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Rapport intérimaire - Rapport No. 363, Mars 2012

Cas no 2811 (Guatemala) - Date de la plainte: 26-AOÛT -10 - Clos

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Allégations: Transfert antisyndical d’une dirigeante syndicale au sein de l’Institut national des sciences criminalistiques, licenciements antisyndicaux au sein de la municipalité de Chimaltenango, entraves à la négociation d’une nouvelle convention collective avec le Tribunal électoral suprême et violation des dispositions d’une convention collective dans le secteur agricole

  1. 645. La plainte figure dans deux communications de l’Union syndicale des travailleurs du Guatemala (UNSITRAGUA) datées du 26 août 2010. L’organisation plaignante a présenté de nouvelles allégations dans des communications du 10 septembre et des 4 et 10 novembre 2010.
  2. 646. Le gouvernement a adressé ses observations dans des communications datées du 23 septembre 2010 et du 14 juin 2011.
  3. 647. Le Guatemala a ratifié la convention (no 87) sur la liberté syndicale et la protection du droit syndical, 1948, la convention (no 98) sur le droit d’organisation et de négociation collective, 1949, ainsi que la convention (no 154) sur la négociation collective, 1981.

A. Allégations de l’organisation plaignante

A. Allégations de l’organisation plaignante
  1. 648. Dans sa communication du 26 août 2010, l’organisation plaignante indique, en ce qui concerne le Syndicat des travailleurs de l’Institut national des sciences criminalistiques (SITRAINACIF), que la notification établissant l’octroi du privilège syndical aux membres du comité exécutif a été envoyée en date du 26 janvier 2010; la protection visée prenait effet à compter du 20 janvier. Cependant, le 4 mai 2010, Mme Nilda Ivette González Ruiz, membre du comité exécutif et secrétaire pour la protection sociale, qui exerçait ses fonctions au siège de la commune de Cobán (département de Alta Verapaz), a été informée qu’elle serait affectée jusqu’à nouvel ordre au siège de la commune de Poptún (département de Petén). Ce transfert, qui modifiait les conditions de travail de la dirigeante en question, constitue du point de vue de l’organisation plaignante une violation manifeste des conventions de l’OIT ratifiées par le pays et une mesure de représailles imputable aux activités syndicales de l’intéressée. L’organisation plaignante indique que Mme Nilda Ivette González Ruiz a fait recours de cette décision devant le ministère du Travail. Les parties ont été convoquées par conséquent à une tentative de conciliation qui n’a pas abouti.
  2. 649. Dans une communication du 10 septembre 2010, l’organisation plaignante fait état de licenciements et de pratiques antisyndicales à l’encontre de ses membres depuis la constitution du Syndicat des travailleurs de la municipalité de la commune de Chimaltenango (département de Chimaltenango) en date du 9 novembre 2007. Plus récemment, en 2008, les élections municipales auraient été suivies par une vague de licenciements abusifs qui auraient touché près de 200 travailleurs, dont 55 membres du syndicat. Parmi eux, 36 ont fait recours devant le Tribunal de première instance de la juridiction du travail, de la prévoyance sociale et de la famille du département de Chimaltenango. Selon l’organisation plaignante, la réintégration de 12 de ces 36 travailleurs a été ordonnée, malgré plusieurs recours de l’employeur qui ont tous été rejetés ou déclarés non recevables. Cependant, le maire de la commune de Chimaltenango a licencié ces 12 travailleurs en déclarant qu’aucun membre du syndicat ne serait autorisé à reprendre le travail. Ces licenciements ont à nouveau été contestés devant le Tribunal de première instance de la juridiction du travail, de la prévoyance sociale et de la famille du département de Chimaltenango.
  3. 650. Dans une communication du 4 novembre 2010, l’organisation plaignante présente les informations suivantes: a) la convention collective conclue par le Syndicat des travailleurs du Tribunal électoral suprême (SITTSE) et le Tribunal électoral suprême expirait le 13 juillet 2011; b) après épuisement de la voie directe pour la négociation d’une convention collective, le SITTSE a lancé un appel à la grève et demandé une déclaration de légalité du mouvement devant la cinquième Chambre du tribunal du travail et de la prévoyance sociale de la première région (division applicable aux juridictions du travail); c) ce tribunal a confié la réalisation du décompte nécessaire à cet effet à l’inspection du travail et à plusieurs tribunaux de paix qui n’ont pas donné suite à cette demande, ce qui a retardé le processus de négociation de la convention collective; et d) les travailleurs ont saisi le Conseil de la magistrature.
  4. 651. Dans une communication du 10 novembre 2010, l’organisation plaignante mentionne un conflit opposant l’entreprise Compañía Agrícola Industrial Ingenio Palo Gordo SA et le Syndicat des travailleurs de la société Palo Gordo en indiquant notamment ce qui suit: a) en juin 2010, près de 250 travailleurs se sont rassemblés devant les bureaux des services administratifs de la raffinerie de sucre Palo Gordo en demandant à s’entretenir avec le responsable des relations agro-industrielles au sujet de la façon d’organiser le travail pendant la période consacrée aux réparations, conformément aux dispositions de la convention collective signée par les parties; b) le syndicat a indiqué qu’il avait été informé du recours à des entreprises privées pour la réalisation des travaux de réparation en violation des clauses de la convention collective, ce qui avait entraîné des complications et plusieurs incidents; c) en août 2010, le comité exécutif et le conseil consultatif du syndicat ont adressé une note au délégué du ministère du Travail et de la Prévoyance sociale de la région de Suchitepéquez, contestant dans ce texte la décision de la direction de l’entreprise de recruter des sous-traitants et des membres du personnel occupés par ailleurs alors qu’elle disposait d’employés qualifiés et expérimentés ayant déjà travaillé en période de récolte et effectué les tâches requises pendant des années; et d) à l’issue d’une séance de concertation tenue le 4 novembre 2010, il a été convenu que la récolte débuterait le 20 novembre 2010 et que le syndicat adresserait notification à l’employeur, après la tenue d’une assemblée générale à venir, en vue de la négociation d’une convention collective par la voie directe.
  5. 652. Enfin, l’organisation plaignante évoque un conflit interne au syndicat survenu entre juillet et août 2010, conflit déjà examiné dans le cadre du cas no 2708.

B. Réponse du gouvernement

B. Réponse du gouvernement
  1. 653. Dans une communication du 14 juin 2011, le gouvernement indique, au sujet du retard dans la délivrance de la déclaration de légalité ou d’illégalité de la grève et des entraves posées par conséquent à la négociation d’une convention collective avec le Tribunal électoral suprême, qu’il a invité l’administration judiciaire à lui indiquer les raisons du délai dans le décompte des grévistes en communiquant à cette fin la liste des tribunaux de paix ou d’instance compétents. Ces tribunaux ont présenté en date du 11 janvier 2011 des informations comme suit: a) il ressort de la liste fournie par le ministère du Travail et de la Prévoyance sociale que 195 tribunaux ont retourné la notification sans donner suite à la demande, dont plusieurs sont mentionnés à deux ou trois reprises; b) les juges de paix de El Tejar (Chimaltenango), Colotenango, Livingston, Izabal, Tectitán et Huehuetenango ont retourné la notification sans donner suite à la demande pour cause de fermeture des services du tribunal électoral; c) le juge de paix de Flores (Petén) a retourné la notification sans donner suite à la demande au motif que le Registre électoral ne comptait pas de bureau dans cette ville; d) le juge de paix de Chinautla a retourné la notification sans donner suite à la demande pour cause d’erreur dans l’adresse des services du Tribunal électoral suprême; e) la commune de Pueblo Nuevo Tiquisate a été inscrite sur la liste alors qu’elle ne fait pas partie du département de Suchitepéquez; on trouve en revanche dans le département d’Escuintla une commune portant ce nom, dont le tribunal a donné suite à la demande de la cinquième Chambre du tribunal du travail et de la prévoyance sociale; et f) la cinquième Chambre du tribunal du travail et de la prévoyance sociale indique qu’en date du 15 février 2011 elle a déclaré la légalité de la grève à l’appel du SITTSE; le Tribunal électoral suprême a contesté cette décision devant la troisième Chambre du tribunal du travail et de la prévoyance sociale, qui n’a pas encore rendu sa décision.

C. Conclusions du comité

C. Conclusions du comité
  1. 654. Le comité observe que, dans le présent cas, l’organisation plaignante allègue le transfert antisyndical d’une dirigeante syndicale au sein de l’Institut national des sciences criminalistiques, des licenciements antisyndicaux au sein de la municipalité de Chimaltenango, des entraves à la négociation d’une nouvelle convention collective avec le Tribunal électoral suprême et la violation des dispositions d’une convention collective dans le secteur agricole.
  2. 655. S’agissant du transfert antisyndical d’une dirigeante syndicale au sein de l’Institut national des sciences criminalistiques, le comité prend note des informations suivantes communiquées par l’organisation plaignante: a) le 4 mai 2010, Mme Nilda Ivette González Ruiz, membre du comité exécutif et secrétaire pour la protection sociale du Syndicat des travailleurs de l’Institut national des sciences criminalistiques (SITRAINACIF), qui exerçait ses fonctions au siège de la commune de Cobán (département de Alta Verapaz), a été informée qu’elle serait affectée jusqu’à nouvel ordre au siège de la commune de Poptún (département de Petén); b) la dirigeante syndicale a fait recours de cette décision devant le ministère du Travail; une tentative de conciliation a été convoquée mais n’a pas abouti.
  3. 656. Le comité rappelle qu’un des principes fondamentaux de la liberté syndicale est que les travailleurs doivent bénéficier d’une protection adéquate contre tous actes de discrimination tendant à porter atteinte à la liberté syndicale en matière d’emploi – licenciement, transfert, rétrogradation et autres actes préjudiciables – et que cette protection est particulièrement souhaitable en ce qui concerne les délégués syndicaux, étant donné que, pour pouvoir remplir leurs fonctions syndicales en pleine indépendance, ceux-ci doivent avoir la garantie qu’ils ne subiront pas de préjudice en raison du mandat syndical qu’ils détiennent. Le comité a estimé que la garantie de semblable protection dans le cas de dirigeants syndicaux est en outre nécessaire pour assurer le respect du principe fondamental selon lequel les organisations de travailleurs ont le droit d’élire librement leurs représentants. [Voir Recueil de décisions et de principes du Comité de la liberté syndicale, cinquième édition, 2006, paragr. 799.] Le comité regrette que le gouvernement n’ait fourni aucune information au sujet du transfert antisyndical dont aurait été victime Mme Nilda Ivette González Ruiz, dirigeante syndicale, et il le prie instamment de remédier à cette situation sans délai et de prendre les mesures nécessaires pour que le principe susmentionné soit respecté. Le comité prie le gouvernement de le tenir informé à cet égard.
  4. 657. S’agissant des licenciements antisyndicaux au sein de la municipalité de Chimaltenango, le comité prend note des informations suivantes communiquées par l’organisation: a) en 2008, près de 200 travailleurs de la municipalité de Chimaltenango, dont 55 membres du Syndicat des travailleurs de la municipalité de la commune de Chimaltenango, ont été licenciés; b) 36 d’entre eux ont fait recours et 12 ont fait l’objet d’une décision de réintégration; et c) les 12 travailleurs ainsi réintégrés ont à nouveau été licenciés et ont contesté ce second licenciement devant le Tribunal de première instance de la juridiction du travail, de la prévoyance sociale et de la famille du département de Chimaltenango.
  5. 658. Tout en regrettant que le gouvernement n’ait fourni aucune information sur cette allégation, le comité souligne que nul ne doit être licencié ou faire l’objet d’autres mesures préjudiciables en matière d’emploi en raison de son affiliation syndicale ou de l’exercice d’activités syndicales légitimes et qu’il importe que tous les actes de discrimination en matière d’emploi soient interdits et sanctionnés dans la pratique. [Voir Recueil, op. cit., paragr. 771.] Le comité prie instamment le gouvernement de lui faire parvenir sans délai ses observations sur cette allégation et de l’informer de l’état d’avancement des procédures pour licenciement engagées devant le Tribunal de première instance de la juridiction du travail, de la prévoyance sociale et de la famille du département de Chimaltenango.
  6. 659. S’agissant des entraves à la négociation d’une nouvelle convention collective, le comité prend note des informations suivantes communiquées par l’organisation plaignante: a) la convention collective signée par le Syndicat des travailleurs du Tribunal électoral suprême (SITTSE) et le Tribunal électoral suprême expirait le 13 juillet 2011; b) une fois épuisée la voie directe pour la négociation d’une convention collective, le SITTSE a lancé un appel à la grève et demandé une déclaration de légalité du mouvement devant la cinquième Chambre du tribunal du travail et de la prévoyance sociale de la première région (division applicable aux juridictions du travail); c) ce tribunal a confié la réalisation du décompte des grévistes à l’inspection du travail et à plusieurs tribunaux de paix qui n’ont pas donné suite à cette demande, ce qui a retardé la négociation de la convention collective; et d) les travailleurs ont alors saisi le Conseil de la magistrature.
  7. 660. Le comité prend note de la réponse fournie à cet égard par le gouvernement, qui indique ce qui suit: a) après plusieurs vérifications, le décompte demandé a été réalisé, et une déclaration établissant la légalité de la grève à l’appel du SITTSE a été délivrée en date du 15 février 2011; et b) le Tribunal électoral suprême a contesté cette déclaration devant la troisième Chambre du tribunal du travail et de la prévoyance sociale, qui n’a pas encore rendu sa décision. Le comité prie le gouvernement de le tenir informé de l’issue de l’appel interjeté par le Tribunal électoral suprême devant la troisième Chambre du tribunal du travail et de la prévoyance sociale. De même, tout en rappelant que les retards injustifiés dans la négociation collective sont incompatibles avec l’obligation de négocier de bonne foi, le comité prie le gouvernement de le tenir informé de l’évolution de la situation en ce qui concerne la négociation d’une nouvelle convention collective par le tribunal et le SITTSE.
  8. 661. S’agissant de la violation des dispositions d’une convention collective dans le secteur agricole, le comité note que l’organisation plaignante mentionne un conflit opposant l’entreprise Compañía Agrícola Industrial Ingenio Palo Gordo SA et le Syndicat des travailleurs de la raffinerie de sucre Palo Gordo en indiquant notamment ce qui suit: a) en juin 2010, près de 250 travailleurs se sont rassemblés devant les bureaux des services administratifs de la société Palo Gordo en demandant à s’entretenir avec le responsable des relations agro-industrielles au sujet de la façon d’organiser le travail pendant la période consacrée aux réparations, conformément aux dispositions de la convention collective signée par les parties; b) le syndicat a indiqué qu’il avait été informé du recours à des entreprises privées pour la réalisation des travaux de réparation en violation des clauses de la convention collective; c) en août 2010, le comité exécutif et le conseil consultatif du syndicat ont adressé une note au délégué du ministère du Travail et de la Prévoyance sociale de la région de Suchitepéquez en contestant dans ce texte la décision de la direction de l’entreprise de recruter des sous-traitants et des membres du personnel occupés par ailleurs alors qu’elle disposait d’employés qualifiés et expérimentés ayant déjà travaillé en période de récolte et effectué les tâches requises pendant des années; et d) à l’issue d’une séance de concertation tenue le 4 novembre 2010, il a été convenu que la récolte débuterait le 20 novembre 2010 et que le syndicat adresserait notification à l’employeur, après la tenue d’une assemblée générale à venir, en vue de la négociation d’une convention collective par la voie directe.
  9. 662. Regrettant que le gouvernement n’ait fourni aucune information au sujet de celle allégation, le comité souligne que les accords doivent être obligatoires pour les parties et que la non-application d’une convention collective, ne serait-ce que temporairement, va à l’encontre du droit de négociation collective ainsi que du principe de la négociation de bonne foi. [Voir Recueil, op. cit., paragr. 939 et 943.] Le comité prie instamment le gouvernement de fournir ses observations sans délai. Il prie également instamment les parties, y compris l’entreprise concernée, par le biais de son organisation d’employeurs, d’indiquer si tous les problèmes mentionnés ont été résolus.

Recommandations du comité

Recommandations du comité
  1. 663. Au vu des conclusions intérimaires qui précèdent, le comité invite le Conseil d’administration à approuver les recommandations suivantes:
    • a) S’agissant du transfert antisyndical dont aurait été victime Mme Nilda Ivette González Ruiz, dirigeante syndicale, le comité regrette que le gouvernement n’ait fourni aucune information sur cette allégation et le prie instamment de remédier à cette situation sans délai et de prendre les mesures nécessaires pour que le principe susmentionné soit respecté; le comité prie le gouvernement de le tenir informé à cet égard.
    • b) S’agissant des allégations relatives à des licenciements antisyndicaux au sein de la municipalité de Chimaltenango, le comité regrette que le gouvernement n’ait fourni aucune information sur cette allégation et le prie instamment de remédier à cette situation sans délai et de l’informer de l’état d’avancement des procédures pour licenciement engagées devant le Tribunal de première instance de la juridiction du travail, de la prévoyance sociale et de la famille du département de Chimaltenango.
    • c) S’agissant des entraves à la négociation d’une nouvelle convention collective entre le Tribunal électoral suprême et le Syndicat des travailleurs du Tribunal électoral suprême (SITTSE), le comité prie le gouvernement de le tenir informé de l’issue de l’appel interjeté par le tribunal devant la troisième Chambre du tribunal du travail et de la prévoyance sociale ainsi que de l’évolution de la situation en ce qui concerne la négociation d’une nouvelle convention collective par le tribunal et le SITTSE.
    • d) S’agissant de la violation des dispositions d’une convention collective dans le secteur agricole, le comité regrette que le gouvernement n’ait fourni aucune information sur cette allégation et le prie instamment de remédier à cette situation sans délai; il prie également instamment les parties, y compris l’entreprise concernée, par le biais de son organisation d’employeurs, d’indiquer si tous les problèmes mentionnés ont été résolus.
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