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Rapport intérimaire - Rapport No. 350, Juin 2008

Cas no 2539 (Pérou) - Date de la plainte: 14-NOV. -06 - Clos

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  1. 1494. Les plaintes figurent dans des communications de la Confédération générale des travailleurs du Pérou (CGTP) et de la Fédération nationale des travailleurs des mines, de la métallurgie et de la sidérurgie du Pérou (FEDMINEROS), datées respectivement du 14 novembre 2006 et du 16 août 2007. Le gouvernement a répondu par les communications du 11 juin, du 9 août et du 26 octobre 2007.
  2. 1495. Le Pérou a ratifié la convention (no 87) sur la liberté syndicale et la protection du droit syndical, 1948, et la convention (no 98) sur le droit d’organisation et de négociation collective, 1949.

A. Allégations des organisations plaignantes

A. Allégations des organisations plaignantes
  1. 1496. Dans sa communication du 14 novembre 2006, la Confédération générale des travailleurs du Pérou (CGTP) allègue que l’entreprise Owens-Illinois Perú S.A. est une entreprise transnationale dont le siège est aux Etats-Unis et qui opère au Pérou depuis 1993 lorsqu’elle a acheté Vidrios Industriales S.A. (VINSA).
  2. 1497. Par la suite, cette entreprise multinationale a assumé l’administration de l’entreprise Manufacturera de Vidrio, la seule de sa compétence sur tout le marché national, et elle est ainsi devenue monopolistique et extrêmement rentable; la multinationale a eu des comportements antisyndicaux dans les deux entreprises rachetées.
  3. 1498. La CGTP explique que le syndicat SITRADISA, dans l’exercice de ses fonctions de représentation des travailleurs, en application des accords conclus lors d’assemblées générales, administre d’une manière autonome le restaurant de l’entreprise en vertu du point 5 de la convention collective, et il prélève un pourcentage des bénéfices réalisés par le concessionnaire du restaurant. Cet état de fait dure depuis plus de trente ans, et l’entreprise Owens-Illinois Perú S.A. en a pleine connaissance. Ces recettes ont été utilisées pour construire les locaux du syndicat et elles figurent dans les bilans généraux du syndicat qui sont contresignés par des comptables publics agréés.
  4. 1499. La CGTP allègue qu’en dépit de ce qui précède l’entreprise, adoptant un comportement antisyndical, a allégué que 13 dirigeants syndicaux, soit huit du comité exécutif en fonction et cinq du comité exécutif antérieur avaient commis une faute grave. Elle a ensuite allégué un motif de licenciement fallacieux, à savoir la prétendue rupture de la bonne foi des travailleurs en matière de travail ainsi que l’utilisation indue et le détournement de biens de l’entreprise à des fins propres; tout cela est faux puisque les comités directeurs ont toujours agi conformément à l’autonomie collective.
  5. 1500. Le 18 octobre 2005, selon la CGTP, l’entreprise, faisant fi de la décharge envoyée par les offensés, a licencié sept dirigeants qui ont perdu leurs postes de travail, au seul motif qu’ils ont exercé leurs fonctions de dirigeants syndicaux. Ce comportement antisyndical constitue une violation de la loi péruvienne et des conventions internationales de l’OIT nos 87 et 98. La CGTP souligne l’incongruité totale du comportement de l’entreprise qui commence par accuser fallacieusement 13 dirigeants syndicaux et qui, sans s’expliquer, procède à la réintégration de six d’entre eux seulement.
  6. 1501. Selon la CGTP, ce comportement n’a pas de raison d’être car on ne saurait présumer qu’une faute a été commise d’une manière unilatérale; les voies judiciaires doivent être saisies et ce n’est qu’à partir d’une condamnation que l’entreprise serait en condition de licencier les travailleurs; son comportement est donc la preuve de sa légèreté, de sa témérité et de sa mauvaise foi, car son objectif principal est de punir les dirigeants par un licenciement; en outre, ce licenciement est une violation d’un droit de l’homme fondamental, le droit au travail, puisqu’il implique que les dirigeants concernés sont désormais privés du moyen de subvenir aux besoins quotidiens de leurs familles.
  7. 1502. Les dirigeants licenciés sont: Máximo Velarde Díaz (secrétaire général, 2005-2007); Gaspar Palacios More (secrétaire à la discipline, 2005-2007); Eddy Córdova Chian (secrétaire à l’économie, 2005-2007); Ruperto Sánchez Gutiérrez (secrétaire général, 20032005); Sebastián Suclupe Yauce (secrétaire à l’organisation, 2003-2005); Jorge Luis Martínez Guevara (secrétaire à la défense, 2003-2005) et Juan Manayay Contreras (secrétaire à l’économie, 2003-2005).
  8. 1503. Selon la CGTP, l’article 29 du décret législatif no 728 établit que «tout licenciement effectué au motif de l’affiliation à un syndicat, de la participation à des activités syndicales, d’une candidature à la représentation des travailleurs ou d’une action en cette qualité, est nul». En outre, selon l’article 30 de la loi sur les relations collectives de travail, décret suprême no 010-03, «le droit syndical garantit à certains travailleurs de ne pas être licenciés sans juste motif dûment démontré ou sans leur acceptation».
  9. 1504. La CGTP ajoute que les dirigeants syndicaux ont interjeté une action judiciaire auprès du juge spécialisé du travail, demandant que le licenciement effectué soit déclaré nul et qu’ils soient réintégrés à leurs postes dans l’entreprise et à leurs grades. Cependant, comme dans le cas de tant d’autres procédures judiciaires en matière de travail, la menace existe de voir le procès s’éterniser.
  10. 1505. Dans sa communication du 16 août 2007, la Fédération nationale des travailleurs des mines, de la métallurgie et de la sidérurgie du Pérou allègue que le 4 juin 2007, sur l’ordre du chef d’usine de la Empresa Siderúrgica del Perú S.A.A., l’entreprise sidérurgique du Pérou S.A.A., M. Luis Cubas (superviseur de l’entreprise), les équipements de sécurité ont été jetés à la poubelle sous prétexte de procéder à un «nettoyage» dans la zone Hornos Elken de l’usine. Les travailleurs de cette équipe ont donc dû travailler sans leurs équipements respectifs de sécurité, ce qui, en plus de porter atteinte à leur dignité, a fait courir un risque grave à leur intégrité physique, car cette zone est un four qui fonctionne à de très hautes températures et qui émet des gaz toxiques. Ces faits ont été portés à la connaissance du fonctionnaire le plus élevé de la hiérarchie de l’entreprise, qui a verbalement promis de sanctionner le chef d’usine mentionné après s’être excusé auprès des dirigeants qui avaient protesté.
  11. 1506. La fédération plaignante ajoute que, suite aux plaintes et à une «enquête» partielle et menée unilatéralement, l’employeur a décidé de sanctionner les dirigeants du Syndicat des travailleurs de l’usine SIDERPERU (le secrétaire général et le secrétaire à la défense); il a donc pris une «mesure disciplinaire» et les a suspendus de leurs fonctions professionnelles pendant trente jours, sans salaire, du 5 juillet au 3 août 2007, au motif qu’ils s’étaient plaints de l’abus dont ils avaient été victimes. Il les a fallacieusement accusés de fautes graves en vertu de l’article 25 de la loi sur la productivité et la compétitivité. En outre, un procès-verbal a été rédigé en l’absence des dirigeants dans lequel figurent des questions insidieuses qui favorisent l’entreprise et sans prendre en compte la déclaration de ceux-ci selon laquelle «les casiers dans lesquels se trouvaient les équipements de sécurité ont été ouverts violemment avec un instrument métallique» ... pour jeter ces équipements à la poubelle.
  12. 1507. La fédération plaignante fait savoir que la représentation syndicale a porté plainte le 16 juillet 2007 auprès du ministère du Travail à Chimbote, ainsi qu’auprès de la Direction nationale des relations de travail.
  13. 1508. La fédération plaignante indique que, lors d’une réunion extrajudiciaire convoquée par le Bureau du ministère du Travail de Lima, ce problème n’a pas été résolu; l’entreprise a alors ratifié la sanction des dirigeants syndicaux, faisant preuve ainsi d’une manifeste violation de droit; il s’agit d’un avertissement à l’encontre des travailleurs pour qu’ils ne réagissent plus à la maltraitance de la part des chefs qui appliquent des pratiques incompatibles avec la législation du travail nationale et internationale. De l’avis de la fédération plaignante, ce fait n’est pas un hasard car l’entreprise tente d’influencer le climat social afin que les travailleurs ne puissent pas défendre leur pli de revendications pour la période 2007-08 avec les garanties nécessaires.
  14. B. Réponse du gouvernement
  15. 1509. Dans ses communications des 11 juin, 9 août et 26 octobre 2007, le gouvernement déclare que, pour ce qui est de la plainte présentée par la CGTP contre l’entreprise Owens-Illinois Perú S.A. concernant le licenciement de dirigeants syndicaux, l’autorité du travail a dûment convoqué les parties concernées à une réunion extrajudiciaire, le 5 février 2007, à la demande du secrétaire à la défense de la CGTP; cependant, on a pu constater l’absence des représentants de l’organisation syndicale plaignante (bien qu’elle ait été notifiée par courrier ordinaire et par fax); les représentants de l’entreprise ont fait savoir que les licenciements sont examinés par la justice. Par conséquent, ayant constaté que les licenciements faisant l’objet du présent cas sont examinés par la justice, le gouvernement attend qu’un jugement soit prononcé, et il informera le Comité de la liberté syndicale dès qu’il aura de nouvelles informations à cet égard.
  16. 1510. Le gouvernement transmet une communication du 9 juillet 2007 de l’entreprise OwensIllinois Perú S.A. concernant la plainte de la CGTP, qui est reproduite ci-après:
  17. Les antécédents
  18. Le 1er décembre 1993, le syndicat des travailleurs et l’entreprise ont signé une convention collective dont le point six précise ce qui suit:
  19. «Concession du restaurant. Les parties décident que l’organisation et le contrôle de la restauration du personnel seront confiés directement au syndicat qui recrutera et contrôlera l’entreprise concessionnaire d’une manière autonome ... L’entreprise décide d’octroyer aux travailleurs d’une manière permanente une subvention à la restauration...»
  20. C’est ainsi que le syndicat de notre entreprise s’est vu confier la responsabilité du choix, du recrutement et du contrôle de l’entreprise concessionnaire du restaurant de l’usine, pour assurer la restauration de tout le personnel.
  21. Dans la convention collective susmentionnée, il est précisé que ces avantages en faveur du syndicat et de tout le personnel revêtent un caractère permanent, et comme ils n’ont pas été éliminés par la suite, ils sont toujours pleinement en vigueur. Ainsi, le point 23 de la convention précise ce qui suit:
  22. «Clause de révision de la convention. Les parties réitèrent que, conformément à la quatrième disposition transitoire et finale du décret-loi no 25593 et son règlement, elles ont revu et/ou modifié tous les accords et les conventions ... de sorte que les seuls avantages qui restent en vigueur sont ceux qui sont expressément mentionnés dans cette convention collective...»
  23. Le 28 septembre 2005, une réunion a eu lieu dans les installations de notre usine, entre des responsables de notre entreprise et Mme Marlene Hortella Morocho de Rodríguez, gérante générale de l’entreprise Menú Express, concessionnaire actuelle du restaurant.
  24. Au cours de cette réunion, Mme Morocho nous a fourni des informations et de la documentation qui prouvent que le syndicat des travailleurs de l’entreprise s’approprie de manière illégitime, depuis plusieurs années, un pourcentage des bénéfices de l’entreprise concessionnaire, à titre de commission en échange de la concession du restaurant de l’entreprise.
  25. Grâce à ces informations, nous avons pu déterminer le nom des personnes qui faisaient partie des comités directeurs qui ont cautionné et exécuté ces actes, notamment:
  26. a) du comité directeur en fonction entre le 12 juillet 2003 et le 11 juillet 2005:
  27. – Ruperto Sánchez Gutiérrez (secrétaire général);
  28. – Juan Manayay Contreras (secrétaire à l’économie);
  29. – José Luis Martínez Guevara (secrétaire à la défense);
  30. b) du comité directeur en fonction depuis le 12 juillet 2005:
  31. – Máximo Velarde Díaz (secrétaire général);
  32. – Eddy Magno Córdova Chian (secrétaire à l’économie);
  33. – Gaspar Armando Palacios More (secrétaire à la discipline et à la sécurité sociale);
  34. – Sebastián Súclupe Yauce (secrétaire à l’organisation).
  35. Il est important de préciser que les réunions entre l’entreprise et la représentante de l’entreprise concessionnaire ont donné lieu à des procès-verbaux dont nous joignons les copies à la présente.
  36. Ainsi, grâce à toutes ces informations et après avoir déterminé les responsables de ces encaissements illégaux, l’entreprise a accusé les personnes impliquées d’avoir commis les fautes graves suivantes:
  37. i) Non-respect des obligations professionnelles découlant d’une rupture de la bonne foi en matière de travail (alinéa a) de l’article 25 du texte unique du décret législatif no 728 de la loi sur la productivité et la compétitivité du travail, approuvée par décret suprême no 003-97-TR, ci-après la LPCL).
  38. ii) Détournement des biens de l’employeur par le syndicat à son profit, indépendamment de la valeur de ces biens (alinéa c) de l’article 25 de la LPCL).
  39. iii) Utilisation indue des biens de l’employeur par le syndicat à son profit (alinéa c) de l’article 25 de la LPCL).
  40. Nous avons alors entamé un processus de licenciement, conformément à ce qui est prévu dans l’article 32 du décret suprême no 003-97-TR, décret législatif no 728, de la loi sur la productivité et la compétitivité du travail. Nous avons envoyé les lettres de préavis aux travailleurs concernés qui ont répondu par des lettres de décharge, mais compte tenu du fait qu’elles n’atténuaient en rien les accusations portées contre eux, nous avons décidé de mettre un terme à la relation de travail.
  41. Motifs invoqués par l’entreprise pour licencier les ex-travailleurs
  42. Les ex-travailleurs affirment que nous les avons licenciés principalement pour sanctionner des actes syndicaux légitimes. Comme nous l’avons expliqué dans le résumé des faits, le syndicat et, plus précisément, ses dirigeants ont fait un usage abusif d’une possibilité que leur avait offerte l’entreprise.
  43. Elle leur avait donné la possibilité de choisir et de contrôler leur concessionnaire car, puisque les travailleurs sont les principaux bénéficiaires des services de restauration, c’est à leur organisation représentative qu’il revient de choisir l’entreprise qui assure les services de restauration.
  44. Cependant, comme nous l’avons déjà dit, la représentante de l’entreprise concessionnaire nous a montré le contrat de concession daté du 28 février 2005 par lequel le syndicat des travailleurs précise dans la première clause qu’il est l’usufruitier du restaurant de l’entreprise.
  45. Nous tenons à préciser qu’il n’est pas vrai que le syndicat est usufruitier du restaurant car cela lui permettrait de garder pour lui les bénéfices. Comme le précise le point six de la convention collective du 1er décembre 1993, le syndicat a le droit d’organiser et de contrôler le restaurant et de recruter directement et d’une manière autonome une entreprise concessionnaire.
  46. Ainsi, le syndicat a le pouvoir de choisir, de recruter et de contrôler le service de l’entreprise concessionnaire du restaurant, afin que tout notre personnel puisse se restaurer, mais non pas à des fins lucratives.
  47. Par conséquent, le syndicat et plus précisément les ex-travailleurs, qui faisaient partie du comité directeur, sont responsables de la bonne administration de cette concession et ils ont l’obligation élémentaire d’obtenir le meilleur service possible au moindre prix. C’est en toute bonne foi que notre entreprise a confié cette responsabilité au syndicat, persuadée qu’il s’en acquitterait en fonction des fins de tout syndicat, à savoir la défense et la promotion des intérêts des travailleurs.
  48. Cependant, à partir de la première clause du contrat de concession, dont il a déjà été fait mention, on appréciera une évidente volonté du syndicat de réaliser un profit indu sous couvert d’administration de la concession du restaurant et à travers un usufruit de facto. Cela ressort encore très clairement des seizième et dix-septième clauses qui précisent notamment:
  49. «Seizième clause: LE CONCESSIONNAIRE versera, en vue de l’amélioration du local syndical, 5 pour cent du montant total mentionné sur la liste hebdomadaire des consommateurs, présentée aux fins d’une remise, et ce montant sera retenu par LE SYNDICAT.
  50. Dix-septième clause: LE CONCESSIONNAIRE versera AU SYNDICAT les 5 pour cent du montant total des réunions.»
  51. Avec une froideur impressionnante et un sentiment d’impunité totale, le syndicat est convenu expressément avec l’entreprise concessionnaire du versement par cette dernière de deux montants non pas au motif de services rendus, mais simplement pour avoir été recruté comme concessionnaire sur décision autonome du syndicat.
  52. En outre, la représentante de l’entreprise concessionnaire nous a fourni la copie du contrat de concession du 30 mai 2005 signé entre le syndicat et l’entreprise Menú Express. Ont signé pour le syndicat MM. Ruperto Sánchez en tant que secrétaire général, Juan Súclupe Yauce en tant que secrétaire à l’organisation et Jorge Martínez Guevara en tant que secrétaire à la défense.
  53. Dans la première clause de ce contrat, il est précisé à nouveau que le syndicat est «usufruitier du restaurant situé à l’intérieur de l’usine Owens-Illinois Perú S.A. (...), en vertu de la convention collective du 1er décembre 1993». Dans la troisième clause, il est dit que la concession du restaurant est octroyée à l’entreprise susmentionnée.
  54. En outre, les seizième et dix-septième clauses contiennent exactement les mêmes éléments que dans le contrat antérieur, c’est-à-dire que le principe des versements illégaux de l’entreprise concessionnaire au syndicat a été prorogé. Selon la quatorzième clause du contrat, celui-ci resterait en vigueur jusqu’au 30 août 2005.
  55. Nous l’avons déjà dit, c’est en toute bonne foi que notre entreprise a signé la convention collective du 1er décembre 1993, confiant au syndicat la responsabilité totale du choix, du recrutement et du contrôle de l’entreprise concessionnaire qui se chargerait d’assurer la restauration de tout notre personnel, des travailleurs syndiqués et des autres, en garantissant le meilleur rapport qualité-prix.
  56. En outre, l’entreprise verse un montant de 46,20 S/ (nouveaux soles) chaque semaine à chaque travailleur pour les aider à payer leur nourriture. La commission illégale que prélève le syndicat sur les bénéfices du concessionnaire fait augmenter illégalement le coût du service.
  57. Depuis 1994, nous étions convaincus que la valeur de la restauration que fournissait l’entreprise concessionnaire correspondait à son coût. Mais en découvrant les irrégularités commises par le syndicat, et par conséquent par les plaignants, compte tenu de leur qualité de membres du comité directeur, nous sommes désormais convaincus que le prix payé par les travailleurs, qui bénéficient de la subvention accordée par notre entreprise, est complètement artificiel et faussé par cette commission ou ces «quotas». A cet égard, le syndicat et, plus précisément, les plaignants se sont appropriés indirectement l’argent de notre entreprise qui verse des subventions pour un montant supérieur à celui qui est véritablement nécessaire à la restauration de nos travailleurs.
  58. Quand nous avons découvert les faits que nous venons d’exposer, à partir du 12 janvier 2006, notre entreprise a commencé à rembourser au personnel les 5 pour cent de ses consommations qui lui étaient retenus toutes les semaines, et qui allaient au syndicat en tant que «versement» pour l’amélioration des locaux syndicaux.
  59. Ce remboursement a été maintenu jusqu’à ce que notre entreprise et le concessionnaire décident, par une convention collective signée le 14 juillet 2006, que la responsabilité de l’organisation et du contrôle du restaurant seraient dévolus à notre entreprise, laquelle ferait en sorte que le menu exécutif soit maintenu à 4,00 S/ (nouveaux soles) et que le déjeuner spécial reste à 3,00 S/ (nouveaux soles).
  60. En outre, notre entreprise subventionne les repas suivants: déjeuner économique: 0,47 S/ (nouveau sol) par consommation; déjeuner renforcé: 0,57 S/ (nouveau sol) par consommation; déjeuner et dîner: 3,00 S/ (nouveaux soles) par consommation.
  61. Tout syndicat a pour principale obligation de défendre et de promouvoir les travailleurs. Or les plaignants ont précisément fait tout le contraire en leur qualité de membres du comité directeur du syndicat puisqu’ils ont tiré profit du pouvoir qui leur avait été octroyé par la convention collective et qu’ils ont prélevé des sommes ou des «quotas» sur les recettes de l’entreprise concessionnaire d’une manière immorale et illégale.
  62. Ces faits constituent une base suffisante pour que notre entreprise juge que le pouvoir octroyé au syndicat des travailleurs par les conventions collectives a été complètement dénaturé.
  63. Ainsi, on ne saurait affirmer que notre entreprise a effectué un acte antisyndical, elle n’a fait qu’utiliser son droit de sanctionner, que lui reconnaît la législation du travail, et elle a mis un terme à la relation de travail avec de mauvais travailleurs, qui ont abusé du pouvoir que l’entreprise avait conféré au syndicat des travailleurs.
  64. Nous estimons par conséquent que notre action ne saurait être comprise comme un acte antisyndical contre les membres de l’organisation syndicale; en effet, nous avons agi conformément à la législation du travail et aux motifs qu’elle reconnaît pour mettre un terme au contrat de travail.
  65. Enfin, nous tenons à faire savoir que ces faits font l’objet d’une procédure judiciaire contre les ex-travailleurs licenciés concernant l’allégation de nullité de leur licenciement; le numéro de dossier est le 1628-2005, et il est instruit par le 30e tribunal du travail de Callao.
  66. Ainsi l’organe juridictionnel sera l’instance chargée d’établir s’il y a véritablement eu acte antisyndical ou non, compte tenu du fait que c’est là la voie habituelle pour résoudre les différends, selon notre ordonnance juridique.
  67. En outre, concernant cette procédure judiciaire, nous informons votre bureau que nous avons conclu un accord extrajudiciaire avec M. Jorge Luis Martínez Guevara, l’un des demandeurs, qui s’est désisté du procès et des plaintes. Nous vous faisons parvenir les preuves correspondantes.

C. Conclusions du comité

C. Conclusions du comité
  1. 1511. Le comité observe que, dans le présent cas, les organisations plaignantes allèguent: 1) le licenciement antisyndical de sept (13 en un premier temps) dirigeants du Syndicat des travailleurs de l’entreprise Owens-Illinois Perú S.A.; et 2) la suspension des fonctions et du salaire de deux dirigeants du Syndicat des travailleurs de l’usine SIDERPERU au motif qu’ils se sont plaints de la conduite d’un représentant de l’entreprise qui avait mis en danger la santé des travailleurs.
  2. 1512. En ce qui concerne l’allégation relative au licenciement antisyndical des dirigeants du Syndicat des travailleurs de l’entreprise Owens-Illinois Perú S.A., le comité prend note du fait que le gouvernement indique que cette question fera l’objet d’une sentence judiciaire, et que l’organisation plaignante n’a pas assisté à la réunion convoquée à sa demande par le ministère du Travail, de sorte que seuls les représentants de l’entreprise y ont assisté. Le comité prend note également du fait que l’entreprise a informé du désistement de la procédure judiciaire de l’un des dirigeants en question, et qu’elle soutient que les licenciements n’avaient pas de motif antisyndical, et que le motif était l’application abusive d’une disposition de la convention collective relative à l’organisation et au contrôle des restaurants par le syndicat, à savoir le détournement indirect par des dirigeants syndicaux de l’argent de l’entreprise puisque cette dernière a dû payer un montant majoré pour assurer la restauration de ses travailleurs, à cause du versement de sommes ou de «quotas» immoraux et illégaux aux entreprises concessionnaires du service de restauration (le contrat de concession signé entre le syndicat et l’entreprise de restauration prévoit 5 pour cent pour l’amélioration du local syndical et 5 pour cent du montant total des réunions); selon l’entreprise, la convention collective de 2006 établit désormais que la gestion des services de restauration est dévolue à l’entreprise.
  3. 1513. Le comité observe que la version de la CGTP souligne, au contraire, que les dirigeants ont été licenciés illégalement et en violation de la liberté syndicale dans le cadre de leurs fonctions et responsabilités de représentation, telles que définies dans des accords conclus lors d’assemblées générales, et dans le cadre de l’autonomie octroyée par le point 5 de la convention collective en matière d’administration du restaurant, au motif qu’ils ont effectué le recouvrement d’un pourcentage des bénéfices du concessionnaire du restaurant. Le comité observe que, selon la CGTP, le syndicat exerce ce pouvoir depuis plus de trente ans, que l’entreprise avait connaissance de ce fait, et que les recettes figurent dans les bilans généraux du syndicat.
  4. 1514. Compte tenu de la divergence qui existe entre la version de la CGTP et celle de l’entreprise, et du fait que la question de la nullité du licenciement a été soumise à l’autorité judiciaire, le comité demande au gouvernement qu’il lui communique le texte de la sentence qui sera prononcée.
  5. 1515. Le comité regrette de constater que le gouvernement n’a pas répondu à l’allégation de la Fédération nationale des travailleurs des mines, de la métallurgie et de la sidérurgie du Pérou, datée du 16 août 2007, concernant la suspension illégale des fonctions et du salaire pendant trente jours du secrétaire général et du secrétaire à la défense du Syndicat des travailleurs de l’usine SIDERPERU, au motif qu’ils se sont plaints du comportement d’un représentant de l’entreprise qui avait mis en danger la santé des travailleurs. Le comité demande instamment au gouvernement qu’il lui envoie sans délai ses observations à cet égard.

Recommandation du comité

Recommandation du comité
  1. 1516. Au vu des conclusions intérimaires qui précèdent, le comité invite le Conseil d’administration à approuver les recommandations suivantes:
    • a) Le comité demande au gouvernement de lui communiquer le texte de la sentence qui sera prononcée concernant le licenciement de sept dirigeants du Syndicat des travailleurs de l’entreprise Owens-Illinois Perú S.A.
    • b) Le comité regrette de constater que le gouvernement n’a pas répondu à l’allégation de la Fédération nationale des travailleurs des mines, de la métallurgie et de la sidérurgie du Pérou, datée du 16 août 2007, concernant la suspension illégale des fonctions et du salaire pendant trente jours du secrétaire général et du secrétaire à la défense du Syndicat des travailleurs de l’usine SIDERPERU, au motif qu’ils se sont plaints du comportement d’un représentant de l’entreprise qui avait mis en danger la santé des travailleurs. Le comité demande instamment au gouvernement de lui envoyer sans délai ses observations à cet égard.
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