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Rapport intérimaire - Rapport No. 349, Mars 2008

Cas no 2498 (Colombie) - Date de la plainte: 14-JUIN -06 - Clos

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  1. 703. La plainte figure dans une communication du 14 juin 2006 du Syndicat national des travailleurs des organisations non gouvernementales et sociales (SINTRAONG’S), présentée conjointement avec la Centrale unitaire des travailleurs (CUT), la Confédération des travailleurs de Colombie (CTC) et la Confédération générale des travailleurs (CGT). Le 31 mai 2006 (communication reçue par le Bureau le 15 juin), le Syndicat des travailleurs de l’Université Santo Tomás (SINTRAUSTA), avec l’appui de la Centrale unitaire des travailleurs (CUT), a adressé de nouvelles allégations. Le 28 juin 2006, le Syndicat des employés de l’Université de Medellín a communiqué de nouvelles allégations. Le SINTRAUSTA et le SINTRAONG’S ont adressé un complément d’information dans des communications en date des 27 juillet, 6 août et 23 août, respectivement. La Confédération syndicale internationale (CSI) a adressé de nouvelles allégations dans une communication du 21 novembre 2006.
  2. 704. Le gouvernement a communiqué ses observations dans des communications des 25 octobre et 19 décembre 2006, et des 8 mars, 26 avril et 29 octobre 2007.
  3. 705. La Colombie a ratifié la convention (nº 87) sur la liberté syndicale et la protection du droit syndical, 1948, et la convention (nº 98) sur le droit d’organisation et de négociation collective, 1949.

A. Allégations des plaignants

A. Allégations des plaignants
  1. 706. Dans leurs communications des 14 juin et 23 août 2006, le SINTRAONG’S, la CUT, la CGT et la CTC indiquent que le SINTRAONG’S a été constitué le 12 septembre 2005. Peuvent s’affilier à cette organisation tous les travailleurs ayant une relation de travail avec des organisations non gouvernementales, dans le cadre de contrats de travail à durée indéterminée ou déterminée, de contrats de service ou d’ouvrage, ou de projets spécifiques. Selon les statuts du syndicat, les fins et objectifs principaux de celui-ci sont, entre autres, l’amélioration et défense des salaires, prestations, horaires, systèmes de protection et de prévention des accidents et des conditions de travail ainsi que la célébration des conventions collectives. Le 13 septembre, l’organisation syndicale a sollicité son inscription au ministère de la Protection sociale. Le 26 septembre 2005, l’inspection du travail de la direction territoriale d’Antioquia a donné un avis selon lequel le SINTRAONG’S ne peut pas être composé de travailleurs dont la relation de travail n’est pas établie en vertu d’un contrat de travail. L’inspection du travail a exigé par conséquent la modification des statuts de l’organisation syndicale.
  2. 707. Le 24 octobre 2005, l’assemblée des affiliés a décidé de ne pas modifier les statuts dans le sens demandé par l’inspection du travail et de continuer d’affilier des personnes dont la relation de travail est établie, ou non, en vertu d’un contrat de travail. Toutefois, cette assemblée a accepté d’apporter les autres modifications que l’autorité administrative avait demandées le 25 novembre 2005.
  3. 708. Les organisations plaignantes indiquent que, en vertu de la résolution no 02741 du 5 décembre 2005, l’inspection du travail a de nouveau refusé la demande d’inscription pour les motifs qu’elle avait évoqués précédemment. Les recours administratifs intentés contre la résolution ont été rejetés.
  4. 709. Dans sa communication du 11 novembre 2006, la Confédération syndicale internationale (CSI) envoie copie d’une lettre adressée à la Cour constitutionnelle dans laquelle elle indique que le SINTRAONG’S a intenté une action de tutelle devant la chambre du travail du tribunal supérieur de Medellín. Cette action de même que le recours en appel intenté devant la Cour suprême de justice ont été déclarés irrecevables. Actuellement, la Cour constitutionnelle est saisie de ce recours en vue d’un éventuel réexamen. Selon la CSI, l’enregistrement syndical a été refusé au motif que les organisations syndicales de premier degré et de branche ne peuvent compter que des personnes ayant un contrat de travail, et non des personnes liées en vertu d’autres modalités – contrat de service ou d’ouvrage, etc. La CSI ajoute que la promulgation de la loi no 50 de 1990 a marqué le début de la flexibilisation de la main-d’œuvre, de sorte qu’aujourd’hui la plupart des travailleurs sont liés par d’autres relations qu’un contrat de travail. Cette situation restreint la possibilité de s’affilier à un syndicat.
  5. 710. Dans sa communication du 31 mai 2006, le Syndicat des travailleurs de l’Université Santo Tomás (SINTRAUSTA) indique qu’il a été constitué le 27 août 2000 et dûment inscrit sur le registre syndical en vertu de la résolution no 002433 du 30 octobre 2000 de la direction territoriale de Cundinamarca. Son inscription a été contestée par l’Université Santo Tomás et par l’entreprise de sécurité privée Guardianes Compañía Líder de Seguridad Ltd. Le ministère du Travail, par la résolution no 000031 du 15 janvier 2001, a fait droit à cette requête. Le SINTRAUSTA a intenté un recours en révision de cette résolution et le recours a débouché sur la confirmation définitive de l’inscription du syndicat. Par ailleurs, des actions au pénal qui avaient été intentées contre l’organisation syndicale et ses dirigeants ont été rejetées.
  6. 711. Le SINTRAUSTA ajoute que, dès sa constitution, il a présenté un cahier de revendications afin de négocier collectivement mais qu’il s’est heurté au refus catégorique de l’Université Santo Tomás. Des actions administratives ont été intentées devant le ministère de la Protection sociale, lequel n’est pas intervenu.
  7. 712. Par ailleurs, l’organisation syndicale indique que des actions judiciaires ont été engagées pour obtenir la réintégration des membres du comité directeur du SINTRAUSTA qui jouissaient de l’immunité syndicale. Ces actions ont été rejetées.
  8. 713. Par la suite, l’université a introduit une demande de dissolution et de liquidation de l’organisation plaignante, et d’annulation de son enregistrement syndical au motif que l’organisation syndicale était formée de personnes qui n’avaient aucun lien avec l’université puisque, depuis le 1er juillet 2000, elles travaillaient pour l’entreprise Guardianes Compañía Líder de Seguridad Ltd. Le 17 septembre 2004, le neuvième tribunal du travail de la circonscription judiciaire de Bogotá a conclu que l’organisation syndicale était en cours de dissolution. Il a ordonné l’annulation de l’inscription au motif que, entre autres, au moment de la constitution de l’organisation syndicale ses membres n’avaient pas de relation de travail avec l’Université Santo Tomás en raison d’une substitution de l’employeur, le nouvel employeur étant l’entreprise Guardianes Compañía Líder de Seguridad Ltd. Le tribunal supérieur du district judiciaire de Bogotá a confirmé cette décision.
  9. 714. Dans sa communication du 28 juin 2006, le Syndicat des employés de l’Université de Medellín affirme que l’organisation syndicale fait l’objet depuis 2000 d’actes antisyndicaux perpétrés par les autorités de l’université, dont les suivants: tentative d’ingérence de la direction de l’université qui a promu une liste de candidats au comité directeur de l’organisation syndicale; licenciement de Mme Dorelly Salazar au motif qu’elle avait dénoncé cette ingérence; pressions et menaces de licenciement qui ont entraîné la démission de 29 travailleurs membres de l’organisation syndicale; licenciement sans motif justifié en mars 2001 de Norella Jaramillo, Ulda Mery Castro, Carlos Mario Restrepo et Julieta Ríos; interdiction de l’affiliation syndicale au personnel enseignant; licenciement de quatre travailleurs (MM. Filman Alberto Ospina, Jesús Alberto Munera Betancur, Mmes Amparo del Socorro Graciano et Diana María Londoño Moreno) au motif de leur affiliation au syndicat, alors qu’ils travaillaient depuis de nombreuses années à l’université (Mmes Amparo del Socorro Graciano et Diana María Londoño Moreno ont été réintégrées car elles bénéficiaient de l’immunité syndicale). Enfin, l’organisation plaignante affirme que depuis 2004, année de la négociation de la dernière convention collective, cette dernière a été violée à plusieurs reprises.

B. Réponse du gouvernement

B. Réponse du gouvernement
  1. 715. Dans ses communications des 25 octobre et 19 décembre 2006, et des 8 mars, 26 avril et 29 octobre 2007, le gouvernement indique ce qui suit.
  2. 716. Au sujet des allégations présentées par le SINTRAONG’S qui portent sur le refus de la direction territoriale d’Antioquia du ministère de la Protection sociale d’inscrire l’organisation syndicale sur le registre syndical, le gouvernement souligne que le droit consacré à l’article 2 de la convention no 87, à savoir que les travailleurs et les employeurs ont le droit de constituer des organisations «sans autorisation préalable», ne dispense pas les fondateurs d’une organisation de l’obligation de satisfaire aux formalités prescrites par la législation interne. En ce sens, conformément à la législation interne, la direction territoriale d’Antioquia (décret no 1194 de 1994) a demandé à l’organisation syndicale, par une ordonnance d’observation, de modifier certaines dispositions de ses statuts et d’apporter des précisions sur la procédure d’élection du comité directeur. Le gouvernement indique que l’organisation n’a pas donné suite aux observations contenues dans cette ordonnance, raison pour laquelle son inscription au registre syndical a été refusée.
  3. 717. En effet, l’organisation n’a pas modifié ses statuts, en particulier le paragraphe 2 de l’article premier, qui dit que le syndicat est formé de «personnes fournissant leurs services selon les différentes modalités…». Or ce point n’est pas conforme à la législation du travail en vigueur, laquelle dispose que sont autorisées à s’organiser en syndicat les personnes liées par un contrat de travail tel que défini à l’article 22 du Code du travail: «On entend par contrat de travail le contrat par lequel une personne physique s’engage à fournir contre rémunération un service individuel à une autre personne physique ou morale, en vertu d’un lien continu de dépendance ou de subordination.»
  4. 718. Ainsi, le contrat de travail se caractérise par l’obligation que le travailleur assume de fournir un service dans des conditions de subordination et par l’obligation qu’a l’employeur, personne physique ou morale, de le rémunérer. Ce qui différencie le contrat de travail et le contrat de service, c’est le lien de subordination. Ce dernier type de contrat a un caractère civil et ne relève pas du droit du travail. Par conséquent, l’organisation syndicale, en incluant dans ses statuts des dispositions se référant au contrat de service, ne tient pas compte de la législation du travail en vigueur.
  5. 719. Le gouvernement ajoute que, dans sa résolution no 02741 du 5 décembre 2005, l’inspection du travail de la direction territoriale d’Antioquia se réfère à la procédure de sélection du comité directeur du syndicat et estime que le syndicat n’a pas pris en compte dans l’article 17 de ses statuts des dispositions de la législation. A ce sujet, la Cour constitutionnelle, dans son jugement C-797/00, a indiqué ce qui suit: «Il n’est pas admissible de reconnaître le caractère absolu de la liberté syndicale dans la mesure où la Constitution elle-même fixe comme limite, que le législateur peut définir, l’obligation que la structure interne des syndicats et des organisations sociales et professionnelles soit conforme à la législation et aux principes démocratiques (art. 39, paragr. 2). Par ailleurs, les conventions internationales sur les droits de l’homme autorisent à imposer, par la voie législative, des restrictions aux droits, à condition que ces restrictions soient nécessaires, minimes, indispensables et proportionnées aux finalités qu’elles poursuivent…»
  6. 720. Le gouvernement estime que le ministère de la Protection sociale n’a pas violé la convention no 87: il respecte la législation du travail en vigueur et, conformément aux pouvoirs que lui confère la loi, il la fait respecter, comme il ressort de la résolution no 02741 du 5 décembre 2005. Cette résolution a fait l’objet de recours en révision et en appel qui ont donné lieu aux résolutions nos 00151 du 15 février 2006 et 000757 du 22 mai 2006. Ces résolutions confirment la décision contenue dans la résolution no 02741 du 5 décembre 2005. Le gouvernement ajoute que l’organisation syndicale a le droit de recourir au tribunal du contentieux administratif, instance qui est compétente pour déterminer la légalité des actes effectués par l’administration.
  7. 721. En ce qui concerne la communication de la CSI relative à l’action de tutelle que le SINTRAONG’S a intentée contre le ministère de la Protection sociale au motif que celui-ci avait refusé de l’inscrire sur le registre syndical, le gouvernement indique que la Cour constitutionnelle a décidé de ne pas examiner l’action de tutelle. La chambre qui est chargée de sélectionner les affaires à soumettre à la Cour constitutionnelle est composée de magistrats qui, conformément aux dispositions de l’article 33 du décret no 2591 de 1991, ne sont pas tenus de motiver expressément leur choix, qui est discrétionnaire.
  8. 722. Quant aux allégations présentées par le SINTRAUSTA et au refus de l’inscription de l’organisation syndicale, le gouvernement indique que les fonctionnaires de l’ancien ministère du Travail et de la Sécurité sociale ont agi en conformité avec la législation interne.
  9. 723. Au sujet de la plainte au pénal, le gouvernement précise qu’elle n’a nullement affecté le syndicat puisque le bureau du Procureur général de la nation a estimé que «la création d’une association syndicale ne porte préjudice à aucun bien juridique protégé».
  10. 724. A propos du refus de négocier le cahier de revendications, le gouvernement précise que le ministère n’a pas pris de mesures administratives à l’encontre de l’Université Santo Tomás étant donné qu’il s’agit d’un conflit qui oblige à statuer sur le droit, ce qui est de l’unique ressort de l’instance judiciaire, comme le dispose l’article 486 du Code du travail.
  11. 725. Le gouvernement ajoute qu’il ressort du septième article du contrat de service de sécurité qu’ont conclu l’Université Santo Tomás et l’entreprise Guardianes Compañía Líder de Seguridad Ltd. que l’université a cédé les contrats de travail du personnel de sécurité, c’est-à-dire les membres du SINTRAUSTA. Le contrat en question a été conclu le 1er juillet 2000 et le SINTRAUSTA a été fondé le 27 août 2000. Par conséquent, l’Université Santo Tomás n’était pas tenue de négocier étant donné qu’elle n’avait plus de relation de travail avec les membres du SINTRAUSTA.
  12. 726. En ce qui concerne les allégations qui portent sur les décisions judiciaires de refus de l’immunité syndicale, le gouvernement indique que les jugements prononcés par les différentes instances du travail allaient à l’encontre des prétentions de l’organisation syndicale. En effet, les magistrats ont considéré que l’instruction faisait apparaître clairement qu’il n’y avait pas de relation de travail entre les membres du SINTRAUSTA et l’Université Santo Tomás, puisque l’université avait cédé les contrats de travail à l’entreprise Guardianes Compañía Líder de Seguridad Ltd. dans le cadre du contrat de service susmentionné. Ce contrat a eu pour effet la substitution de l’employeur, laquelle a eu lieu avant la fondation du syndicat le 27 août 2000 et avant son inscription au registre syndical le 30 octobre 2000. Par conséquent, l’instance judiciaire n’a enfreint ni la procédure régulière ni les droits dont bénéficient les travailleurs syndiqués. En revanche, ces derniers ont commis une erreur en portant plainte contre l’université alors qu’ils ne disposaient pas au stade de l’instruction d’éléments pour démontrer la relation de travail, laquelle est l’élément clé pour demander une réintégration.
  13. 727. Au sujet des allégations relatives à la dissolution de l’organisation syndicale et à l’annulation de son enregistrement, le gouvernement indique que le neuvième tribunal du travail de la circonscription judiciaire de Bogotá a ordonné la dissolution et la liquidation du SINTRAUSTA. Cette décision a été confirmée par la chambre du travail du tribunal supérieur du district judiciaire de Bogotá (jugement du 31 janvier 2005) qui a considéré que: «(…) il est indéniable à la lumière de la législation applicable que, dans le cas d’un syndicat en place dans une entreprise, ce que le SINTRAUSTA est sans aucun doute, la condition indispensable est que ses membres fassent partie des effectifs de l’entreprise en question, c’est-à-dire qu’ils le soient au moment de la constitution du syndicat. A l’évidence, ce n’était pas le cas puisque à la suite de la substitution de l’employeur, depuis le 1er juillet 2000, ils travaillaient sous l’autorité d’un nouvel employeur.»
  14. 728. A propos des allégations présentées par le Syndicat des employés de l’Université de Medellín qui portent sur le licenciement antisyndical des travailleurs syndiqués Dorelly Salazar, Norella Jaramillo, Ulda Mery Castro, Carlos Mario Restrepo, Julieta Ríos, Wilman Alberto Ospina et Jesús Alberto Munera Betancur, le gouvernement indique que l’Université de Medellín, conformément à la législation interne (art. 61, paragr. 1 h)), a la faculté discrétionnaire de licencier des membres de son personnel, à condition de reconnaître leur droit à l’indemnisation correspondante.
  15. 729. Le gouvernement souligne que l’université, en licenciant les travailleurs susmentionnés, n’avait pas l’intention de porter atteinte au droit d’association et de liberté syndicale. De fait, ces travailleurs n’occupaient pas de fonctions de direction dans l’organisation syndicale. Si tel avait été le cas, on aurait pu penser alors que ces licenciements avaient porté préjudice à l’organisation syndicale. En outre, ces licenciements n’ont pas eu pour effet de diminuer le nombre des membres du syndicat et de lui porter atteinte. En effet, comme l’indique l’article 401 du Code du travail, le fait que le nombre des affiliés d’un syndicat de travailleurs, comme en l’espèce, a diminué et est inférieur à 25 constitue un motif de dissolution du syndicat. Le gouvernement estime donc que cette allégation n’a pas de fondement juridique.
  16. 730. En ce qui concerne la prétendue ingérence de l’université dans une assemblée qui avait été organisée pour élire le comité directeur du syndicat, le syndicat n’a pas apporté d’éléments démontrant cette allégation et la désaffiliation de 29 membres.
  17. 731. Le gouvernement indique que, selon les déclarations de la direction territoriale d’Antioquia contenues dans la communication CGPIVC/JMGG/381 du 7 novembre 2006, il n’y a pas d’enquête en cours sur l’Université de Medellín pour des violations des droits d’association et de liberté syndicale. Le gouvernement fait état par ailleurs de trois enquêtes dont l’Université de Medellín a fait l’objet pour violation de la convention collective. Ces enquêtes ont donné lieu à des résolutions qui ont conduit à prononcer un non-lieu en faveur de l’université, à déclarer l’incompétence du ministère pour entendre de ce cas et à laisser la possibilité d’ester en justice. L’organisation syndicale n’a pas engagé de recours contre ces décisions. Le gouvernement ajoute qu’il ressort des informations fournies par le directeur territorial d’Antioquia que l’organisation syndicale n’a pas dénoncé d’actes de persécution syndicale, domaine qui ne relève pas de la responsabilité du gouvernement.

C. Conclusions du comité

C. Conclusions du comité
  1. 732. Le comité note que le présent cas porte sur les points suivants: 1) les allégations présentées par le Syndicat national des travailleurs des organisations non gouvernementales et sociales (SINTRAONG’S), avec la CUT, la CGT, la CTC et la CSI, qui font état du refus de l’inspection du travail de la direction territoriale d’Antioquia d’inscrire le SINTRAONG’S sur le registre syndical au motif que ce syndicat est composé de travailleurs dont la relation de travail n’est pas établie exclusivement en vertu d’un contrat de travail; 2) les allégations présentées par le Syndicat des travailleurs de l’Université Santo Tomás (SINTRAUSTA) et la CUT qui affirment que l’université refuse de négocier collectivement avec l’organisation syndicale, et a demandé à l’autorité judiciaire de dissoudre et de liquider cette dernière et d’annuler son inscription au motif qu’elle ne compte pas de membres ayant une relation de travail avec l’université; et 3) les allégations présentées par le Syndicat des employés de l’Université de Medellín qui affirme que les autorités universitaires ont perpétré, depuis 2000, de nombreux actes de discrimination et d’ingérence antisyndicale – par exemple, le fait d’avoir promu une liste de candidats au comité directeur de l’organisation syndicale, le licenciement de travailleurs en raison de leurs activités syndicales, l’interdiction de l’affiliation syndicale et l’inobservation de la convention collective conclue en 2004.
  2. 733. En ce qui concerne l’allégation selon laquelle l’inspection du travail aurait refusé d’inscrire le SINTRAONG’S, le comité note que l’organisation syndicale a été constituée le 12 septembre 2005, qu’elle a demandé son inscription le 13 septembre, que l’inspection du travail a formulé des objections dans un avis du 26 septembre de la même année, et que l’assemblée des affiliés a décidé de modifier certains aspects des statuts mais refusé de modifier les dispositions relatives à la nature de la relation de travail de ses affiliés, afin de continuer d’affilier des travailleurs, même dans le cas où ils ne seraient pas liés par un contrat de travail mais par d’autres relations de travail, par exemple des contrats de service ou d’ouvrage. Le comité note aussi qu’en vertu de la résolution no 02741 du 5 décembre 2005 l’inspection du travail a de nouveau refusé la demande d’inscription, que les recours administratifs intentés ont été rejetés et qu’une action de tutelle a été engagée devant la Cour constitutionnelle. Le comité note que, selon la CSI, la promulgation de la loi no 50 de 1990 a marqué le début de la flexibilisation de la main-d’œuvre, de sorte qu’aujourd’hui la plupart des travailleurs sont liés par d’autres relations qu’un contrat de travail.
  3. 734. Le comité prend note de l’observation du gouvernement, à savoir que l’article 2 de la convention no 87 dispose que les travailleurs et les employeurs ont le droit de constituer des organisations sans autorisation préalable, ce qui ne dispense pas de l’obligation de satisfaire aux formalités prescrites par la législation interne. Le gouvernement ajoute que, dans le présent cas, l’organisation syndicale a refusé de modifier les dispositions des statuts qui permettent d’affilier des «personnes fournissant leurs services selon les différentes modalités». Par conséquent, ces dispositions ne sont pas conformes à la législation du travail en vigueur qui oblige les affiliés à un syndicat à être liés par une relation de travail établie en vertu d’un contrat de travail. Le comité prend note aussi de l’information du gouvernement selon laquelle la Cour constitutionnelle a décidé de ne pas examiner l’action de tutelle.
  4. 735. Le comité rappelle que l’article 2 de la convention no 87 dispose que les travailleurs et les employeurs, sans distinction d’aucune sorte, ont le droit de constituer les organisations syndicales de leur choix, à la seule exception des membres des forces armées et de la police. Lors de son examen d’autres cas analogues [voir par exemple le 304e rapport, cas no 1796, et le 336e rapport, cas no 2347], le comité a estimé que le critère à retenir pour définir les personnes couvertes par ce droit n’est pas la relation d’emploi avec un employeur. Dans ces conditions, conformément à l’article 2 de la convention, le comité demande au gouvernement de prendre les mesures nécessaires pour que soit inscrit sans retard le Syndicat national des travailleurs des organisations non gouvernementales et sociales (SINTRAONG’S), et de le tenir informé à ce sujet. De plus, étant donné qu’il ressort des déclarations du gouvernement que seuls les travailleurs liés par un contrat de travail ont le droit de constituer des organisations syndicales, le comité demande au gouvernement de modifier la législation, en consultation avec les organisations de travailleurs et d’employeurs les plus représentatives, afin que les travailleurs qui ne sont pas liés par un contrat de travail puissent s’ils le souhaitent constituer les organisations de leur choix.
  5. 736. En même temps, le comité invite le SINTRAONG’S à veiller à ce que soient respectées les dispositions juridiques et statutaires relatives à la procédure d’élection du comité directeur.
  6. 737. Au sujet des allégations présentées par le SINTRAUSTA et la CUT, le comité note que, selon les organisations plaignantes, depuis la création du SINTRAUSTA et depuis son enregistrement syndical, en août et en octobre 2000 respectivement, l’université refuse de négocier collectivement. L’inspection du travail n’a pas pris de mesures à ce sujet, malgré le fait que des actions administratives ont été engagées; par ailleurs, des actions en justice ont été intentées en vue de réintégrer les membres du comité directeur mais elles ont été rejetées. Par la suite, l’université a introduit une demande de dissolution et de liquidation de l’organisation syndicale, et d’annulation de son enregistrement syndical au motif qu’elle était formée de personnes qui n’avaient aucun lien avec l’université. En effet, le 1er juillet 2000, leurs contrats de travail avaient été transférés à l’entreprise Guardianes Compañía Líder de Seguridad Ltd., ce qu’a constaté le neuvième tribunal du travail de la circonscription judiciaire de Bogotá. Le 17 décembre 2004, cette instance a ordonné l’annulation de l’inscription. Le tribunal supérieur du district judiciaire de Bogotá a confirmé cette décision.
  7. 738. A ce sujet, le comité note que, selon le gouvernement, le 1er juillet 2000 l’université a conclu un contrat de service de sécurité avec l’entreprise Guardianes Compañía Líder de Seguridad Ltd. En vertu de ce contrat, elle a cédé les contrats de travail du personnel de sécurité. Or le SINTRAUSTA n’a été constitué que le 27 août de la même année. Ainsi, de l’avis du gouvernement, l’université n’était pas tenue de négocier étant donné qu’elle n’avait plus de relation de travail avec les membres de l’organisation syndicale, puisque la cession des contrats de travail, qui a conduit à une substitution de l’employeur, a eu lieu avant la création de l’organisation. Le comité prend note de l’indication du gouvernement selon laquelle l’autorité judiciaire a ordonné la dissolution du SINTRAUSTA et l’annulation de son enregistrement, et donc reconnu ces faits. En effet, dans le cas d’un syndicat en place dans une entreprise, comme le SINTRAUSTA, la condition indispensable est que ses membres fassent partie des effectifs de l’entreprise en question au moment de la constitution du syndicat, ce qui n’était pas le cas en l’espèce.
  8. 739. Tenant compte de ces circonstances, le comité conclut qu’au moment de sa constitution le SINTRAUSTA n’était pas composé d’effectifs de l’université mais de travailleurs de l’entreprise Compañía Líder de Seguridad Ltd. – le changement d’employeur a eu lieu le 1er juillet 2000, et le syndicat a été constitué le 27 août 2000 et inscrit le 30 octobre 2000. Par conséquent, le comité estime que, l’employeur n’étant plus l’Université Santo Tomás mais l’entreprise de sécurité, il n’incombait plus à l’université de négocier collectivement avec l’organisation syndicale.
  9. 740. En ce qui concerne la demande de dissolution et de liquidation du SINTRAUSTA, et l’annulation de l’enregistrement du syndicat pour les mêmes motifs, le comité note que les membres du syndicat avaient une relation de travail non pas avec l’université mais avec l’entreprise de sécurité, comme indiqué précédemment. Le comité fait observer qu’il était donc logique que le nom de l’organisation syndicale ne fasse pas mention de l’Université Santo Tomás. Toutefois, afin de ne pas porter préjudice à l’existence de l’organisation elle-même, compte tenu qu’elle était déjà inscrite sur le registre syndical et comptait le nombre suffisant de membres, il aurait fallu l’inviter à modifier son nom afin d’y éliminer la mention de l’Université Santo Tomás, sans porter préjudice à son existence ni enfreindre ses droits. Dans ces conditions, le comité invite l’organisation plaignante à modifier son nom et à solliciter une nouvelle inscription au registre syndical. Le comité demande au gouvernement de prendre les mesures nécessaires pour que, dans le cas où l’organisation syndicale demanderait son inscription, celle-ci lui soit accordée sans retard.
  10. 741. Quant aux allégations relatives aux actions en réintégration qui ont été intentées à la suite de la violation présumée de l’immunité syndicale, le comité demande aux organisations plaignantes de préciser le contenu de ces allégations et d’indiquer le nombre et les noms des travailleurs qui ont été licenciés, ainsi que les circonstances de ces licenciements, afin qu’il puisse examiner ces allégations en pleine connaissance de cause.
  11. 742. Au sujet des allégations présentées par le Syndicat des employés de l’Université de Medellín qui fait état d’actes antisyndicaux perpétrés par les autorités de l’université depuis 2000, le comité note que, selon l’organisation syndicale, ces actes sont entre autres les suivants: ingérence antisyndicale de la direction de l’université qui a promu une liste de candidats au comité directeur de l’organisation syndicale; licenciement de Mme Dorelly Salazar au motif qu’elle avait dénoncé ces faits; pressions et menaces de licenciement qui ont entraîné la démission de 29 travailleurs membres de l’organisation syndicale; interdiction de l’affiliation syndicale au personnel enseignant; licenciement sans motif justifié en mars 2001 de Norella Jaramillo, Ulda Mery Castro, Carlos Mario Restrepo et Julieta Ríos; licenciement ensuite de deux autres travailleurs (MM. Filman Alberto Ospina et Jesús Alberto Munera Betancur) après leur affiliation au syndicat. Le comité note aussi que, selon les allégations, la convention collective a été violée à plusieurs reprises depuis qu’elle a été conclue en 2004.
  12. 743. Le comité note au sujet de ces licenciements que, selon le gouvernement, l’université a la faculté discrétionnaire de licencier son personnel, à condition que soit versée l’indemnisation correspondante; les personnes licenciées n’occupaient pas de postes de direction et leur licenciement n’a pas entraîné de diminution du nombre de membres de l’organisation syndicale. Le gouvernement précise que, conformément à la loi, le fait qu’une organisation syndicale compte moins de 25 membres entraîne sa dissolution. Par conséquent, de l’avis du gouvernement, on ne saurait considérer que le licenciement de ces travailleurs a porté préjudice à l’organisation syndicale. De plus, le comité note que, selon le gouvernement, le syndicat n’a pas dûment prouvé les actes d’ingérence évoqués et le fait que la désaffiliation des 29 travailleurs aurait été due aux pressions et menaces en question. Le comité note aussi que, selon le gouvernement, il n’y a pas eu d’enquêtes administratives au sujet de ces allégations. Enfin, le comité note, au sujet de l’allégation de violation des dispositions de la convention collective conclue en 2004, que les diverses enquêtes administratives faites ont conduit à prononcer un non-lieu en faveur de l’université dans un cas et, dans les autres, à déclarer l’incompétence du ministère de la Protection sociale pour entendre de ce cas, et à laisser la possibilité d’ester en justice.
  13. 744. Le comité estime que ces allégations de licenciements, d’ingérence antisyndicale, de pressions et de menaces sont très graves et que le gouvernement doit apporter de plus amples précisions. En attendant, le comité souhaite signaler les principes suivants. Il rappelle que: «Nul ne doit être licencié ou faire l’objet d’autres mesures préjudiciables en matière d’emploi en raison de son affiliation syndicale ou de l’exercice d’activités syndicales légitimes, et il importe que tous les actes de discrimination en matière d’emploi soient interdits et sanctionnés dans la pratique.» [Voir Recueil de décisions et de principes du Comité de la liberté syndicale, cinquième édition, 2006, paragr. 771.] Le comité souligne que tous les travailleurs, qu’ils soient ou non des dirigeants ou des membres d’un syndicat, doivent être protégés contre les actes de discrimination. Il rappelle que l’article 2 de la convention no 98 interdit les actes d’ingérence dans le fonctionnement des organisations de travailleurs, et que la promotion de la négociation collective passe par le plein respect des clauses des conventions collectives. Par conséquent, le comité demande au gouvernement de diligenter sans retard une enquête sur tous les faits qui ont été dénoncés et, s’ils étaient avérés, de prendre sans retard les mesures nécessaires pour la réintégration des travailleurs licenciés. Le comité demande au gouvernement de le tenir informé à cet égard.

Recommandation du comité

Recommandation du comité
  1. 745. Au vu des conclusions intérimaires qui précèdent, le comité invite le Conseil d’administration à approuver les recommandations suivantes:
    • a) En ce qui concerne l’allégation selon laquelle l’inspection du travail aurait refusé d’inscrire le Syndicat national des travailleurs des organisations non gouvernementales et sociales (SINTRAONG’S), le comité demande au gouvernement de prendre les mesures nécessaires pour que soit inscrit sans retard ce syndicat, et de le tenir informé à ce sujet. Le comité invite le SINTRAONG’S à veiller à ce que soient respectées les dispositions juridiques et statutaires relatives à la procédure d’élection du comité directeur.
    • b) Le comité demande au gouvernement de modifier la législation, en consultation avec les organisations de travailleurs et d’employeurs les plus représentatives, afin que les travailleurs qui ne sont pas liés par un contrat de travail puissent constituer s’ils le souhaitent les organisations de leur choix.
    • c) En ce qui concerne les allégations relatives à la décision judiciaire de dissoudre et de liquider le Syndicat des travailleurs de l’Université Santo Tomás (SINTRAUSTA), et d’annuler l’enregistrement du syndicat, le comité invite l’organisation plaignante à modifier son nom et à solliciter une nouvelle inscription au registre syndical. Le comité demande au gouvernement de prendre les mesures nécessaires pour que, dans le cas où l’organisation syndicale demanderait son inscription, celle-ci lui soit accordée sans retard.
    • d) Quant aux allégations du SINTRAUSTA relatives aux actions en réintégration qui ont été intentées à la suite de la violation présumée de l’immunité syndicale, le comité demande aux organisations plaignantes de préciser le contenu de ces allégations et d’indiquer le nombre et les noms des travailleurs qui ont été licenciés, ainsi que les circonstances de ces licenciements, afin qu’il puisse examiner les allégations en pleine connaissance de cause.
    • e) Au sujet des allégations présentées par le Syndicat des employés de l’Université de Medellín (ingérence antisyndicale par la promotion d’une liste de candidats au comité directeur de l’organisation syndicale; licenciement de Mme Dorelly Salazar au motif qu’elle avait dénoncé ces faits; pressions et menaces de licenciement qui ont entraîné la démission de 29 travailleurs membres de l’organisation syndicale; interdiction de l’affiliation syndicale au personnel enseignant; licenciement sans motif justifié en mars 2001 de Norella Jaramillo, Ulda Mery Castro, Carlos Mario Restrepo et Julieta Ríos; licenciement ensuite de deux autres travailleurs (MM. Filman Alberto Ospina et Jesús Alberto Munera Betancur) après leur affiliation au syndicat; et violations à maintes reprises de la convention collective depuis qu’elle a été conclue en 2004), le comité, compte tenu de la gravité de ces allégations, demande au gouvernement de diligenter sans retard une enquête sur tous les faits qui ont été dénoncés et, s’ils étaient avérés, de prendre sans retard les mesures nécessaires pour la réintégration des travailleurs licenciés. Le comité demande au gouvernement de le tenir informé à cet égard.
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