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- 485. Cette plainte figure dans une communication du 18 septembre 2007 du Syndicat national des travailleurs de l’industrie alimentaire (SINALTRAINAL). L’organisation plaignante a envoyé des informations complémentaires le 26 octobre 2007. Dans les communications des 25 mars, 1er avril et 4 juin 2008, le SINALTRAINAL a présenté de nouvelles allégations. L’organisation plaignante a envoyé des informations complémentaires dans une communication en date du 4 février 2009.
- 486. Le gouvernement a envoyé ses observations dans les communications des 6 décembre 2007, 25 avril, 22 et 27 août 2008, et 9 février 2009.
- 487. La Colombie a ratifié la convention (nº 87) sur la liberté syndicale et la protection du droit syndical, 1948, la convention (nº 98) sur le droit d’organisation et de négociation collective, 1949, la convention (nº 151) sur les relations de travail dans la fonction publique, 1978, et la convention (nº 154) sur la négociation collective, 1981.
A. Allégations de l’organisation plaignante
A. Allégations de l’organisation plaignante- 488. Dans ses communications des 18 septembre et 26 octobre 2007, des 25 mars, 1er avril et 4 juin 2008, et du 4 février 2009, le Syndicat national des travailleurs de l’industrie alimentaire (SINALTRAINAL) allègue qu’une série d’actes d’intimidation ont été menés contre les dirigeants de l’organisation syndicale et ses affiliés par plusieurs usines d’embouteillage (Embotelladora de Santander S.A., Embotelladora Román S.A., Panamco Colombia S.A., Coca-Cola Femsa et Embotelladora de Carepa) dans certains cas, et dans d’autres par des groupes paramilitaires, afin de les dissuader de poursuivre leurs activités syndicales. L’organisation plaignante fait également référence à des actes antisyndicaux commis dans d’autres entreprises, que nous citerons ultérieurement.
- 489. En effet, l’organisation plaignante allègue que les entreprises susmentionnées ont mené depuis plus de vingt ans une politique nettement antisyndicale. L’organisation plaignante cite des perquisitions et des détentions arbitraires, sans mandat d’arrêt ni de perquisition, qui se seraient produites depuis 1984. Les dirigeants et les membres ont été séquestrés par des paramilitaires qui leur ont intimé de ne pas porter plainte contre les entreprises. D’après l’organisation plaignante, ses membres auraient subi des violations au droit à l’intégrité et à la sécurité, car ils ont fait l’objet de deux agressions physiques et de menaces dans 32 cas. Ces faits ont fait l’objet de plaintes, mais les enquêtes n’ont pas abouti. Le syndicat SINALTRAINAL explique que ces faits ont provoqué l’abandon des activités syndicales par de nombreux travailleurs, craignant des représailles. Il ajoute que ces violations des droits fondamentaux sont à resituer dans un contexte de restrictions considérables en matière de liberté syndicale imputables à la politique de l’Etat, des entreprises et des groupes paramilitaires. Dans ses communications, l’organisation plaignante cite de façon détaillée de nombreux actes de violence, de menaces et d’intimidation, allant jusqu’à l’assassinat et aux attentats contre divers dirigeants syndicaux et membres du SINALTRAINAL.
- 490. Au dire de l’organisation plaignante, au fil des ans, les entreprises auraient stigmatisé les dirigeants syndicaux pour justifier les poursuites et la répression, essayé de pénaliser les conflits sociaux, la liberté de pensée, la liberté d’opinion et d’association afin de terroriser les travailleurs et les empêcher de se syndiquer, en ayant recours à des accusations mensongères d’insultes et de calomnies, de délinquance en réunion, terrorisme, rébellion, participation à des groupes de guérilleros, sabotage, déprédation de biens et vol qualifié, et les entreprises ont demandé la levée de l’immunité syndicale de certains dirigeants dans le but de les licencier, entre autres choses. Lors des procès, les juges ont disculpé ou abandonné les poursuites contre les travailleurs affiliés au SINALTRAINAL. Cependant, certains sont restés emprisonnés jusqu’à ce que la preuve de leur innocence ait été apportée.
- 491. D’après le SINALTRAINAL, le 9 décembre 1996, des membres de groupes paramilitaires ont pénétré dans l’usine d’embouteillage de Carepa, réuni les membres du syndicat et les ont contraints sous la menace à résilier leur affiliation au SINALTRAINAL en les obligeant à signer des lettres qui avaient été écrites sur les ordinateurs de l’entreprise.
- 492. D’après l’organisation plaignante, un certain nombre d’usines d’embouteillage ne respectent pas la liberté syndicale: en 2000, les autorités judiciaires ont sanctionné l’usine Embotelladora de Santander S.A. pour violation de la convention collective; Embotelladora de Santander S.A. a été condamnée par les tribunaux en 2001 à payer au SINALTRAINAL les cotisations syndicales dues, mais l’entreprise a fait appel de la décision, et ce recours est en instance; ensuite, plusieurs fonctionnaires de l’usine d’embouteillage ont été condamnés à une amende pour non-respect des droits de réunion et d’association.
- 493. L’organisation plaignante allègue également qu’en 2003 l’entreprise Coca-Cola Femsa aurait exercé des pressions à l’encontre des travailleurs afin qu’ils renoncent à leur contrat de travail en échange d’une indemnité financière, en les menaçant de licenciement. Ces faits ont fait l’objet d’une plainte, mais les autorités n’ont pas réagi. L’organisation plaignante ajoute à ce sujet que le tribunal supérieur du district judiciaire de Medellín a exigé la réintégration de plusieurs travailleurs licenciés à leurs postes de travail.
- 494. L’organisation plaignante mentionne également les fermetures d’usines de production ou d’embouteillage en 2003, qui ont entraîné le licenciement de nombreux travailleurs. Cette mesure a fait l’objet de plusieurs recours en tutelle, et dans certains cas le tribunal a exigé la réintégration des travailleurs alors que, dans d’autres, le jugement était favorable aux usines d’embouteillage.
- 495. Le SINALTRAINAL allègue également que, le 8 juillet 2004, l’entreprise Coca-Cola Femsa a demandé au ministère de la Protection sociale d’annuler les statuts du syndicat, afin d’empêcher les travailleurs sous-traitants d’adhérer au syndicat. En conséquence, la décision no 2994 de la Coordinatrice du groupe de travail, emploi et sécurité sociale a annulé les statuts du SINALTRAINAL. D’après le syndicat, cette décision a été prise alors que le syndicat n’avait pas encore reçu la notification de la demande d’annulation. Le Conseil sectoriel de la magistrature de Cundinamarca a déclaré recevable la demande de tutelle engagée par le SINALTRAINAL mais, pour des raisons de procédure, ladite tutelle a été annulée et les recours rejetés. L’organisation plaignante ajoute que l’assemblée générale nationale des délégués du SINALTRAINAL, qui s’est tenue du 3 au 7 décembre 2007 dans la ville de Cachipay, du département de Cundinamarca, a adopté une réforme de ses statuts pour que le syndicat soit constitué des travailleurs de l’industrie agroalimentaire et des industries connexes, quels que soient le type de relation de travail ou les modalités de l’emploi; l’assemblée a défini le syndicat en tant qu’organisation démocratique de classe dont l’objectif fondamental est de revendiquer et de promouvoir l’intégralité des droits économiques, sociaux, culturels et des droits du travail; la défense des libertés politiques, du bien-être, de la souveraineté nationale et alimentaire, la défense de l’environnement, la paix, la démocratie véritable, la solidarité, la lutte contre la pauvreté, l’unité et la solidarité avec le syndicalisme international. La réforme des statuts a été déposée dans les délais légaux auprès du ministère de la Protection sociale, à la direction territoriale de Cundinamarca, et l’Inspection du travail et de la sécurité sociale de Facatativa a accepté le dépôt des statuts amendés au moyen de la décision no 0005 du 14 janvier 2008, en les déclarant conformes à la loi et non contraires à la Constitution de la Colombie. Toutefois, l’usine d’embouteillage Panamco Colombia S.A. s’est opposée le 8 février 2008 à la réforme des statuts, accusant le SINALTRAINAL de procédure frauduleuse, afin de tromper les autorités en essayant de semer le doute sur la légalité des statuts afin d’interdire au SINALTRAINAL d’amender ses statuts; l’usine a argué du fait que les statuts avaient été annulés en 2004, puis qu’ils avaient été déposés en ce temps-là en dehors des délais légaux, au mépris de la décision du juge des tutelles de Colombie qui avait statué que tous les travailleurs et personnes disposent du droit fondamental d’organisation quelles que soient les modalités d’emploi ou de contrat. L’organisation plaignante indique que la Coordinatrice du groupe de travail, emploi et sécurité sociale de la direction territoriale de Cundinamarca a adopté la décision no 000984 du 25 mars 2008, annulant la décision no 0005 du 14 janvier 2008, et refusant l’enregistrement et l’adoption de la réforme des statuts du SINALTRAINAL. Le ministère, sans se fonder sur le droit, a interprété qu’il s’agit de la même réforme des statuts que celle de 2001, qui avait été annulée par cette même coordinatrice en 2004. Le ministère reprend d’ailleurs la décision de cette dernière et, fait aggravant, il reprend presque textuellement le recours déposé par l’usine d’embouteillage Panamco Colombia S.A. du 8 février 2008, sans faire d’analyse juridique sur le fond, et le ministère assume en outre des compétences d’un juge de la République ou même de la Cour constitutionnelle de Colombie, en qualifiant la fraude.
- 496. L’organisation plaignante mentionne également que les usines d’embouteillage Panamco Colombia S.A. (devenue Coca-Cola Femsa) et Embotelladora Román S.A., la Compañía Nacional de Chocolates S.A., Supertiendas y Droguerías Olímpica S.A. ou Eficacia S.A. ont intenté plusieurs recours en annulation de l’enregistrement des syndicats ou des nouveaux conseils d’administration des sections syndicales de plusieurs villes. Il s’agit des sections de Girardot, Cali, Villavicencio, Bucaramanga, Santa Marta et Bogotá. Les demandes d’annulation se fondaient sur le nombre insuffisant de membres pour former une section ou sur le fait que, d’après les entreprises, les travailleurs qui souhaitaient s’affilier n’appartenaient pas au secteur de l’alimentation, mais travaillaient dans des entreprises de services au sein des entreprises du secteur de l’alimentation. L’issue de ces recours n’a été que rarement favorable au syndicat, en respectant le droit d’association. Dans les autres cas, la suppression du registre ou le refus d’inscrire les membres du conseil d’administration ont permis aux entreprises de licencier les travailleurs qui exerçaient leurs droits syndicaux. C’est ainsi que:
- – Le 22 août 2003, le tribunal du travail de la circonscription de Cundinamarca a déclaré recevable la demande spéciale de dissolution et d’annulation de la section syndicale de Girardot, dans la décision no 0236-03. Cette demande avait été déposée par l’entreprise Panamco Colombia S.A. et se fondait sur le fait que le nombre d’adhérents à la section syndicale de Girardot était inférieur au minimum légal, étant donné que ces membres étaient des travailleurs indépendants du secteur de l’alimentation. Dans la décision no 0153 du 6 février 2004, le ministère de la Protection sociale a ordonné l’enregistrement du conseil d’administration de la section de Girardot du SINALTRAINAL mais, le 9 mars 2004, l’usine d’embouteillage Panamco Colombia S.A., devenue aujourd’hui Coca-Cola Femsa, présentait un recours en annulation et un appel. Le 25 août 2004, le ministère de la Protection sociale a annulé dans sa décision no 00003196 l’enregistrement du conseil d’administration. Dans la ville de Girardot, de la province de Cundinamarca, le ministère de la Protection sociale a notifié le 7 décembre 2004 au syndicat le contenu de la décision no 02065 du 30 novembre 2004, refusant l’enregistrement du conseil d’administration de la section de Girardot du syndicat SINALTRAINAL à la demande de l’usine d’embouteillage Panamco Colombia S.A.
- – Le 4 janvier 2002, l’usine d’embouteillage Román S.A. a déposé une requête en dissolution, liquidation et annulation de l’enregistrement de la section de Santa Marta du syndicat, au motif que cette dernière ne remplissait pas les conditions fixées par la loi pour l’enregistrement. La troisième chambre du tribunal du travail de Santa Marta a refusé cette requête le 4 mars 2004.
- – Dans la décision no 00627 du 13 décembre 2004, le ministère de la Protection sociale a enregistré le conseil d’administration de la section de Villavicencio du SINALTRAINAL et, le 18 janvier 2005, l’usine d’embouteillage Panamco Colombia S.A. déposait un recours en annulation et obtenait l’accord du ministère de la Protection sociale dans la décision no 00088 du 4 mai 2005; et, dans sa décision no 00319 du 26 juillet 2005, le ministère de la Protection sociale a invalidé le conseil d’administration élu le 30 novembre 2005.
- – A la demande de l’usine d’embouteillage Panamco Colombia S.A., le ministère de la Protection sociale a refusé, dans la décision no 00001700 du 29 juin 2005, d’enregistrer le conseil d’administration de la section de Bogotá élu en assemblée générale le 18 mars 2005, en alléguant que cette section ne comptait pas le nombre d’adhérents requis car certains de ses membres étaient des travailleurs indépendants du secteur de l’alimentation.
- – Dans la décision no G0287 du 27 mars 2006, le ministère de la Protection sociale a ordonné l’enregistrement du conseil d’administration de la section de Bucaramanga du SINALTRAINAL, et la Compañía Nacional de Chocolates S.A. et l’Acueducto Metropolitano de Bucaramanga ont déposé un recours en annulation et un appel de cette décision les 7 et 18 avril 2006, et le ministère de la Protection sociale a partiellement invalidé le conseil d’administration dans la décision no 2022 du 29 décembre 2006.
- – Dans la décision no 000629 du 17 avril 2006, le ministère de la Protection sociale a décidé d’enregistrer le conseil d’administration de la section de Cali du SINALTRAINAL. Le 9 mai 2006, l’usine d’embouteillage Panamco Colombia S.A., devenue Coca-Cola Femsa, s’est opposée à cette décision mais, le 30 mai 2006, le ministère a confirmé l’enregistrement, réaffirmant sa décision le 28 septembre 2006, dans la décision no 001692, et enregistré le conseil d’administration de la section de Cali du SINALTRAINAL.
- – le 2 novembre 2006, la direction territoriale de Magdalena du ministère de la Protection sociale a ordonné dans sa décision no 361-06 d’enregistrer le conseil d’administration de la section de Santa Marta du SINALTRAINAL et, dans une lettre du 17 novembre 2006, l’entreprise Supertiendas y Droguerías Olímpica S.A. a déposé un recours en annulation et fait appel de cette décision; le ministère de la Protection sociale a partiellement invalidé l’enregistrement du conseil d’administration de la section de Santa Marta dans une décision du 16 janvier 2007. L’entreprise a alors procédé au licenciement indiscriminé de travailleurs.
- 497. Le SINALTRAINAL ajoute que l’entreprise Eficacia S.A. a refusé en 2006 de procéder au prélèvement des cotisations syndicales en faveur du SINALTRAINAL, et ne reconnaît pas la commission des réclamations, en alléguant qu’elle ne fait pas partie du secteur de l’agroalimentaire couvert par le SINALTRAINAL. D’après l’organisation plaignante, les travailleurs d’Eficacia S.A. qui ont essayé de s’affilier au SINALTRAINAL, tout en étant employés par Eficacia S.A., travaillaient dans l’usine d’embouteillage de Santander S.A. depuis plusieurs années. En effet, l’organisation plaignante indique que 70 pour cent des travailleurs de l’usine d’embouteillage de Santander S.A. sont employés en sous-traitance, et qu’on leur refuse les droits inscrits dans la convention collective en vigueur dans l’entreprise, au motif que cette dernière ne s’applique qu’aux employés directement employés par Santander S.A. Il en résulte, au dire de l’organisation plaignante, une très grande précarité pour les travailleurs d’Eficacia S.A.
- 498. L’organisation plaignante indique que, pour les mêmes raisons, l’entreprise Eficacia S.A. a refusé de négocier le cahier de revendications présenté par le SINALTRAINAL le 25 août 2006. Devant ce refus, le syndicat a demandé au ministère de la Protection sociale d’enjoindre l’entreprise à négocier et de lui imposer des sanctions en raison de son refus. Cependant, le ministère s’est borné à transmettre à l’organisation syndicale une lettre d’Eficacia S.A. exposant les raisons pour lesquelles cette entreprise n’était pas obligée à négocier. Le ministère de la Protection sociale ne s’est pas prononcé à ce sujet. Depuis lors, l’entreprise a entamé une campagne d’intimidation pour éviter les affiliations au syndicat, en licenciant les travailleurs qui souhaitaient le faire.
- 499. D’après les allégations, l’administration de Coca-Cola Femsa a rassemblé le 15 février 2007 les travailleurs qui avaient un contrat de sous-traitance avec Eficacia S.A. pour leur annoncer que le contrat de cette dernière avec Coca-Cola Femsa prenait fin, mais qu’ils avaient la possibilité d’être embauchés par une autre entreprise – PROSERVIS. Toutefois, au dire de l’organisation plaignante, les travailleurs affiliés au SINALTRAINAL n’ont pas été repris.
- 500. Le SINALTRAINAL explique que dans ses statuts les catégories de travailleurs qui peuvent adhérer au syndicat sont les suivantes: «article 2. Le Syndicat national des travailleurs de l’industrie alimentaire (SINALTRAINAL) est constitué des travailleurs ayant un lien avec des entreprises ou des établissements dont l’objectif est de cultiver, récolter, fabriquer, déshydrater, pulvériser, conditionner, préparer, acheter, vendre, distribuer, importer, exporter des produits alimentaires ou devant être mélangés à des produits alimentaires».
- 501. Le SINALTRAINAL prétend que cette façade juridique a une incidence sur les travailleurs et justifie au niveau juridique le refus de négocier le cahier de revendications présenté par le syndicat le 4 septembre 2006, afin d’établir les droits minimaux des sous-traitants. Ces derniers se voient imposer des conditions de travail indignes, ne bénéficient pas des conventions collectives, ont des salaires inférieurs, leur droit d’association n’est pas respecté et ils sont victimes d’abus.
- 502. Le SINALTRAINAL allègue également que M. Andrés Olivar a été suspendu à titre de sanction pour avoir utilisé son congé syndical. Les usines d’embouteillage de Villavicencio et de Bogotá auraient procédé au licenciement de travailleurs après leur adhésion au SINALTRAINAL en mars 2007. Il s’agit de 16 distributeurs et d’un travailleur directement sous contrat chez Villavicencio, ainsi que de M. Edgar Alfredo Martínez Moyano à Bogotá.
- 503. Une autre entreprise de services en sous-traitance pour Coca-Cola Femsa, Ayuda Integral S.A., refuse de négocier collectivement le cahier de revendications présenté par le SINALTRAINAL et ne reconnaît pas l’adhésion à ce syndicat.
- 504. Le SINALTRAINAL allègue également que le groupe de travail emploi et sécurité sociale de la direction territoriale de Santander du ministère de la Protection sociale a refusé d’enregistrer M. Ernesto Estrada Prada en tant que membre du conseil exécutif du SINALTRAINAL, car il a un contrat de travail avec l’entreprise de services Empaques Hernández, qui fournit des services à l’entreprise Saceites S.A., où travaille M. Estrada.
- 505. L’organisation plaignante indique également que le ministère de la Protection sociale a estimé que les travailleurs de l’Acueducto Metropolitano de Bucaramanga ne peuvent pas adhérer au SINALTRAINAL, parce qu’ils ne sont pas des travailleurs du secteur de l’alimentation. D’après l’organisation syndicale, il s’agit d’une entreprise qui stocke de l’eau potable destinée à la consommation humaine.
- 506. Dans sa communication en date du 4 février 2009, le SINALTRAINAL se réfère à la situation juridique en Colombie des entreprises Coca-Cola S.A., Coca-Cola Femsa S.A., Embotelladoras de Santander S.A., Embotelladoras Román S.A., Indega S.A. et Bebidas y Alimentos de Urabá S.A., et signale que:
- – Les entreprises Coca-Cola Femsa S.A., Embotelladoras de Santander S.A., Embotelladoras Román S.A., Indega S.A. et Bebidas y Alimentos de Urabá S.A. sont directement liées et sont contrôlées par Coca-Cola S.A. ou Coca-Cola Company S.A. par le biais d’un contrat de franchise dont le caractère confidentiel en empêche l’accès.
- – Dans le cas de Panamco, qui dispose d’un contrôle direct de Embotelladoras de Santander S.A., Embotelladoras Román S.A. et Indega S.A., l’entreprise est contrôlée non seulement par le biais d’un contrat de franchise par Coca-Cola Company ou Coca-Cola S.A., mais cette dernière détient des actions à hauteur de 24 pour cent et ses représentants siègent à la direction de l’entreprise qui est l’une de ces usines d’embouteillage principales, enregistrée comme Panamerican Beverage.
- – Coca-Cola Femsa S.A. a acheté Panamco pour 3,6 millions de dollars et cette acquisition lui a permis de détenir automatiquement les usines Embotelladoras de Santander S.A., Embotelladoras Román S.A. et Indega S.A. au sein desquelles Coca-Cola S.A. ou Coca-Cola Company a augmenté non seulement son contrôle mais aussi sa participation en tant qu’actionnaire et sa présence dans l’organe de direction.
- – Coca-Cola Femsa S.A., comme cela apparaît dans l’en-tête du document daté du 29 octobre 2008 et signé par Embotelladoras de Santander S.A., a approuvé la fusion et a été absorbée par Industria Nacional de Gaseosas S.A.
- – Industria Nacional de Gaseosas S.A. est la même entité que Indega S.A.
- – Coca-Cola S.A. ou Coca-Cola Company a enregistré Coca-Cola Servicios de Colombia S.A., entreprise via laquelle elle exécute ses opérations avec les usines d’embouteillage.
- – Embotelladoras Román S.A. a été absorbée de la même manière que Coca-Cola Femsa.
- B. Réponse du gouvernement
- 507. Dans ses communications du 6 décembre 2007, des 25 avril, 22 et 27 août 2008, et du 9 février 2009, le gouvernement indique que les allégations relatives aux droits de l’homme (violation du droit à l’inviolabilité du domicile et violation du droit à la liberté personnelle), ainsi que les plaintes pour terrorisme et rébellion devraient être examinées dans le cadre du cas no 1787. Il ajoute que le Bureau de la coopération et des relations internationales a transmis une copie des présentes allégations à la Coordinatrice du groupe des droits de l’homme du ministère de la Protection sociale afin qu’elle diligente les enquêtes nécessaires.
- 508. Concernant la situation juridique des entreprises citées dans les allégations du présent cas, et les liens qui les unissent, le gouvernement a envoyé les informations transmises par l’entreprise Industria Nacional de Gaseosas (INDEGA). D’après cette dernière:
- 1. Coca-Cola Femsa appartient à un groupe d’origine mexicaine spécialisé dans l’embouteillage de boissons non alcoolisées (y compris les boissons des marques appartenant à The Coca-Cola Company) dans plusieurs pays d’Amérique latine. En Colombie, Coca-Cola Femsa opère dans le cadre du groupe Industria Nacional de Gaseosas, contrôlé par la société Industria Nacional de Gaseosas S.A. (auparavant PANAMCO Colombia S.A.).
- 2. En décembre 2008, Industria Nacional de Gaseosas S.A. a absorbé Embotelladora de Santander S.A. et Embotelladora Román S.A. (des sociétés qui appartiennent également au groupe Industria Nacional de Gaseosas), au moyen d’une fusion par absorption.
- 3. Il convient de mentionner que le nom exact de l’entreprise est Embotelladora Román S.A. et non Embotelladora San Román. A propos de ces deux dernières sociétés, notre entreprise en Colombie ne dispose d’aucun lien de contrôle ou d’administration avec elles.
- 4. Coca-Cola Servicios de Colombia S.A. est une société appartenant à The Coca-Cola Company. Le lien existant dans ce cas est purement commercial, découlant de la signature d’un contrat d’embouteillage avec The Coca-Cola Company, aux termes duquel cette entreprise autorise Coca-Cola Femsa à embouteiller et commercialiser ses produits dans différentes zones du territoire colombien.
- 5. Quant à Embotelladora Carepa, nous confirmons que notre compagnie n’entretient aucun lien avec cet établissement ni avec la société qui en est propriétaire (Bebidas y Alimentos de Urabá S.A.). En effet, i) nous savons que les activités de cette société se déroulent dans la zone d’Urabá, et ii) notre contrat d’embouteillage ne couvre pas cette zone, donc nous ne pouvons pas y avoir d’activités.
- 509. Concernant les autres points, le gouvernement, en accord avec les observations envoyées par le groupe INDEGA et par le service d’inspection, de surveillance et de contrôle du ministère de la Protection sociale, répond ce qui suit.
- 510. INDEGA décrit brièvement les activités du groupe en lien avec le droit d’association et la liberté syndicale. INDEGA indique que ses activités s’inscrivent dans le cadre de la Constitution et de la loi, avec un engagement profond en faveur du respect des droits de l’homme, des droits d’association, de négociation collective et du développement du travail des syndicats.
- 511. Il existe chez INDEGA plus de six syndicats, avec lesquels ont été souscrites trois conventions collectives qui sont renégociées tous les deux ans; actuellement, les trois conventions collectives ont été signées, déposées et sont en vigueur. Le SINALTRAINAL a négocié les trois conventions collectives et en est partie. Trente pour cent des travailleurs adhèrent à un syndicat, dont le SINALTRAINAL. L’entreprise entretient un dialogue ouvert et permanent dans chacun des établissements avec les délégués syndicaux, et apporte un appui économique aux 18 sections syndicales enregistrées dans l’ensemble du pays, dont plus de la moitié sont des sections du SINALTRAINAL. De plus, l’entreprise appuie le travail des syndicats par le biais d’avantages tangibles qui garantissent l’exercice du droit d’association. Plus de 6 000 journées annuelles de congés syndicaux rémunérés sont ainsi accordées, et plus de 500 000 dollars des Etats-Unis sont apportés en tant qu’aide aux syndicats. Le SINALTRAINAL, qui représente plus de 40 pour cent des travailleurs syndiqués, est le principal bénéficiaire de ces aides.
- 512. INDEGA ajoute qu’elle s’engage à sauvegarder l’intégrité et la sécurité des travailleurs, en exécutant avec diligence et en temps opportun toutes les actions qui sont en son pouvoir dans ce sens. L’entreprise a défini un système de procédures et de recours pour gérer les questions de sécurité posées par le SINALTRAINAL. Elle est en contact permanent avec les directions des droits de l’homme du ministère de l’Intérieur et de la vice-présidence de la République, chargées de proposer des mesures de sécurité à plus de 6 000 personnes en Colombie, dont 1 500 dirigeants syndicaux, avec un investissement annuel de presque 40 millions de dollars. L’entreprise rencontre périodiquement les dirigeants du SINALTRAINAL pour évaluer les problèmes de sécurité rencontrés par ses dirigeants et ses adhérents et fournir des aides directes comme des téléphones mobiles, des congés rémunérés, des transports, des aides au logement, la flexibilité des horaires de travail, qui s’ajoutent à toutes les aides du gouvernement. Lorsqu’il y a eu des menaces contre les travailleurs ou leurs organisations, l’entreprise a souhaité que les autorités soient mises au courant, et a demandé une enquête sur les faits et l’adoption des mesures de protection nécessaires.
- 513. Quant au plan de restructuration, l’entreprise indique qu’elle a dû recourir à un plan de restructuration pour rationaliser sa production, qui était surdimensionnée par rapport aux besoins du marché de l’époque, et dont les coûts étaient trop élevés, entraînant une perte de compétitivité, ce qui mettait en péril la stabilité de l’entreprise à l’avenir. Quelques collaborateurs venus d’usines dont la production avait été consolidée ont été invités, qu’ils soient syndiqués ou non, afin d’évaluer un programme de départ volontaire à la retraite. Ce programme prévoyait des incitations économiques plus intéressantes que celles qui sont fixées par la loi et la convention collective, et offrait des avantages supplémentaires. Une entreprise spécialisée experte en orientation de carrière et en reconversion a été engagée pour proposer cette offre, afin de donner des conseils aux personnes qui souhaitaient profiter du programme de départ volontaire à la retraite.
- 514. Deux cent vingt collaborateurs ont utilisé le programme de départ volontaire à la retraite, venant de toutes les zones de production du pays, syndiqués ou non, et ont bénéficié d’accords financiers dépassant de 250 pour cent en moyenne les conditions fixées par la loi. Sur la totalité des personnes parties volontairement de l’entreprise, moins d’un tiers étaient membres du SINALTRAINAL. Etant donné que certains collaborateurs n’ont pas demandé à bénéficier du programme de départ volontaire, et qu’il n’y avait pas de postes vacants correspondant à leur profil, l’entreprise a demandé au ministère de la Protection sociale l’autorisation de procéder au licenciement collectif de ces travailleurs. Le ministère a accepté le licenciement de 88 travailleurs de toutes les unités de production du pays (la copie de l’autorisation est jointe). Une fois la procédure administrative conclue, l’entreprise a entamé la procédure judiciaire de licenciement pour mettre en œuvre cette décision. Le dialogue a été maintenu avec les syndicats durant toute la procédure. Concernant le SINALTRAINAL, après des mois de discussion, l’entreprise et ce syndicat sont parvenus à un accord impliquant l’interruption des actions judiciaires engagées tant par l’entreprise que par le syndicat, le transfert de certains travailleurs et le départ d’un commun accord pour d’autres, qui a fait l’objet d’une conciliation devant le ministère (la copie de cette conciliation est jointe). A la suite de cet accord, le syndicat s’est engagé à ne pas engager d’actions juridiques en lien avec le processus de restructuration de la production et l’autorisation de licenciement collectif du ministère de la Protection sociale. Parallèlement, dans le cadre de cet accord, l’entreprise s’engageait à transférer 24 travailleurs.
- 515. Le gouvernement souligne que la fin des contrats des travailleurs s’est faite pour des motifs sans aucun lien avec l’appartenance à un syndicat, et qu’avant d’entamer ce processus de licenciement collectif l’entreprise a pris en compte l’organisation syndicale.
- 516. S’agissant des plaintes pour insultes, l’entreprise signale que les personnes ayant fait l’objet de la plainte avaient distribué des tracts attribuant à l’entreprise des actes délictueux. De même, sur le panneau d’affichage du syndicat, il y avait une affiche contenant des informations calomnieuses. C’est pour cette raison que, le 27 janvier 2004, l’entreprise a déposé une plainte afin qu’une enquête soit menée. A la suite de cette plainte, l’enquête a été menée et a permis d’établir un lien avec les personnes accusées. A la suite d’un accord avec le SINALTRAINAL, l’entreprise a renoncé aux actions devant le tribunal pénal et le tribunal civil qu’elle avait engagées.
- 517. Dans un autre cas de plainte pour insultes et calomnies, l’entreprise indique qu’elle a déposé une plainte auprès du procureur contre certains membres du SINALTRAINAL, afin qu’une enquête soit menée pour savoir si ces personnes avaient commis le délit d’insulte et de calomnie en raison d’une plainte déposée auprès du tribunal fédéral de l’Etat de Floride, aux Etats-Unis, ainsi que d’autres déclarations publiques et devant la presse de dirigeants du syndicat, indiquant que l’entreprise avait des liens avec des groupes en marge de la loi, entre autres comportements illégaux qui lui étaient attribués. Initialement, le chef d’accusation du procureur portait sur des délits d’insulte et de calomnie, mais la décision relative au recours interjeté par le syndicat en janvier 2004 a annulé cette décision, précluant l’enquête.
- 518. L’entreprise avoue également avoir engagé une action devant le tribunal pénal pour les accusations proférées par des membres du SINALTRAINAL lors d’un meeting devant les bureaux de l’administration centrale de l’entreprise à Bogotá, le 5 décembre 2002. A ce jour, la procédure est sur le bureau du procureur de première instance qui doit décider de son ouverture formelle. Le gouvernement explique que, pour une entreprise qui fournit plus de 8 000 emplois directs en Colombie et est présente dans le pays depuis plus de quatre-vingts ans, il est compréhensible et logique qu’il se produise régulièrement des situations où l’entreprise est en désaccord avec les actions ou les comportements de ses travailleurs – syndiqués ou non, membres du SINALTRAINAL ou pas – tout comme il est évident qu’en quatre-vingts ans les travailleurs ont eu l’occasion de ne pas être d’accord avec les décisions de l’entreprise. L’important est que ces désaccords soient résolus dans le respect de la légalité. Si, lors d’une protestation, le syndicat utilise des slogans comme «Coca-Cola assassin», «CocaCola viole les droits de l’homme», «Coca-Cola parraine les groupes paramilitaires illégaux» et «Coca-Cola assassine les ouvriers», il est compréhensible que l’entreprise entame une action en justice pour insulte et calomnie. Les droits ont des limites, et la bonne réputation des personnes et des sociétés est un droit. Dans ce genre d’affaire, le minimum que doit faire une entreprise est de défendre sa réputation, qui repose sur les efforts quotidiens de ses travailleurs. Bien évidemment, elle doit le faire en recourant à des voies légales et dans le respect des décisions des autorités. Nul ne peut prétendre que les recours juridiques, quelle que soit leur nature, engagés par l’entreprise pour défendre ses droits à l’encontre d’un syndicat, en l’espèce le SINALTRAINAL, sont des actions de «répression antisyndicale».
- 519. Le gouvernement indique qu’en juillet 2008 a eu lieu une mission d’évaluation des conditions de travail et des relations de travail dans cinq usines d’embouteillage de CocaCola en Colombie. Cette mission a été menée après consultation des autorités du pays, et des organisations nationales d’employeurs et de travailleurs intéressées, lesquelles ont donné leur accord à cette mission.
- 520. Six hauts fonctionnaires du BIT ont donc effectué une visite impromptue et élaboré un questionnaire auquel les parties ont répondu avec preuves à l’appui. A chacune des visites, la mission a tenu des réunions conjointes avec l’entreprise et les syndicats, effectué une visite des installations et des entrevues privées avec les représentants des syndicats.
- 521. Le résultat de cette mission d’évaluation directe de l’OIT figure dans un rapport reprenant non seulement les faits relatifs à la plainte à l’origine du présent cas, mais aussi une évaluation précise et approfondie de sujets comme le respect des obligations du travail, la liberté d’association et de négociation collective dans les différentes usines d’embouteillage de Coca-Cola en Colombie. C’est la raison pour laquelle le gouvernement fera référence, pour certains éléments des présentes observations, sans se substituer toutefois aux fonctions propres des organes de contrôle réguliers ou spéciaux de l’OIT, à ce document qui représente le fruit d’un exercice sérieux de vérification directe par des hauts fonctionnaires, qui ont donné d’importantes garanties aux parties afin d’évaluer les sujets qui nous préoccupent.
- 522. S’agissant des relations entre le SINALTRAINAL et les usines d’embouteillage de CocaCola en Colombie, le gouvernement a pu constater que le SINALTRAINAL compte 247 membres parmi les 587 travailleurs syndiqués de Coca-Cola Femsa en Colombie. Trois conventions collectives ont été signées et enregistrées, qui font l’objet d’une révision tous les deux ans par accord direct entre les parties, et le SINALTRAINAL n’a aucune demande en instance devant les autorités d’inspection et de surveillance pour non-respect de la loi ou des conventions collectives, selon les informations présentées par les directions territoriales du nord de Santander, Magdalena, Meta, Santander et Valle.
- 523. D’après le rapport de l’OIT:
- Tout semble indiquer que, de façon générale, les conditions de travail inscrites dans les instruments en vigueur dans l’entreprise (les conventions collectives ou les pactes collectifs), sont dûment respectées aux travailleurs qui ont une relation de travail directe avec l’entreprise.
- La complexité des relations de travail dans les usines d’embouteillage de Coca-Cola en Colombie reflète, dans une large mesure, la complexité des relations de travail au niveau national. Il existe, d’une part, un grand nombre de syndicats; et, d’autre part, certains syndicats nationaux ou régionaux jouent un rôle qui va parfois au-delà de la défense des intérêts concrets de leurs membres dans les usines en participant activement à des actions sociopolitiques sectorielles ou nationales.
- Le gouvernement national est conscient du fait que les relations de travail sont en amélioration constante, et invite donc l’entreprise et le syndicat à participer aux programmes de dialogue social qui sont proposés en coopération avec l’OIT et le gouvernement suédois.
- 524. S’agissant des allégations relatives à l’usine d’embouteillage de Carepa, qui appartient à Bebidas y Alimentos de Urabá S.A., le gouvernement envoie les informations présentées par l’entreprise, qui indique qu’il est de notoriété publique qu’au milieu et à la fin des années quatre-vingt-dix, la région d’Urabá a été tout particulièrement le théâtre de violences. En effet, durant toutes ces années, l’ensemble de la zone de production bananière comprenant les municipalités de Turbo, Apartado, Carepa, Chigorodó, Mutatan et Necocli a souffert de ces événements violents, qui ont eu des répercussions directes sur l’entreprise Bebidas y Alimentos de Urabá S.A. Il convient de souligner qu’avant cet épisode de violence la région était dominée par des groupes armés illégaux de gauche, si bien qu’au milieu et à la fin des années quatre-vingt-dix des groupes armés illégaux de droite ont tenté de s’emparer de la riche région d’Urabá.
- 525. Bebidas y Alimentos de Urabá S.A. n’a aucunement participé à ce combat, directement ou indirectement, ni tacitement en faveur de l’un ou l’autre groupe, mais l’entreprise a malgré tout beaucoup souffert des conséquences de ce conflit armé, qui se sont traduites par des pertes de vies humaines et l’abandon de la zone par une partie du personnel au service de l’entreprise. Il s’est produit des violences généralisées, mais les plus touchés ont été les éléments de la société civile, parmi lesquels figuraient à l’époque le syndicat SINALTRAINAL, son siège administratif ainsi que plusieurs de ses membres qui travaillaient dans l’entreprise, indépendamment de leur affiliation syndicale. L’entreprise, une fois que les faits ont été connus, a déposé les plaintes respectives auprès des autorités compétentes pour obtenir la protection nécessaire et garantir non seulement au syndicat, mais à l’ensemble des travailleurs, la vie, le droit au travail et la liberté d’association, entre autres choses. En dépit de toutes ces plaintes, de l’impartialité de l’entreprise, et devant l’ampleur du conflit, certains ont choisi de se désolidariser et de créer un rideau de fumée pour tenter d’attribuer à l’entreprise la responsabilité directe des faits, étant donné son renom et sa visibilité dans la région, et qu’elle distribuait la marque Coca-Cola dans la région bananière.
- 526. L’enquête, menée par l’unité des droits de l’homme du Procureur général de la Nation, et dont le numéro est 164 UDH (dont la copie est jointe), au sujet des événements d’octobre, novembre et décembre 1996 qui ont vu l’assassinat d’un travailleur de l’entreprise (Isidro Segundo Gil Gil), parmi les divers crimes commis, a permis d’innocenter totalement le gérant de l’entreprise et d’exonérer l’entreprise Bebidas y Alimentos de Urabá S.A. de toute responsabilité dans un arrêt du 11 avril 2001.
- 527. L’innocence susmentionnée n’a pas seulement été déclarée par l’unité des droits de l’homme du Procureur général de la Nation, mais aussi par le syndicat SINALTRAINAL lui-même, dans un communiqué du 30 septembre 1996, dans lequel son vice-président et son secrétaire à l’éducation demandaient au conseil d’administration national d’annuler le communiqué qui avait été adopté contre l’entreprise Bebidas y Alimentos de Urabá S.A.
- 528. La dixième chambre du tribunal pénal de la circonscription, dans un arrêt du 22 avril 1997, a également refusé la tutelle demandée par les travailleurs de l’entreprise Bebidas y Alimentos de Urabá S.A. pour divers motifs parmi lesquels figuraient des actes de violence. Les autorités judiciaires ont estimé que l’entreprise n’avait pas violé les droits des travailleurs; au contraire, elle avait porté plainte auprès des autorités et réclamé des mesures de sécurité pour les travailleurs.
- 529. Le gouvernement ajoute qu’il a transmis une copie de la présente affaire à la Coordinatrice du groupe des droits de l’homme du ministère de la Protection sociale, lui demandant de faire des recherches à ce sujet.
- 530. Quant aux allégations relatives au non-respect de la convention collective de la part d’Embotelladora de Santander S.A., l’entreprise indique que le syndicat a engagé à diverses reprises des actions juridiques à l’encontre de l’entreprise à Cúcuta et Bucaramanga, pour infraction présumée aux différentes règles de la convention. Un certain nombre de décisions ont été rendues en faveur de l’entreprise, avec deux arrêts sommant l’entreprise de respecter la procédure de publication des postes vacants en les affichant sur le panneau d’affichage, et les conditions requises pour pouvoir occuper les postes appartenant à la grille conventionnelle. L’entreprise a respecté les décisions des autorités.
- 531. Le gouvernement souligne que les fonctionnaires du ministère de la Protection sociale accomplissent correctement leur mission de surveillance et de contrôle des normes du travail, conformément aux droits d’association et à la liberté syndicale.
- 532. Concernant l’absence de versement des cotisations syndicales, l’entreprise signale qu’en 1995 le SINALTRAINAL a porté plainte contre l’entreprise à Santander, alléguant qu’elle ne leur avait pas versé les cotisations syndicales. En première instance, le tribunal a statué que l’entreprise devait reconnaître et verser au syndicat les cotisations qui auraient dû être prélevées sur les salaires des travailleurs non syndiqués bénéficiaires de la convention collective. En deuxième instance, la décision a été modifiée en exonérant partiellement l’entreprise du paiement de certaines cotisations, et en déclarant que les cotisations auxquelles l’arrêt faisait référence se limitaient au personnel qui remplissait les fonctions décrites dans l’article (de la convention) entre le 25 janvier 1993 et le 29 juin 1995. C’est ainsi que l’entreprise a dû reconnaître qu’elle devait au SINALTRAINAL une somme équivalant aux cotisations qui devaient être prélevées aux travailleurs conformément à l’article 93 de la convention collective, entre le 25 janvier 1993 et le 29 juin 1995, somme qui a dûment été payée au syndicat. Un recours en cassation a été proposé, puis abandonné le 25 janvier 2006. L’entreprise indique qu’au cours des réunions avec l’avocat du syndicat ce dernier a pu examiner et recevoir les preuves du versement au profit du SINALTRAINAL d’une somme équivalant aux cotisations des travailleurs en lien avec l’article 93 de la convention collective, entre le 25 janvier 1993 et le 29 juin 1995, et l’affaire est close.
- 533. Concernant la modification des statuts du SINALTRAINAL, le gouvernement indique dans sa communication du 9 février 2009 qu’aucune action judiciaire n’a été engagée par le SINALTRAINAL pour obtenir l’annulation de la décision no 000984 du 25 mars 2008, annulant l’enregistrement de la réforme des statuts.
- 534. Par ailleurs, le ministère de la Protection sociale a modifié ses critères et procédures relatives au registre syndical en exécution des décisions nos C-695 de 2008, C-465 de 2008 et C-732 de 2008 de la Cour constitutionnelle, dans lesquelles le tribunal suprême conclut que toute controverse relative à l’enregistrement des syndicats, des conseils d’administration ou des statuts d’une organisation syndicale doit faire l’objet d’une décision de la justice ordinaire. La décision no C-695 précise à ce sujet:
- Cette modification permet de conclure que le ministère de la Protection sociale ne peut plus refuser l’enregistrement des modifications des statuts des organisations syndicales qui sont déposées devant lui. L’obligation du syndicat se limite au «dépôt» de la modification des statuts devant le ministère – ce qui implique également le dépôt des preuves selon lesquelles la modification a été adoptée de façon légale –, le ministère ne peut se mettre à juger si ces amendements sont compatibles avec la Constitution ou la loi. Ainsi, si le ministère estime que les modifications introduites sont anticonstitutionnelles ou illégales, il devra avoir recours aux tribunaux du travail pour que ceux-ci statuent sur cette anticonstitutionnalité ou illégalité.
- Le dépôt répond à une fonction de publicité, compatible avec l’autonomie du syndicat. […] le dépôt de la modification des statuts du syndicat répond à la fonction de rendre publique cette modification des statuts, sans pour autant autoriser le ministère de la Protection sociale à effectuer un contrôle préalable sur le contenu de cette réforme des statuts.
- En outre, le Procureur général de la Nation a rédigé les instructions reprenant ces décisions conformément à la réglementation en vigueur, et conclut que:
- Les réformes des statuts des syndicats et les modifications du conseil d’administration des syndicats doivent être retranscrites dans le registre respectif telles qu’elles ont été présentées par les intéressés. Si le ministère ou l’employeur émettent des objections à ces réformes ou modifications, ils doivent recourir au tribunal du travail pour remettre en cause l’élection ou la modification.
- 535. Le gouvernement indique que, depuis le mois d’octobre 2008, le ministère de la Protection sociale accomplit sa simple mission d’enregistrement, qui s’effectue de manière automatique et ne peut faire l’objet de recours. Le ministère a donné des instructions à tous les fonctionnaires chargés de l’inspection et du contrôle afin qu’ils respectent strictement les nouveaux critères et les nouvelles procédures en matière de registre syndical.
- 536. Dans ce sens, et conformément aux informations présentées par l’Inspection de Facatativá, les statuts du SINALTRAINAL ont été dûment enregistrés sous le numéro 0003 le 22 octobre 2008. Le gouvernement a joint une copie de cette information.
- 537. S’agissant de la requête en dissolution, liquidation et annulation de l’enregistrement de la section de Santa Marta du syndicat, le gouvernement indique que, d’après l’entreprise, la législation colombienne prévoit que les syndicats et leurs sections doivent comprendre au minimum 25 membres, et qu’un nombre inférieur d’adhérents est cause de liquidation. En janvier 2002, l’entreprise a entamé un recours demandant la dissolution de la sous-direction de Santa Marta, étant donné que d’après les informations de l’entreprise cette sous-direction ne comptait que dix employés. La plainte de l’entreprise a été déboutée car le syndicat a démontré qu’en plus de ces dix personnes d’autres travailleurs indépendants étaient membres du syndicat. Bien que la loi colombienne précise que seuls les travailleurs dépendants peuvent devenir membres des syndicats de l’industrie, au moment de la procédure, le ministère du Travail avait accepté une modification des statuts du SINALTRAINAL accordant aux travailleurs indépendants la possibilité d’adhérer, modification qui fut par la suite déclarée illégale. L’entreprise indique qu’actuellement la section syndicale fonctionne normalement et est en dialogue permanent avec l’entreprise, bénéficie d’aides et d’avantages au titre de la convention négociée avec l’entreprise.
- 538. S’agissant des faits relatifs à l’annulation de l’enregistrement du conseil d’administration de la section de Girardot par le ministère de la Protection sociale, l’entreprise INDEGA déclare qu’en février 2004 les travailleurs du SINALTRAINAL de la ville de Girardot se sont réunis en assemblée générale pour constituer le conseil d’administration de la section du syndicat de cette ville, qui comprend en majorité des travailleurs indépendants – parmi lesquels des vendeurs ambulants ou des commerçants. Puisqu’il s’agit d’un syndicat de l’industrie, la législation exige que les membres de l’organisation soient des travailleurs dépendants, c’est-à-dire employés par une entreprise. Comme cette condition n’était pas remplie, l’entreprise a fait appel de la décision du ministère d’enregistrer la section et, le 25 août 2004, le supérieur hiérarchique du ministère chargé du contrôle de l’inscription a confirmé que les conditions légales n’étaient pas remplies, et a refusé l’enregistrement du conseil d’administration de la section de Girardot du SINALTRAINAL. Le ministère déclare à ce sujet: «ainsi, il est évident que pour appartenir à un syndicat d’entreprise ou à un syndicat d’industrie [comme c’est le cas du SINALTRAINAL] … il faut, et c’est une condition sine qua non, être un travailleur de cette entreprise dans le premier cas, ou un travailleur de l’une des entreprises de cette industrie ou de ce secteur d’activité, condition qui, dans le cas qui nous préoccupe, n’est à l’évidence pas remplie étant donné que 40 vendeurs saisonniers font partie des adhérents du SINALTRAINAL, alors qu’ils ne peuvent pas appartenir à un syndicat de l’industrie alimentaire en Colombie; ceci ne signifie aucunement qu’ils ne peuvent pas adhérer à un syndicat, car la loi a prévu pour eux les organisations syndicales des métiers et professions diverses, mais ils n’ont pas qualité pour devenir membres d’un syndicat d’industrie» (décision no 3196 du 25 août 2004, ministère de la Protection sociale).
- 539. Le gouvernement estime que la décision du ministère est conforme à la législation nationale, et prend en compte les règles qui prévoient le classement des organisations syndicales et, dans le cas présent, celles qui s’appliquent aux syndicats d’industrie.
- 540. L’entreprise ajoute qu’en novembre 2004 les membres du SINALTRAINAL de Girardot ont réessayé de faire enregistrer un conseil d’administration de la section, sans respecter les dispositions législatives relatives à sa composition: cette dernière comprenait encore des membres indépendants, contrairement à la législation qui prévoit que les membres des syndicats d’industrie doivent être des employés – et non pas des indépendants – d’une entreprise dont l’objet social correspond à l’industrie mentionnée. Face à ce qui précède, l’entreprise a déposé les recours pertinents pour demander que le conseil d’administration non conforme à la réglementation du travail ne soit pas enregistré, et a obtenu la décision du ministère de la Protection sociale du 30 novembre 2004 refusant l’enregistrement de la section. Cette décision a fait l’objet d’un recours du SINALTRAINAL, et le ministère a confirmé sa décision précédente. En dépit de ce qui précède, il est important de souligner que le fait qu’il n’existe pas de section du SINALTRAINAL à Girardot n’implique pas qu’il n’y a pas d’adhérents à ce syndicat dans cette ville. Au contraire, il y a actuellement 11 adhérents à ce syndicat dans cette ville, et l’entreprise n’a exercé aucune pression contre ces personnes.
- 541. Concernant le conseil d’administration de la section de Villavicencio, INDEGA indique qu’à deux reprises les quatre travailleurs de l’entreprise adhérents du SINALTRAINAL de la ville de Villavicencio ont tenté d’enregistrer un conseil d’administration pour la section, alors qu’ils n’avaient pas le nombre minimum d’adhérents requis par la loi, qui est de 25 travailleurs d’une même ville, employés dans n’importe quelle entreprise de l’industrie alimentaire. L’entreprise est intervenue dans ces procédures pour faire respecter le cadre réglementaire. Dans les deux cas, le ministère n’a pas enregistré la sous-direction après avoir vérifié que la section ne comptait pas le nombre minimum légal d’adhérents pour sa constitution. En juillet 2005, le SINALTRAINAL a présenté une nouvelle demande d’enregistrement d’un conseil d’administration, qui a été acceptée par le ministère, car cette fois-là les conditions légales étaient respectées. Cette décision a été respectée par l’entreprise. Toutefois, début 2007, l’entreprise Almacenes YEP S.A. – qui n’a aucun lien avec INDEGA – a demandé l’annulation des décisions d’enregistrer la section de Villavicencio du SINALTRAINAL, au motif que cette dernière ne comptait pas le nombre minimum de 25 adhérents exigé par la loi pour être en mesure de créer une section dans une ville. Après avoir vérifié la liste des adhérents et vérifié les preuves apportées par YEP S.A., le ministère de la Protection sociale a accepté cette demande d’annulation.
- 542. Quant au refus d’enregistrer le conseil d’administration de la section de Bogotá, l’entreprise déclare qu’en mars 2005 les adhérents du SINALTRAINAL de Bogotá ont demandé l’enregistrement d’un conseil d’administration pour la section. Afin de traiter le dossier, le ministère a formulé des objections et demandé des informations et des documents apportant les preuves du respect des conditions minimales prévues par la loi. Le syndicat n’a pas fourni les documents demandés, ce qui a entraîné la décision no 1700 du 20 juin 2005, dans laquelle le ministère refusait l’enregistrement sollicité.
- 543. Concernant l’annulation partielle du conseil d’administration de la section de Bucaramanga, l’entreprise indique qu’elle n’a émis aucune objection au sujet de l’enregistrement de la section de Bucaramanga du SINALTRAINAL, bien au contraire, elle en reconnaît les dirigeants et entretient le dialogue avec le syndicat, accordant des congés, des billets d’avion et les aides financières prévues dans la convention collective signée avec le SINALTRAINAL.
- 544. S’agissant de l’enregistrement du conseil d’administration de la section de Cali, l’entreprise déclare que la section de Cali du SINALTRAINAL est active de façon continue depuis sa constitution. L’entreprise a reconnu les effets juridiques de sa constitution, et a respecté les privilèges syndicaux de ses dirigeants, en signant des accords collectifs avec ses délégués et en soutenant économiquement la gestion du syndicat par le biais d’un soutien économique mensuel et les congés syndicaux rémunérés inscrits dans la convention collective. En avril 2006, le SINALTRAINAL a modifié le conseil d’administration de la section de Cali et a déposé la demande d’enregistrement prévue par la loi. Le ministère a notifié cette demande à l’entreprise, qui a demandé à vérifier si le nombre minimum d’adhérents inscrits dans la loi était bien respecté, en tenant compte que le SINALTRAINAL compte 12 adhérents employés dans l’entreprise de la ville de Cali. Le ministère a décidé d’enregistrer la modification notifiée par le SINALTRAINAL, décision respectée par l’entreprise.
- 545. Quant aux faits relatifs à l’entreprise Eficacia S.A., le gouvernement indique qu’il s’agit d’une entreprise de services aux tiers dans tous les domaines nécessaires au développement normal des activités de l’industrie, l’industrie agroalimentaire, les banques, le nettoyage, la commercialisation et la vente, la publicité et le commerce en général.
- 546. Ces contrats commerciaux sont mis en œuvre par du personnel lié par contrat de travail à l’entreprise prestataire de services, ce qui permet de comprendre que ce personnel prête ses services à une entreprise de la même industrie ou d’une autre branche d’activités en fonction des clients de l’entreprise, comme c’est le cas pour la Embotelladora de Santander S.A. dans la présente plainte; mais comme l’activité d’Eficacia S.A. n’est ni de cultiver ni de récolter, fabriquer, déshydrater, pulvériser, conditionner, préparer, acheter, vendre, distribuer, importer, exporter des produits alimentaires ou des produits devant être mélangés à des produits alimentaires, il n’existe aucune base juridique permettant d’affirmer que les travailleurs d’Eficacia S.A. réunissent les conditions permettant d’adhérer au SINALTRAINAL.
- 547. Le gouvernement indique qu’au dire du gérant général d’Eficacia S.A., «Eficacia S.A. comptant parmi ses clients des entreprises comme Colgate, Procter & Gamble, Johnson & Johnson, Pfizer, Beiersdorf (BDF), Bayer, Schering, Avon, Prebel, Belleza Express, Exito, Carulla, Olímpica, Colsubsidio, Comfandi, il convient de se demander comment les travailleurs liés à ces services pourraient adhérer à un syndicat de l’industrie alimentaire».
- 548. Le gouvernement ajoute que l’article 2 des statuts du syndicat prévoit que «le Syndicat national des travailleurs de l’industrie alimentaire (SINALTRAINAL) est constitué des travailleurs ayant un lien avec des entreprises ou des établissements dont l’objectif est de cultiver, récolter, fabriquer, déshydrater, pulvériser, conditionner, préparer, acheter, vendre, distribuer, importer, exporter des produits alimentaires ou devant être mélangés à des produits alimentaires». Les travailleurs d’Eficacia S.A. ne remplissent donc ni les conditions requises par la législation nationale ni celles qui figurent dans les statuts du SINALTRAINAL pour devenir adhérents de ce syndicat.
- 549. Il en découle que, si un syndicat accepte des adhésions au-delà de ce que prévoient ses statuts, il s’agit d’une adhésion illégitime et irrégulière dont les conséquences juridiques sont multiples, parmi lesquelles l’incapacité à présenter valablement des cahiers de revendications, ou à négocier des conventions collectives en son nom, car le fait générateur du droit serait frauduleux, ce qui explique pourquoi l’entreprise Eficacia S.A. ne serait pas obligée à négocier le cahier de revendications présenté par le SINALTRAINAL.
- 550. Par ailleurs, le gouvernement indique que la direction territoriale de Santander a entrepris une enquête administrative contre l’entreprise Eficacia S.A., pour violation des droits d’association, refus de négocier un cahier de revendications, et a adopté la décision no 0802 du 28 juin 2007, acquittant Eficacia S.A. et laissant aux parties la liberté de recourir au tribunal, les juges étant seuls compétents pour statuer sur ce litige.
- 551. Si le syndicat estime qu’il y a eu infraction au droit de négociation collective, il existe différentes instances administratives pour faire appel de cette décision, instances que le syndicat a choisi de ne pas saisir. En tout cas, le SINALTRAINAL peut saisir le tribunal du travail pour qu’une nouvelle enquête soit menée. D’après l’entreprise, aucune action juridique dans ce sens ne lui a été notifiée.
- 552. Le gouvernement ajoute que le ministère de la Protection sociale sera attentif à toutes les situations de ce genre et exercera un contrôle permanent sur ces entreprises afin de faire respecter la loi en matière d’obligation de prélever et de reverser les cotisations syndicales des travailleurs affiliés, et de négocier les cahiers de revendications présentés par leurs travailleurs.
- 553. Voici ce qu’indique le rapport de la mission de l’OIT sur ces entreprises et les travailleurs qui y travaillent:
- Il existe dans toutes les entreprises visitées des conventions et des pactes collectifs, à l’exception de celles de Barranquilla et de Carepa-Urabá, pour lesquelles il n’existe que des conventions collectives.
- Tout indique que, de façon générale, les conditions de travail applicables aux travailleurs directs sont dûment respectées, dans la mesure où elles sont fixées par des instruments juridiques, des conventions collectives ou des pactes de travail.
- Concernant la gestion de la liste des employés percevant l’intégralité de leur salaire à la périodicité prévue par la loi, la convention collective ou le pacte; les modalités du versement des salaires avec des garanties pour les travailleurs de pouvoir en disposer pleinement; le respect de la durée du travail – huit heures par jour et 48 heures par semaine – et des repos, aucune observation ni plainte n’ont été déposées, qui permettraient de déduire qu’il existe des problèmes.
- 554. Pour le gouvernement, la situation de l’appartenance syndicale vérifiée par la mission de l’OIT et décrite dans son rapport est très significative et donne une bonne indication de la liberté syndicale dont bénéficient les travailleurs de ces usines d’embouteillage en Colombie. Le rapport souligne que les contrôleurs ont pu observer que l’entreprise tolérait les manifestations des travailleurs syndiqués (les travailleurs portaient des t-shirts qui faisaient allusion à leurs revendications).
- 555. Le rapport reprend des témoignages qui révèlent un profond désaccord entre les usines d’embouteillage et les syndicats, mais il est certain que ces employeurs respectent les droits fondamentaux du travail: le droit d’association, le droit à la négociation collective, l’absence d’embauche de mineurs, l’absence de discrimination, des journées de travail de huit heures. Le rapport reconnaît que les avantages inscrits dans les conventions collectives qui sont régulièrement négociées dépassent les avantages légaux et il signale que la mission n’a reçu aucune plainte pour non-respect des clauses des conventions collectives.
- 556. Quant aux allégations relatives au fait que le personnel syndiqué n’a pas été réembauché par le nouveau prestataire de services (PROSERVIS) qui fournit des services spécialisés à Embotelladora de Santander S.A., le gouvernement renvoie au contrôle effectué par la mission de façon directe et cite le rapport:
- Il semblerait qu’aucune action de l’entreprise ne dénote de formes de discrimination dans les procédures préalables à l’embauche.
- En ce qui concerne les travailleurs directs, l’ancienneté moyenne est relativement élevée, et c’est particulièrement vrai pour les représentants de l’entreprise et les dirigeants syndicaux. Ce qui signifie que l’indice de rotation (le rapport entre les embauches et les départs à la retraite) des travailleurs est faible en dépit de l’introduction d’innovations technologiques dans les processus de production.
- D’après les informations fournies par l’entreprise, dans l’usine de Barranquilla, l’ancienneté moyenne est de 11,9 ans. Dans celle de Bogotá-Nord, sur un total de 494 travailleurs directs reconnus, 359 ont plus de huit ans d’ancienneté, et la moyenne est de 15,02 ans. Dans l’usine de Cali, 122 des 193 travailleurs directs déclarés ont une ancienneté de plus de huit ans, et la moyenne est de 13,94 ans. A l’usine de Medellín, 188 des 274 travailleurs directs déclarés ont une ancienneté supérieure à huit ans, et la moyenne est de quinze ans. A l’usine de Bogotá-Sud, 34 des 83 travailleurs directs ont une ancienneté qui oscille entre dix et quinze ans, il y en a même 11 qui ont plus de trente ans d’ancienneté. A Carepa-Urabá enfin, 33 pour cent des travailleurs ont plus de huit ans d’ancienneté, et 25 pour cent ont une ancienneté qui varie entre cinq et huit ans.
- 557. Concernant la suspension du contrat de travail de M. Andrés Olivar, l’entreprise explique que, le 28 février 2007, le SINALTRAINAL a déposé une demande d’autorisation pour que M. Andrés Olivar, travailleur de l’entreprise et membre du syndicat, assiste à une activité syndicale. M. Olivar remplit les fonctions de liquidateur, et à ce moment-là s’est produite une panne dans la plate-forme du système, faisant perdre plus de trois jours d’informations. En tant que liquidateur, la présence de M. Olivar était indispensable, si bien que l’entreprise a informé oralement et par écrit le syndicat et le travailleur qu’il lui était impossible d’accorder ce congé, en expliquant la situation et les raisons objectives de ce refus. Malgré tout, M. Olivar, passant outre le refus du congé, ne s’est pas présenté au travail, et pour cette raison l’entreprise – suivant ainsi les directives légales et les conventions – a demandé au travailleur de se justifier et de donner des explications. Après l’avoir entendu, et comme les explications ne justifiaient pas son absence, conformément à la convention collective, au règlement interne et à la législation, le travailleur a été sanctionné pour ces faits.
- 558. Dans le cadre du dialogue normal entre le syndicat et l’entreprise s’est tenue une réunion le 24 mai 2007 entre l’entreprise et le SINALTRAINAL, qui a abouti à un accord sur la levée de la sanction, chacune des parties acceptant clairement que cette décision ne signifiait pas pour autant que M. Olivar n’avait pas commis de faute grave méritant la sanction imposée. Etant donné que l’entreprise est parvenue à un accord avec le syndicat, le gouvernement estime que ce fait ne mérite pas d’être examiné plus avant.
- 559. L’entreprise ajoute que la distribution des produits qu’elle embouteille se fait par le biais de microentreprises indépendantes avec lesquelles l’entreprise établit une relation de nature commerciale. Ce commerce est formalisé par des contrats de concession de revente des produits, au titre duquel chaque concessionnaire achète les produits de l’entreprise pour les revendre ensuite sur le marché. Il s’agit d’une concession exclusive, comportant des obligations réciproques prévues et autorisées dans le contrat. Pour l’exécution de leur commerce (la revente des produits), les concessionnaires utilisent leurs propres moyens en embauchant directement et pour leur propre compte des travailleurs. Ils obtiennent de leur activité commerciale un bénéfice qui résulte de la différence entre le prix d’achat et le prix de revente, une fois couverts les frais propres à leur commerce. En aucun cas l’entreprise ne paie ni ne rémunère les concessionnaires; au contraire, ce sont ces derniers qui paient l’entreprise pour les produits qu’ils lui achètent à un prix préférentiel.
- 560. Au mois de mars, l’entreprise, faisant usage de ses facultés légales et contractuelles, a rompu les liens commerciaux avec certains de ses concessionnaires pour différentes raisons: pour certains, pour non-respect des clauses contractuelles et, pour d’autres, parce qu’ils avaient décidé d’abandonner leurs tournées.
- 561. Concernant les faits en lien avec la manifestation de travailleurs en sous-traitance dans l’unité de distribution de Villavicencio, INDEGA informe que, le 23 avril 2007, certaines des entreprises concessionnaires dont les contrats commerciaux avaient pris fin ont organisé une protestation en bloquant l’accès aux installations de l’unité de distribution de l’entreprise, occupant sans autorisation les lieux publics. Les voisins ont contacté les autorités pour se plaindre des «nuisances visuelles et sonores», ce qui a provoqué l’intervention des autorités pour défendre les lieux publics, et suggérer aux manifestants de recourir aux moyens légaux pour faire aboutir leurs plaintes ou leurs inquiétudes. Le gouvernement estime, à la lumière de ce qui vient d’être décrit, que la force publique a agi dans le cadre de ses compétences pour rétablir l’ordre public, ce qui est conforme aux principes de la liberté syndicale.
- 562. Quant au licenciement de M. Edgar Alfredo Martínez Moyano, INDEGA signale qu’elle a un contrat de services spécialisés avec l’entreprise Ayuda Integral S.A. Conformément à la législation colombienne, les contrats commerciaux de services impliquent l’autonomie technique et administrative de la partie contractante et, notamment, la gestion de son personnel. Tous les contrats souscrits par l’entreprise contiennent une clause exigeant du signataire de respecter la loi et de se soumettre au contrôle et à la surveillance des autorités de l’Etat. D’après les informations présentées par Ayuda Integral S.A., M. Edgar Alfredo Martínez Moyano a été entendu pour s’expliquer sur la non-exécution de ses fonctions et, sur la base des informations recueillies, Ayuda Integral S.A. a mis fin à son contrat de travail pour une juste cause. Au cours de son contrat, Ayuda Integral S.A. n’a jamais été notifiée de son appartenance au SINALTRAINAL. En avril 2006, le SINALTRAINAL a notifié à Ayuda Integral l’adhésion de ses employés Carlos Alberto Guzmán Rojas, Luis Enrique Pacheco Contreras et Luis Eduardo Rubio Morales. Cela a suscité une discussion sur la validité juridique de ces adhésions. Ayuda Integral a avisé le ministère le moment venu de sa position, afin de résoudre cette controverse et valider les obligations qui pourraient découler de cette adhésion. A l’heure actuelle, MM. Guzmán, Pacheco et Rubio continuent à travailler au service d’Ayuda Integral S.A.
- 563. Le gouvernement ajoute que le ministère de la Protection sociale a pu constater qu’à ce jour aucune plainte n’a été déposée devant les différentes directions territoriales pour négligence dans le prélèvement des cotisations syndicales ou refus de négocier un cahier de revendications concernant Ayuda Integral.
C. Conclusions du comité
C. Conclusions du comité- 564. Le comité prend note de la présente plainte présentée par le Syndicat national des travailleurs de l’industrie alimentaire (SINALTRAINAL) des 18 septembre et 26 octobre 2007, et des 25 mars, 1er avril et 4 juin 2008. Le comité prend note des réponses du gouvernement du 6 décembre 2007, des 25 avril, 22 et 27 août 2008, et du 9 février 2009.
- 565. Le comité observe que les allégations de ce présent cas font référence à: a) des assassinats, des actes d’intimidation et des menaces à l’encontre de dirigeants et des membres du SINALTRAINAL pour les dissuader de poursuivre leurs activités syndicales, y compris la stigmatisation des travailleurs en tant qu’éléments subversifs, en les accusant d’être responsables d’insultes et de calomnies; b) les allégations comprennent la violation de la convention collective de la part d’Embotelladora de Santander S.A.; c) le refus de cette entreprise de verser les cotisations syndicales; d) des plans de restructuration de Coca-Cola Femsa aboutissant à la fermeture de centres de production; e) la demande d’annulation de l’enregistrement des statuts du SINALTRAINAL ou des conseils d’administration de différentes sections du syndicat, déposée par plusieurs usines d’embouteillage; f) le refus de reconnaître le droit des travailleurs de l’entreprise Eficacia S.A. et Ayuda Integral S.A. à adhérer au SINALTRAINAL et à négocier collectivement avec ce syndicat; g) des sanctions contre un dirigeant syndical qui a utilisé un congé syndical; et h) le refus aux travailleurs de l’Acueducto Metropolitano de Bucaramanga du droit à s’affilier au SINALTRAINAL.
- 566. S’agissant des allégations relatives aux assassinats et actes d’intimidation à l’encontre des dirigeants et des membres du SINALTRAINAL, le comité prend note du fait que, d’après ces dirigeants, plusieurs des usines d’embouteillage mentionnées ci-dessus ont mis en place une politique antisyndicale depuis 1984; de nombreux dirigeants et membres ont été assassinés ou victimes d’autres actes de violence; les dirigeants sont accusés de terrorisme et, pour cette raison, beaucoup ont été emprisonnés pour être ensuite libérés après avoir fait la démonstration de leur innocence, et ils ont parfois été victimes de menaces et de séquestration de la part de groupes paramilitaires pour qu’ils ne portent pas plainte contre l’entreprise. Le comité prend note du fait que, d’après l’organisation plaignante, les plaintes respectives ont été déposées, mais que les enquêtes n’ont pas donné de résultats concrets. Cette situation a contraint de nombreux travailleurs à abandonner leurs activités syndicales.
- 567. Le comité note également que le gouvernement l’a informé qu’une copie des allégations avait été remise à la Coordinatrice du groupe des droits de l’homme du ministère de la Protection sociale afin qu’elle ouvre les enquêtes nécessaires. Le comité note également la réponse du gouvernement selon laquelle le groupe INDEGA, qui regroupe les différentes raisons sociales d’Industria Nacional de Gaseosas, explique en premier lieu la situation juridique des entreprises mentionnées dans les allégations. C’est ainsi que l’Industria Nacional de Gaseosas (INDEGA, qui auparavant s’appelait Panamco Colombia S.A.) représente en Colombie l’entreprise Coca-Cola Femsa spécialisée dans l’embouteillage de boissons non alcoolisées (y compris les boissons des marques appartenant à The Coca-Cola Company). INDEGA a absorbé en 2008 Embotelladora de Santander S.A. et Embotelladora Román S.A. Embotelladora de Carepa n’appartient pas à INDEGA, mais à Bebidas y Alimentos de Urabá S.A. INDEGA fait part de son engagement à préserver l’intégrité et la sécurité des travailleurs, le groupe a défini un système de procédures de sécurité pour répondre aux propositions du SINALTRAINAL dans ce domaine; INDEGA est aussi en contact permanent avec les directions des droits de l’homme du ministère de l’Intérieur et de la vice-présidence de la République; et l’entreprise rencontre régulièrement le syndicat pour évaluer les problèmes de sécurité des dirigeants et des membres du syndicat et fournir directement des aides qui s’ajoutent à celles du gouvernement.
- 568. A ce propos, le comité, tout en exprimant son appréciation des mesures de protection adoptées par les différentes entreprises du groupe, considère que les allégations, si elles s’avèrent fondées, portent sur des questions d’une extrême gravité et rappelle ainsi que les droits des organisations de travailleurs et d’employeurs ne peuvent s’exercer que dans un climat exempt de violence, de pressions ou menaces de toutes sortes à l’encontre des dirigeants et des membres de ces organisations, et qu’il appartient aux gouvernements de garantir le respect de ce principe. [Voir Recueil de décisions et de principes du Comité de la liberté syndicale, cinquième édition, 2006, paragr. 44.] Nonobstant, le comité observe que la plus grande partie de ces allégations ont déjà fait l’objet d’une plainte, et qu’elle sont examinées dans le cadre du cas no 1787. Dans ces circonstances, le comité poursuivra l’examen de ces allégations dans ce cadre.
- 569. Concernant les allégations relatives à l’usine d’embouteillage de Carepa, selon lesquelles en décembre 1996 des groupes paramilitaires ont pénétré dans l’usine et contraint les membres du SINALTRAINAL à résilier leur affiliation, le comité observe que, d’après le gouvernement, la copie de ces allégations a été transmise à la Coordinatrice du groupe des droits de l’homme du ministère de la Protection sociale afin qu’une enquête soit ouverte. Le comité observe également que l’entreprise signale qu’à l’époque des faits, se sont produits des affrontements violents entre des factions d’extrême gauche et d’extrême droite pour la domination du territoire, mais que l’entreprise n’a en aucune façon participé en soutenant un des deux groupes. Le comité observe que l’entreprise déclare avoir porté plainte devant les autorités pour les actes de violence commis contre ses travailleurs. Le comité note également que l’entreprise ajoute que l’enquête réalisée par l’unité des droits de l’homme du Procureur général de la Nation (dossier no 164) sur les faits datant de 1996, au cours desquels un travailleur a été assassiné, a disculpé l’entreprise de toute responsabilité et qu’il en a été de même dans la décision du juge de la dixième chambre pénale de la circonscription du 22 avril 1997. Le comité prend note de cette information et demande au gouvernement de le tenir informé du résultat de l’enquête menée par la Coordinatrice du groupe des droits de l’homme du ministère de la Protection sociale.
- Plaintes devant les instances pénales
- 570. Concernant les plaintes pour insultes contre les membres du SINALTRAINAL, le comité observe que, d’après INDEGA, les membres de l’organisation syndicale ont distribué des tracts diffusant des informations sur les activités présumées délictueuses de l’entreprise. L’entreprise a engagé des poursuites pénales qu’elle a par la suite annulées. Lors d’une autre enquête pour calomnies à la suite d’une plainte contre l’entreprise Coca-Cola aux Etats-Unis, dans le cadre d’une campagne internationale contre cette entreprise, et qui aurait été menée, au dire de l’entreprise, avec la participation de l’organisation syndicale, le procureur a annulé une décision accusant les membres du syndicat du délit d’insulte et de calomnie. Le comité prend note que cette enquête a été précluse. Quant à une troisième plainte pour des accusations émises par le syndicat lors d’un meeting en face de l’administration de l’entreprise à Bogotá, le comité observe qu’elle est en instance devant le procureur qui doit décider de son ouverture formelle.
- 571. Le comité, soulignant l’importance du dialogue entre le syndicat et l’entreprise pour obtenir des relations de travail harmonieuses, demande au gouvernement de prendre les mesures qui sont en son pouvoir afin d’encourager l’entreprise et le syndicat à améliorer le climat de dialogue au sein des différents établissements et usines d’embouteillage du groupe, afin que chacune des parties puisse, dans un respect mutuel, remplir ses fonctions de façon appropriée, en laissant de côté les hostilités, les menaces, les insultes et toute forme de violence.
- 572. Concernant le plan de restructuration mis en place par Coca-Cola Femsa en 2003, le comité observe que l’organisation plaignante indique que l’entreprise aurait exercé des pressions sur les travailleurs pour qu’ils renoncent à leurs contrats en échange d’une indemnité financière, attitude qui a fait l’objet d’une plainte devant les autorités. Le comité note que le tribunal supérieur du district judiciaire de Medellín a ordonné la réintégration de plusieurs travailleurs licenciés à leurs postes de travail. Le comité note également que, d’après les allégations, le plan de restructuration a entraîné la fermeture de centres de production et d’usines d’embouteillage, avec le licenciement de nombreux travailleurs, et que cette mesure a fait l’objet d’un certain nombre de demandes de tutelle qui ont dans certains cas fait l’objet d’une décision en faveur des travailleurs.
- 573. Le comité observe que le gouvernement signale que, d’après les informations présentées par l’entreprise, la restructuration n’avait rien à voir avec la liberté syndicale; qu’elle a concerné les travailleurs syndiqués tout comme ceux qui ne l’étaient pas, qui ont reçu des indemnités largement supérieures à celles qui sont prévues par la loi. Le comité observe que, durant le plan, le dialogue a été maintenu avec les syndicats, et en particulier avec le SINALTRAINAL, organisation à laquelle appartenaient moins du tiers des travailleurs concernés et avec laquelle, après des mois de négociation, un accord a été conclu aux termes duquel le syndicat s’engageait à ne pas entamer d’actions en justice et l’entreprise à retrouver un poste à 24 travailleurs.
- 574. Le comité observe à ce sujet que, d’après les informations présentées par l’organisation plaignante et par l’entreprise, le plan de restructuration susmentionné a eu des répercussions sur les travailleurs de façon générale, qu’ils soient syndiqués ou non, que le plan a fait l’objet de négociations avec les organisations syndicales, et qu’avec le SINALTRAINAL en particulier un accord a été conclu aux termes duquel 24 travailleurs ont été mutés vers d’autres postes de travail. Le comité rappelle qu’il ne peut se prononcer sur les allégations concernant les programmes et les mesures de restructuration ou de rationalisation économique, que ceux-ci impliquent ou non des réductions de personnel, que dans la mesure où ils ont donné lieu à des actes de discrimination ou d’ingérence antisyndicaux. [Voir Recueil, op. cit., paragr. 1079.] Dans ces conditions, le comité ne poursuivra pas l’examen de ces allégations.
- Violation de la convention collective et paiement des cotisations syndicales
- 575. S’agissant des allégations relatives à l’entreprise Embotelladora de Santander S.A. sur la violation de la convention collective et l’absence de versement des cotisations syndicales, le comité observe que, d’après ces allégations, l’entreprise a été sanctionnée par les autorités judiciaires et que plusieurs fonctionnaires ont reçu des amendes pour n’avoir pas respecté le droit de réunion et d’association. Dans le cas particulier de l’absence de versement des cotisations syndicales, le comité observe que l’organisation plaignante indique que l’entreprise a fait appel de la décision, et que ce recours est en instance.
- 576. A ce sujet, le comité observe que le gouvernement indique que, selon la réponse de l’entreprise, le syndicat aurait engagé des recours contre l’entreprise pour violation de différentes clauses de la convention dans les villes de Cúcuta et de Bucaramanga, qui ont abouti à des décisions favorables à l’entreprise et à deux décisions dans lesquelles il a été enjoint à l’entreprise de respecter la convention en matière de publication sur les panneaux d’affichage des postes vacants existants et du respect des conditions pour obtenir ces postes. Le comité note que, d’après l’entreprise, ces décisions auraient été dûment respectées. Le comité observe également que le gouvernement signale que les fonctionnaires du ministère de la Protection sociale ont respecté leurs obligations en ce qui concerne la surveillance du respect des normes du travail.
- 577. S’agissant de l’absence alléguée de versement des cotisations syndicales, le comité observe que l’entreprise confirme que les autorités judiciaires ont ordonné leur paiement, mais elle signale que les autorités judiciaires ont modifié la décision pour limiter le paiement aux cotisations correspondant à la période allant de janvier 1993 à juin 1995, et que le versement a été effectué, tel qu’il ressort des preuves fournies à l’avocat du syndicat au cours de réunions.
- Enregistrement et droit d’association et de négociation collective
- 578. S’agissant des allégations relatives à la demande déposée par l’usine d’embouteillage de Panamco Colombia S.A. du 8 juillet 2004 auprès du ministère de la Protection sociale pour que ce dernier annule la décision d’enregistrement de la modification des statuts du SINALTRAINAL, le comité observe qu’au dire de l’organisation plaignante la Coordinatrice du groupe de travail, emploi et sécurité sociale a annulé les statuts du syndicat dans la décision no 2994, et que le recours en tutelle déposé devant le Conseil sectoriel de la magistrature et les recours judiciaires engagés ont été rejetés. Le comité note que, le 7 décembre 2007, l’organisation plaignante a décidé lors de l’assemblée générale nationale de ses délégués de réviser ses statuts afin d’autoriser les travailleurs du système agroalimentaire et des industries connexes à adhérer, quelles que soient leur relation de travail et leurs modalités de travail. Le comité observe que l’article 2 des statuts (dont une copie a été jointe) prévoit que le syndicat est «constitué de travailleurs du système agroalimentaire et des industries connexes ayant différents types de relation de travail ou de modalités de travail…». Cette décision a été approuvée par l’inspectrice du travail et de la sécurité sociale dans la décision no 0005 du 14 janvier 2008, qui a été annulée par la décision no 000984 du 25 mars 2008 de la direction territoriale de Cundinamarca, sur la base d’un recours déposé par l’usine d’embouteillage Panamco Colombia S.A.
- 579. Le comité observe également dans ce cadre les allégations de l’organisation plaignante selon lesquelles les usines d’embouteillage Panamco Colombia S.A., Embotelladora Román S.A., la Compañía Nacional de Chocolates S.A. et Supertiendas y Droguerías Olímpica S.A. ont demandé l’annulation de l’enregistrement des sections du syndicat dans plusieurs villes, en raison, au dire des entreprises, du non-respect du nombre minimum d’adhérents car certaines des personnes qui souhaitaient s’affilier étaient des travailleurs indépendants.
- 580. Le comité observe également que, dans d’autres cas, les entreprises ne reconnaissent pas au SINALTRAINAL le droit d’accepter l’affiliation de certains travailleurs qui travaillent dans ces entreprises car elles considèrent qu’il s’agit de travailleurs qui n’appartiennent pas au secteur de l’alimentation, mais au secteur des services, étant donné qu’ils sont fournis par le biais d’entreprises de services comme Eficacia S.A. ou Ayuda Integral S.A. Ces entreprises de services, qui fournissent des employés aux autres entreprises, ne reconnaissent pas non plus au SINALTRAINAL le droit de représenter leurs travailleurs, en considérant que ces derniers appartiennent au secteur des services et non pas au secteur de l’alimentation. Le comité observe qu’au dire de l’organisation plaignante plus de 70 pour cent du personnel de l’usine d’embouteillage de Santander S.A. est recruté sous forme de sous-traitants, et que ce personnel n’est pas couvert par la convention collective en vigueur entre l’entreprise et le SINALTRAINAL, ce qui met ces travailleurs dans une situation d’extrême précarité. Eficacia S.A. refuse pour ces mêmes raisons, d’après les allégations, de procéder au prélèvement des cotisations syndicales en faveur du SINALTRAINAL, et de négocier le cahier de revendications présenté par le syndicat. Le comité note également les allégations selon lesquelles, en février 2007, l’administration de l’usine d’embouteillage de Santander S.A. a mis fin au contrat d’Eficacia S.A., en informant les travailleurs qui travaillaient dans l’usine d’embouteillage qu’ils pourraient obtenir un nouveau contrat par le biais de l’entreprise PROSERVIS, mais que les travailleurs affiliés au SINALTRAINAL n’ont pas été réembauchés.
- 581. Quant à l’enregistrement de la réforme des statuts du SINALTRAINAL, le comité note les observations du gouvernement du 9 février 2009 selon lesquelles le SINALTRAINAL n’aurait engagé aucune action judiciaire à cette date contre la décision no 000984 du 25 mai 2008 annulant l’enregistrement de la réforme des statuts du syndicat. Le comité prend également note des derniers arrêts de la Cour constitutionnelle (C-465 et C-695 de 2008) selon lesquels le ministère de la Protection sociale ne peut pas refuser d’enregistrer les modifications des statuts demandées, et que, s’il estime qu’il existe des irrégularités, il doit saisir les autorités judiciaires qui sont les seules à pouvoir décider de ces questions. Le comité note avec intérêt qu’à la suite de ces arrêts les statuts du SINALTRAINAL ont été déposés en bonne et due forme sous le no 0003 du 22 octobre 2008. Le comité demande au gouvernement de veiller à ce que les statuts des différentes sections qui avaient été rejetés ou annulés à la demande des usines d’embouteillage ou d’autres entreprises du secteur alimentaire soient dûment enregistrés après avoir été déposés.
- 582. Quant au droit d’affiliation au SINALTRAINAL des travailleurs des entreprises de services Eficacia S.A. et Ayuda Integral S.A., qui travaillent dans les usines d’embouteillage, le comité note que, d’après le gouvernement, l’entreprise Eficacia S.A. fournit des services à d’autres entreprises dans tous les domaines nécessaires au développement normal de leurs activités dans les secteurs de l’industrie, l’industrie agroalimentaire, les banques, le nettoyage, la commercialisation et la vente, la publicité et le commerce en général, par le biais d’un contrat commercial grâce à du personnel lié par contrat à Eficacia S.A. Pour cette raison, ces travailleurs ne peuvent pas adhérer à un syndicat d’industrie comme le SINALTRAINAL, car de nombreux travailleurs d’Eficacia S.A. fournissent des services dans des entreprises qui ne font pas partie du secteur de l’alimentation. Le syndicat ne peut pas non plus, pour ces mêmes raisons, présenter de cahier de revendications. Le comité prend note du fait que la direction territoriale de Santander a engagé une enquête administrative du travail contre l’entreprise pour violation des droits syndicaux et pour refus de négocier un cahier de revendications, et a pris la décision no 082 du 28 juin 2007, qui ouvre aux parties la possibilité de recourir à la justice.
- 583. Concernant les allégations selon lesquelles l’usine d’embouteillage de Santander S.A. a mis fin au contrat d’Eficacia S.A. en informant les travailleurs de cette dernière qui travaillaient dans l’usine d’embouteillage qu’ils pourraient être embauchés par l’entreprise PROSERVIS, mais que les travailleurs affiliés au SINALTRAINAL n’ont pas été réembauchés, le comité note que, selon le gouvernement, aucune discrimination n’a pu être établie au moment de l’embauche dans l’entreprise PROSERVIS.
- 584. A ce sujet, le comité estime que les travailleurs qui exécutent leurs tâches dans des entreprises du secteur agroalimentaire devraient bénéficier du droit d’adhérer au SINALTRAINAL, s’ils le souhaitent. En effet, dans le cas présent, même si tous les travailleurs d’Eficacia S.A. ou d’Ayuda Integral S.A. n’ont pas de lien de travail direct avec les usines d’embouteillage, ils pourraient souhaiter, étant donné qu’il exercent leurs activités dans ce secteur, appartenir à une organisation syndicale représentant les intérêts des travailleurs de ce secteur au niveau national [voir 349e rapport du comité, cas no 2556, paragr. 754]. De plus, le syndicat qui représente ces travailleurs devrait bénéficier, en parallèle au droit d’association, du droit de présenter des cahiers de revendications et de négocier collectivement avec les entreprises du secteur au nom de ces travailleurs. Dans ces conditions, le comité demande au gouvernement de prendre de toute urgence les mesures nécessaires pour modifier la législation afin de garantir: le droit d’affiliation au SINALTRAINAL pour les travailleurs d’Eficacia S.A. (ou PROSERVIS) et d’Ayuda Integral S.A. qui travaillent dans les usines d’embouteillage, le prélèvement des cotisations syndicales correspondantes, ainsi que le droit du syndicat à présenter des cahiers de revendications et à négocier collectivement en tant que représentant de ces travailleurs. Le comité demande au gouvernement de le tenir informé à ce sujet.
- 585. Concernant les allégations de refus de l’enregistrement de M. Ernesto Estrada Prada en tant que membre du conseil exécutif du SINALTRAINAL parce qu’il est sous contrat dans l’entreprise de services Empaques Hernández, alors qu’il travaille dans l’entreprise Saceites S.A., et les allégations selon lesquelles le ministère de la Protection sociale refuse aux travailleurs de l’Acueducto Metropolitano de Bucaramanga le droit de s’affilier au SINALTRAINAL, le comité exprime le ferme espoir que, dans le cadre des arrêts de la Cour constitutionnelle mentionnés et en vertu des articles 2 et 3 de la convention no 87, le gouvernement procédera à l’enregistrement du conseil exécutif du SINALTRAINAL et examinera le droit des travailleurs de l’Acueducto Metropolitano de Bucaramanga de s’affilier au SINALTRAINAL.
- Sanctions et licenciements
- 586. Concernant les allégations relatives à la suspension de M. Andrés Olivar, dirigeant du SINALTRAINAL, pour avoir utilisé son congé syndical, le comité prend note de l’information fournie par le gouvernement selon laquelle la sanction a été imposée conformément aux règles de la convention collective, au règlement interne et à la législation nationale en vigueur, mais que le 24 mai 2007 est intervenu un accord entre l’entreprise et le syndicat pour lever la sanction.
- 587. Concernant les allégations selon lesquelles les usines d’embouteillage de Villavicencio et de Bogotá ont licencié 16 distributeurs et un travailleur, ainsi que M. Edgar Alfredo Martínez Moyano, en mars 2007, après qu’ils eurent adhéré au syndicat, le comité note les informations données par le gouvernement, selon lesquelles la distribution des produits embouteillés par l’usine se fait par le biais de microentreprises indépendantes avec lesquelles il est établi une relation de nature commerciale formalisée par un contrat de concession pour la revente des produits. Le concessionnaire achète la marchandise pour la revendre ensuite sur le marché. Le comité note l’information selon laquelle, en mars 2007, l’entreprise a décidé de mettre fin aux liens commerciaux qui l’unissaient à certains de ses concessionnaires pour diverses raisons, dont le non-respect de clauses contractuelles et l’abandon des tournées. Le comité note que le gouvernement ajoute que certains concessionnaires de Villavicencio ont manifesté, en avril 2007, pour protester contre la fin de leurs concessions, ce qui a provoqué une intervention des autorités publiques qui ont conseillé aux manifestants de déposer les recours juridiques pertinents.
- 588. Concernant le licenciement de M. Martínez Moyano, le comité observe que, d’après les informations données par le gouvernement, INDEGA a indiqué qu’il travaillait pour l’entreprise de services Ayuda Integral S.A. qui a mis fin à son contrat pour une juste cause parce qu’il n’avait pas rempli ses fonctions. Le comité demande au gouvernement de diligenter une enquête indépendante à cet égard et de le tenir informé du résultat de celleci.
Recommandation du comité
Recommandation du comité- 589. Au vu des conclusions qui précèdent, le comité invite le Conseil d’administration à approuver les recommandations suivantes:
- a) S’agissant des allégations relatives à l’usine d’embouteillage de Carepa, selon lesquelles, en décembre 1996, des groupes paramilitaires ont pénétré dans l’usine et contraint les membres du SINALTRAINAL à résilier leur affiliation, le comité demande au gouvernement de le tenir informé du résultat de l’enquête demandée à la Coordinatrice du groupe des droits de l’homme du ministère de la Protection sociale.
- b) S’agissant des dénonciations pour insultes contre les membres du SINALTRAINAL, le comité, tout en notant que l’entreprise a renoncé à certaines plaintes, demande au gouvernement de prendre toutes les mesures qui sont en son pouvoir afin d’encourager l’entreprise et le syndicat à améliorer le climat de dialogue au sein des différents établissements du groupe, afin que chacune des parties puisse, dans un respect mutuel, accomplir ses fonctions de façon appropriée, en laissant de côté les hostilités, les menaces, les insultes et toute autre forme de violence.
- c) Concernant l’annulation de l’enregistrement des statuts du SINALTRAINAL, le comité demande au gouvernement, à la lumière des récents arrêts de la Cour constitutionnelle, de veiller à ce que les statuts des différentes sections du SINALTRAINAL qui avaient été rejetés ou annulés soient dûment enregistrés après avoir été déposés.
- d) Tout en prenant note de l’information transmise par le gouvernement au paragraphe 582, le comité demande au gouvernement de prendre de toute urgence les mesures nécessaires pour modifier la législation afin de garantir le droit d’affiliation au SINALTRAINAL pour les travailleurs d’Eficacia S.A. (ou PROSERVIS) et d’Ayuda Integral S.A. qui travaillent dans les usines d’embouteillage, le prélèvement des cotisations syndicales correspondantes, ainsi que le droit du syndicat à présenter des cahiers de revendications et à négocier collectivement en tant que représentant de ces travailleurs. Le comité demande au gouvernement de le tenir informé à ce sujet.
- e) Concernant les allégations de refus de l’enregistrement de M. Ernesto Estrada Prada en tant que membre du conseil exécutif du SINALTRAINAL parce qu’il est sous contrat dans l’entreprise de services Empaques Hernández, alors qu’il travaille dans l’entreprise Saceites S.A., et les allégations selon lesquelles le ministère de la Protection sociale refuse aux travailleurs de l’Acueducto Metropolitano de Bucaramanga le droit de s’affilier au SINALTRAINAL, le comité veut croire que, dans le cadre des récents arrêts de la Cour constitutionnelle mentionnés et en vertu des articles 2 et 3 de la convention no 87, le gouvernement procédera à l’enregistrement du conseil exécutif du SINALTRAINAL, et examinera le droit des travailleurs de l’Acueducto Metropolitano de Bucaramanga de s’affilier au SINALTRAINAL. Le comité prie le gouvernement de le tenir informé à cet égard.
- f) S’agissant du licenciement de M. Martínez Moyano, le comité demande au gouvernement de diligenter une enquête indépendante à cet égard et de le tenir informé du résultat de celle-ci.