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Rapport intérimaire - Rapport No. 348, Novembre 2007

Cas no 2540 (Guatemala) - Date de la plainte: 16-JANV.-07 - Clos

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  1. 788. Les plaintes figurent dans une communication de l’Union syndicale des travailleurs du Guatemala (UNSITRAGUA) en date du 16 janvier 2007 et dans une communication commune de la Confédération syndicale internationale (CSI) et de la Fédération internationale des ouvriers du transport (ITF) en date du 25 janvier 2007. La CSI et l’ITF ont présenté des informations complémentaires dans une communication datée du 12 février 2007.
  2. 789. Le gouvernement a fait part de ses observations dans des communications en date des 16 février, 22 mars, 3 et 4 mai et 16 octobre 2007.
  3. 790. Le Guatemala a ratifié la convention (no 87) sur la liberté syndicale et la protection du droit syndical, 1948, ainsi que la convention (no 98) sur le droit d’organisation et de négociation collective, 1949.

A. Allégations des plaignants

A. Allégations des plaignants
  1. 791. Dans sa communication du 16 janvier 2007, l’Union syndicale des travailleurs du Guatemala (UNSITRAGUA) indique que, le 15 janvier 2007, à la tombée de la nuit, M. Pedro Zamora Alvarez, secrétaire général du Syndicat des travailleurs de l’Empresa Portuaria Quetzal (STEPQ), qui, ayant quitté les installations de l’Empresa Portuaria Quetzal, rentrait chez lui en compagnie de son jeune fils, a été intercepté à la hauteur de Las Morenas (commune d’Iztapa, département d’Escuintla) par des hommes armés qui l’ont tué et ont blessé son fils. Ce fait montre à nouveau que l’Etat du Guatemala ne garantit pas les conditions minimales nécessaires à l’exercice de la liberté syndicale. L’UNSITRAGUA demande au Comité de la liberté syndicale de prier instamment l’Etat du Guatemala de faire la lumière sur cet assassinat et de déterminer s’il a un rapport ou non avec le conflit du travail auquel était confrontée l’organisation syndicale dont le défunt était secrétaire général. L’UNSITRAGUA demande aussi au Comité de la liberté syndicale de prier le gouvernement de prendre d’urgence les mesures nécessaires pour protéger la vie et la sécurité de tous les membres du comité exécutif et du conseil consultatif du Syndicat des travailleurs de l’Empresa Portuaria Quetzal.
  2. 792. La communication du 25 janvier 2007 de la Confédération syndicale internationale (CSI) et de la Fédération internationale des ouvriers du transport (ITF) porte elle aussi sur l’assassinat du dirigeant syndical Pedro Zamora.
  3. 793. La CSI et l’ITF indiquent que M. Pedro Zamora a été assassiné le 15 janvier 2007, aux alentours de 19 h 50, alors qu’il revenait avec ses deux jeunes enfants du dispensaire pour les travailleurs portuaires, qui se trouve à l’intérieur de l’entreprise, et s’apprêtait à rentrer chez lui. Un véhicule, avec cinq personnes à bord, qui avait suivi sa camionnette depuis la sortie des installations portuaires, l’attendait à une cinquantaine de mètres de son domicile. Les cinq individus ont tiré une centaine de balles contre la camionnette de Pedro Zamora, et une vingtaine de balles ont atteint ce dernier. Zamora a poussé ses enfants à se coucher sur le sol du véhicule pour se protéger, mais son fils de 3 ans, Angel, a été touché (désormais, ses jours ne sont plus en danger). Grièvement blessé, Zamora a percuté un mur. Un des assaillants s’est approché et lui a donné le coup de grâce. La manière dont Pedro Zamora a été assassiné et la quantité de balles qui ont été tirées montrent clairement que cette opération a été organisée par des professionnels et rappelle les méthodes utilisées par beaucoup de paramilitaires aux heures obscures de l’histoire guatémaltèque.
  4. 794. Les cinq membres du comité exécutif du STEPQ et leurs proches ont fait l’objet d’intimidations et d’attaques l’an passé. Elu secrétaire général en décembre 2005, Zamora était la cible principale de ces attaques et actes d’intimidation, dont l’objectif semblait être de le dissuader de poursuivre la partie conflictuelle de ses activités syndicales. Du 9 janvier à mars 2006, il a été suivi régulièrement par divers véhicules, dont une Toyota Yaris et une camionnette. Par ailleurs, des inconnus sont venus chez lui à plusieurs reprises pour savoir où il se trouvait. Le 2 novembre 2006, Zamora a été suivi par un véhicule dont les occupants ont dégainé leurs armes et tiré en l’air. Selon son témoignage, il s’agissait d’une Chevrolet de couleur noire ou grise, avec des vitres teintées. Zamora a également indiqué qu’il avait été suivi en permanence durant tout le mois de décembre, ce qui l’avait obligé à ne jamais suivre la même routine.
  5. 795. Pedro Zamora se battait pour éviter que le port ne soit privatisé sans la participation des travailleurs et sans que le syndicat soit consulté. Il se battait aussi pour que cessent les atteintes aux droits syndicaux dont sont victimes en permanence les travailleurs portuaires. Il s’était heurté au refus de l’administration de l’entreprise de négocier la convention collective. Récemment, il s’était opposé au projet de l’entreprise de construire un nouveau terminal pour conteneurs, de peur que cela ne conduise à une privatisation et à des suppressions d’emplois. Le syndicat réclamait par ailleurs le renvoi du directeur général qui était à la tête des plans de privatisation. Il luttait également pour la réintégration de neuf travailleurs – tous d’anciens dirigeants syndicaux – licenciés injustement le 10 octobre 2006 pour avoir participé à une manifestation pacifique. Le directeur général de l’Empresa Portuaria Quetzal avait envoyé à deux reprises des policiers en civil pour menacer les travailleurs durant les manifestations et pour les sommer de cesser de s’opposer à la direction. Il convient de souligner que le syndicat a porté plainte, car certains syndicalistes ont interrogé les policiers qui auraient reconnu être en service commandé.
  6. 796. Le 10 janvier 2007, le comité exécutif du syndicat a participé à une réunion au Congrès de la République. A cette occasion, le ministre du Transport a annoncé que les neuf travailleurs licenciés illégalement pour avoir participé en octobre 2006 à une manifestation pacifique contre le projet de construction allaient être réintégrés. Cela aurait profondément contrarié le directeur général. Apparemment, une Toyota de couleur sombre aurait suivi les syndicalistes à leur sortie du congrès. Depuis cette date et jusqu’au jour de sa mort, Pedro Zamora a confié à ses collègues qu’il était suivi tous les jours. Un an auparavant, le STEPQ avait porté plainte pour menaces et intimidations auprès du ministère public et du Procureur aux droits de l’homme. Les faits montrent que ce fut malheureusement en vain.
  7. 797. Le 18 janvier, la CSI et l’ITF ont reçu des informations selon lesquelles les cinq membres restants du comité exécutif du STEPQ avaient reçu des appels téléphoniques les menaçant de mort, eux et leurs proches. Lázaro Noe Reyes Matta (secrétaire à l’organisation), Max Alberto Estrada Linares (secrétaire au travail et aux conflits), Eulogio Obispo Monzón Mérida (secrétaire aux finances), Oscar Giovanni González Donado (secrétaire aux archives et aux accords) et Arturo Granados Hernández (secrétaire aux relations intersyndicales) sont constamment surveillés et harcelés, comme le fut Pedro Zamora. Le 17 janvier 2007, Oscar Giovanni González Donado et Lázaro Noe Reyes Matta ont reçu trois appels anonymes sur leur téléphone portable, entre 13 h 45 et 20 heures. Leur interlocuteur leur aurait dit, avec une voix modifiée électroniquement, que leurs autres collègues, leurs proches et eux-mêmes seraient tués dans les neuf prochains jours. Selon les informations communiquées par Amnesty International, une camionnette aux vitres teintées aurait été repérée près du domicile d’Eulogio Obispo Monzón Mérida ces derniers jours.
  8. 798. Malheureusement, cette situation d’abus, de violence et d’impunité ne date pas d’hier. La démocratie formelle et représentative établie il y a vingt ans n’a pas entraîné de grands changements pour le mouvement syndical sur le plan de la sécurité et des droits fondamentaux des travailleurs. Selon la Confédération générale des travailleurs du Guatemala (CGT), l’assassinat de dizaines de travailleurs et de travailleuses, sans que le ministère public n’ait jusqu’ici fait la lumière sur un seul de ces cas, confirme cet état de fait.
  9. 799. Les travailleurs et travailleuses de Puerto Quetzal ont été victimes d’une répression constante de la part de l’entreprise qui gère le port, au point que certains travailleurs et dirigeants syndicaux se sont vus forcés de démissionner. Le syndicat a essayé de nouer un dialogue afin de régler ces difficultés, mais l’entreprise a refusé de coopérer. Face à cette impasse, le syndicat a déclenché une grève le 11 septembre 2006. Elle a pris la forme d’un arrêt de travail d’une heure la première semaine, et d’une heure de plus chacune des semaines suivantes. Le 9 octobre 2006, le gouvernement a envoyé 350 policiers antiémeutes. La réunion programmée entre les syndicalistes et le ministre des Communications a été annulée et les neuf travailleurs mentionnés plus haut ont été arrêtés pour grève illégale. En octobre 2006, l’ITF a écrit au Président du Guatemala pour protester contre cette crise à Puerto Quetzal.
  10. 800. Par ailleurs, la direction a encouragé la création d’un groupe de travailleurs qui lui sont favorables, dont certains ont quitté le STEPQ (celui-ci affirme que seulement 25 à 30 travailleurs font partie de ce groupe). Le STEPQ souligne que la direction a favorisé ces travailleurs et espère que ceux-ci renverseront la direction du STEPQ ou qu’ils acquerront une force suffisante pour obtenir le droit de négocier la prochaine convention collective.
  11. 801. Dans leur communication du 12 février 2007, la CSI et l’ITF indiquent qu’ils ont dépêché une mission internationale commune à Puerto Quetzal et dans la capitale du Guatemala. Cette mission a pu constater que la situation sociale est très tendue à Puerto Quetzal. Il existe un projet de construction d’un nouveau terminal et de démantèlement des installations actuelles qui, espère-t-on, pourrait prendre fin avant le changement de Président de la République. Cela entraînerait une privatisation qui ne serait pas sans effet sur les travailleurs de l’Empresa Portuaria Quetzal. Le Syndicat des travailleurs de l’Empresa Portuaria Quetzal (STEPQ) s’oppose à ce projet et se déclare favorable à une modernisation avec la participation des travailleurs.
  12. 802. La CSI et l’ITF joignent à leur communication la liste, que leur a remise le STEPQ, des neuf travailleurs licenciés il y a quatre mois, qui ont entre neuf et onze ans d’ancienneté. Durant cette période, ces travailleurs ont eu des réunions avec des ministres, des entretiens avec des parlementaires, ils ont envoyé des lettres au Président, sans aucun résultat. L’entreprise suit une stratégie d’intimidation et les convoque à des réunions de nuit dans la capitale du Guatemala (à plus de 100 kilomètres de Puerto Quetzal). Deux instances judiciaires se sont déjà prononcées en faveur des travailleurs et ont exigé de l’entreprise portuaire qu’elle les réintègre, mais celle-ci n’en a rien fait, préférant payer une amende. Par ailleurs, ces travailleurs se sont vu offrir un contrat de neuf mois s’ils renoncent à leur appartenance au syndicat et aux prestations liées au travail. Les travailleurs – qui sont dans une situation financière difficile malgré l’appui du syndicat et qui n’ont même pas pu inscrire leurs enfants à l’école – ont rejeté cette offre.
  13. 803. La CSI et l’ITF indiquent qu’il n’a pas été possible d’obtenir copie des plaintes présentées par Pedro Zamora ou par d’autres membres du STEPQ, pas plus que du constat établi à l’occasion de l’entrée dans l’entreprise portuaire de deux policiers armés qui ont été obligés de décliner leur identité. L’entreprise portuaire a une police spéciale – pour les ports et les aéroports – et la police ordinaire ne peut entrer, sauf ordre des autorités supérieures.
  14. B. Réponse du gouvernement
  15. 804. Dans ses communications des 16 février, 22 mars, et 3 et 4 mai 2007, le gouvernement déclare que le ministère public enquête sur la mort de Pedro Zamora afin de trouver les coupables et d’établir les responsabilités pénales et civiles. Le 31 janvier 2007, le ministère public a déclaré ce qui suit:
  16. L’agence no 3, Section spéciale du ministère public chargée des délits commis à l’encontre de journalistes et de syndicalistes, a été saisie du dossier no 25/2007 du 15 janvier 2007 de la police nationale civile (poste no 31-32) de la commune de Puerto Iztapa (département d’Escuintla) concernant l’homicide par arme à feu dont a été victime Pedro Zamora Alvarez, le 15 janvier, à Las Morenas (commune de Puerto Iztapa, département d’Escuintla). Une enquête est en cours sur la base des indices trouvés sur les lieux du crime, des déclarations des témoins éventuels et d’expertises et comparaisons balistiques. Il convient de signaler que l’enquête a montré que ce ne sont pas 100 balles qui ont été tirées sur le véhicule ni 20 balles qui ont touché Pedro Zamora, et que celui-ci n’a pas reçu non plus de coup de grâce, contrairement à ce qu’indique le secrétaire général de la Confédération syndicale internationale. L’autopsie fait apparaître huit blessures par balle, la majorité dans la partie supérieure du corps. Le coup mortel a été reçu dans le dos (perforation cardioaortique pulmonaire).
  17. 805. Le gouvernement ajoute que la police a pris des mesures pour protéger M. Lázaro Reyes, secrétaire général en fonctions du Syndicat des travailleurs de l’Empresa Portuaria Quetzal, et assure aussi la sécurité autour du siège du syndicat. Il convient de signaler que, dans la documentation envoyée, cette protection est justifiée par les démarches entreprises par une mission d’assistance technique du BIT qui a dénoncé la surveillance, le harcèlement et les appels téléphoniques avec menaces de mort dont a fait l’objet ce dirigeant, ainsi que par l’obligation de respecter les conventions nos 87 et 98. Par ailleurs, le gouvernement transmet le rapport suivant de l’Empresa Portuaria Quetzal, en date du 13 mars 2007:
  18. Dans notre entreprise, la situation sociale n’a rien de tendu, et on peut même dire qu’elle est harmonieuse. Il n’y a pas eu non plus de manœuvres d’intimidation. Nous respectons la liberté syndicale, et la preuve en est que, dans notre entreprise, il existe trois syndicats qui ont une large liberté d’action. Nous avons insisté pour poursuivre la négociation de la convention collective, qui a été interrompue à trois reprises par le syndicat, lequel a déclenché un conflit collectif, puis s’est opposé aux travaux d’agrandissement et, enfin, a déclenché une grève de facto, illégale.
  19. Néanmoins, l’entreprise a tenu à poursuivre la négociation de la nouvelle convention collective et, aujourd’hui, 105 des 111 articles qu’elle contient ont déjà été approuvés.
  20. Puerto Quetzal a entrepris des travaux d’agrandissement pour répondre à l’essor du transport maritime international de conteneurs. Tous les ports de la région s’efforcent de s’adapter à cette évolution; les porte-conteneurs ont besoin d’une plus grande profondeur d’eau et d’un terminal spécialisé dans la manutention de ce type de cargaison. Les travaux d’agrandissement sont devenus indispensables et n’ont aucune répercussion sur les travailleurs; au contraire, ils pourraient offrir de nouveaux débouchés à beaucoup de personnes et, s’ils ne sont pas entrepris, Puerto Quetzal risque de ne plus être compétitif dans la région.
  21. A la fin de septembre et au début d’octobre 2006, le Syndicat des travailleurs de l’Empresa Portuaria Quetzal a déclenché une grève de facto, dénommée «Assemblée permanente» (institution qui n’existe pas dans la loi et qui en outre est interdite par le décret no 35/96 du Congrès). Une telle grève, illégale, est lourdement sanctionnée par la loi de syndicalisation et de réglementation de la grève des travailleurs de l’Etat, décret no 71/86, modifié par le décret no 35/96 du Congrès de la République, à quoi s’ajoute le fait que le décret gouvernemental no 700-2003 établit que les ports assurent un service public essentiel.
  22. Malgré un dialogue direct, le syndicat a refusé de changer d’attitude, causant un grave préjudice à l’économie du pays. Il a entravé la liberté de circulation en empêchant le passage de véhicules et en empêchant aussi l’appareillage des navires ayant terminé leurs opérations dans le port. Cela a obligé l’entreprise à prendre des mesures administratives, en s’appuyant sur les lois susmentionnées. Pour sa part, l’organisme exécutif a envoyé des éléments de la police nationale civile pour maintenir l’ordre et assurer le fonctionnement du port. Ces mesures ont mis fin à la grève.
  23. L’Empresa Portuaria Quetzal a toujours respecté les droits des travailleurs et a toujours agi dans le cadre de la loi. En ce qui concerne les neuf travailleurs qui ont été licenciés, il a fallu prendre cette décision parce que ces travailleurs ont été dénoncés par leurs chefs et par le département de la sécurité du port comme étant les éléments les plus revendicatifs et les meneurs, et que la loi nous obligeait à agir de manière à assurer un service public essentiel. Tous étaient des travailleurs de base. Aucun n’était un dirigeant syndical. Une fois licenciés, ils ont saisi le tribunal du travail pour demander leur réintégration. Il n’est pas exact que deux instances judiciaires se soient prononcées en leur faveur. Afin de régler de manière satisfaisante le conflit, l’entreprise a maintenu le dialogue et a fini par signer avec chacun des travailleurs un contrat administratif de transaction par lequel l’entreprise annule les licenciements, cependant que les travailleurs renoncent à la plainte qu’ils avaient déposée pour obtenir leur réintégration. Aujourd’hui, ces neuf travailleurs travaillent à leurs postes respectifs à Puerto Quetzal.
  24. Il n’est pas non plus conforme à la vérité de dire que les conditions de travail à Puerto Quetzal sont «calamiteuses», bien au contraire: il n’existe pas au Guatemala d’entité publique ou privée qui paie de meilleures prestations et qui offre plus d’avantages aux travailleurs que Puerto Quetzal, comme le montre le tableau comparatif ci-joint. Le comité exécutif du syndicat a à sa disposition trois véhicules, avec de l’essence, qu’il utilise pour se rendre constamment dans la capitale, pour ses activités syndicales et non pas parce que l’entreprise le lui demande. Il dispose d’un édifice qui est son siège syndical, avec des secrétaires et des ordinateurs dernier cri. Sept de ses membres disposent d’un congé 30 jours par mois, avec paiement de leur salaire; des permissions et des congés spéciaux sont accordés aux syndicalistes qui ne sont pas dirigeants, un appui financier est fourni pour différentes activités et les intéressés reçoivent 100 000 quetzales chaque année pour les fêtes de Noël.
  25. En général, les travailleurs perçoivent un salaire de base supérieur à celui versé par n’importe quelle autre entreprise publique ou privée du Guatemala. Ils bénéficient de multiples avantages: prime pour les vacances, prime d’ancienneté, prime de disponibilité, prime de responsabilité, prime annuelle, prime au mérite, allocations familiales, aide pour les fournitures scolaires, prime scolaire, bourses d’études (argent versé chaque mois), augmentations de salaires, cadeaux de Noël, assurance santé, assurance-vie, paiement des frais de funérailles et transport pour les enterrements, cantine et repas financés par l’entreprise, transport pour les déplacements des travailleurs, avantages économiques, services médical, dentaire et ophtalmologique, logement, heures extraordinaires doublées, périodes de vacances qui vont de 20 à 31 jours ouvrables. Chaque année, ils reçoivent trois paires de chaussures, quatre uniformes, un gilet, un blouson et un casque, des articles sanitaires et ils reçoivent 5 pour cent des bénéfices de l’entreprise qui sont répartis entre les travailleurs. Ils disposent d’un dispensaire, d’une garderie, d’un centre de formation et d’un plan de pension et de retraite, sans compter toutes les autres prestations prévues dans le pays, dont certaines ont été majorées, par exemple les étrennes (l’entreprise verse 25 pour cent de plus que ce qui est prévu par l’Etat).
  26. Je suis prêt à fournir des renseignements supplémentaires si cela est jugé nécessaire et peut éclairer le Premier vice-ministre, et je me permets de joindre à la présente un exemplaire de la convention collective en vigueur, laquelle a déjà été renégociée dans sa plus grande partie par les commissions de négociation.
  27. 806. Le gouvernement confirme que les neuf travailleurs de l’Empresa Portuaria Quetzal qui avaient été licenciés ont été réintégrés à leur poste de travail.
  28. 807. Dans sa communication du 16 octobre 2007, le gouvernement déclare que l’action du ministère public a permis d’identifier les possibles suspects en ce qui concerne le meurtre du dirigeant syndical Pedro Zamora et que l’autorité judiciaire a émis les mandats d’arrêt correspondants afin d’entamer la procédure pertinente.

C. Conclusions du comité

C. Conclusions du comité
  1. 808. Le comité prend note avec préoccupation des graves allégations présentées par les organisations plaignantes: 1) l’assassinat du dirigeant syndical du secteur portuaire, M. Pedro Zamora, à l’occasion duquel un de ses enfants a été blessé; 2) les menaces de mort, la surveillance, les actes de harcèlement et d’intimidation dont ont été victimes M. Pedro Zamora et sa famille (avant sa mort) et les cinq membres restants du comité exécutif du syndicat et leurs proches; selon les plaignants, la plainte présentée au ministère public par le syndicat une année auparavant pour menaces et intimidations n’a servi à rien. Le comité prend note aussi des allégations suivantes: I) licenciement de neuf syndicalistes ayant participé à une manifestation pacifique en novembre 2006, qui ont fini par être arrêtés; II) refus de l’entreprise de dialoguer à propos des problèmes des travailleurs et du projet de restructuration et de privatisation de l’entreprise; III) création d’un groupe de travailleurs favorables à la direction devant se substituer au syndicat portuaire ou acquérir une force suffisante pour prétendre avoir le droit de négocier la prochaine convention collective.
  2. 809. Les organisations plaignantes soulignent que ces faits s’inscrivent dans un contexte marqué par l’absence de dialogue de la part de l’entreprise, alors que le syndicat portuaire se battait pour éviter une privatisation du port sans la participation des travailleurs et sans qu’il soit consulté, ainsi que la construction d’un nouveau terminal pour conteneurs, qui aurait pu déboucher sur une privatisation.
  3. 810. Le comité prend note des déclarations du gouvernement et note avec intérêt qu’il a pris des mesures pour la protection du secrétaire général en fonctions du Syndicat des travailleurs de l’Empresa Portuaria Quetzal (STEPQ) ainsi que pour la sécurité du siège de ce syndicat. Le comité note aussi avec intérêt que les neuf travailleurs licenciés pour avoir participé en octobre 2006 à une manifestation syndicale (pacifique, selon les plaignants) ont été réintégrés à leurs postes de travail et que 105 des 111 articles de la nouvelle convention collective ont été déjà renégociés par les commissions de négociation.
  4. 811. En ce qui concerne l’assassinat du dirigeant syndical Pedro Zamora, le 15 janvier 2007, le comité prend note des premières déclarations du gouvernement selon lesquelles: 1) le ministère public enquête actuellement sur cet assassinat afin de trouver les coupables et d’établir les responsabilités pénales et civiles; 2) l’enquête a permis de rassembler les indices trouvés sur les lieux du crime, d’interroger les témoins, et de réaliser des expertises et comparaisons balistiques; il a été établi à cette occasion que le corps présentait moins de blessures que ce qu’indiquent les organisations plaignantes. Le comité prend également note des déclarations récentes du gouvernement que l’action du ministère public a permis d’identifier les possibles suspects et que l’autorité judiciaire a émis les mandats d’arrêt correspondants afin d’entamer la procédure pertinente.
  5. 812. Le comité déplore profondément l’assassinat du dirigeant syndical Pedro Zamora et les blessures infligées à son fils de 3 ans, en particulier au vu du fait que, en ce qui concerne ce dirigeant syndical, le syndicat portuaire avait, selon les organisations plaignantes, porté plainte auprès du ministère public pour menaces et intimidations, et que Pedro Zamora de même que les cinq autres membres du comité exécutif du syndicat avaient été menacés de mort (eux et leurs proches) et avaient fait l’objet d’une surveillance et de manœuvres de harcèlement et d’intimidation.
  6. 813. Le comité appelle l’attention du gouvernement sur le principe selon lequel un mouvement syndical réellement libre et indépendant ne peut se développer dans un climat de violence et d’incertitude; la liberté syndicale ne peut s’exercer que dans une situation de respect et de garantie complets des droits fondamentaux de l’homme, en particulier du droit à la vie et du droit à la sécurité de la personne, et les droits des organisations de travailleurs et d’employeurs ne peuvent s’exercer que dans un climat exempt de violence, de pressions ou menaces de toutes sortes à l’encontre des dirigeants et des membres de ces organisations, et il appartient aux gouvernements de garantir le respect de ce principe. De même, le comité rappelle que l’absence de jugements contre les coupables entraîne une impunité de fait qui renforce le climat de violence et d’insécurité et qui est donc extrêmement dommageable pour l’exercice des activités syndicales. [Voir Recueil de décisions et de principes du Comité de la liberté syndicale, cinquième édition, 2006, paragr. 43 à 45 et 52.]
  7. 814. Dans ces conditions, le comité demande instamment au gouvernement de prendre toutes les mesures en son pouvoir pour que l’enquête et les actions en cours pour arrêter les auteurs présumés de l’assassinat du dirigeant syndical Pedro Zamora s’intensifient et pour que des enquêtes soient menées sur les menaces de mort, la surveillance et les actes d’intimidation et de harcèlement dont ont été victimes tant ce dirigeant syndical que les cinq autres membres du comité exécutif du syndicat et leurs familles. Le comité demande au gouvernement de lui communiquer des informations à ce sujet et souligne l’importance de faire sans tarder la lumière sur ces faits, et d’identifier et punir les coupables. Le comité demande aussi au gouvernement de lui indiquer quelle suite a été donnée à la plainte pour menaces et intimidations dont le syndicat avait saisi le ministère public avant l’assassinat du dirigeant syndical Pedro Zamora. Enfin, il demande au gouvernement de prendre toutes les mesures nécessaires pour assurer la protection des membres du comité exécutif du STEPQ qui ont été menacés et de lui communiquer des informations à ce sujet.
  8. 815. En ce qui concerne le refus allégué de la direction de dialoguer à propos des problèmes des travailleurs et du projet de restructuration et de privatisation de l’entreprise, le comité note que, selon l’Empresa Portuaria Quetzal, il existe en son sein trois syndicats, que la situation sociale n’est pas tendue mais harmonieuse, qu’il est faux de dire que les conditions de travail sont calamiteuses (l’entreprise communique des données à ce sujet) et que 105 des 111 articles du projet de convention collective ont été approuvés. Toujours selon l’entreprise, l’agrandissement des installations pour faire face à l’essor du transport international des conteneurs offre de nouveaux débouchés qui pourraient profiter à beaucoup de personnes. Le comité demande au gouvernement que, dans tout processus de restructuration ou de privatisation de l’Empresa Portuaria Quetzal, les organisations syndicales soient consultées de manière approfondie, franche et complète.
  9. 816. Par ailleurs, en ce qui concerne les allégations relatives à la grève qui a eu lieu en 2006 à Puerto Quetzal, le comité note que le gouvernement signale que selon l’entreprise cette grève était illégale en vertu notamment du décret gouvernemental no 700-2003 qui indique que les ports assurent un service public essentiel; selon l’entreprise, le pouvoir exécutif a fait intervenir la police nationale civile pour maintenir l’ordre et assurer le fonctionnement du port.
  10. 817. A ce sujet, le comité tient à souligner que, en de précédentes occasions, il a jugé que les transports en général et les opérations portuaires (chargement et déchargement) en particulier ne constituent pas des services essentiels au sens strict du terme. [Voir Recueil, op. cit., paragr. 587.] Le comité juge néanmoins que, en cas de paralysie d’un service non essentiel au sens strict du terme dans un secteur d’importance capitale
  11. – comme cela peut être le cas du secteur des manutentions portuaires et du transport en général –, l’imposition d’un service minimum peut se justifier. [Voir Recueil, op. cit., paragr. 616.] Cela dit, les organisations de travailleurs et d’employeurs intéressées doivent pouvoir participer à la détermination du service minimum à garantir et, en cas de divergence, la législation devrait prévoir que la question sera tranchée par un organe indépendant ayant la confiance des parties concernées et non par l’autorité administrative.
  12. 818. Dans ces conditions, le comité demande au gouvernement que, en consultation avec les organisations représentatives d’employeurs et de travailleurs et tenant compte des circonstances particulières du pays, il prenne les mesures nécessaires pour réviser et modifier la législation qui interdit la grève dans le secteur de la manutention portuaire qui est défini comme un service essentiel, ceci de manière à assurer sa conformité avec les conventions nos 87 et 98.
  13. 819. Par ailleurs, en ce qui concerne l’intervention alléguée de la police nationale civile durant la grève, le comité note que, selon l’entreprise, cette intervention avait pour objectif d’assurer le maintien de l’ordre et le fonctionnement du port (selon l’entreprise, les grévistes empêchaient le passage des véhicules et l’appareillage des navires). Vu que ni les organisations plaignantes ni le gouvernement ne donnent plus de précisions sur les faits allégués, le comité se limite à rappeler de manière générale le principe que «les autorités ne devraient avoir recours à la force publique que dans des situations où l’ordre public serait sérieusement menacé. L’intervention de la force publique devrait rester proportionnée à la menace pour l’ordre public qu’il convient de contrôler, et les gouvernements devraient prendre des dispositions pour que les autorités compétentes reçoivent des instructions appropriées en vue d’éliminer le danger qu’impliquent les excès de violence lorsqu’il s’agit de contrôler des manifestations qui pourraient troubler l’ordre public. [Voir Recueil, op. cit., paragr. 140.]
  14. 820. Le comité demande au gouvernement de répondre à l’allégation selon laquelle l’Empresa Portuaria Quetzal favorise un groupe de travailleurs pour qu’ils remplacent la direction du syndicat STEPQ ou acquièrent une force suffisante pour prétendre avoir le droit de négocier la prochaine convention collective.

Recommandation du comité

Recommandation du comité
  1. 821. Au vu des conclusions intérimaires qui précèdent, le comité invite le Conseil d’administration à approuver les recommandations suivantes:
    • a) Le comité déplore profondément l’assassinat du dirigeant syndical Pedro Zamora et les menaces de mort et autres actes d’intimidation contre les cinq autres dirigeants du syndicat STEPQ, et il demande instamment au gouvernement de prendre toutes les mesures en son pouvoir pour que l’enquête et les mesures en cours pour arrêter les auteurs présumés de l’assassinat du dirigeant syndical Pedro Zamora s’intensifient et pour que des enquêtes soient menées sur les menaces de mort, la surveillance et les actes d’intimidation et de harcèlement dont ont été victimes tant ce dirigeant syndical que les cinq autres membres du comité exécutif du syndicat et leurs familles. Le comité demande au gouvernement de lui communiquer des informations à ce sujet et souligne l’importance de faire sans tarder la lumière sur ces faits, et d’identifier et punir les coupables. Le comité demande aussi au gouvernement d’indiquer quelle suite a été donnée à la plainte pour menaces et intimidations dont le syndicat avait saisi le ministère public avant l’assassinat du dirigeant syndical Pedro Zamora. Enfin, le comité demande au gouvernement de prendre toutes les mesures nécessaires pour assurer la protection des membres du comité exécutif du STEPQ qui ont été menacés et de lui communiquer des informations à ce sujet.
    • b) Le comité demande au gouvernement que, dans tout processus de restructuration ou de privatisation de l’Empresa Portuaria Quetzal, les organisations syndicales soient consultées de manière approfondie, franche et complète.
    • c) Le comité demande au gouvernement que, en consultation avec les organisations représentatives d’employeurs et de travailleurs et tenant compte des circonstances particulières du pays, il prenne les mesures nécessaires pour réviser et modifier la législation qui interdit la grève dans le secteur de la manutention portuaire qui est défini comme un service essentiel, ceci de manière à assurer sa conformité avec les conventions nos 87 et 98.
    • d) Le comité demande au gouvernement de répondre à l’allégation selon laquelle l’Empresa Portuaria Quetzal favorise un groupe de travailleurs pour qu’ils remplacent la direction du syndicat STEPQ ou acquièrent une force suffisante pour prétendre avoir le droit de négocier la prochaine convention collective.
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