de leurs membres de changer d’affiliation. En ce qui a trait à la Fédération nationale des syndicats des travailleurs de l’alimentation et de l’agriculture de la Moldova (AGROINDSIND) et à l’Union de l’éducation et de la science, le gouvernement souligne qu’il n’existe aucune preuve tangible d’ingérence directe ou de pression exercée par les pouvoirs publics.
  33. 1077. Le gouvernement ajoute, selon les règlements de la SINDASP, pour qu’une organisation syndicale territoriale se retire de la fédération, une demande en ce sens et une décision signée par l’organe supérieur de l’organisation en question doivent être déposées au Comité de gestion, qui examine la demande et prend une décision finale à cet égard. Le gouvernement indique qu’aucune décision de cet ordre n’a été adoptée. Par conséquent, les organisations syndicales territoriales de Ocnita, Briceni, Floresti, Chisinau, Riscani, Cimislia, Donduseni, Balti, Calarase, Ungheni et Edinet continuent d’être membres de la SINDASP. Le gouvernement indique par ailleurs que le ministère du Travail et de la Protection sociale a surveillé la situation dans le cas de la SINDASP lorsque les organisations syndicales de premier niveau et l’association territoriale de 18 districts et municipalités ont décidé de quitter cette fédération et de s’affilier au syndicat «Solidaritate». Il souligne que toutes les personnes qui ont joué un rôle dans la désaffiliation étaient membres de la SINDASP et qu’elles ne pouvaient être jugées pour leurs actions qu’à titre de membres du syndicat et non en qualité de fonctionnaires dans l’exercice de leurs fonctions.
  34. 1078. Le gouvernement indique en outre que, à la demande de la CSRM, une mission de la CISL s’est rendue dans le pays pour rencontrer les deux confédérations, les syndicats de branche et leurs membres. Elle a recommandé que les organisations syndicales améliorent leur collaboration constructive réciproque et mettent fin à leurs conflits internes, ce que les deux confédérations ont accepté. Le gouvernement souligne également que la loi sur les syndicats garantit le droit de constituer des syndicats et prévoit les garanties nécessaires pour leur administration et leurs activités.
  35. 1079. Selon le gouvernement, la situation actuelle est le résultat de divergences et de problèmes d’ordre interne qui sont apparus dans le monde syndical il y a bien des années. Les corps étatiques ne créent pas d’obstacles aux activités des syndicats ni ne s’ingèrent dans leurs activités ou affaires internes.

C. Conclusions du comité

C. Conclusions du comité
  1. 1080. Le comité note que cette plainte a été présentée par la Confédération des syndicats de la République de Moldova (CSRM) et par deux de ses membres – la Fédération des syndicats des employés de la fonction publique (SINDASP) et la Fédération nationale des syndicats des travailleurs de l’alimentation et de l’agriculture de la Moldova (AGROINDSIND). Outre les organisations plaignantes précitées, l’affaire concerne également l’Union de l’éducation et de la science et le syndicat «Sanatate», également membres de la CSRM. Le comité note que les organisations plaignantes allèguent que le gouvernement tente d’adopter des dispositions législatives contraires à la liberté syndicale. Elles allèguent également que les pouvoirs publics et les employeurs s’ingèrent dans les affaires internes de leurs organisations et, en particulier, font pression sur leurs membres pour qu’ils changent d’affiliation et deviennent membres du syndicat soutenu par le gouvernement.
  2. 1081. En ce qui a trait à la première série d’allégations, le comité note l’allégation de la CSRM selon laquelle le gouvernement tente d’adopter des dispositions législatives contraires à la liberté syndicale. Le plaignant mentionne la proposition visant à modifier l’article 11 de la loi sur les syndicats, qui permettrait d’interdire ou de suspendre les activités des syndicats pour les motifs énoncés dans la loi aux fins de la prévention d’activités extrémistes. Selon l’organisation plaignante, le projet de loi sur les organisations non commerciales contient un article qui habilite le registraire à vérifier les documents des syndicats, à prendre part aux actions entreprises par les syndicats, etc. Le même projet de loi prévoit également que les syndicats seraient tenus de rendre compte annuellement de leurs activités au registraire et de présenter des rapports annuels par écrit à cet effet. D’autre part, le registraire aurait le droit d’intenter une procédure de dissolution d’une organisation syndicale. En outre, l’organisation plaignante indique que les décisions et dispositions législatives sont adoptées bien souvent sans avoir fait l’objet de consultations auprès des syndicats ou de discussions à la Commission républicaine pour la négociation collective. Le comité note que le gouvernement ne fournit aucune précision au sujet des projets de loi en question, mais indique que les syndicats ont pris part à la rédaction de lois, de décisions et de règlements. Le gouvernement indique également que la loi actuelle sur les syndicats garantit le droit de constituer des syndicats et offre les garanties nécessaires en ce qui concerne leur administration et leurs activités. Le comité demande au gouvernement de fournir copie des projets de loi cités et de faire parvenir ses observations à cet égard.
  3. 1082. Le comité note, par ailleurs, l’allégation du plaignant selon laquelle le gouvernement confère des privilèges au syndicat «Solidaritate» en faisant participer des représentants de cette organisation aux travaux de certains conseils tripartites, tout en excluant des représentants de la CSRM. Par exemple, en vertu de la décision gouvernementale no 74 du 30 janvier 2004, le président du syndicat «Solidaritate» est devenu membre du conseil responsable de la remise de prix, au nom du gouvernement, en reconnaissance de réalisations accomplies en matière de qualité, de productivité et de compétitivité. En vertu de la décision gouvernementale no 270 du 17 mars 2004, le président du syndicat «Solidaritate» est également devenu membre du Conseil des affaires économiques auprès du Premier ministre. En outre, le président du syndicat «Viitorul», qui fait partie du syndicat «Solidaritate», a été nommé par le gouvernement membre du groupe de travail chargé de la réorganisation du lycée «B.P. Hasdeu». Par ailleurs, la CSRM affirme que le gouvernement a destitué le président de l’AGROINDSIND, M. Porchesku, de ses fonctions au sein du bureau exécutif de la société d’Etat «Moldova-Vin» et a nommé à sa place le président du syndicat «Solidaritate». Le comité note que, selon le gouvernement, les représentants de «Solidaritate» ont été choisis parce que les conseils en question s’occupent de secteurs de l’économie représentés par «Solidaritate». Le gouvernement ajoute que, en qualité de partenaire social, il traite les deux confédérations sur un pied d’égalité, comme en témoigne le fait que les présidents des deux confédérations participent chaque année à la Conférence internationale du Travail. Le gouvernement souligne que les deux confédérations sont membres, sur un pied d’égalité, de la Commission nationale pour les consultations et les négociations collectives et qu’elles ont pris part aux négociations de la convention collective au niveau national pour les années 2001, 2002, 2003 et 2004.
  4. 1083. Le comité note l’affirmation du gouvernement au sujet de la participation de «Solidaritate» à certaines commissions tripartites. Il rappelle toutefois que le fait qu’une organisation syndicale n’est pas admise à siéger dans des commissions paritaires n’implique pas nécessairement qu’il y a atteinte aux droits syndicaux de cette organisation. Mais, pour qu’il n’y ait pas une telle atteinte, deux conditions devraient être remplies: il faut d’abord que la raison pour laquelle un syndicat est écarté de la participation à une commission paritaire réside dans son manque de représentativité déterminé objectivement; il faut ensuite que – malgré cette non-participation – les autres droits dont il jouit et les activités qu’il peut déployer par ailleurs lui permettent effectivement de promouvoir et de défendre les intérêts de ses membres au sens de l’article 10 de la convention no 87. [Voir Recueil de décisions et de principes du Comité de la liberté syndicale, quatrième édition, 1996, paragr. 946.] Par ailleurs, le comité estime que certains avantages, notamment en matière de représentation, peuvent être accordés aux syndicats en raison de leur degré de représentativité. En revanche, l’intervention des pouvoirs publics en matière d’avantages ne devrait pas être de nature à influencer indûment le choix des travailleurs relativement à l’organisation à laquelle ils entendent appartenir. [Voir Recueil, op. cit., paragr. 311.]
  5. 1084. En ce qui a trait aux allégations d’ingérence dans les affaires internes des syndicats, le comité note que la CSRM allègue que les employeurs s’opposent souvent à la création d’organisations syndicales dans leurs entreprises, comme dans le cas du Collège écologique et du lycée «Mircea Eliade». Le comité regrette que le gouvernement n’ait fourni aucune précision à ce sujet. Il rappelle que l’article 2 de la convention no 98 interdit aux employeurs de s’ingérer dans la création de syndicats et, à ce titre, demande au gouvernement d’effectuer une enquête indépendante au sujet de cette allégation et de le tenir informé à cet égard.
  6. 1085. Par ailleurs, le comité note que l’AGROINDSIND allègue que la direction de l’entreprise «Moldcarton» tente actuellement de convaincre ses travailleurs de réclamer le remboursement des cotisations syndicales qui ont été déduites de leur salaire au cours des trois dernières années, mais qui n’ont jamais été remises au syndicat. En dépit de deux décisions judiciaires obligeant l’entreprise à virer les cotisations syndicales déduites mais non remises au syndicat, la direction de l’entreprise a imprimé et distribué aux travailleurs une demande de remboursement des cotisations déduites. Le comité regrette que le gouvernement n’ait fourni aucune précision à ce sujet. Le comité estime qu’une telle action de la part de la direction de l’entreprise «Moldcarton» constitue une ingérence dans les affaires internes du syndicat et est contraire à l’article 2 de la convention no 98. Le comité demande au gouvernement de prendre toutes les mesures nécessaires pour l’exécution sans délai des décisions judiciaires enjoignant à l’entreprise de virer au compte du syndicat les cotisations syndicales déduites mais non remises et de le tenir informé à cet égard.
  7. 1086. Le comité note l’allégation de l’AGROINDSIND selon laquelle, le 11 mars 2004, le directeur de «Mileshti-Mish» a empêché des représentants d’organisations syndicales internationales – la CISL et l’IUF – ainsi que le président et deux autres représentants de l’AGROINDSIND de prendre part à la réunion syndicale qui a eu lieu dans les locaux de l’entreprise. Le gouvernement ne fournit aucune précision à ce sujet.
  8. 1087. Le comité estime que, au nom du droit d’association, les organisations de travailleurs concernées devraient pouvoir promouvoir et défendre les intérêts de leurs membres, en leur permettant de jouir des locaux dont ils ont besoin pour bien s’acquitter de leurs fonctions. Il rappelle en outre que le gouvernement doit garantir aux représentants syndicaux l’accès aux lieux du travail en respectant pleinement les droits de propriété et les droits de la direction, afin que les syndicats puissent communiquer avec les travailleurs dans le but de les informer des avantages que la syndicalisation peut présenter pour eux.[Voir Recueil, op. cit., paragr. 954.] Le comité considère de plus que les organisations syndicales devraient pouvoir bénéficier des contacts avec des organisations syndicales internationales. Le comité demande au gouvernement de faire le nécessaire pour que les dirigeants et représentants syndicaux aient accès aux locaux des entreprises à l’occasion des réunions syndicales, en respectant pleinement les droits de propriété et de la direction. Il demande au gouvernement de le tenir informé à cet égard.
  9. 1088. D’autre part, le comité note l’allégation de l’AGROINDSIND selon laquelle, depuis le début de 2002, les pouvoirs publics tentent de dissoudre la fédération. Différentes tactiques auraient été utilisées à cette fin, dont la tenue d’enquêtes sur les activités financières de la fédération par le Service de la sécurité et du renseignement, l’Inspection de l’impôt et le Bureau du procureur. Ces enquêtes ont été suivies par l’ouverture d’une enquête criminelle. L’organisation plaignante indique que, depuis le début de l’enquête criminelle en 2002, rien n’indique qu’elle soit en cours. En outre, les documents saisis en 2002 n’ont toujours pas été rendus au syndicat. Le comité regrette que le gouvernement ne fournisse aucune précision au sujet de cette allégation et lui demande de lui faire parvenir ses observations dans les plus brefs délais.
  10. 1089. En ce qui a trait aux allégations selon lesquelles, depuis la fin de 2003, les pouvoirs publics et les employeurs exercent des pressions sur les syndicats affiliés à la CSRM pour qu’ils changent d’affiliation et deviennent membres du syndicat «Solidaritate», le comité note les faits suivants. Pour ce qui est de la SINDASP, le comité note l’allégation de l’organisation plaignante selon laquelle les employés de la fonction publique ont reçu l’ordre de se désaffilier de la SINDASP et de se joindre au syndicat «Solidaritate». Le plaignant précise notamment que, dans les districts d’Ocnita, Briceni et Edinet, des réunions syndicales présidées par des représentants de l’Etat ont été convoquées pour décider de la question de la désaffiliation de la SINDASP et de l’affiliation au syndicat «Solidaritate». Par suite des pressions exercées et des menaces de congédiement de syndicalistes, les syndicats de six districts ainsi que de la municipalité de Chisinau ont été forcés de quitter la SINDASP et de s’affilier au syndicat «Solidaritate». En outre, le comité note que, selon l’organisation plaignante, le gouvernement n’a pas répondu à ses nombreuses plaintes.
  11. 1090. Le comité note que la CSRM donne la liste des syndicats qui auraient quitté la CSRM, sous la pression présumée des pouvoirs publics et des employeurs, pour devenir membres d’autres organisations syndicales, soit: la Fédération des syndicats des travailleurs de l’industrie chimique et de l’énergie, la Fédération «Moldsindcoopcomet», le Syndicat «Raut» et le Syndicat des travailleurs du cadastre, de la géodésie et de la géologie «SindGeoCad».
  12. 1091. Pour ce qui concerne l’AGROINDSIND, le comité note que les organisations plaignantes donnent des exemples des entreprises dont les dirigeants, agissant eux-mêmes sous la pression des pouvoirs publics, ont enjoint aux syndicats locaux de changer d’affiliation, soit: la Compagnie vinicole, la vinerie Mileshti-Mish et la société des producteurs de vin et des viticulteurs. Sous l’effet de ces pressions, les syndicats des entreprises suivantes ont été forcés de changer d’affiliation: Viorika-Cosmetics Ltd., «Barza Alba», «Tutun CTC», «Aroma», «Cricova», «Franzeluta», l’usine de machines agricoles du district de Calarasi et l’usine de produits alimentaires de la municipalité de Balti.
  13. 1092. En ce qui a trait à l’Union de l’éducation et de la science, le comité note l’allégation des organisations plaignantes selon laquelle, sous la pression du chef de l’administration générale de l’éducation, de la jeunesse et des sports, les chefs du service de l’éducation, de la jeunesse et des sports des districts de Floresti, Gagauzia, Balti, Ocnita et Edinet ont tenu des réunions avec les dirigeants syndicaux, auxquels ils ont donné ordre de quitter l’Union de l’éducation et de la science pour s’affilier aux syndicats «Solidaritate» et «Viitorul». Les organisations plaignantes indiquent que, par suite d’un vote lors d’une conférence extraordinaire du syndicat dans le district d’Ocnita, où les directeurs des établissements d’enseignement étaient présents et ont voté, tous les syndicats locaux de l’Union de l’éducation et de la science du district d’Ocnita sont passés au syndicat «Solidaritate».
  14. 1093. En ce qui a trait au syndicat «Sanatate», le comité note que l’organisation plaignante allègue que, le 25 mai 2004, le ministre de la Santé a donné instruction aux dirigeants des établissements médicosanitaires de faire immédiatement le nécessaire pour que les organisations syndicales du secteur de la santé (affiliées au syndicat «Sanatate») se joignent au syndicat «Solidaritate». Les plaignants indiquent que, sous la pression du ministre, la décision de changer d’affiliation a été prise le 27 mai 2004, durant une réunion du personnel du ministère de la Santé.
  15. 1094. Le comité note la déclaration du gouvernement, selon laquelle le processus par lequel les organisations syndicales passent d’un secteur à un autre ou d’une confédération à une autre s’accomplit en fonction de leur seule volonté et liberté de choix. Le gouvernement indique qu’il n’a dissous ni suspendu, pour raison administrative, aucune organisation syndicale membre de l’une ou l’autre des deux confédérations. D’autre part, le gouvernement estime que, dans le cas de l’AGROINDSIND et de l’Union de l’éducation et de la science, il n’existe aucune preuve tangible d’ingérence directe ou de pression exercée par les pouvoirs publics. S’agissant de la SINDASP, le comité note d’une part que, selon le gouvernement, les organisations syndicales territoriales d’Ocnita, Briceni, Floresti, Chisinau, Riscani, Cimislia, Donduseni, Balti, Calarase, Ungheni et Edinet continuent d’être membres de la SINDASP et, d’autre part, que toutes les personnes qui ont joué un rôle dans la désaffiliation des organisations syndicales de premier niveau et de l’association territoriale de 18 districts et municipalités, et dans l’affiliation au syndicat «Solidaritate», étaient membres de la SINDASP et qu’elles ne pouvaient être jugées pour leurs actions qu’à titre de membres du syndicat et non en qualité de fonctionnaires dans l’exercice de leurs fonctions. Le gouvernement souligne que ni la SINDASP ni la CSRM n’avaient contesté les décisions de leurs membres de changer d’affiliation. Enfin, le gouvernement affirme que la situation actuelle est le résultat de divergences et de problèmes d’ordre interne qui sont apparus dans le monde syndical il y a bien des années, et que les autorités ne font pas obstacle aux activités des syndicats ni ne s’ingèrent dans leurs affaires internes. Le comité note que le gouvernement n’a fourni aucune information concernant le syndicat «Sanatate».
  16. 1095. Le comité note que le gouvernement rejette les allégations d’ingérence et, plus particulièrement, celle selon laquelle il aurait exercé des pressions directes ou par l’entremise des employeurs. Le comité note que le gouvernement fournit des informations assez ambiguës concernant la SINDASP. Le comité croit comprendre, toutefois, qu’une désaffiliation massive de la CSRM au profit d’une affiliation au syndicat «Solidaritate» s’est produite sur une courte période dans plusieurs secteurs. Dans ces circonstances, le comité a des raisons de mettre en doute le fait que les organisations concernées aient entrepris cette démarche de leur plein gré et en toute liberté. Le comité demande donc au gouvernement de tenir des enquêtes indépendantes de façon urgente au sujet des allégations de pressions exercées sur les syndicats dans les districts d’Ocnita, Briceni, Edinet et dans la municipalité de Chisinau, en ce qui concerne la SINDASP; dans les districts de Floresti, Gagauzia, Balti, Ocnita et Edinet, en ce qui concerne l’Union de l’éducation et de la science; à la Compagnie viticole, la cave vinicole Mileshti-Mish, la Chambre nationale des producteurs de vin et des viticulteurs, les firmes Viorika-Cosmetics Ltd., «Barza Alba», «Tutun CTC», «Aroma», «Cricova», «Franzeluta», l’usine de machines agricoles du district de Calarasi et l’usine de produits alimentaires de la municipalité de Balti, en ce qui concerne l’AGROINDSIND. Il demande également au gouvernement de tenir une enquête indépendante sur les allégations de la CSRM concernant les organisations syndicales du secteur de la santé et, en particulier, au sujet de la désaffiliation du syndicat du ministère de la Santé «Sanatate» et sur les circonstances de la désaffiliation de la Fédération des syndicats des travailleurs de l’industrie chimique et de l’énergie, de la Fédération «Moldsindcoopcomet», du syndicat «Raut» et du Syndicat des travailleurs du cadastre, de la géodésie et de la géologie «SindGeoCad» de la CSRM. Il demande au gouvernement de le tenir informé des résultats de ces enquêtes.

Recommandation du comité

Recommandation du comité
  1. 1096. A la lumière des conclusions intérimaires qui précèdent, le comité invite le Conseil d’administration à approuver les recommandations suivantes:
    • a) Le comité demande au gouvernement de fournir copie des projets de loi mentionnés par le plaignant et de faire parvenir ses observations à cet égard.
    • b) Le comité rappelle que certains avantages, notamment en matière de représentation, pourraient être accordés aux syndicats en raison de leur degré de représentativité, mais a considéré que l’intervention des pouvoirs publics en matière d’avantages ne devait pas être de nature à influencer indûment le choix des travailleurs en ce qui concerne l’organisation à laquelle ils entendent appartenir.
    • c) Il rappelle que l’article 2 de la convention no 98 interdit aux employeurs de s’ingérer dans la création de syndicats et, à ce titre, demande au gouvernement d’effectuer une enquête indépendante au sujet de cette allégation selon laquelle les employeurs s’opposent à la création d’organisations syndicales au Collège écologique et au lycée «Mircea Eliade» et de le tenir informé à cet égard.
    • d) Le comité demande au gouvernement de prendre toutes les mesures nécessaires pour l’exécution sans délai des décisions judiciaires enjoignant à l’entreprise de virer au compte du syndicat les cotisations syndicales déduites mais non remises et de le tenir informé à cet égard.
    • e) Le comité demande au gouvernement de faire le nécessaire pour que les dirigeants et représentants syndicaux aient accès aux locaux des entreprises à l’occasion des réunions syndicales en respectant pleinement les droits de propriété et de la direction. Il demande au gouvernement de le tenir informé à cet égard.
    • f) Le comité estime que les organisations syndicales devraient pouvoir bénéficier des contacts avec les organisations syndicales internationales.
    • g) Le comité demande au gouvernement de lui faire parvenir dans les plus brefs délais ses observations concernant les enquêtes criminelles amorcées il y a plus de deux ans à l’endroit de l’AGROINDSIND.
    • h) Le comité demande au gouvernement de tenir de façon urgente des enquêtes indépendantes suivantes au sujet des allégations de pressions exercées sur les syndicats pour qu’ils changent d’affiliation:
    • i) dans les districts d’Ocnita, Briceni, Edinet et dans la municipalité de Chisinau, en ce qui concerne la SINDASP;
    • ii) dans les districts de Floresti, Gagauzia, Balti, Ocnita et Edinet, en ce qui concerne l’Union de l’éducation et de la science;
    • iii) à la Compagnie viticole, la cave vinicole Mileshti-Mish, la Chambre nationale des producteurs de vin et des viticulteurs, les firmes Viorika-Cosmetics Ltd., «Barza Alba», «Tutun CTC», «Aroma», «Cricova», «Franzeluta», l’usine de machines agricoles du district de Calarasi et l’usine de produits alimentaires de la municipalité de Balti, en ce qui concerne l’AGROINDSIND;
    • iv) sur les allégations de la CSRM concernant les organisations syndicales du secteur de la santé et, en particulier, au sujet de la désaffiliation du syndicat du ministère de la Santé «Sanatate»;
    • v) sur les circonstances de la désaffiliation de la Fédération des syndicats des travailleurs de l’industrie chimique et de l’énergie, de la Fédération «Moldsindcoopcomet», du syndicat «Raut» et du Syndicat des travailleurs du cadastre, de la géodésie et de la géologie «SindGeoCad» de la CSRM.
      • Le comité demande au gouvernement de le tenir informé des résultats de ces enquêtes.
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