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Rapport définitif - Rapport No. 337, Juin 2005

Cas no 2331 (Colombie) - Date de la plainte: 12-MARS -04 - Clos

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  1. 552. La présente plainte figure dans une communication du 12 mars 2004 de la Fédération nationale des syndicats des travailleurs des entreprises et entités de services publics et officiels (FENASINTRAP) et dans une communication du 15 juillet 2004 de l’Association des travailleurs et employés de l’entreprise sociale publique METROSALUD (ASMETROSALUD).
  2. 553. Le gouvernement a adressé ses observations les 28 janvier et 9 mars 2005. La Colombie a ratifié la convention (nº 87) sur la liberté syndicale et la protection du droit syndical, 1948, la convention (nº 98) sur le droit d’organisation et de négociation collective, 1949, la convention (nº 151) sur les relations de travail dans la fonction publique, 1978, et la convention (nº 154) sur la négociation collective, 1981.

A. Allégations des plaignants

A. Allégations des plaignants
  1. 554. Dans sa communication du 12 mars 2004, la Fédération nationale des syndicats des travailleurs des entreprises et entités de services publics et officiels (FENASINTRAP) présente les allégations suivantes.
  2. Syndicat des travailleurs et employés
  3. du département d’Antioquia
  4. 555. Le 23 décembre 1998, le président du Syndicat des travailleurs et employés du département d’Antioquia a partiellement dénoncé la convention collective en vigueur jusqu’au 31 décembre 1998, en ce qui concerne la durée de validité, les salaires, l’aide aux études, le fonds du logement et l’aide au fonctionnement du siège. Le syndicat a explicitement déclaré: «les articles, clauses, paragraphes, points et alinéas qui ne sont pas dénoncés restent évidemment en vigueur et ne sont pas litigieux. Cela signifie qu’ils ne feront pas l’objet de discussions dans le cadre du conflit.» Le cahier des revendications, qui compte 16 points, a été présenté par le syndicat le 28 décembre 1998. La phase d’accord direct destinée à régler le conflit économique a débuté le 5 janvier 1999 et s’est terminée le 24 janvier de la même année, sans que les parties ne soient parvenues à un accord. Les procès-verbaux signés par les parties font apparaître que les représentants du département d’Antioquia ont seulement manifesté leur volonté de négocier d’autres points dénoncés par l’entité, ce qui n’a pas été accepté par l’organisation syndicale.
  5. 556. Par la décision no 0525 du 26 mars 1999, le ministère du Travail et de la Sécurité sociale a ordonné la constitution d’un tribunal arbitral obligatoire pour régler le conflit; ledit tribunal a été constitué le 26 mai 1999 et a convoqué les parties à une audience qui s’est tenue le 1er juin de la même année. Seuls les représentants du département d’Antioquia se sont présentés à cette audience et ont manifesté leur souhait que le tribunal statue sur le contenu de la dénonciation qu’ils avaient faite. Ladite dénonciation concernait les points suivants: pensions de retraite, sécurité sociale, avancements, indemnités de transport, remplacements des travailleurs décédés, frais d’éducation des enfants des travailleurs. Le 11 juin, le tribunal s’est déclaré compétent pour connaître de la dénonciation présentée par le département d’Antioquia. Le membre du tribunal arbitral représentant les travailleurs n’a pas appuyé ladite décision, étant donné qu’il estimait que la dénonciation avait été présentée en dehors des délais fixés par l’article 478 du Code du travail. S’agissant des points dénoncés par les syndicats, le tribunal arbitral en a accepté certains en les réduisant et en a rejeté d’autres. Enfin, le 24 juin, le tribunal arbitral a rendu sa sentence sur les questions suivantes: entrée en vigueur de la sentence arbitrale, augmentation salariale, fonds du logement et prêts, aide au fonctionnement du siège syndical, aide au service du conseiller juridique, aide aux études. Quant à la dénonciation présentée par le département d’Antioquia, le tribunal a décidé d’abroger la clause conventionnelle relative aux sanctions et procédures disciplinaires, pour qu’à l’avenir cette question soit régie par la loi no 200 de 1995; en ce qui concerne les pensions, le tribunal a dit que le régime général des pensions visé par la loi no 100 de 1993 serait applicable aux fonctionnaires qui seraient engagés à compter de l’exécution de la sentence arbitrale.
  6. 557. L’organisation plaignante signale qu’elle-même et le département d’Antioquia ont formé un recours en homologation contre la sentence arbitrale: le syndicat a fait valoir que la dénonciation lui avait été présentée de façon incomplète et en dehors des délais, et que le système constitutionnel et légal ne permettait pas que la dénonciation de la convention collective par l’employeur puisse donner naissance à un conflit collectif de travail; le département d’Antioquia, quant à lui, a demandé que les questions de santé et de pensions soient tranchées. Le 14 septembre 1999, la Cour suprême de justice a renvoyé l’affaire devant le tribunal arbitral, qui s’est prononcé le 24 juin 1999 sur la question de la santé et des pensions sans tenir compte des arguments exposés par le syndicat, à savoir que la dénonciation de la convention collective par l’employeur ne provoquait pas le conflit collectif et que le tribunal pouvait, à titre exceptionnel uniquement, considérer les points de la dénonciation faite par le département, si les parties étaient d’accord sur les points dénoncés ou si le syndicat acceptait de discuter des points soulevés par le département pendant la phase d’accord direct, circonstance qui ne s’appliquait pas en l’espèce. Selon l’organisation plaignante, la Cour suprême de justice n’a pas statué conformément à la thèse appelée «traditionaliste», qu’elle a longtemps soutenue, mais a adopté une position nouvelle.
  7. Syndicat des fonctionnaires de METROSALUD (SINTRAOMMED)
  8. 558. FENASINTRAP allègue que le Syndicat des fonctionnaires de METROSALUD (SINTRAOMMED) a présenté le 17 décembre 1998 un cahier des revendications, qui ne comportait aucun point concernant la santé et les pensions. De son côté, l’entreprise METROSALUD a présenté la dénonciation de la convention collective de travail le 31 décembre 1998 aux fins de modifier, de réviser et d’annuler diverses clauses conventionnelles dans le but de les mettre en conformité avec la loi no 100 de 1993 sur les pensions. Le 16 avril 1999, l’entreprise a déposé une proposition globale pour le règlement du conflit du travail, qui prévoyait notamment la création d’un fonds complémentaire pour la santé et la mise en conformité du régime des pensions avec la loi no 100 applicable aux travailleurs à partir de janvier 2001.
  9. 559. Par ailleurs, le 15 avril, le syndicat avait présenté une proposition dont la teneur correspondait essentiellement au contenu du cahier des revendications du 17 décembre 1998, mais avec une réduction des aspirations économiques. Néanmoins, METROSALUD a persisté à demander la révision, la modification et l’annulation des clauses conventionnelles relatives aux questions de santé et de pensions qui n’étaient pas contenues dans le cahier présenté par SINTRAOMMED et qui n’avaient pas non plus été acceptées par ce dernier syndicat pendant la phase d’accord direct. Etant donné qu’aucun accord n’avait pu être conclu, la phase d’accord direct ayant expiré, le ministère du Travail et de la Sécurité sociale a convoqué un tribunal arbitral pour régler le conflit; ledit tribunal a tenu une audience publique le 12 novembre 1999 lors de laquelle les représentants du syndicat ont manifesté leur opposition à un examen des points soulevés par l’entreprise. Nonobstant cette opposition, le 18 novembre 1999, le tribunal arbitral a déclaré qu’il examinerait tant le cahier des revendications soumis par l’organisation syndicale que la dénonciation présentée par l’entreprise, du fait de leur pertinence conformément à la nouvelle jurisprudence de la Cour suprême de justice.
  10. 560. Dès lors, le tribunal a rendu une sentence arbitrale le 6 décembre 1999, par laquelle il a modifié les normes conventionnelles relatives à la santé et au système des pensions. L’organisation syndicale a formé un recours en homologation à l’encontre de la sentence arbitrale, la rejetant dans son intégralité du fait que dans ladite sentence les arbitres ont fait droit à toutes les demandes de l’entreprise, annulant les droits conventionnels des travailleurs en dépit du fait que les clauses qui prévoyaient ces droits n’avaient pas été soumises à la discussion lors de la phase d’accord direct et n’avaient pas été incluses dans le cahier des revendications.
  11. 561. FENASINTRAP signale que la Cour suprême de justice s’est prononcée sur le recours en homologation le 17 mars 2001 et a confirmé la sentence arbitrale, faisant valoir que sa position traditionnelle sur les effets de la dénonciation de la convention collective par le patronat et la compétence des tribunaux arbitraux avait évolué, en ce sens qu’elle permettait que le tribunal arbitral examine le contenu de ladite dénonciation par le patronat, compte tenu également du fait que le Code du travail ne régissait pas, de façon explicite et catégorique, cette matière dans tous ses éléments. Ainsi, la chambre du travail de la cour a estimé que la loi no 100 de 1993 avait force obligatoire et que les conventions collectives de travail devaient être conformes à ladite loi, même dans les cas où la dénonciation des clauses concernées émanait de l’entreprise.
  12. Syndicat des travailleurs de la commune d’Itagüí (SINTRAMITA)
  13. 562. FENASINTRAP signale que le Syndicat des travailleurs de la commune d’Itagüí (SINTRAMITA) a présenté, le 3 novembre 1998, un cahier des revendications à la commune d’Itagüí après avoir dénoncé la convention collective. A la même date, la commune a dénoncé la convention collective. La phase d’accord direct a commencé le 10 novembre, mais les parties ne sont pas parvenues à un accord, raison pour laquelle le ministère du Travail et de la Sécurité sociale a convoqué un tribunal arbitral pour régler le conflit.
  14. 563. FENASINTRAP signale que le 1er septembre 2001 le tribunal a rendu une sentence arbitrale, à laquelle s’est opposé un des arbitres qui estimait que la dénonciation de l’employeur devait être rejetée en l’absence de circonstances exceptionnelles permettant son examen, à savoir: iniquité flagrante, modification radicale et notoire des circonstances économiques et sociales ou menace grave et manifeste pour la vie de l’entreprise, la source de travail et la continuité de ses activités essentielles; en outre, ledit arbitre considérait que cela revenait à ignorer les droits conventionnels des travailleurs tels que la pension de retraite, les congés en cas de catastrophes, la vente de ciment et la stabilité de l’emploi.
  15. 564. Le syndicat SINTRAMITA a formé un recours en homologation à l’encontre de la sentence arbitrale, et la Cour suprême a accueilli les arguments du syndicat relatifs à la stabilité de l’emploi, mais a rejeté les arguments relatifs à la vente de ciment, aux congés en cas de catastrophes et au régime des pensions, en conformité avec sa jurisprudence récente.
  16. 565. FENASINTRAP signale de manière générale que la négociation collective en Colombie fait partie du concept du conflit collectif de travail qui est amorcé par la présentation du cahier des revendications par le syndicat. L’initiative du conflit revient à l’organisation syndicale. En effet, bien que la dénonciation de la convention collective en vigueur puisse émaner tant de l’employeur que de l’organisation syndicale, selon l’organisation plaignante, le cahier des revendications, qui détermine la portée du conflit collectif, peut exclusivement être présenté par le syndicat. Après la présentation du cahier, le processus de négociation collective est amorcé avec la phase d’accord direct lors de laquelle, grâce au dialogue, les parties peuvent mettre fin au conflit par la signature d’une convention collective. Si les parties ne parviennent pas à un accord, les travailleurs peuvent recourir à la grève ou demander la constitution d’un tribunal arbitral. Les décisions des tribunaux arbitraux sont contrôlées par voie judiciaire par le recours en homologation formé devant la chambre de cassation du travail de la Cour suprême de justice dans le cas des conflits qui surviennent au sein d’entreprises publiques ou devant le tribunal supérieur du district judiciaire dans le cas de conflits dans toute autre entreprise.
  17. 566. La Cour suprême de justice avait soutenu une thèse appelée traditionaliste qui consistait à considérer que les arbitres devaient régler les conflits collectifs de travail exclusivement à l’égard des éléments litigieux, c’est-à-dire les éléments contenus dans le cahier des revendications, et que les travailleurs avaient accepté d’examiner pendant la phase d’accord direct. Les éléments contenus dans la dénonciation de l’employeur pouvaient seulement être examinés par le tribunal dans le cas où ils correspondaient aux éléments exposés dans le cahier des revendications.
  18. 567. L’organisation plaignante signale qu’à partir de 1993, parallèlement à l’approbation de la loi no 100 relative aux pensions, la cour a modifié sa position traditionnelle en acceptant dans un premier temps que les tribunaux arbitraux examinent les clauses relatives aux pensions, même lorsque la demande d’examen n’était pas mentionnée dans le cahier des revendications mais qu’elle l’était dans la dénonciation faite par l’employeur. Avec le temps, la compétence d’examen du tribunal arbitral a été étendue à d’autres questions que celles relatives aux pensions, visées dans la dénonciation faite par les employeurs.
  19. 568. Dans sa communication du 15 juillet 2004, l’Association des travailleurs et employés de l’entreprise sociale publique METROSALUD (ASMETROSALUD) précise qu’elle a été créée, en tant qu’organisation syndicale, le 16 mars 2001 dans le but de protéger les travailleurs contre la menace avancée par l’administration de liquider l’entreprise. Elle ajoute qu’elle compte parmi ses membres des employés du secteur public appartenant à toutes les associations du secteur de la santé présentes au sein de METROSALUD, à savoir: l’Association syndicale colombienne des médecins, ASMEDAS, section d’Antioquia; l’Association nationale des infirmières de Colombie, ANEC; l’Association nationale des infirmières diplômées, ANDEC; l’Association des bactériologistes diplômés, ASBAS.
  20. 569. ASMETROSALUD signale que trois organisations syndicales sont présentes au sein de METROSALUD, à savoir: le Syndicat des fonctionnaires de METROSALUD, SINTRAOMMED; l’Association des employés de l’assainissement, ASAESA; l’Association des travailleurs et employés de l’entreprise sociale publique METROSALUD, ASMETROSALUD.
  21. 570. Le 13 décembre 2001, ASMETROSALUD a présenté un cahier des revendications. Le 20 décembre, l’entreprise a adressé à l’organisation syndicale un mémorandum signalant que, conformément à l’article 416 du Code du travail, les employés publics ne peuvent pas présenter de cahier des revendications et que, bien que les conventions internationales du travail nos 151 et 154 aient été ratifiées par le gouvernement colombien, elles ne sont pas encore réglementées. L’organisation plaignante informe qu’en raison du refus de l’entreprise de négocier un litige pour outrage a été soumis au ministère du Travail et de la Sécurité sociale aux fins d’obliger l’employeur à négocier. Cependant, le ministère ne s’est pas prononcé sur cette action.
  22. 571. ASMETROSALUD ajoute qu’en février 2002 le Syndicat des fonctionnaires de METROSALUD (SINTRAOMMED), autre organisation syndicale présente dans l’entreprise, a présenté un cahier des revendications. Etant donné qu’il existait deux cahiers des revendications parallèles, la direction de l’entreprise a sollicité un avis juridique auprès de la conseillère juridique du ministère du Travail et de la Sécurité sociale concernant la procédure à suivre pour négocier avec chacun des syndicats. Le 12 mars 2002, la conseillère juridique a rendu son avis, indiquant que dans le cas des employés publics, étant donné qu’il n’existait pas de procédure de négociation, il convenait d’appliquer les règles de façon analogue à celles applicables aux autres cas similaires et que, dans une entité où il existe deux syndicats minoritaires, on pouvait négocier avec les deux pour compiler une seule convention collective englobant les deux cahiers des revendications. L’organisation plaignante signale qu’à ce jour la direction de l’entreprise n’a pas mis cet avis en application.
  23. B. Réponse du gouvernement
  24. 572. Dans sa communication du 28 janvier 2005, le gouvernement répond de manière générale aux allégations formulées par la Fédération nationale des syndicats des travailleurs des entreprises et entités de services publics et officiels (FENASINTRAP). Le gouvernement signale que, étant donné que la présente dénonciation est concernée par les décisions rendues par la chambre de cassation du travail de la Cour suprême de justice sur l’exercice de l’activité syndicale et le droit à la négociation collective de travail, il convient de tenir compte de la position de ladite instance en vertu des indications données par le président (E) de la chambre de cassation du travail.
  25. 573. Tout d’abord, il importe de tenir compte du fait que les décisions adoptées par la Cour suprême de justice en matière de droit à la négociation collective sont fondées sur le principe de l’égalité conformément à l’article 13 de la Constitution politique, de concert avec l’article 55 de la charte en vigueur, qui garantit le droit à la négociation collective aux fins de réglementer les relations de travail, hormis les exceptions prévues par la loi.
  26. 574. Le gouvernement souligne que les décisions de justice auxquelles il est fait référence dans le présent cas garantissent, en conformité avec les normes constitutionnelles en vigueur, le droit à la négociation collective en mettant sur un pied d’égalité le syndicat et l’employeur, l’Etat ayant le devoir d’encourager la concertation ou le commun accord des parties pour un règlement pacifique des litiges sans négliger l’équilibre économique des parties à la convention. Pour mieux illustrer son propos, le gouvernement transcrit ci-dessous certains passages de décisions pertinentes rendues par la Cour suprême de justice.
  27. 575. Ainsi, dans l’arrêt du 27 mars 1969, ladite cour s’est prononcée sur le recours en homologation formé par les parties à l’encontre de la sentence arbitrale rendue le 9 juin 1967 par le tribunal arbitral qui a réglé le conflit collectif de travail entre le Syndicat national des travailleurs de la Fédération nationale des producteurs de café de Colombie et des Almacenes Generales de Depósito de Café S.A. et ces entreprises:
  28. ... Attendu que la pérennité alléguée de la convention collective non seulement ne s’accorde pas avec les postulats énoncés, mais constituerait également une violation du texte explicite de la Constitution, il serait prudent, si la loi n’a effectivement pas défini de procédure spécifique pour l’examen de la dénonciation faite par l’employeur, d’accepter l’existence d’un vide légal que l’interprétation doit combler par l’application de principes abstraits que la législation elle-même prévoit à cet effet. En vertu de l’article 481 du Code judiciaire, le juge n’est pas autorisé à refuser de statuer sur une affaire dont il est saisi. Il est donc tenu de statuer en droit; dès lors, il lui est implicitement ordonné de combler les lacunes et de remédier aux contradictions apparentes que les dispositions applicables peuvent contenir. Si l’article 14 du décret no 616 confère à l’employeur le droit de renoncer unilatéralement à la convention, appelant du fait de la dénonciation une décision sur les points qu’elle soulève, sans que soit défini le moyen d’y parvenir, il s’agit d’une règle incomplète qui, pour produire l’effet proposé, doit s’appuyer sur une interprétation qui se fonde sur les règles dont la loi ordonne qu’il faut tenir compte dans de tels cas.
  29. ... L’équité, comprise comme le simple sentiment ou la conscience de ce qui est juste, échappe à l’appréciation des juges de droit, le règlement des conflits la concernant étant réservé aux juges appelés juges d’équité (parce qu’ils rendent leurs décisions en conscience), comme c’est le cas des tribunaux arbitraux. Cependant, dès lors que le juge de droit présume que le juste règlement du cas concret ne concorde pas strictement avec l’hypothèse abstraite ou absolue de la règle positive, ledit juge doit appliquer un critère d’interprétation de la loi et des instruments juridiques dans le but de préserver ou de rétablir l’équilibre ou l’égalité dans la situation des parties que la loi a voulu préserver et qui, dans le domaine du travail, se manifeste, entre autres effets, dans la compensation de l’inégalité entre le travailleur et l’entreprise qui applique le régime de convention collective. La convention n’a pas d’autre but que de suppléer au manque de liberté du travailleur qui signe un contrat individuel avec l’employeur à cause de sa fragilité économique et de placer les deux parties sur un pied d’égalité afin de définir les conditions générales de travail. Il ressort clairement de ces postulats que, tous les conflits collectifs trouvant leur origine dans l’aspiration naturelle des travailleurs de modifier le droit existant pour améliorer les conditions de travail par rapport aux normes légales ou conventionnelles en vigueur, tout ce qui a trait à cette modification relève de la compétence exclusive des arbitres, étant donné que cette question ressort à la conscience ou au sentiment moral de ceux qui ont pour tâche de régler le conflit d’intérêts, bien qu’il n’en soit pas de même pour ce qui concerne le maintien de l’équilibre des forces économiques entre lesquelles survient le différend et qui luttent entre elles, parce que la préservation de cet équilibre implique non seulement un conflit d’intérêts mais également un problème juridique, qui est celui de la préservation d’un ordre légal qui a été institué en tant que facteur indispensable de l’«équilibre social»; par conséquent, à cette fin, le concept d’équité doit également être appliqué par les juges de droit.
  30. ... La dénonciation de la convention par l’employeur est subordonnée à la nécessité de maintenir cet équilibre, étant donné que, la loi supposant l’égalité des parties grâce à l’association professionnelle, l’égalité serait rompue s’il était reconnu à une partie une faculté refusée à l’autre partie, obligeant ainsi les entreprises à supporter une spirale sans fin d’élévation des niveaux des salaires et des prestations qui, avec le temps, pourrait finir par menacer l’existence même de l’entreprise. C’est pourquoi la dénonciation de la convention par l’employeur ne peut pas être considérée comme un rejet intempestif du régime légal colombien – comme semble l’indiquer le recours – mais au contraire comme un mécanisme qui s’appuie sur des précédents tirés de la doctrine et de la législation de validité exceptionnelle...
  31. ... Il n’est pas contestable que le droit positif admet la dénonciation de la convention par l’employeur et que cette dénonciation s’inscrit dans le cadre du conflit du travail qui doit être réglé par la signature d’une nouvelle convention en vertu des dispositions des articles 478 et 479 du Code du travail; cela signifie qu’entre les associations des travailleurs et les associations des employeurs les forces sont considérées sur le même pied, et donc le même traitement leur est réservé. Ainsi, octroyer les instruments légaux garantissant à l’une des parties l’application de ce traitement, alors qu’il est refusé à l’autre partie, constituerait une véritable atteinte à l’équité avec laquelle les relations entre les employeurs et les travailleurs doivent être considérées, afin que, dans leurs conflits d’intérêts, ne soit pas rompu l’équilibre entre les associations professionnelles que la loi a voulu organiser...
  32. 576. Par ailleurs, l’arrêt du 8 juillet 1996, numéro de référence 8989, déclare:
  33. ... Il convient de garder à l’esprit que la décision du tribunal arbitral obligatoire convoqué pour régler un conflit collectif se caractérise par le fait qu’elle doit être rendue en toute équité et ne doit pas être soumise à la rigueur des jugements rendus en droit.
  34. ... Selon la doctrine constante de la présente chambre en conformité avec l’article 479 du Code du travail, modifié par l’article 14 du décret-loi no 616 de 1954, la dénonciation de la convention collective constitue un droit des parties qui sont tenues de la respecter, ledit droit se manifestant par la déclaration écrite de l’un de ses signataires adressée à l’autre signataire, par l’intermédiaire du ministère du Travail et de la Sécurité sociale, de sa volonté d’y mettre fin.
  35. ... Il convient de relever que la négociation collective a pour effet de réglementer les relations de travail et pour mission d’assurer la paix par le règlement des conflits collectifs de travail que la législation en vigueur lui a confiée, si elle se déroule sans heurts et en souplesse en parfaite harmonie avec les droits et les obligations que la loi confère aux parties aux fins de garantir l’égalité des parties au conflit. En revanche, la volonté d’obtenir des avantages, en faisant valoir des droits que la loi ne leur reconnaît pas, revient à ramener le conflit à son état naturel, créant une polarisation indésirable dans laquelle les parties se radicalisent et se font face dans le cadre d’une véritable guerre de positions, dans laquelle les adversaires ne s’accordent pas pour écouter leurs propositions mais sont résolus à défendre d’avance leurs idées préconçues...
  36. ... Lorsque la convention en vigueur est dénoncée par l’employeur, la jurisprudence prévoit les cas dans lesquels une sentence arbitrale est habituellement requise pour trancher les questions auxquelles la dénonciation se réfère, les questions examinées étant limitées à celles qui présentaient un caractère conflictuel lors de la phase d’accord direct. Cependant, la jurisprudence a également précisé que «ne peut être acceptée en droit l’affirmation que les employeurs ne peuvent pas dénoncer la convention collective, parce que c’est contraire à ce que dit la loi, en conformité avec les explications de l’arrêt du 29 octobre 1982, numéro de référence 9120, ni que les parties ou le tribunal arbitral ne peuvent modifier les conditions antérieurement convenues qui ont été dénoncées légalement» (arrêt statuant sur l’homologation du 17 octobre 1991). Bien entendu – ajoute la chambre –, en ce qui concerne ce dernier élément, cette possibilité constitue l’exception et non la règle générale.
  37. 577. A la lumière des précédents exposés ci-dessus, le gouvernement souligne que la jurisprudence a reconnu des effets concrets à la dénonciation de la convention collective par l’employeur, compte tenu du fait qu’il s’agit d’un droit essentiel de toute partie intervenant dans la convention collective, laquelle implique fondamentalement la négociation sur les conditions qui doivent régir les contrats de travail des travailleurs liés par ladite convention collective. A cet égard, bien que l’employeur ne provoque pas le conflit collectif en dénonçant la convention ou l’accord, il est certain qu’il a le droit de faire connaître ses inquiétudes dans le cadre du conflit collectif et d’exposer ses aspirations et ses arguments à son interlocuteur, qui y prêtera une attention raisonnable, afin que cette relation de dialogue atteigne parfois la dimension bilatérale ou plurilatérale, comme il convient à une relation contractuelle.
  38. 578. S’agissant des attributions de la Cour suprême de justice, le gouvernement signale que ladite cour examine la régularité des sentences arbitrales, en tenant compte des conditions minimales de travail prévues par la loi et de celles définies par les règles conventionnelles en vigueur, ainsi que du cadre que la dénonciation de la convention confère au pouvoir de décision des arbitres; parallèlement, elle examine la nature du conflit, vérifie si les phases d’accord direct ou de conciliation ont eu lieu, si le tribunal a été constitué conformément à la loi, s’il a effectué ses travaux dans les conditions définies par la loi, si la sentence a été rendue dans le délai fixé et sur les questions pertinentes. En conclusion, la chambre du travail de la Cour suprême de justice examine si la sentence remplit les conditions définies par la Constitution politique, par la loi et par les contrats pertinents et vérifie si les droits constitutionnels des parties ne sont pas violés du fait que la sentence n’a pas été dûment ou suffisamment motivée ou qu’elle a ignoré de façon manifestement déraisonnable ces droits.
  39. 579. Le gouvernement rappelle qu’à maintes reprises le Comité de la liberté syndicale a déclaré que «lorsqu’il demande à un gouvernement des informations sur l’issue des procédures judiciaires, une telle demande d’information n’implique de sa part absolument aucun jugement quant à l’intégrité et à l’indépendance du pouvoir judiciaire». Le gouvernement considère, comme le Comité de la liberté syndicale, qu’un système judiciaire solide et indépendant est fondamental pour le système démocratique et pour garantir la liberté et l’indépendance du mouvement syndical. A cet égard, le gouvernement approuve l’affirmation du comité qui a déclaré: «l’essence même de la procédure judiciaire est que ses résultats sont connus, et la conviction que l’on acquiert de son impartialité repose sur cette publicité»; cette publicité est garantie grâce aux mécanismes de publicité dont dispose le système judiciaire colombien ainsi qu’aux informations que le gouvernement fournit au Comité de la liberté syndicale. Le gouvernement estime, comme le comité l’a lui-même déclaré, «qu’il est certain que le comité se considère habilité à examiner les lois, y compris celles qui sont interprétées par les tribunaux supérieurs». Le fait que le système judiciaire rende des décisions qui ne conviennent pas aux travailleurs ou aux organisations des travailleurs parce qu’elles ne satisfont pas leurs intérêts ou leurs demandes ou parce qu’elles ne correspondent pas à l’interprétation qu’ils font de la réglementation applicable ne constitue pas un motif valable pour faire une enquête sur le système judiciaire, son intégrité et les décisions qu’il rend. Le gouvernement n’accepte pas ces investigations ni cet avis. Si le but recherché est de faire du Comité de la liberté syndicale une instance qui se substitue au système judiciaire, lorsque celui-ci prononce une décision contraire aux prétentions formulées, le gouvernement rejette fermement et sans hésitation cette attitude qui, si elle était acceptée, aurait pour conséquence immédiate – fait paradoxal – d’affaiblir le système judiciaire, ce qui entraînerait avant tout la détérioration de la liberté syndicale en Colombie.
  40. 580. A partir de cette prémisse, le gouvernement apporte une réponse qui s’appuie sur diverses décisions rendues en la matière par la Cour suprême de justice, dans la seule intention d’éclairer le comité et le Conseil d’administration sur la jurisprudence actuelle en la matière et sur les fondements sur lesquels elle s’appuie. Les actions tendant à renforcer le système judiciaire colombien grâce à la formation et au développement des compétences des juges et des magistrats dans le cadre du programme spécial de coopération technique mis en œuvre avec l’OIT constituent l’unique moyen de dialogue que le gouvernement accepte en ce qui concerne les décisions rendues par le système judiciaire car, dans ce contexte de coopération, l’objectif n’est pas de soumettre à l’examen le système judiciaire colombien.
  41. 581. S’agissant des allégations présentées par ASMETROSALUD concernant le refus de l’entreprise METROSALUD de procéder à la négociation collective, le gouvernement fait savoir que le système juridique des prestataires de services publics reconnaît deux situations: celle des employés publics de la branche exécutive, à caractère légal et statutaire, et celle des fonctionnaires qui est de nature contractuelle. En effet, la relation de travail de l’employé public est régie par la loi ou par les règlements en vigueur qui ne peuvent être modifiés que par des règles de même niveau. C’est la différence essentielle de ce type de relation par rapport à la situation contractuelle, pour laquelle il existe la possibilité de négocier les conditions du service et de modifier les prestations correspondantes dans un sens favorable en vertu d’une décision unilatérale de l’employeur ou de conventions collectives de travail.
  42. 582. Ainsi, en vertu des dispositions expresses de l’article 414 du Code du travail, le droit d’association au sein de syndicats est étendu aux travailleurs de la fonction publique dans son ensemble, à l’exception des membres de l’armée nationale et des corps ou forces de police de tous ordres. Cependant, les syndicats des employés publics remplissent uniquement les fonctions suivantes: i) étudier les caractéristiques de la profession concernée et les conditions de travail de leurs membres; ii) conseiller leurs membres dans la défense de leurs droits en tant qu’employés publics, en particulier ceux qui concernent la carrière administrative; iii) représenter en justice ou devant les autorités les intérêts économiques communs ou généraux des membres d’une association ou de la profession concernée; iv) présenter aux supérieurs hiérarchiques compétents de l’administration des requêtes respectueuses.
  43. 583. Les fonctions énoncées aux deux derniers points exposés ci-dessus entraînent, pour les autorités et en particulier pour les supérieurs hiérarchiques des membres des syndicats, l’obligation conjointe de recevoir comme il se doit les représentants du syndicat et de trouver la solution adéquate à leurs demandes (art. 415 du Code du travail).
  44. 584. La Cour constitutionnelle a jugé légitime l’interdiction, imposée aux syndicats des employés publics par l’article 416 du Code du travail, de présenter un cahier des revendications ou de conclure des conventions collectives, comme elle l’a constaté dans son arrêt C-110 du 10 mars 1994, en le déclarant exécutoire. Cette restriction trouve sa justification dans l’article 55 de la Constitution, qui garantit le droit à la négociation collective aux fins de réglementer les relations de travail avec les exceptions que la loi précise.
  45. 585. En ce qui concerne l’arrêt C-377 de 1998, lors de l’examen de la constitutionnalité de la convention (nº 151) sur les relations de travail dans la fonction publique, 1978, et de la loi no 411 de 1997 portant approbation dudit instrument, la cour a considéré que la différenciation entre les fonctionnaires et les employés publics aux fins de l’exercice du droit à la négociation collective était conforme à la Constitution; elle a signalé que les fonctionnaires jouissaient pleinement de ce droit, tandis que les employés publics en avaient une jouissance restreinte car, bien que ces derniers aient le droit de chercher et de trouver des solutions concertées en cas de conflit, la faculté qu’ont les autorités de fixer unilatéralement les conditions de travail ne peut en aucun cas être perturbée.
  46. 586. Dans l’arrêt C-201 de 2002, la Cour constitutionnelle a dit: «pour déterminer si ces dispositions sont applicables aux syndicats des employés publics, il convient de se référer à l’article 416 du Code du travail, qui limite le droit à la négociation collective des syndicats des employés publics, en ce sens qu’il leur interdit de présenter des cahiers des revendications et de conclure des conventions collectives, restriction que la cour a confirmée à plusieurs reprises en conformité avec la Constitution politique».
  47. 587. S’agissant de la déclaration de l’organisation syndicale selon laquelle, en raison du refus de négocier manifesté par la direction de METROSALUD, un litige a été soumis au ministère du Travail et de la Sécurité sociale, le gouvernement signale que le ministère du Travail et de la Sécurité sociale a rendu la décision no 00979 du 28 mai 2002 faisant droit à l’entreprise sociale publique METROSALUD, étant donné que ledit ministère a considéré que l’entreprise avait entamé des discussions sur le sujet mais qu’elle les avait suspendues parce qu’elle avait des doutes concernant la légalité de la négociation collective avec les employés publics. La décision susvisée continue de produire ses effets, étant donné que les recours prévus par la loi n’ont pas été formés. S’agissant des principes formulés par le bureau juridique du ministère du Travail et de la Sécurité sociale de l’époque, auxquels l’organisation plaignante se réfère, le gouvernement signale que lesdits principes n’ont pas force obligatoire et n’engagent pas l’entité, en conformité avec les dispositions de l’article 25 du Code des contentieux administratifs.
  48. 588. En conclusion, la négociation collective avec les employés publics est limitée. En effet, on ne peut invoquer en la matière les conditions d’emploi que la Constitution politique a expressément réservées à la loi, comme c’est le cas pour les questions d’ordre salarial, celles ayant trait aux prestations et celles relatives au régime disciplinaire et à la carrière administrative notamment.

C. Conclusions du comité

C. Conclusions du comité
  1. 589. Le comité observe que le présent cas concerne les points suivants: 1) les allégations présentées par la Fédération nationale des syndicats des travailleurs des entreprises et entités de services publics et officiels (FENASINTRAP) selon lesquelles la Cour suprême de justice de Colombie aurait modifié ses critères, autorisant à présent les tribunaux d’arbitrage, appelés à régler les conflits collectifs entre les travailleurs et les entreprises ou les entités du secteur public, à examiner, outre les cahiers des revendications présentés par les travailleurs, les dénonciations des conventions collectives faites par les employeurs et à rendre leur sentence en se fondant sur cet examen, ce qui serait, d’après l’organisation plaignante, contraire à la convention no 98; 2) les allégations présentées par l’Association des travailleurs et employés de l’entreprise sociale publique METROSALUD (ASMETROSALUD) concernant le refus de la part de l’entreprise publique METROSALUD d’engager une négociation collective avec l’organisation syndicale en raison de l’absence de réglementation en ce qui concerne l’application des conventions nos 151 et 154, ratifiées par la Colombie.
  2. 590. S’agissant des allégations présentées par FENASINTRAP concernant l’examen par les tribunaux d’arbitrage non seulement des cahiers des revendications soumis par les travailleurs mais également des dénonciations des conventions collectives présentées par les employeurs dans le cadre des conflits collectifs survenus entre le département d’Antioquia et le Syndicat des travailleurs et employés du département d’Antioquia, l’entreprise METROSALUD et le Syndicat des fonctionnaires de METROSALUD (SINTRAOMMED) et la commune d’Itagüí et le Syndicat des travailleurs de la commune d’Itagüí (SINTRAMITA), le comité note la déclaration de l’organisation plaignante selon laquelle la Cour suprême de justice de Colombie avait traditionnellement soutenu que les tribunaux d’arbitrage devaient rendre leurs sentences en se fondant uniquement sur les cahiers des revendications présentés par les travailleurs. Les dénonciations faites par les employeurs pourraient uniquement être prises en compte dans les cas où lesdites dénonciations concorderaient avec les points figurant dans le cahier des revendications ou dans les cas où les travailleurs auraient accepté de les examiner lors de la phase d’accord direct préalable à la nomination du tribunal d’arbitrage. Le comité note que, selon FENASINTRAP, en raison du revirement de jurisprudence de la Cour suprême de justice, bien que le déclenchement du conflit collectif reste subordonné exclusivement à la dénonciation faite par les travailleurs et à la présentation ultérieure par ceux-ci d’un cahier des revendications, les tribunaux d’arbitrage peuvent actuellement statuer non seulement sur la base des cahiers des revendications, mais aussi des dénonciations faites par l’employeur, même dans les cas où les travailleurs s’opposent à l’examen des points contenus dans lesdites dénonciations. Le comité note que, selon FENASINTRAP, cette position modifie fondamentalement le contenu des conventions collectives en vigueur à ce jour et entraîne dans de nombreux cas une détérioration des conditions de travail et des avantages liés au travail, en particulier en matière de pensions et de santé.
  3. 591. Le comité note également la réponse du gouvernement dans laquelle il insiste sur la compétence de la Cour suprême en ce qui concerne l’examen de la régularité des sentences arbitrales, lesquelles doivent être conformes aux critères d’égalité et de libre participation. Le gouvernement transcrit certains paragraphes d’arrêts rendus en la matière par la Cour suprême de justice, qui mettent l’accent sur l’importance de permettre à toutes les parties concernées de participer à la négociation collective et sur la nécessité de préserver l’égalité entre les parties dans le traitement des conflits collectifs.
  4. 592. Observant que, comme il ressort de la réponse du gouvernement et des arrêts de la Cour suprême, le conflit collectif ne peut naître que de l’initiative des travailleurs, et considérant que conformément à la législation colombienne, si la convention n’est pas dénoncée, elle est prorogée automatiquement de six mois en six mois (art. 477 et suiv. du Code du travail), le comité estime que ne constitue pas une violation du principe de négociation libre et volontaire l’autorisation donnée au tribunal, lorsque surgit un conflit collectif, de tenir compte des points invoqués par les employeurs, même s’ils n’ont pas été acceptés par les travailleurs. A cet égard, le comité insiste sur l’importance de la participation active des deux parties à la négociation et rappelle également que «la possibilité pour les employeurs de présenter, conformément à la législation, des cahiers contenant leurs propositions aux fins de négociation collective – si ces propositions sont destinées simplement à servir de base à la négociation volontaire à laquelle se réfère la convention no 98 – ne doit pas être considérée comme une violation des principes applicables en la matière». [Voir Recueil de décisions et de principes du Comité de la liberté syndicale, quatrième édition, 1996, paragr. 849.] Dans ces conditions, le comité ne considère pas que la nouvelle jurisprudence de la Cour suprême viole les principes de la convention no 98 relatifs à la négociation collective libre et volontaire.
  5. 593. S’agissant des allégations présentées par l’Association des travailleurs et employés de l’entreprise sociale publique METROSALUD (ASMETROSALUD) relatives au refus de l’entreprise publique METROSALUD d’entamer une négociation collective avec l’organisation plaignante en raison de l’absence de réglementation des conventions nos 151 et 154, le comité prend note des informations communiquées par le gouvernement, à savoir que les employés publics ne jouissent pas du droit de présenter des cahiers des revendications, en conformité avec les dispositions de l’article 55 de la Constitution politique qui consacre le droit à la négociation collective accordé aux travailleurs dans les limites imposées par la loi, et l’article 416 du Code du travail qui interdit la négociation collective dans le cas des employés publics.
  6. 594. A cet égard, le comité observe que la Colombie a ratifié les conventions nos 98, 151 et 154 et qu’en conséquence les travailleurs du secteur public et de l’administration publique centrale doivent jouir du droit à la négociation collective. Le comité signale cependant qu’en vertu de la convention no 154 des modalités particulières d’application de ladite convention peuvent être fixées pour ce qui concerne la négociation collective au sein de la fonction publique. En effet, le comité, partageant le point de vue de la commission d’experts dans son étude d’ensemble de 1994, rappelle que, si le principe de l’autonomie des partenaires à la négociation collective reste valable en ce qui concerne les fonctionnaires et les employés publics couverts par la convention no 151, les particularités de la fonction publique décrites ci-dessus appellent une certaine souplesse dans son application, mais que, parallèlement, les autorités devraient privilégier dans toute la mesure possible la négociation collective pour fixer les conditions de travail des fonctionnaires. En ce sens, le comité estime que, dans le présent cas, la restriction imposée aux employés publics en ce qui concerne leurs possibilités de négociation collective n’est pas conforme aux dispositions des conventions mentionnées, étant donné que lesdits employés peuvent seulement présenter des «requêtes respectueuses» qui ne feront l’objet d’aucune négociation, en particulier sur les conditions d’emploi, dont la détermination relève de la compétence exclusive des autorités. Dans ces conditions, le comité demande au gouvernement de prendre les mesures nécessaires pour modifier la législation en concertation avec les organisations syndicales concernées, afin qu’elle soit conforme aux conventions ratifiées par la Colombie, de telle sorte que les travailleurs concernés jouissent du droit à la négociation collective.

Recommandation du comité

Recommandation du comité
  1. 595. Au vu des conclusions qui précèdent, le comité invite le Conseil d’administration à approuver la recommandation suivante:
    • S’agissant du refus exprimé par l’entreprise sociale publique METROSALUD d’engager une négociation collective avec l’Association des travailleurs et employés de l’entreprise sociale publique METROSALUD (ASMETROSALUD), le comité demande au gouvernement de prendre les mesures nécessaires pour modifier la législation en concertation avec les organisations syndicales concernées, afin qu’elle soit conforme aux conventions ratifiées par la Colombie, de telle sorte que les travailleurs concernés jouissent du droit à la négociation collective.
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