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Rapport où le comité demande à être informé de l’évolution de la situation - Rapport No. 336, Mars 2005

Cas no 2347 (Mexique) - Date de la plainte: 18-MAI -04 - Clos

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  1. 605. La plainte figure dans une communication du syndicat Footballeurs affiliés du Mexique (FAM) datée du 18 mai 2004. Le gouvernement a fait parvenir ses observations dans une communication du 22 septembre 2004.
  2. 606. Le Mexique a ratifié la convention (nº 87) sur la liberté syndicale et la protection du droit syndical, 1948; il n’a pas ratifié la convention (nº 98) sur le droit d’organisation et de négociation collective, 1949.

A. Allégations de l’organisation plaignante

A. Allégations de l’organisation plaignante
  1. 607. Dans sa communication du 18 mai 2004, le syndicat Footballeurs affiliés du Mexique (FAM) affirme que, le 16 avril 2001, a eu lieu à Mexico, district fédéral, conformément aux lois mexicaines et aux traités internationaux applicables, une assemblée constitutive du syndicat dénommé Footballeurs affiliés du Mexique (FAM) lequel, ayant rempli toutes les conditions, a donc été constitué à partir de ce moment. Comme il ressort de ses statuts, ce syndicat se compose de personnes qui se consacrent ou se sont consacrées au métier de footballeur professionnel et englobe tous ceux qui, dans une partie de la République mexicaine ou sur l’ensemble de son territoire, s’y consacrent: il a donc un caractère national. Le FAM s’est constitué avec 118 travailleurs en activité puis, sur la base de l’article 359 de la loi fédérale du travail qui permet aux syndicats d’élire librement leurs représentants, a décidé de désigner selon ce principe quatre anciens footballeurs membres du premier bureau, ce qui porte le nombre de membres fondateurs à 122. Ce syndicat s’est constitué pour contrer, de façon collective, les violations des droits des footballeurs, infligées de façon réitérée par les patrons, les clubs de football.
  2. 608. En septembre 2001, le bureau du FAM a sollicité son inscription au registre des syndicats auprès du Secrétariat au travail et à la prévision sociale du Mexique, ayant alors considéré, en se fondant sur l’interprétation de la loi et les antécédents en la matière d’autres syndicats dotés de caractéristiques similaires, que cette autorité était compétente. Il a présenté tous les documents requis par la loi à cet effet. Toutefois, dans sa réponse du 4 octobre 2001, le Secrétariat au travail et à la prévision sociale s’est déclaré incompétent.
  3. 609. Par l’entremise de ses représentants, le syndicat a fait appel de cette décision devant le Secrétariat au travail et à la prévision sociale, qui s’est à nouveau déclaré incompétent; il a alors présenté un recours en amparo indirect. La juge de première instance en matière de travail du district fédéral a accordé l’amparo au syndicat, considérant que le Secrétariat au travail et à la prévision sociale était bel et bien compétent.
  4. 610. Cependant, la décision de trancher a été transférée à la Cour suprême de justice de la nation, après que le Secrétariat au travail et à la prévision sociale eut à son tour fait appel.
  5. 611. Le 15 novembre 2002, dans une décision sans précédent, la deuxième chambre de la Cour suprême de justice de la nation, en audience plénière, a déclaré que c’est à l’autorité locale compétente qu’il incombe de connaître de l’enregistrement d’un syndicat, de portée nationale, qui a des membres dans toute la République mexicaine. Cette décision n’a pas de précédent au Mexique (où les syndicats nationaux, sous réserve qu’ils satisfassent aux conditions requises, sont enregistrés par le Secrétariat au travail et à la prévision sociale).
  6. 612. Par ailleurs, puisqu’il existait bien qu’il ne soit pas enregistré, le syndicat a poursuivi diverses activités internes relatives à son maintien en activité et à son fonctionnement, et c’est ainsi qu’à la demande de 35 membres fondateurs 214 nouveaux travailleurs en activité ont sollicité leur adhésion le 15 janvier 2003 et l’ont obtenue, ce qui a porté l’effectif à 336 membres.
  7. 613. Le 10 mars 2003, 224 affiliés (66,67 pour cent du total), conformément à l’article 371, section VIII, de la loi fédérale du travail du Mexique, ont demandé au bureau de convoquer une assemblée chargée d’examiner divers points en instance, déclarant que, si la convocation n’intervenait pas dans les dix jours, ils s’en chargeraient eux-mêmes comme ladite loi le prévoit dans tel cas.
  8. 614. Le bureau du FAM n’ayant pu convoquer l’assemblée générale dans le délai indiqué, le 31 mars 2003, les 224 membres susmentionnés ont convoqué l’ensemble des membres à une assemblée générale pour le 30 avril 2003, conformément à l’article 371, section VIII, de la loi fédérale du travail.
  9. 615. Au cours de cette assemblée générale, le bureau fondateur a rendu compte de ses activités et les membres présents lui ont demandé à l’unanimité de poursuivre la procédure d’enregistrement devant l’autorité compétente. Pour ne pas laisser le syndicat sans défense, neuf membres du bureau national élus à la proportionnalité ont été chargés de le représenter, et c’est ce bureau qui soumet la présente plainte.
  10. 616. L’organisation plaignante signale que la décision de la Cour suprême de justice de la nation n’a pas de précédent: en effet, conformément à ses statuts, le FAM a son siège social dans le district fédéral, et il compte beaucoup plus de 20 membres fondateurs dont les patrons ont également leur siège dans le district fédéral, où donc ils exécutent leurs services; par ailleurs, vu la nature de leurs services en tant que footballeurs professionnels, ils doivent se déplacer en différents points du pays et c’est pour cela que tous, à un moment ou à un autre, ont travaillé dans la ville de Mexico.
  11. 617. Le syndicat ajoute que, le 9 juillet 2003, il a demandé au Conseil local de conciliation et d’arbitrage du district fédéral de procéder à son enregistrement et de prendre note de la composition de son bureau. Or, dans une décision du 11 août 2003, jour même de l’ouverture de la procédure, le conseil a décidé de ne pas accéder à la demande du syndicat. Le 1er octobre 2003, celui-ci a fait appel par la voie du recours en amparo indirect auprès du tribunal de première instance en matière de travail du district fédéral. Le 5 novembre 2003, ce tribunal a octroyé au FAM l’amparo et la protection de la justice fédérale, intimant au Conseil local de conciliation et d’arbitrage de rendre une nouvelle décision, avec liberté de juridiction, et de remédier aux vices de forme, dûment énumérés par le tribunal, qui entachaient sa décision du 11 août 2003.
  12. 618. Néanmoins, dans sa nouvelle décision rendue le 23 janvier 2004, le Conseil local de conciliation et d’arbitrage refusait à nouveau d’enregistrer le syndicat FAM et son bureau.
  13. 619. Le FAM souligne que, dans sa décision du 26 février 2004, le tribunal de district qui lui avait octroyé l’amparo a considéré que la décision du Conseil local de conciliation et d’arbitrage du district fédéral ne respectait pas l’amparo; il lui a donc ordonné de rendre une nouvelle décision.
  14. 620. Le 16 avril 2004, dans une nouvelle décision, le conseil refusait à nouveau d’enregistrer le FAM et son bureau, sur la base d’arguments contraires, selon l’organisation plaignante, aux principes nationaux et internationaux de la liberté syndicale.
  15. 621. L’organisation plaignante indique qu’elle a sollicité du tribunal de district compétent qu’il reconnaisse que le jugement octroyant l’amparo n’a pas été respecté et qu’il oblige le conseil à le respecter et donc à octroyer l’enregistrement.
  16. 622. Elle ajoute que, dans sa décision du 16 avril 2004, le Conseil local de conciliation et d’arbitrage dispose que les membres du syndicat doivent justifier d’une relation de travail avec les clubs pour demander l’enregistrement (condition non prévue par la loi); cette exigence est discrétionnaire, d’autant plus qu’une grande partie des problèmes des membres découlent du fait que les patrons ne leur remettent ni contrats ni copie des contrats ou établissent des doubles contrats. Par ailleurs, cette décision s’appuie, pour justifier le refus d’enregistrer le syndicat, sur la teneur de ses statuts, laquelle relève pourtant de la liberté syndicale et ne peut juridiquement être invoquée à cet effet.
  17. 623. Pour toutes ces raisons, l’organisation plaignante considère que l’autorité compétente a violé la convention no 87, ratifiée par le Mexique.

B. Réponse du gouvernement

B. Réponse du gouvernement
  1. 624. Dans sa communication du 22 septembre 2004, le gouvernement envoie les commentaires du Conseil local de conciliation et d’arbitrage du district fédéral, reproduits ci-après:
    • a) En date du 9 juillet 2003, José María Huerta Carrasco, José Alberto Mariscal Mendoza, Mario García Covalles et Mario Carrillo Rojo ont soumis au Conseil local de conciliation et d’arbitrage une demande d’enregistrement du groupement dénommé «syndicat Footballeurs affiliés du Mexique». Dans sa décision du 11 août 2003, ce conseil refusait d’enregistrer le syndicat au motif qu’il répondait aux critères de refus prévus par les sections I et III de l’article 366 de la loi fédérale du travail.
    • b) En outre, aux termes de l’article 123 de la Constitution, ledit groupement ne comprend pas les éléments indispensables pour former un syndicat basé sur la relation patron-travailleurs; en d’autres termes, ceux qui se disent affiliés n’ont à aucun moment justifié de la qualité de travailleurs à laquelle se réfère l’article 8 de la loi du travail comme suit: «est travailleur la personne physique qui exécute pour le compte d’une autre personne, physique ou morale, un travail personnel subordonné …». Cela ressort de la simple lecture des statuts, qui disposent que les affiliés peuvent être membres fondateurs, en activité ou à la retraite ou membres honoraires. Autrement dit, pour s’affilier à ce syndicat, il faut être footballeur en activité ou à la retraite, ces derniers termes se référant à ceux qui ont exercé la profession de footballeur.
    • c) Or le gros des effectifs du syndicat se compose de footballeurs à la retraite, ce qui est en contradiction avec les prescriptions de l’article 356 de la loi fédérale du travail. Par ailleurs, il n’a jamais été établi que les autres membres – que le syndicat présente comme des footballeurs en activité – prêtent leurs services aux clubs auxquels ils disent appartenir. Faute de répondre aux critères susmentionnés, le syndicat s’est vu refuser l’enregistrement.
    • d) Cette décision leur ayant été notifiée, le 1er octobre 2003 les plaignants ont fait appel en amparo indirect (numéro 1726/03) auprès du tribunal de première instance en matière de travail du district fédéral, lequel leur a octroyé l’amparo et la protection de la justice fédérale par décision du 5 novembre, afin que le Conseil local de conciliation et d’arbitrage rende une nouvelle décision fondée et dûment motivée, avec liberté de juridiction.
    • e) A la suite de quoi, s’en tenant strictement à ce jugement, le conseil s’est soumis à la demande de l’autorité fédérale et a rendu une nouvelle décision le 16 avril 2004. En désaccord avec cette dernière, les plaignants ont interjeté appel; le règlement de la question se trouve donc à ce jour en instance, entre les mains du pouvoir judiciaire de la fédération.

C. Conclusions du comité

C. Conclusions du comité
  1. 625. Le comité observe que, dans le présent cas, l’organisation plaignante, qui regroupe des footballeurs, affirme qu’elle s’est constituée le 16 avril 2001 mais que l’autorité compétente (Conseil local de conciliation et d’arbitrage) n’a pas procédé à son enregistrement ni n’a pris note de la composition de son bureau, passant outre, selon elle, aux décisions rendues par l’autorité judiciaire à l’issue des recours en amparo qui ont été présentés. L’organisation plaignante souligne que ce conseil local a rendu trois décisions dans lesquelles il refuse de l’enregistrer, la troisième de ces décisions étant en cours d’examen par l’autorité judiciaire.
  2. 626. Le comité prend note des commentaires du Conseil local de conciliation et d’arbitrage du district fédéral (communiqués par le gouvernement) d’où il ressort que les raisons motivant le refus d’enregistrement sont les suivantes: 1) les affiliés peuvent, en vertu des statuts, être des footballeurs en activité ou à la retraite; 2) le gros des effectifs du syndicat se compose de footballeurs à la retraite; 3) en ce qui concerne les autres membres, qu’il désigne comme des footballeurs en activité, le syndicat n’a jamais fourni la preuve qu’ils prêtent leurs services aux clubs auxquels ils disent appartenir; 4) à aucun moment le groupement syndical FAM n’a donné la preuve qu’ils sont des travailleurs aux termes de l’article 8 de la loi fédérale du travail («personne physique qui exécute, pour le compte d’une autre personne, physique ou morale, un travail personnel subordonné»); ce groupement ne comprend pas les éléments indispensables pour former un syndicat basé sur la relation «patron-travailleurs».
  3. 627. A cet égard, le comité souligne qu’il incombe à chaque syndicat, en vertu de son autonomie interne, de déterminer s’il doit ou non représenter les travailleurs à la retraite afin de défendre leurs intérêts propres. Dans le présent cas, l’organisation plaignante affirme qu’elle représente en tout état de cause 224 membres footballeurs. De l’avis du comité, si l’organisation plaignante compte un nombre de footballeurs en activité égal ou supérieur au nombre minimum requis par la législation pour créer un syndicat, il y a lieu de lui octroyer l’enregistrement. Le gouvernement soulève d’autres questions, notamment celle de la preuve que les affiliés sont des footballeurs en activité (il revient en principe au syndicat de fournir cette preuve) et celle de la relation de travail subordonné entre les footballeurs et leurs clubs. Toutefois, l’organisation plaignante souligne qu’une grande partie des problèmes de ses membres découlent du fait que les patrons ne leur donnent pas de contrats ni de copie des contrats ou qu’ils établissent des doubles contrats. Par conséquent, le comité demande au gouvernement de prendre des mesures pour que l’administration du travail – conformément au rôle qui est aussi le sien de contrôler le respect de la législation du travail – détermine si l’organisation plaignante compte un nombre suffisant de footballeurs pour atteindre le minimum requis pour constituer un syndicat. En outre, le comité demande au gouvernement de veiller à ce que les retraités bénéficient du même droit que les autres travailleurs d’adhérer à un syndicat et d’y exercer des fonctions électives, et en conséquence d’amender l’article 356 de la loi fédérale du travail.
  4. 628. Le comité souligne par ailleurs que l’organisation plaignante a demandé l’enregistrement il y a plus de trois ans et il rappelle qu’en vertu de l’article 2 de la convention no 87 «les travailleurs et les employeurs, sans distinction d’aucune sorte, ont le droit, sans autorisation préalable, de constituer des organisations de leur choix, ainsi que celui de s’affilier à ces organisations, à la seule condition de se conformer aux statuts de ces dernières». Le comité signale également à l’intention du gouvernement que, «en vertu des principes de la liberté syndicale, tous les travailleurs – à la seule exception des membres des forces armées et de la police – devraient avoir le droit de constituer les organisations de leur choix et de s’y affilier. Le critère à retenir pour définir les personnes couvertes n’est donc pas la relation d’emploi avec un employeur; cette relation est en effet souvent absente, comme pour les travailleurs de l’agriculture, les travailleurs indépendants en général ou les membres de professions libérales, qui doivent pourtant tous jouir du droit syndical.» [Voir Recueil de décisions et de principes du Comité de la liberté syndicale, quatrième édition, 1996, paragr. 235.]
  5. 629. Dans ces conditions, le comité s’attend à ce que la décision de l’autorité judiciaire relative à l’enregistrement de l’organisation plaignante soit rendue dès que possible et tienne pleinement compte des principes précités et il demande au gouvernement de lui communiquer toute décision ou tout arrêté pris à ce sujet.

Recommandation du comité

Recommandation du comité
  1. 630. Au vu des conclusions qui précèdent, le comité invite le Conseil d’administration à approuver les recommandations suivantes:
    • a) Le comité demande au gouvernement de prendre des mesures pour que l’autorité administrative du travail détermine si l’organisation plaignante compte un nombre suffisant de footballeurs pour atteindre le minimum requis afin de constituer un syndicat. En outre, le comité demande au gouvernement de veiller à ce que les retraités bénéficient du même droit que les autres travailleurs d’adhérer à un syndicat et d’y exercer des fonctions électives, et en conséquence d’amender l’article 356 de la loi fédérale du travail.
    • b) Le comité s’attend à ce que la décision de l’autorité judiciaire relative à l’enregistrement de l’organisation plaignante tienne pleinement compte des principes cités dans les conclusions et il demande au gouvernement de lui communiquer toute décision ou tout arrêté pris à ce sujet.
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