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Rapport définitif - Rapport No. 357, Juin 2010

Cas no 2688 (Pérou) - Date de la plainte: 29-OCT. -08 - Clos

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  1. 893. La présente plainte figure dans une communication de la Fédération nationale des travailleurs du pouvoir judiciaire du Pérou (CEN-FNTPJ) en date du 29 octobre 2008.
  2. 894. Le gouvernement a envoyé ses observations dans des communications en date des 25 février et 25 mai 2010.
  3. 895. Le Pérou a ratifié la convention (no 87) sur la liberté syndicale et la protection du droit syndical, 1948, et la convention (no 98) sur le droit d’organisation et de négociation collective, 1949.

A. Allégations de l’organisation plaignante

A. Allégations de l’organisation plaignante
  1. 896. La Fédération nationale des travailleurs du pouvoir judiciaire du Pérou (CEN-FNTPJ) allègue que les autorités du pouvoir judiciaire ont refusé de constituer la commission paritaire chargée de débattre formellement des cahiers de revendications présentés en 2007 et 2008, mais qu’après la grève nationale qui a eu lieu du 27 novembre au 4 décembre 2007 l’organisation syndicale et le pouvoir judiciaire ont signé un accord visant à régler le conflit en vertu duquel la grève a été suspendue et une partie des revendications de l’organisation plaignante a été satisfaite. L’organisation plaignante ajoute toutefois que, le 7 janvier 2008, le responsable du personnel et du tableau d’avancement du pouvoir judiciaire, s’ingérant dans les affaires internes de la fédération, a signé un deuxième accord visant à régler le conflit au titre duquel des avantages ont également été accordés, avec des organisations membres de la fédération qui avaient décidé de poursuivre la grève en dépit du fait qu’elles n’avaient pas de statut syndical, et sans tenir compte de la représentativité de la fédération nationale plaignante.
  2. 897. L’organisation plaignante allègue également que le pouvoir judiciaire s’ingère dans les affaires internes de la fédération, ce dernier ayant essayé d’influencer la désignation des travailleurs qui feraient partie de la commission paritaire approuvée aux termes de la résolution no 268-2007-P/PJ (selon l’organisation plaignante, l’autorité judiciaire essaie d’y inclure un membre du Syndicat unitaire des travailleurs du pouvoir judiciaire, base de Lima (SUTRAPOJ-LIMA)) et ayant nommé une commission paritaire parallèle, par la résolution no 197-2008-P/PJ du 19 septembre 2008, chargée d’étudier le cahier de revendications relatif à la période de 2008-09 présenté par le syndicat SUTRAPOJ-LIMA, une organisation de base membre de la fédération, en dépit de l’existence d’une autre commission paritaire approuvée par la résolution no 268-2007-P/PJ.

B. Réponse du gouvernement

B. Réponse du gouvernement
  1. 898. Dans ses communications, le gouvernement indique qu’il a demandé des informations concernant les allégations soulevées contre le pouvoir judiciaire, lequel n’a pas envoyé ses observations.
  2. 899. S’agissant de l’allégation relative au refus d’effectuer des négociations collectives, le gouvernement signale que la fédération a présenté la convention collective signée le 20 décembre 2007 avec le pouvoir judiciaire pour la période 2007-08, laquelle a été enregistrée le 10 janvier 2008 sous le numéro 006-2008. Concernant le cahier de revendications relatif à la période 2008-09, le gouvernement indique que la sous-direction des négociations collectives, par arrêté no 023-2008-MTPE/12.210 du 2 avril 2008, a décidé de ne pas prendre connaissance ni examiner le cahier en question, au motif que celui-ci concernait des travailleurs soumis aux régimes de travail public et privé, décision qui a été confirmée en deuxième instance administrative, le dossier ayant été classé. Le gouvernement explique que, s’il est vrai que dans le passé la possibilité pour l’autorité administrative d’intervenir dans le processus des négociations collectives effectuées par des syndicats mixtes (constitués de membres soumis aux régimes de travail public et privé) n’était pas réglementée, à l’heure actuelle, en vertu de la directive nationale no 0022009MTPE/211.1 du 17 février 2009 adoptée par la Direction nationale des relations de travail, les cahiers de revendications présentés par des organisations syndicales mixtes ne peuvent pas être refusés. Afin de garantir le droit de négocier collectivement, l’autorité administrative devra demander à l’organisation demanderesse de délimiter le champ de négociation des travailleurs soumis au régime privé. La fédération négocie actuellement le cahier de revendications relatif à la période 2009-10.
  3. 900. Quant aux allégations selon lesquelles le pouvoir judiciaire aurait conclu un deuxième accord visant à régler le conflit qui serait assimilable à une convention collective avec un groupe de travailleurs qui n’aurait pas de statut syndical, le gouvernement indique qu’il s’agit en réalité d’un accord visant à régler le conflit conclu avec les travailleurs d’organisations syndicales de base, membres de la fédération, qui ont poursuivi la grève malgré l’accord conclu le 4 décembre 2007 par la fédération. Le gouvernement précise que s’il s’était effectivement agi d’une convention collective celle-ci aurait dû être enregistrée auprès de l’autorité administrative compétente, ce qui n’a pas été le cas.
  4. 901. En ce qui concerne les allégations selon lesquelles le pouvoir judiciaire s’ingère dans la formation de la commission paritaire, celui-ci ayant demandé qu’un représentant d’une organisation de base en fasse partie et ayant constitué, par la résolution no 197-2008-P/PJ, une commission paritaire parallèle chargée d’examiner un cahier de revendications relatif à la période 2008-09, et cela dans le but de porter atteinte aux droits de la fédération, le gouvernement fait savoir que l’Etat péruvien ne permet pas la signature d’actes qui nuisent à l’autonomie et à la liberté syndicale. Il ajoute que l’autorité administrative a refusé de prendre connaissance et d’examiner le cahier de revendications relatif à la période 2008-09 présenté par le syndicat SUTRAPOJLIMA, et que cette décision n’a pas fait l’objet d’un appel. Le gouvernement précise par ailleurs que le pouvoir judiciaire n’a négocié aucune convention collective avec cette organisation de base ni engagé aucune procédure en vue de la présentation du cahier de revendications.

C. Conclusions du comité

C. Conclusions du comité
  1. 902. Le comité observe que, dans le présent cas, la Fédération nationale des travailleurs du pouvoir judiciaire du Pérou (CEN-FNTPJ) allègue: 1) que le pouvoir judiciaire, en tant qu’employeur, a refusé de négocier avec elle; 2) que, malgré la conclusion d’un accord visant à régler le conflit entre la fédération et les autorités du pouvoir judiciaire le 4 décembre 2007 (à la suite d’une grève qui avait débuté le 27 novembre), le 7 janvier 2008, le pouvoir judiciaire a signé un autre accord visant à régler le conflit avec un groupe d’organisations syndicales qui, bien que membres de la fédération, avaient décidé de poursuivre la grève; 3) une ingérence du pouvoir judiciaire en ceci qu’il: a) s’est montré favorable à la demande d’un syndicat (SUTRAPOJ-LIMA) d’inclure un représentant de ce syndicat dans la Commission paritaire pouvoir judiciaire-CEN-FNTPJ approuvée par la résolution no 268-2007-P/PJ du 3 décembre 2007 (concrètement, en demandant qu’un membre du syndicat SUTRAPOJ-LIMA soit membre de la commission paritaire, une demande à laquelle la fédération n’a pas accédé), et b) a nommé une commission paritaire parallèle par résolution no 197-2008-P/PJ du 19 septembre 2008 pour négocier un cahier de revendications présenté par le syndicat SUTRAPOJ-LIMA, en dépit de l’existence d’une autre commission paritaire. A cet égard, le comité observe qu’il ressort des allégations et de la réponse du gouvernement que les allégations font référence à un conflit interne existant entre la fédération et une organisation syndicale de base membre de la fédération.
  2. 903. S’agissant de l’allégation relative au refus d’effectuer des négociations collectives, le gouvernement informe le comité de la manière dont la composition des commissions paritaires a été décidée, et que: 1) la convention collective signée le 20 décembre 2007 par la fédération et le pouvoir judiciaire pour la période 2007-08 a été enregistrée le 10 janvier 2008 sous le numéro 006-2008; 2) concernant le cahier de revendications relatif à la période 2008-09, la sous-direction des négociations collectives a décidé de ne pas prendre connaissance ni examiner le cahier en question au motif que celui-ci concernait des travailleurs soumis aux régimes de travail public et privé et qu’elle n’était pas habilitée à prendre des décisions dans ce domaine, une décision qui a été confirmée en deuxième instance administrative, le dossier ayant été classé; 3) la fédération négocie actuellement le cahier de revendications pour la période 2009-10 et en est à l’étape des négociations directes. Le comité prend bonne note de cette information.
  3. 904. Concernant les allégations relatives à la signature, le 7 janvier 2008, d’un accord visant à régler le conflit avec des organisations syndicales de base membres de la fédération, en dépit du fait qu’un accord avait déjà été signé le 4 décembre 2007 avec la fédération, le comité note que le gouvernement indique qu’il s’agit en réalité d’un accord qui met fin à un conflit, souscrit par les organisations syndicales de base, membres de la fédération, qui ont poursuivi la grève malgré le fait que celle-ci avait été suspendue par la fédération. Il note aussi que cet accord n’a pas été enregistré comme convention collective par l’autorité administrative. A ce propos, le comité estime qu’on ne peut pas reprocher aux autorités d’avoir mené des actions destinées à parvenir à des accords visant à mettre fin à une grève dans un secteur qui fournit des services essentiels comme le secteur judiciaire, bien que les syndicats signataires – comme dans le présent cas – n’aient pas suivi les instructions de leur fédération et aient décidé de poursuivre la grève. Dans ces conditions, étant donné que la fédération n’a pas fourni de renseignements qui permettent d’établir que des procédures internes ont été engagées contre les organisations syndicales de base en vertu des statuts du syndicat, ou que des recours judiciaires ont été présentés en raison de préjudices éventuels, et compte tenu du fait que la situation décrite correspond à un conflit entre organisations syndicales, le comité ne poursuivra pas l’examen de ces allégations.
  4. 905. Quant aux allégations selon lesquelles le pouvoir judiciaire s’ingère dans les affaires internes de la fédération en nommant une Commission paritaire pouvoir judiciaireSUTRAPOJ-LIMA parallèlement à la Commission paritaire pouvoir judiciaireCENFNTPJ, le comité prend note que le gouvernement indique que: 1) l’Etat péruvien ne permet pas la signature d’actes qui nuisent à l’autonomie et à la liberté syndicale; 2) l’autorité administrative a refusé de prendre connaissance et d’examiner le cahier de revendications pour la période 2008-09 présenté par le syndicat SUTRAPOJLIMA, et que cette décision n’a pas fait l’objet d’un appel; et 3) le pouvoir judiciaire n’a négocié aucune convention collective avec cette organisation de base ni engagé aucune procédure en vue de la présentation du cahier de revendications.
  5. 906. Le comité observe qu’il ressort de la documentation fournie par l’organisation plaignante qu’une autre commission paritaire a effectivement été nommée par la résolution no 1972008 P/PJ et que le motif invoqué dans la résolution pour la constitution de cette nouvelle commission paritaire est le refus de la fédération d’accepter qu’un membre du syndicat SUTRAPOJ-LIMA (qui regroupe, selon la résolution, le plus grand nombre de travailleurs du pouvoir judiciaire) fasse partie de la commission paritaire précédente (résolution no 268-2007-P/PJ). Selon la résolution, compte tenu de ce conflit interne qui oppose la fédération et le syndicat de base, lequel est expressément reconnu dans la résolution, il a été décidé de créer une commission paritaire chargée de négocier le cahier de revendications présenté par l’organisation syndicale de base, lequel, selon le gouvernement, n’a finalement jamais été signé.
  6. 907. Le comité estime que les mesures prises par les autorités, soit la nomination de deux commissions paritaires aux fins de la présentation de deux cahiers de revendications (même si l’un d’eux – celui présenté par le syndicat SUTRAPOJ-LIMA – n’a finalement pas fait l’objet de négociations ni abouti à la signature d’une convention collective) soumis par deux organisations syndicales de niveau distinct et appartenant à un secteur qui fournit des services essentiels, l’ont été dans le cadre d’un conflit intersyndical opposant les syndicats CEN-FNTPJ et SUTRAPOJ-LIMA, et résultent de toute évidence d’une volonté des autorités de maintenir la paix sociale et d’assurer la fourniture des services essentiels en question. Le comité estime donc qu’il ne s’agit pas d’une conduite que l’on pourrait reprocher à l’employeur, puisque dans le présent cas il n’apparaît aucune forme de dépendance du syndicat SUTRAPOJ-LIMA envers l’employeur, mais d’une attitude fortement revendicative. En conséquence, compte tenu une fois de plus du fait que ces allégations entrent dans le cadre d’un conflit interne entre organisations syndicales, le comité ne poursuivra pas l’examen de ces allégations.

Recommandation du comité

Recommandation du comité
  1. 908. Au vu des conclusions qui précèdent, le comité invite le Conseil d’administration à décider que ce cas ne nécessite pas un examen plus approfondi.
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