Afficher en : Anglais - Espagnol
- 303. Le comité a examiné ce cas pour la dernière fois à sa réunion de novembre 2009 et a présenté à cette occasion un rapport intérimaire au Conseil d’administration. [Voir 355e rapport, approuvé par le Conseil d’administration à sa 306e session (2009), paragr. 327-357.]
- 304. Dans une communication en date du 9 mars 2010, le gouvernement a envoyé des informations partielles au sujet des allégations présentées.
- 305. Le Cambodge a ratifié la convention (nº 87) sur la liberté syndicale et la protection du droit syndical, 1948, et la convention (no 98) sur le droit d’organisation et de négociation collective, 1949.
A. Examen antérieur du cas
A. Examen antérieur du cas- 306. Lors de son examen antérieur du cas, en novembre 2009, déplorant que, malgré le temps écoulé, le gouvernement n’ait fourni aucune information au sujet des actes allégués de discrimination antisyndicale, notamment au sujet des licenciements abusifs, et que l’on ait apparemment refusé de négocier avec le syndicat concerné, le comité a formulé les recommandations suivantes concernant les questions en suspens [voir 355e rapport, paragr. 327-357]:
- a) Le comité déplore le manque de coopération du gouvernement et le prie fermement d’être plus coopératif à l’avenir.
- b) Le comité prie instamment le gouvernement de prendre sans tarder des mesures en vue d’adopter un cadre législatif approprié afin de garantir aux travailleurs une protection efficace contre les actes de discrimination antisyndicale, notamment en prévoyant des sanctions suffisamment dissuasives et en prenant des décisions rapides, définitives et contraignantes. Le comité rappelle au gouvernement qu’il peut se prévaloir de l’assistance technique du Bureau à cet égard.
- c) Le comité prie instamment le gouvernement de diligenter sans délai une enquête approfondie et indépendante sur toutes les allégations relatives au présent cas et, si celles-ci étaient avérées, de prendre les mesures nécessaires pour faire en sorte que les syndicalistes licenciés, ou ceux dont le contrat de travail n’a pas été renouvelé, soient totalement réintégrés dans leur poste sans perte de salaire. Au cas où la réintégration des travailleurs licenciés concernés ne serait pas possible pour des raisons objectives et impérieuses, le comité demande au gouvernement de veiller à ce que les travailleurs concernés soient dûment indemnisés, ce qui constituerait une sanction suffisamment dissuasive contre les licenciements antisyndicaux. Le comité demande au gouvernement de l’informer du résultat de l’enquête et de toutes les mesures de réparation prises.
- d) Le comité demande au gouvernement de prendre les mesures nécessaires, y compris l’émission d’instructions appropriées sur les sites concernés, pour faire en sorte que le syndicat de la JASA puisse organiser des élections et que les travailleurs puissent y participer sans crainte de licenciement ou d’autres représailles. Il demande à être tenu informé de l’évolution de la situation à cet égard. Le comité estime nécessaire d’attirer spécialement l’attention du Conseil d’administration sur ce cas en raison de l’extrême gravité et de l’urgence des problèmes en cause.
- e) Le comité demande au gouvernement de prendre les mesures nécessaires pour faire en sorte que l’APSARA et le complexe de golf d’Angkor engagent des négociations de bonne foi avec leur syndicat respectif, et de le tenir informé à cet égard.
- f) Le comité estime nécessaire d’attirer spécialement l’attention du Conseil d’administration sur ce cas en raison de l’extrême gravité et de l’urgence des problèmes en cause.
B. Réponse du gouvernement
B. Réponse du gouvernement- 307. Dans sa communication en date du 9 mars 2010, le gouvernement a envoyé des informations partielles concernant les questions examinées dans le présent cas.
- 308. Le gouvernement fait savoir, en ce qui concerne le différend mettant en cause l’Autorité pour la protection du site et l’aménagement de la région d’Angkor Siem Reap (APSARA) et l’Autorité APSARA-Japon pour la sauvegarde d’Angkor (JASA), que le Département chargé des conflits du travail et le Département du travail et de la formation professionnelle de la province de Siem Reap ont tenté de trouver une solution avec l’APSARA et la JASA, selon la procédure prévue, mais que, faute d’y parvenir, il ont transmis l’affaire au Conseil d’arbitrage le 22 décembre 2009.
- 309. Le gouvernement fait savoir que le Département chargé des conflits du travail susmentionné n’est pas parvenu à régler le différend mettant en cause le complexe de golf d’Angkor et a donc transmis ce dossier au Conseil d’arbitrage le 11 janvier 2010.
C. Conclusions du comité
C. Conclusions du comité- 310. Le comité rappelle que le présent cas a trait à des actes allégués de discrimination syndicale, notamment des licenciements abusifs, qui, d’après les organisations plaignantes, ont eu lieu dans les circonstances suivantes:
- a) Le 21 décembre 2006, après avoir apparemment ignoré délibérément les demandes répétées du syndicat concernant l’ouverture de négociations, l’APSARA a publié une note, dans laquelle elle exigeait de ses salariés qu’ils renoncent à leur adhésion à ce syndicat s’ils souhaitaient conserver leur emploi et, le 22 décembre 2006, a licencié 14 dirigeants et militants syndicaux. Le Département du travail de la province de Siem Reap a, selon les allégations, tenté une conciliation le 22 mars et le 14 septembre 2007; l’APSARA a refusé en ces deux occasions de réintégrer les 14 dirigeants et militants syndicaux licenciés. L’APSARA ne se serait par ailleurs pas présentée à la réunion de conciliation fixée au 25 octobre 2007, et ni le Département du travail de la province de Siem Reap ni le ministère des Affaires sociales, du Travail, de la Formation professionnelle et de la Réinsertion des jeunes (MOSALVY) n’ont pris par la suite d’autres mesures en vue de résoudre ce conflit, en saisissant par exemple le Conseil d’arbitrage.
- b) Le 28 février 2005, l’Equipe japonaise pour la sauvegarde d’Angkor (JSA) a licencié des dirigeants et militants syndicaux et a fermé le site de son projet de restauration. Elle a repris ses activités le 27 mars 2006, sur un autre site de restauration, sous un nouveau nom, JASA, et a conservé 90 pour cent des anciens employés de la JSA, mais n’a pas réengagé 16 dirigeants et militants syndicaux. Les 25 avril et 5 juillet 2007, la Fédération cambodgienne des syndicats de la construction (CCTUF, affiliée à l’organisation plaignante) a adressé des communications au MOSALVY qui a alors demandé au Département du travail de la province de Siem Reap de prendre des mesures afin de régler les questions en suspens. Il s’est avéré cependant impossible de parvenir à un règlement de ce différend.
- c) Enfin, s’agissant du complexe de golf d’Angkor, la présidente du syndicat concerné, Yun Sokha, a été licenciée sans motif satisfaisant, le 28 février 2007 – alors que ce même jour des négociations, infructueuses, avaient lieu avec ce syndicat. Le 7 avril 2007, la direction a, elle aussi, suspendu les activités de son établissement, pour les reprendre environ trois semaines plus tard, en ne réengageant que les travailleurs non syndiqués et ceux qui avaient accepté de renoncer à leur affiliation au syndicat. Yun Sokha, le vice-président Thy Sothea et 40 autres travailleurs qui avaient refusé d’abandonner le syndicat n’ont pas été réembauchés. Les 9 juin et 5 juillet 2007, la CCTUF a déposé un recours devant le Département du travail de la province de Siem Reap en vue de la réintégration des dirigeants et militants syndicaux du complexe de golf d’Angkor. Le Département du travail n’a toutefois pas répondu au syndicat et les questions en suspens n’ont pas été résolues.
- 311. Saisine du Conseil d’arbitrage. Lors de son précédent examen de ce cas, le comité a considéré que l’insuffisance des mesures prises par les autorités, en particulier la non-soumission des plaintes au Conseil d’arbitrage, compromettait fortement les chances de l’organisation plaignante d’obtenir réparation pour les violations alléguées. Le comité accueille par conséquent favorablement l’information fournie par le gouvernement, à savoir que le Département chargé des conflits du travail et le Département du travail et de la formation professionnelle de la province de Siem Reap ont transmis la plainte déposée contre l’APSARA et la JASA ainsi que celle formée contre le complexe de golf d’Angkor au Conseil d’arbitrage, respectivement le 22 décembre 2009 et le 11 janvier 2010. Le comité prie le gouvernement de le tenir informé de tout élément nouveau à cet égard et de transmettre copie des décisions du Conseil d’arbitrage une fois qu’elles auront été rendues. Il s’attend à ce que ces décisions soient prises sans délai, à l’issue d’une procédure impartiale et indépendante, et que, s’il ressortait de cette procédure que les licenciements avaient un caractère antisyndical, les dirigeants et militants syndicaux licenciés soient immédiatement réintégrés sans perte de salaire ni d’indemnités. Dans le cas où, tout en constatant le caractère antisyndical des licenciements, le Conseil d’arbitrage considérerait que la réintégration des dirigeants et militants syndicaux n’est pas possible pour des raisons objectives et impérieuses, le comité prie instamment le gouvernement de prendre les mesures nécessaires afin que les travailleurs concernés soient dûment indemnisés, ce qui constituerait une sanction suffisamment dissuasive contre les licenciements antisyndicaux. En outre, le comité rappelle que des actes ayant pour but de subordonner l’emploi d’un travailleur à la condition qu’il ne s’affilie pas à un syndicat ou cesse de faire partie d’un syndicat constituent une violation de l’article 1 de la convention no 98, et il prie instamment le gouvernement de veiller à ce que toute infraction avérée à cet égard fasse l’objet d’une sanction proportionnée et adéquate.
- 312. Cadre législatif. Lors du précédent examen, le comité a fait observer que le présent cas illustrait l’insuffisance des lois et procédures destinées à protéger les travailleurs contre les actes de discrimination antisyndicale et que, comme dans d’autres plaintes déposées contre le gouvernement, les présentes allégations reprenaient la teneur d’autres allégations antérieures et similaires faisant état d’un climat de relations professionnelles caractérisé par des actes de discrimination antisyndicale, aboutissant fréquemment à des licenciements, et de l’inefficacité manifeste des sanctions prévues par la loi pour protéger les travailleurs contre de tels actes. [Voir cas no 2468, 344e rapport, paragr. 436.] Le comité a rappelé en outre que, dans le cadre d’une autre plainte contre le gouvernement, il avait noté avec une profonde préoccupation l’absence d’instances judicaires indépendantes et efficaces et avait, en conséquence, prié instamment le gouvernement de prendre les mesures nécessaires pour assurer l’indépendance et l’efficacité du système judiciaire, notamment par des mesures de renforcement de ses capacités et par la mise en place de garanties contre la corruption. [Voir cas no 2318, 351e rapport, paragr. 250.]
- 313. Enfin, le comité note avec regret qu’un intervalle de temps considérable s’est écoulé depuis le licenciement des travailleurs concernés – qui a eu lieu, respectivement, en février 2005 (s’agissant du différend mettant en cause la JSA/JASA), en décembre 2006 (s’agissant de celui concernant l’APSARA) et en avril 2007 (s’agissant du complexe de golf d’Angkor). Le comité rappelle une fois encore que le gouvernement a la responsabilité de prévenir tout acte de discrimination antisyndicale et de veiller à ce que les plaintes pour des pratiques discriminatoires de cette nature soient examinées dans le cadre d’une procédure qui doit être prompte, impartiale et considérée comme telle par les parties intéressées. En outre, il est nécessaire que la législation établisse d’une manière expresse des recours et des sanctions suffisamment dissuasives contre les actes de discrimination antisyndicale afin d’assurer l’efficacité pratique des articles 1 et 2 de la convention no 98. [Voir Recueil de décisions et de principes du Comité de la liberté syndicale, cinquième édition, 2006, paragr. 817 et 822.] A cet égard, le comité prie de nouveau instamment le gouvernement, ainsi qu’il l’a fait dans les cas précédents, de prendre sans délai des mesures en vue d’adopter un cadre législatif approprié afin de garantir aux travailleurs une protection efficace contre les actes de discrimination antisyndicale, notamment en prévoyant des sanctions suffisamment dissuasives et en prenant des décisions rapides, définitives et contraignantes. Le comité rappelle au gouvernement qu’il peut se prévaloir de l’assistance technique du Bureau à cet égard.
- 314. Elections syndicales. Le comité rappelle par ailleurs qu’il avait prié le gouvernement de prendre les mesures nécessaires, y compris l’émission d’instructions appropriées sur les sites concernés, pour faire en sorte que le syndicat de la JASA puisse organiser des élections et que les travailleurs puissent y participer sans crainte de licenciement ou d’autres représailles. Le comité note avec regret que le gouvernement ne fournit aucune information à ce sujet dans sa communication. En conséquence, il le prie une fois de plus de garantir le droit des membres du syndicat de la JASA d’élire librement leurs représentants sans avoir à redouter de représailles d’aucune sorte, d’indiquer les mesures prises à cette fin et de l’informer de la date à laquelle le scrutin aura eu lieu.
- 315. Négociation collective. Lors du précédent examen du cas, le comité a noté que, d’après l’organisation plaignante, les licenciements ayant eu lieu à l’APSARA et au complexe de golf d’Angkor avaient été précipités par les demandes d’entamer des négociations collectives formulées par les syndicats concernés – tous deux accrédités auprès du MOSALVY comme étant les plus représentatifs. A cet égard, le comité rappelle une fois encore l’importance qu’il attache à l’obligation de négocier de bonne foi pour le maintien d’un développement harmonieux des relations professionnelles. Il importe qu’employeurs et syndicats participent aux négociations de bonne foi et déploient tous leurs efforts pour aboutir à un accord, des négociations véritables et constructives étant nécessaires pour établir et maintenir une relation de confiance entre les parties. [Voir Recueil, op. cit., paragr. 934 et 935.] Notant également que le Prakas no 305 du 22 novembre 2001 fait obligation à l’employeur de négocier avec le syndicat le plus représentatif, le comité prie à nouveau le gouvernement – en l’absence d’informations à ce sujet dans sa communication – de prendre les mesures nécessaires pour faire en sorte que l’APSARA et le complexe de golf d’Angkor engagent des négociations de bonne foi avec leur syndicat respectif, et de le tenir informé à cet égard.
Recommandation du comité
Recommandation du comité- 316. A la lumière des conclusions intérimaires qui précèdent, le comité invite le Conseil d’administration à approuver les recommandations suivantes:
- a) Prenant note des informations communiquées par le gouvernement, selon lesquelles la plainte déposée contre l’APSARA et la JASA, ainsi que celle contre le complexe de golf d’Angkor ont été transmises au Conseil d’arbitrage, respectivement le 22 décembre 2009 et le 11 janvier 2010, le comité prie le gouvernement de le tenir informé de tout élément nouveau à cet égard et de lui transmettre une copie des décisions du Conseil d’arbitrage une fois qu’elles auront été rendues. Il s’attend à ce que ces décisions soient prises sans délai, à l’issue d’une procédure impartiale et indépendante, et que, s’il ressortait de cette procédure que les licenciements avaient un caractère antisyndical, les dirigeants et militants syndicaux licenciés soient immédiatement réintégrés sans perte de salaire ni d’indemnités. Dans le cas où, tout en constatant le caractère antisyndical des licenciements, le Conseil d’arbitrage considérerait que la réintégration des dirigeants et militants syndicaux n’est pas possible pour des raisons objectives et impérieuses, le comité prie instamment le gouvernement de prendre les mesures nécessaires afin que les travailleurs concernés soient dûment indemnisés, ce qui constituerait une sanction suffisamment dissuasive contre les licenciements antisyndicaux.
- b) Le comité rappelle que des actes ayant pour but de subordonner l’emploi d’un travailleur à la condition qu’il ne s’affilie pas à un syndicat ou cesse de faire partie d’un syndicat constituent une violation de l’article 1 de la convention no 98 et il prie instamment le gouvernement de veiller à ce que toute infraction avérée à cet égard fasse l’objet d’une sanction proportionnée et adéquate.
- c) S’agissant de l’élection des représentants du syndicat de la JASA, le comité prie une fois de plus le gouvernement de prendre les mesures nécessaires, y compris l’émission d’instructions appropriées sur les sites concernés, pour faire en sorte que les membres du syndicat de la JASA puissent élire librement leurs représentants et que les travailleurs puissent participer à cette élection sans crainte de licenciement ou d’autres représailles, d’indiquer les mesures prises à cette fin et de l’informer de la date à laquelle le scrutin aura eu lieu.
- d) En outre, le comité prie à nouveau le gouvernement de prendre les mesures nécessaires pour faire en sorte que l’APSARA et le complexe de golf d’Angkor engagent des négociations de bonne foi avec leur syndicat respectif, et de le tenir informé à cet égard.
- e) Enfin, le comité prie de nouveau instamment le gouvernement de prendre sans tarder des mesures en vue d’adopter un cadre législatif approprié afin de garantir aux travailleurs une protection efficace contre les actes de discrimination antisyndicale, notamment en prévoyant des sanctions suffisamment dissuasives et en prenant des décisions rapides, définitives et contraignantes. Le comité rappelle au gouvernement qu’il peut se prévaloir de l’assistance technique du Bureau à cet égard.
- f) Le comité attire spécialement l’attention du Conseil d’administration sur le caractère extrêmement grave et urgent du présent cas.