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Rapport où le comité demande à être informé de l’évolution de la situation - Rapport No. 351, Novembre 2008

Cas no 2632 (Roumanie) - Date de la plainte: 15-FÉVR.-08 - Clos

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  1. 1241. Les plaintes figurent dans des communications du Syndicat LEGIS-CCR en date des 13 octobre et 30 novembre 2007 et de la Fédération de l’éducation nationale (FEN) en date des 15 février et 18 mars 2008.
  2. 1242. Le gouvernement a transmis ses observations dans des communications en date du 13 décembre 2007 et des 16 janvier, 8 avril et 9 mai 2008.
  3. 1243. La Roumanie a ratifié la convention (nº 87) sur la liberté syndicale et la protection du droit syndical, 1948, la convention (nº 98) sur le droit d’organisation et de négociation collective, 1949, ainsi que la convention (nº 154) sur la négociation collective, 1981.

A. Allégations des organisations plaignantes

A. Allégations des organisations plaignantes
  • Allégations de la Fédération de l’éducation nationale (FEN)
    1. 1244 Dans des communications en date des 15 février et 18 mars 2008, la Fédération de l’éducation nationale (FEN) déclare être une organisation représentative dans le secteur de l’enseignement. L’organisation plaignante indique aussi être un partenaire de dialogue social permanent du ministère de l’Education nationale, de la Recherche et de la Jeunesse, ainsi que du gouvernement de la Roumanie et plus spécifiquement du ministère du Travail, de la Famille et de l’Egalité des chances.
    2. 1245 Selon l’organisation plaignante, le gouvernement applique une politique de rejet permanent du dialogue social et refuse de se conformer à l’obligation de consulter réellement les organisations syndicales. Les principes de droits collectifs, de dialogue social permanent sont violés en permanence et le rôle des organisations syndicales est dénaturé à tous les niveaux, notamment par les autorités centrales et territoriales. Le plus souvent, les syndicats sont entendus seulement après qu’ils aient protesté ou entrepris des actions en justice. Cette attitude est, selon l’organisation plaignante, absurde et de nature à porter constamment préjudice aux salariés ainsi qu’aux organisations syndicales.
    3. 1246 Pour la FEN, le manquement le plus grave est cependant l’intention du gouvernement d’amender l’article 12, alinéas 1 et 2, de la loi no 130/1996 concernant les contrats collectifs de travail en élaborant un projet de modification de cette loi. Le texte actuel de l’article 12 prévoit que:
    4. 1) Les contrats collectifs de travail peuvent être signés également par les salariés des institutions budgétaires. Ce type de contrat ne permet pas la négociation de clauses concernant les conditions d’octroi des droits et le quantum établi par des dispositions légales.
    5. 2) Les contrats collectifs de travail des salariés des institutions budgétaires peuvent être signés au niveau de l’entreprise, de l’administration ou des services publics locaux – pour les institutions en subordination – et au niveau départemental – pour les institutions subordonnées.
    6. 1247 Or, sous prétexte que le texte de loi n’est pas clair et qu’il donne lieu à des interprétations trop larges, le gouvernement aurait proposé la modification du texte par la rédaction suivante: «Les contrats collectifs de travail peuvent être signés également par le personnel des institutions et les autorités publiques. Ce type de contrat ne permet pas la négociation des clauses concernant les conditions d’octroi des droits et le quantum établi par des dispositions légales concernant: le salaire de base, les augmentations de salaire, les indemnités, les primes et d’autres droits du personnel.»
    7. 1248 Selon l’organisation plaignante, le désir du gouvernement de clarifier le texte de loi est une tentative déguisée de réduire au silence les organisations syndicales en employant des moyens légaux. Ainsi, les droits des syndicats seraient réduits en ce qui concerne les négociations salariales pour les travailleurs des institutions budgétaires. Etant donné que le droit national et international promeut la négociation collective, la mise en œuvre de la modification de la loi no 130/1996 conduirait de facto à nier ce droit et à anéantir le rôle et les attributions des organisations syndicales.
    8. 1249 L’organisation plaignante ajoute que le projet de modification de la loi no 130/1996 serait contraire à la Constitution de la Roumanie qui, en son article 45, alinéa 1, garantit le droit essentiel de négociation collective. De plus, ce projet serait contraire aux articles 1, alinéa 5, et 11, alinéa 1, de la Constitution de la Roumanie ainsi qu’aux dispositions suivantes: article 34, alinéa 1, du décret concernant les personnes physiques et les personnes juridiques (no 31/30 de 1954); articles 5, 217-221 et 236 du Code du travail; articles 1, 27 et 28 de la loi no 54/2004; article 3 de la loi no 130/1996.
  • Allégations du LEGIS-CCR
    1. 1250 Dans ses communications du 13 octobre et du 30 novembre 2007, le Syndicat LEGIS-CCR se présente comme une organisation représentative des travailleurs opérant au niveau de la Cour des comptes de la Roumanie. L’objet de la plainte porte sur la violation des droits syndicaux garantis par la Constitution de la Roumanie (art. 41) ainsi que par les conventions nos 87, 98 et 154, ratifiées par la Roumanie.
    2. 1251 L’organisation plaignante indique que la Cour des comptes est une institution publique dont le salaire des employés est financé par le budget de l’Etat. Ainsi, le personnel est recruté via un contrat individuel de travail à durée indéterminée. Le nombre maximum de postes pourvus à la Cour des comptes est approuvé par les lois budgétaires annuelles. Pour l’année 2007 et l’année 2008, la Cour des comptes s’est dotée d’un nombre total de 1 438 postes avec la répartition suivante: i) 18 postes pour le personnel occupant des fonctions de dignité publique; ii) 1 341 postes pour le personnel contractuel; iii) 79 fonctionnaires publics.
    3. 1252 L’organisation plaignante fait le constat qu’au cours des quinze dernières années aucun président de la Cour des comptes n’a initié des négociations pour la conclusion d’un contrat collectif de travail. Elle déclare ainsi avoir initié la toute première négociation dans ce but en conformité avec les dispositions de l’article 3(6) de la loi no 130/1966, celle-ci étant enregistrée auprès du Cabinet du président sous la référence 2604/DDS/06.12.2006.
    4. 1253 Seulement, l’organisation plaignante regrette que la direction de l’institution n’ait accepté de la rencontrer que pour prévenir le déclenchement d’une réunion de protestation le 9 janvier 2007. Le procès-verbal de cette rencontre est enregistré sous le no 365/DDS/08.02.2007. A cet égard, la direction a accepté le principe de la négociation avec pour objectif de signer le premier contrat collectif de travail applicable à la Cour des comptes.
    5. 1254 L’organisation plaignante allègue que la Cour des comptes aurait élaboré un projet de contrat collectif de travail sur la base duquel des échanges de communications écrites et des négociations ont eu lieu avec le syndicat pendant trois mois, à savoir du 9 janvier au 26 mars 2007. La négociation des clauses du premier contrat collectif de travail a été conclue le 26 mars 2007. Il n’y avait eu alors aucune divergence de vues exprimée par les parties à l’accord. L’organisation plaignante ajoute que ce fait peut être prouvé par les enregistrements des séances de négociation qui se sont déroulées du 23 au 26 mars 2007. Copie de ces enregistrements a d’ailleurs été transmise à l’organisation plaignante par la Cour des comptes. Néanmoins, l’organisation plaignante dénonce le fait qu’après cette date la direction ait refusé de signer le contrat pourtant dûment négocié par les parties.
    6. 1255 L’organisation plaignante ajoute qu’elle a demandé à la Cour des comptes de signer le contrat collectif de travail, fruit de négociations, durant la période allant de mars à juillet 2007, à travers de nombreuses lettres officielles. Néanmoins, six mois après le début des négociations, le président de la Cour des comptes aurait fait savoir à l’organisation plaignante qu’il n’avait pas l’intention de signer ce contrat collectif de travail au motif qu’il avait seulement l’obligation de le négocier mais qu’il n’était pas tenu de le signer à l’issue des négociations. Il indiquait par ailleurs que les travailleurs en question étaient embauchés par une «institution budgétaire» et que la loi concernant les contrats collectifs de travail prévoit «qu’on peut conclure» de tels contrats dans les institutions budgétaires, ce qui signifierait qu’il n’y a aucune obligation de signer de tels contrats, même lorsque les négociations ont abouti sans divergence. Pour l’organisation plaignante, cette position de la direction de la Cour des comptes est contraire aux dispositions de l’article 41 de la Constitution de la Roumanie.
    7. 1256 L’organisation plaignante indique s’être adressée au ministère du Travail en mai 2007 pour demander que le conflit soit résolu via une conciliation. Néanmoins, cette requête est restée lettre morte. De même, l’organisation plaignante a demandé au président de la Cour des comptes d’accepter de soumettre le différend à l’arbitrage ou la médiation. Cette requête est aussi restée sans suite.
    8. 1257 L’organisation plaignante dénonce la violation de ses droits syndicaux dans la mesure où elle est entrée en négociation collective avec la direction de la Cour des comptes pendant dix mois, sans que cette dernière n’ait visiblement eu la moindre intention de signer le contrat collectif de travail à la fin de ces négociations. Par ailleurs, la liberté syndicale serait aussi violée dans la mesure où la direction a refusé: i) de respecter son droit constitutionnel de jouir d’un contrat collectif de travail à la fin des négociations (art. 41 de la Constitution de la Roumanie); ii) d’octroyer au minimum les droits prévus dans le contrat collectif de travail applicable au niveau national, en vertu de l’article 24 de la loi no 53/2003 portant Code du travail; et iii) d’accepter la conciliation ou la médiation du ministère du Travail dans la résolution du conflit.
    9. 1258 L’organisation plaignante fait état des mesures qu’elle a prises afin de dénoncer la violation de ses droits auprès des différentes instances nationales, y compris auprès du ministère du Travail, de l’Avocat du peuple, du parlement (Sénat et Chambre des députés) et du Président de la République, sans succès. L’organisation plaignante indique en particulier avoir déposé une réclamation auprès du ministère du Travail (no 2480/23.05.2007) afin de demander que le conflit soit réglé via une médiation. A cet égard, l’organisation plaignante précise que, si le ministère du Travail a en effet convoqué la Cour des comptes en vue de la résolution du conflit, le président de la Cour des comptes ne s’est pas présenté et a envoyé deux cadres qui n’avaient ni la compétence de négocier au nom de la Cour des comptes ni celle de lier l’institution par leur signature. Par conséquent, il n’y a pas eu de possibilité de négocier en vue de la résolution du conflit au niveau du ministère du Travail. L’organisation plaignante transmet copie du procès-verbal en annexe de sa plainte.

B. Réponse du gouvernement

B. Réponse du gouvernement
  • Allégations de la Fédération de l’éducation nationale (FEN)
    1. 1259 En ce qui concerne les allégations de la FEN sur le projet de modification de la loi no 130/1996, le gouvernement indique dans une communication en date du 8 avril 2008 que la négociation des contrats collectifs de travail se fait désormais conformément aux dispositions de ladite loi republiée, amendée et complétée par la suite. L’article 12 de cette loi dispose que les contrats collectifs de travail peuvent être conclus également pour les salariés des institutions budgétaires. Les dispositions législatives actuelles prévoient l’impossibilité de négocier via ce type de contrat des clauses relatives à des droits dont l’octroi et le niveau sont établis par la loi. En outre, l’application pratique a démontré que le caractère général de ces dispositions génère des difficultés d’interprétation. Il était ainsi nécessaire pour le législateur de les clarifier.
    2. 1260 Selon le gouvernement, le projet de modification de la loi no 130/1996 ne porte pas atteinte au droit de négociation collective ni ne réduit le rôle et les prérogatives des syndicats à cet égard. La modification de l’article 12, objet du projet de loi, contient une énumération détaillée et concrète des droits dont l’octroi et le montant sont établis par des dispositions légales et qui ne peuvent pas être négociés par des contrats collectifs de travail. Ainsi, le texte de l’article 12 de la loi no 130/1996 ne serait modifié qu’en ce qui concerne l’énumération des clauses qui ne peuvent faire l’objet de négociation. Le gouvernement ajoute que, compte tenu du fait que dans le domaine budgétaire «les salaires de base, les augmentations, les indemnisations, les primes et autres droits de personnel» sont établis par des dispositions légales, l’avis du ministère de l’Education est que les allégations de la FEN sur le projet de modification de la loi no 130/1996 ne sont pas fondées. Enfin, il souligne que les allégations visent un texte qui est à l’heure actuelle un projet en cours d’analyse avec les partenaires sociaux, avant d’être établi sous forme de loi, qui de surcroît devra être débattu au parlement avant d’être adopté.
  • Allégations du LEGIS-CCR
    1. 1261 Dans des communications en date du 13 décembre 2007 et du 16 janvier 2008, le gouvernement fournit des observations pour ce qui concerne les allégations du LEGISCCR au sujet de la négociation collective à la Cour des comptes. Il indique en premier lieu que du point de vue juridique l’article 12, alinéa 1, de la loi no 130/1996 telle qu’amendée sur les contrats collectifs de travail prévoit que ce type de contrat peut être conclu également pour les institutions budgétaires. Néanmoins, la loi ne permet pas la négociation des clauses concernant des droits dont l’octroi et le montant sont établis par des dispositions légales. Ainsi, il n’est pas possible de conclure des contrats collectifs portant sur de telles clauses.
    2. 1262 Des dispositions similaires sont contenues dans la loi no 188/1999 republiée sur le statut des fonctionnaires publics. Ainsi, l’article 72(1) de ladite loi dispose que «les autorités et les institutions publiques peuvent conclure annuellement, en respectant la loi, des accords avec les syndicats représentatifs des fonctionnaires publics ou avec les représentants des fonctionnaires publics qui comprennent exclusivement des mesures concernant:
      • a) la constitution et la destination des fonds pour l’amélioration des conditions au lieu de travail;
      • b) le programme journalier de travail;
      • c) la formation professionnelle;
      • d) d’autres mesures que celles prévues par la loi, concernant la protection des personnes élues dans les organismes directeurs des organisations syndicales».
    3. 1263 Le gouvernement précise que, pour ce qui est du domaine des droits salariaux des employés de la Cour des comptes au bénéfice d’un contrat individuel de travail, le texte applicable est l’ordonnance d’urgence du gouvernement no 24/2000 sur le système de fixation des salaires de base pour le personnel contractuel du secteur budgétaire et le personnel salarié conformément aux annexes II et III de la loi no 154/1998 sur le système de détermination des salaires de base dans le secteur budgétaire et des indemnisations pour des personnes qui ont des fonctions de dignité publique. Les droits salariaux des fonctionnaires publics de la Cour des comptes sont réglementés par l’ordonnance du gouvernement no 6/24, janvier 2007, concernant certaines mesures de règlement des droits salariaux et d’autres droits des fonctionnaires publics jusqu’à l’entrée en vigueur de la «loi sur le système unitaire de salarisation et autres droits des fonctionnaires publics», ainsi que l’augmentation du salaire octroyé aux fonctionnaires publics en 2007.
    4. 1264 Le gouvernement en tire la conclusion que le personnel contractuel comme les fonctionnaires publics de la Cour des comptes peuvent certes conclure des contrats collectifs de travail ou des accords collectifs, mais ne peuvent pas négocier des clauses relatives aux droits dont l’octroi et le montant sont établis par des dispositions légales.
    5. 1265 Le gouvernement souligne en outre que ses conclusions sont en accord avec la convention no 154, ratifiée par la Roumanie. L’article 1, paragraphe 3, de la convention disposant de la possibilité de fixer, selon la législation et la pratique nationales, des modalités spécifiques d’application de la convention en ce qui concerne la fonction publique.
    6. 1266 En deuxième lieu, et d’un point de vue factuel concernant le dialogue social, le gouvernement précise qu’en analysant les documents déposés au dossier par l’organisation plaignante il ne résulte pas que l’employeur, à savoir la Cour des comptes, aurait accepté les clauses négociées pendant les séances des 23 et 26 mars 2007. Le gouvernement tient à préciser que, si l’organisation plaignante arrive à démontrer via des documents le fait que l’employeur a accepté ces clauses et qu’il n’y a donc aucune divergence à leur sujet, comme elle le soutient, elle aurait la possibilité de s’adresser à la Direction du travail et de la protection sociale du ministère du Travail en vue d’enregistrer le contrat collectif de travail, ceci conformément à l’article 26, alinéa 2 b), de la loi no 130/1996 republiée sur le contrat collectif de travail qui prévoit que: «Les contrats collectifs de travail seront enregistrés sans porter la signature de tous les représentants des parties au cas où (…) b) certaines associations patronales représentatives ou organisations syndicales représentatives ont participé aux négociations, sont tombées d’accord avec les clauses négociées, mais refusent la signature des contrats, situation qui résulte des documents déposés par les parties.»
    7. 1267 Le gouvernement ajoute qu’en examinant les données fournies par la Direction du travail et de la protection sociale il s’avère que, le 23 mai 2007, l’organisation plaignante a demandé une conciliation du conflit d’intérêts, cette dernière ayant eu lieu le 25 mai 2007 au siège de la Direction du travail. Cette conciliation n’aurait pas abouti car les parties n’auraient pas trouvé d’accord selon le procès-verbal no 3783/43/23.05.2007.

C. Conclusions du comité

C. Conclusions du comité
  1. 1268. Le comité rappelle que les allégations des organisations plaignantes concernent diverses entraves à la négociation collective et à la conclusion de contrats collectifs de travail dans l’administration publique.
    • Allégations de la Fédération de l’éducation nationale (FEN)
  2. 1269. Le comité note que la Fédération de l’éducation nationale (FEN) allègue que le gouvernement a élaboré un projet de loi qui restreindrait les matières qui pourraient faire l’objet de négociations collectives ainsi que le niveau de la négociation. Le comité note que l’article 12, alinéa 1, de la loi no 130/1996 concernant les contrats collectifs de travail dispose que: «Les contrats collectifs de travail peuvent être signés également par les salariés des institutions budgétaires. Ce type de contrat ne permet pas la négociation de clauses concernant les conditions d’octroi des droits et le quantum établi par des dispositions légales.»
  3. 1270. Le comité relève sur la base des allégations de l’organisation plaignante et de la réponse du gouvernement qu’un texte amendant l’article précité est en cours d’élaboration. Selon l’organisation plaignante, le texte serait modifié comme suit: «Les contrats collectifs de travail peuvent être signés également par le personnel des institutions et les autorités publiques. Ce type de contrat ne permet pas la négociation des clauses concernant les conditions d’octroi des droits et le quantum établi par des dispositions légales concernant: le salaire de base, les augmentations de salaire, les indemnités, les primes et d’autres droits du personnel.»
  4. 1271. Le comité note que, selon le gouvernement, le projet de modification de la loi no 130/1996 ne porte pas préjudice au droit de négociation collective ni ne réduit le rôle et les prérogatives des syndicats à cet égard. Il déclare ainsi que la modification porte sur une énumération détaillée et concrète des droits dont l’octroi et le montant sont établis par l’intermédiaire de dispositions légales et qui, par conséquent, ne peuvent être négociés via des contrats collectifs de travail. Le gouvernement soutient que le texte de l’article 12 de la loi no 130/1996 serait modifié par l’énumération des clauses qui ne pourraient faire l’objet de négociation. Le gouvernement indique que, tenant compte du fait que dans le domaine budgétaire «les salaires de base, les augmentations, les indemnisations, les primes et autres droits de personnel» sont établis par des dispositions légales, les allégations de la FEN concernant le projet de modification de la loi no 130/1996 ne sont pas fondées.
  5. 1272. S’agissant dans le présent cas d’une organisation d’enseignants, le comité souhaite rappeler le principe de la négociation collective libre et volontaire énoncé à l’article 4 de la convention no 98 et souligner que l’action des pouvoirs publics afin de promouvoir et développer la négociation collective en ce qui concerne les conditions de travail ou d’emploi dans l’administration publique sont des principes essentiels consacrés tant dans la convention no 98 que dans la convention no 154 qu’il a ratifiées. De l’avis du comité, les enseignants n’exécutent pas des tâches de fonctionnaires commis à l’administration de l’Etat, ce type d’activités étant en fait également menée dans le secteur privé. Dans ces conditions, il importe que les enseignants à statut de fonctionnaires publics puissent bénéficier des garanties prévues par la convention no 98. [Voir Recueil de décisions et de principes du Comité de la liberté syndicale, cinquième édition, 2006, paragr. 901.]
  6. 1273. En ce qui concerne la position du gouvernement selon laquelle il devrait être tenu compte du fait que dans le domaine budgétaire «les salaires de base, les augmentations, les indemnisations, les primes et autres droits de personnel» sont établis par des dispositions légales, ce qui selon lui justifie d’exclure du champ de la négociation des contrats collectifs du travail, le comité considère que cette approche va à l’encontre des principes posés par les conventions relatives à la négociation collective ratifiées par le gouvernement qui encouragent et promeuvent le développement et l’utilisation des mécanismes de négociation collective sur les termes et les conditions d’emploi. Le comité, tout en reconnaissant que des particularités de la fonction publique peuvent appeler une certaine souplesse dans l’application du principe de l’autonomie des partenaires à la négociation collective, est d’avis que dans le présent cas le gouvernement pourrait plutôt prévoir des dispositions législatives qui permettent au parlement ou à l’organe compétent en matière budgétaire de fixer une «fourchette» pour les négociations salariales ou d’établir une «enveloppe» budgétaire globale dans le cadre desquelles les parties peuvent négocier les clauses monétaires ou normatives (par exemple, réduction du temps de travail ou autre aménagement, modulation des augmentations salariales en fonction des niveaux de rémunération, modalités d’étalement des revalorisations). De telles mesures laisseraient une place significative à la négociation collective et pourraient trouver l’agrément des partenaires. Le comité rappelle néanmoins qu’il est essentiel que les travailleurs et leurs organisations puissent participer pleinement et de façon significative à la détermination de ce cadre global de négociations, ce qui implique notamment qu’ils aient à leur disposition toutes les données financières, budgétaires ou autres, leur permettant d’apprécier la situation en toute connaissance de cause. [Voir notamment Recueil, op. cit., paragr. 1038.]
  7. 1274. Compte tenu de ce qui précède, le comité demande au gouvernement de prendre toutes les mesures nécessaires afin de modifier l’article 12, alinéa 1, de la loi no 130/1996 de manière à ne plus exclure du champ de négociation collective les salaires de base, les augmentations, les indemnisations, les primes et autres droits des employés publics. En outre, le comité est d’avis que toute modification de l’article 12, alinéa 1, de la loi no 130/1996 qui aurait pour effet d’étendre le champ des clauses exclues de la négociation collective portant sur les conditions de travail et d’emploi des employés publics serait contraire aux principes de développement et d’utilisation de la négociation collective contenus dans les conventions ratifiées par le gouvernement. Le comité veut croire que, dans tout processus de modification de la loi no 130/1996 qu’il envisagera, le gouvernement tiendra dûment compte des principes posés ci-dessus ainsi que des recommandations sur la possibilité de fixer une «fourchette» pour les négociations salariales et d’établir une «enveloppe» budgétaire globale dans le cadre desquelles les parties peuvent négocier les clauses monétaires. En tout état de cause, si les dispositions légales ou constitutionnelles requièrent que les accords conclus fassent l’objet d’une décision budgétaire du parlement, en pratique le système devrait assurer le plein respect des clauses librement négociées. Le comité prie le gouvernement de le tenir informé de tout fait nouveau à cet égard.
    • Allégations du LEGIS-CCR
  8. 1275. Le comité note que le Syndicat LEGIS-CCR allègue le refus de la part de la direction de la Cour des comptes de signer une convention collective après l’avoir négociée pendant dix mois. Selon l’organisation plaignante, le motif invoqué pour ce refus par la Cour des comptes est que la direction de l’institution a seulement l’obligation de négocier le contrat collectif de travail, sans pour autant être tenue de le signer à l’issue des négociations, ceci compte tenu du fait que les travailleurs concernés sont embauchés par une «institution budgétaire» et que la loi concernant le contrat collectif de travail prévoit seulement «qu’on peut conclure» de tels contrats dans les institutions budgétaires. En conséquence, la position de la direction de la Cour des comptes serait qu’il n’est pas obligatoire de conclure des contrats collectifs de travail, même si les négociations ont été achevées sans divergence entre les parties.
  9. 1276. Le comité note les allégations selon lesquelles les droits syndicaux sont violés dans la mesure où la direction de la Cour des comptes a refusé à l’organisation plaignante: i) de respecter son droit constitutionnel de jouir d’un contrat collectif de travail à la fin des négociations (art. 41 de la Constitution de la Roumanie); ii) d’octroyer au minimum les droits prévus dans le contrat collectif de travail applicable au niveau national, en vertu de l’article 24 de la loi no 53/2003 portant Code du travail; et iii) d’accepter la conciliation ou la médiation du ministère du Travail dans la résolution du conflit.
  10. 1277. Le comité note que, dans sa réponse, le gouvernement indique que les salaires des employés de la Cour des comptes sont déterminés par la loi. Il explique également que le personnel contractuel ainsi que les fonctionnaires publics de la Cour des comptes peuvent conclure des contrats collectifs de travail ou des accords collectifs, mais ils ne peuvent entrer en négociation en ce qui concerne les clauses relatives aux droits dont l’octroi et le montant sont établis par des dispositions légales. Le comité relève également que, selon le gouvernement, sa position est conforme à l’article 1, paragraphe 3, de la convention no 154 qui prévoit que, pour ce qui concerne la fonction publique, des modalités particulières d’application de la convention peuvent être fixées par la législation ou la pratique nationales. A cet égard, le comité souhaite rappeler que de telles modalités ne devraient toutefois pas être de nature à retirer tout sens au principe de promotion de la négociation collective dans l’administration publique et aux sujets sur lesquels celle-ci doit porter, ceci aux termes de l’article 5 de ladite convention.
  11. 1278. Le comité note que le gouvernement se réfère à la loi no 188/1999 sur le statut des fonctionnaires publics, notamment à son article 72(1) qui dispose que «les autorités et les institutions publiques peuvent conclure annuellement, en respectant la loi, des accords avec les syndicats représentatifs des fonctionnaires publics ou avec les représentants des fonctionnaires publics qui comprennent exclusivement des mesures concernant: a) la constitution et la destination des fonds pour l’amélioration des conditions au lieu de travail; b) le programme journalier de travail; c) la formation professionnelle; d) d’autres mesures que celles prévues par la loi, concernant la protection des personnes élues dans les organismes directeurs des organisations syndicales». A cet égard, le comité souhaite une nouvelle fois se référer aux conclusions auxquelles il a abouti précédemment en ce qui concerne les limitations au champ de la négociation des contrats collectifs du travail dans la fonction publique, à savoir que d’une manière générale de telles limitations vont à l’encontre des principes posés par les conventions relatives à la négociation collective ratifiées par le gouvernement – notamment la convention no 154 – qui encouragent et promeuvent le développement et l’utilisation des mécanismes de négociation collective sur les termes et les conditions d’emploi. Le comité prie donc le gouvernement de prendre les dispositions nécessaires pour modifier la loi no 188/1999 de manière à ne pas restreindre l’étendue des sujets négociables dans l’administration publique, en particulier ceux qui relèvent normalement des conditions de travail ou d’emploi. Le comité encourage le gouvernement à y remédier notamment en élaborant avec les partenaires sociaux concernés des lignes directrices en matière de négociation collective et à déterminer ainsi l’extension du champ de négociation, ceci en conformité avec les conventions nos 98 et 154 qu’il a ratifiées. En tout état de cause, si les dispositions légales ou constitutionnelles requièrent que les accords conclus fassent l’objet d’une décision budgétaire du parlement, en pratique le système devrait assurer le plein respect des clauses librement négociées.
  12. 1279. Le comité rappelle aussi que les particularités de la fonction publique peuvent appeler une certaine souplesse dans l’application du principe de l’autonomie des partenaires à la négociation collective, auquel cas une réponse possible serait de prévoir des dispositions législatives qui permettent au parlement ou à l’organe compétent en matière budgétaire de fixer une «fourchette» pour les négociations salariales ou d’établir une «enveloppe» budgétaire globale dans le cadre desquelles les parties peuvent négocier les clauses monétaires ou normatives (par exemple, réduction du temps de travail ou autre aménagement, modulation des augmentations salariales en fonction des niveaux de rémunération, modalités d’étalement des revalorisations). [Voir Recueil, op. cit., paragr. 1038.]
  13. 1280. Le comité note l’indication du gouvernement selon laquelle, en analysant les documents déposés au dossier par l’organisation plaignante, il ne résulte pas que l’employeur, à savoir la Cour des comptes, aurait accepté les clauses négociées pendant les séances des 23 et 26 mars 2007. Le comité note également que, selon le gouvernement, si l’organisation plaignante arrive à démontrer via des documents le fait que l’employeur a accepté ces clauses et qu’il n’y a donc aucune divergence à leur sujet, comme elle le soutient, elle aurait la possibilité de s’adresser à la Direction du travail et de la protection sociale du ministère du Travail en vue d’enregistrer le contrat collectif de travail, ceci conformément à l’article 26, alinéa 2 b), de la loi no 130/1996 republiée sur le contrat collectif de travail qui prévoit que: «Les contrats collectifs de travail seront enregistrés sans porter la signature de tous les représentants des parties au cas où (…) b) certaines associations patronales représentatives ou organisations syndicales représentatives ont participé aux négociations, sont tombées d’accord avec les clauses négociées, mais refusent la signature des contrats, situation qui résulte des documents déposés par les parties.»
  14. 1281. Par ailleurs, le comité note l’indication du gouvernement selon laquelle, en examinant les données fournies par la Direction du travail et de la protection sociale, il s’avère que le 23 mai 2007 l’organisation plaignante a demandé une conciliation du conflit d’intérêts, cette dernière ayant eu lieu le 25 mai 2007 au siège de la Direction du travail. Cette conciliation n’aurait pas abouti car les parties n’auraient pas trouvé d’accord selon le procès-verbal no 3783/43/23.05.2007. Le comité note à cet égard que, selon l’organisation plaignante, une telle conciliation n’aurait pas abouti dans la mesure où le président de la Cour des comptes ne s’est pas présenté à la réunion et y a envoyé deux cadres ne disposant ni de la compétence pour négocier au nom de l’institution ni de celle de lier celle-ci par leur signature.
  15. 1282. Le comité observe qu’en l’espèce il ne dispose pas d’information sur un accord entre les parties. Il observe néanmoins que, indépendamment de l’analyse que l’on peut faire sur la légalité de la non-signature d’un accord librement négocié, ce genre d’agissement est nuisible au développement de relations professionnelles normales et saines. A cet égard, le comité tient à rappeler l’importance qu’il attache à l’obligation de négocier de bonne foi pour le maintien d’un développement harmonieux des relations professionnelles. Il importe qu’employeurs et syndicats participent aux négociations de bonne foi et déploient tous leurs efforts pour aboutir à un accord, des négociations véritables et constructives étant nécessaires pour établir et maintenir une relation de confiance entre les parties. Enfin, les accords doivent être obligatoires pour les parties. [Voir Recueil, op. cit., paragr. 934, 935 et 939.] En conséquence, le comité demande au gouvernement de prendre toutes les mesures nécessaires pour résoudre dans les plus brefs délais et selon les procédures en vigueur le différend portant sur l’accord négocié entre le Syndicat LEGIS-CCR et la direction de la Cour des comptes, et de promouvoir la négociation collective au sein de cette institution. Le comité veut croire que le gouvernement le tiendra pleinement informé de tout fait nouveau à cet égard.

Recommandation du comité

Recommandation du comité
  1. 1283. Au vu des conclusions qui précèdent, le comité invite le Conseil d’administration à approuver les recommandations suivantes:
    • a) Le comité demande au gouvernement de prendre toutes les mesures nécessaires afin de modifier l’article 12, alinéa 1, de la loi no 130/1996 de manière à ne plus exclure du champ de négociation collective les salaires de base, les augmentations, les indemnisations, les primes et autres droits des employés publics. En tout état de cause, si les dispositions légales ou constitutionnelles requièrent que les accords conclus fassent l’objet d’une décision budgétaire du parlement, en pratique le système devrait assurer le plein respect des clauses librement négociées.
    • b) Rappelant que toute modification législative qui aurait pour effet d’étendre le champ des clauses exclues de la négociation collective portant sur les conditions de travail et d’emploi des employés publics serait contraire aux principes de développement et d’utilisation de la négociation collective contenus dans les conventions ratifiées par le gouvernement, le comité veut croire que ce dernier en tiendra dûment compte dans tout processus de modification de la loi no 130/1996 ainsi que des autres principes mentionnés dans ses conclusions. Le comité prie le gouvernement de le tenir informé de tout fait nouveau à cet égard.
    • c) Le comité prie le gouvernement de prendre les dispositions nécessaires pour modifier la loi no 188/1999 de manière à ne pas restreindre l’étendue des sujets négociables dans l’administration publique, en particulier ceux qui relèvent normalement des conditions de travail ou d’emploi. Le comité encourage le gouvernement à y remédier notamment en élaborant avec les partenaires sociaux concernés des lignes directrices en matière de négociation collective et à déterminer ainsi l’extension du champ de négociation, ceci en conformité avec les conventions nos 98 et 154 qu’il a ratifiées. En tout état de cause, si les dispositions légales ou constitutionnelles requièrent que les accords conclus fassent l’objet d’une décision budgétaire du parlement, en pratique le système devrait assurer le plein respect des clauses librement négociées.
    • d) Le comité demande au gouvernement de prendre toutes les mesures nécessaires pour résoudre dans les plus brefs délais et selon les procédures en vigueur le différend portant sur l’accord négocié entre le Syndicat LEGIS-CCR et la direction de la Cour des comptes, et de promouvoir la négociation collective au sein de cette institution. Le comité veut croire que le gouvernement le tiendra pleinement informé de tout fait nouveau à cet égard.
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