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Rapport définitif - Rapport No. 364, Juin 2012

Cas no 2835 (Colombie) - Date de la plainte: 13-OCT. -10 - Clos

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Allégations: Refus d’enregistrer un syndicat et licenciements antisyndicaux

  1. 485. Les plaintes figurent dans une communication du Syndicat des travailleurs des communications, des secteurs connexes et du transport (SINTRACOMUNICACIONES) – section Antioquia datée du 13 octobre 2010. L’Union nationale des travailleurs de l’Etat et des services publics de la Colombie (UTRADEC) a indiqué qu’elle appuyait cette plainte dans une communication du 1er février 2011.
  2. 486. Le gouvernement a envoyé ses observations dans une communication du 15 septembre 2011.
  3. 487. La Colombie a ratifié la convention (no 87) sur la liberté syndicale et la protection du droit syndical, 1948, et la convention (no 98) sur le droit d’organisation et de négociation collective, 1949.

A. Allégations de l’organisation plaignante

A. Allégations de l’organisation plaignante
  1. 488. Dans sa communication du 13 octobre 2010, le Syndicat des travailleurs des communications, des secteurs connexes et du transport (SINTRACOMUNICACIONES) – section Antioquia fait savoir qu’au moment de la liquidation de l’Administration postale nationale – ADPOSTAL – le syndicat susmentionné opérait au sein de cette institution et que son comité directeur avait été nommé le 13 septembre 2006, ses membres jouissant de la protection syndicale depuis cette date. L’organisation plaignante ajoute que, lorsque le gouvernement a ordonné la liquidation d’ADPOSTAL (ci-après «l’institution»), il a licencié, le 26 décembre 2006, les travailleurs membres du comité directeur du syndicat, sans égard pour leur droit à la protection syndicale, c’est-à-dire sans avoir obtenu l’autorisation judiciaire du juge du travail.
  2. 489. L’organisation plaignante souligne que, le 18 septembre 2006, le comité directeur du syndicat – section Antioquia a demandé à la Coordination du travail et de l’emploi du ministère de la Protection sociale son enregistrement au registre syndical; il l’a d’ailleurs obtenu aux termes d’une résolution datée du 9 octobre 2006. Par un décret du 27 décembre 2006, le gouvernement a licencié tout le personnel de l’institution en liquidation (supprimant la totalité des 567 postes de travail officiels); il a indiqué que: «à partir de l’exécution de la sentence autorisant la levée de la protection syndicale, ou à l’échéance de ce même droit telle que prévue par la loi ou les statuts de l’organisation, tous les postes occupés par les agents publics jouissant de la protection syndicale seront supprimés».
  3. 490. L’organisation plaignante souligne également que, lorsque l’institution a eu connaissance de l’enregistrement du comité directeur du syndicat – section Antioquia, elle a interjeté des recours administratifs puis judiciaires afin d’obtenir son annulation. Finalement, après le prononcé du jugement du Tribunal supérieur de Medellín, l’autorité administrative du travail a ordonné l’enregistrement du comité directeur du SINTRACOMUNICACIONES – section Antioquia.
  4. 491. L’organisation plaignante fait savoir que, pendant ce temps, deux dirigeants syndicaux ont reçu une réponse à leurs demandes concernant le respect du droit de protection syndicale par l’institution et que cette réponse était rédigée en ces termes: «tant que la résolution relative à l’enregistrement ne sera pas confirmée, ADPOSTAL, qui est en liquidation, s’abstiendra de reconnaître ce droit, d’autant plus que l’issue des recours qui ont été interjetés contre la résolution no 01685 du 9 octobre 2006 n’est pas encore connue».
  5. 492. Le 19 décembre 2007, l’organisation plaignante a présenté une demande de réintégration auprès du Tribunal du travail du district de Medellín en application du droit de protection syndicale prévu par la législation; ce tribunal a décidé, le 10 juin 2008, d’ordonner à l’institution de réintégrer les membres du comité directeur à leur poste de travail et de leur verser les traitements et prestations sociales qui leur étaient dus depuis le 28 décembre 2006. Après un recours en appel, le 11 août 2008, le Tribunal supérieur de Medellín a révoqué le jugement en première instance et acquitté l’institution au motif que le délai de présentation de la demande judiciaire de réintégration avait été dépassé. L’organisation plaignante fait savoir qu’elle a introduit une action en tutelle contre ce jugement auprès de la Chambre du travail de la Cour suprême de justice, mais cette autorité a décidé de rejeter ce recours et, par la suite, la Cour constitutionnelle a décidé de ne pas réexaminer la requête.

B. Réponse du gouvernement

B. Réponse du gouvernement
  1. 493. Par une communication du 15 septembre 2011, le gouvernement indique que, compte tenu de la non-viabilité économique et financière de ADPOSTAL, il a décidé, par le décret no 2853 du 25 août 2006, le démantèlement de l’institution et le début du processus de liquidation, qu’il a confié à la fiduciaire La Previsora S.A. (FIDUPREVISORA S.A.), la désignant liquidatrice de ADPOSTAL. Le 30 décembre 2008, date de la signature de l’accord final, il a été mis un terme à l’existence de l’institution à toutes fins juridiques.
  2. 494. Concernant les procédures entamées aux fins de la levée du droit de protection syndicale, le rapport définitif de reddition des comptes de la liquidation donne à connaître la situation à cet égard au terme de la liquidation, à savoir: «dans le cadre de la liquidation, les mesures permettant le licenciement des travailleurs protégés par le droit syndical ont été mises en place. Elles ont été prises le 25 octobre 2006; 177 travailleurs bénéficiant de la protection syndicale ont entamé une action dans le cadre de 136 procès, compte tenu des certifications émises par le ministère de la Protection sociale concernant les syndicats et leurs comités directeurs; cependant, par la suite, le ministère a procédé à une mise à jour des informations, d’où le retrait de 61 requêtes provenant de 39 travailleurs bénéficiant de la protection syndicale; cela s’explique par le fait qu’un même travailleur bénéficiaire de la protection syndicale peut en bénéficier par le biais de son appartenance à divers syndicats. (…) Après la signature de la liquidation qui est alors devenue définitive, et en dépit de l’absence d’une autorisation judiciaire de levée de la protection syndicale, ce droit prend fin du fait de la non-existence juridique de l’entité, conformément au concept émis par le Plan de modernisation de l’administration publique 10.»
  3. 495. Le gouvernement souligne que la suppression des postes et la liquidation de l’institution étaient dues à des problèmes économiques et financiers; l’affiliation des travailleurs n’a pas été prise en compte, et l’idée n’était pas d’attenter aux droits d’association ni à la liberté syndicale; l’objectif principal était de servir au mieux la communauté et d’éviter de porter préjudice au bien public. Le droit de protection syndicale est une garantie du droit d’association qui protège l’organisation syndicale en tentant de prévenir les actes arbitraires des employeurs qui affectent le personnel occupant des postes importants dans le syndicat, ce qui a nécessairement un effet sur le déroulement de leurs activités et la réalisation de leurs objectifs. Lorsque l’entité, l’entreprise ou l’employeur qui garantit ces privilèges syndicaux disparaît, le lien de travail disparaît également, ainsi que la garantie qui contraignait l’employeur à respecter le droit de protection syndicale de ces travailleurs.
  4. 496. Selon le gouvernement, le directeur du Programme de modernisation de l’administration a fait savoir dans le cadre d’une consultation que, «une fois la liquidation achevée, conformément à ce qui est prévu par l’alinéa 2 de l’article 8 du décret-loi no 254 de 2000, la suppression des postes serait automatique; par conséquent, même si l’entité n’a pas reçu l’autorisation judiciaire de licencier un travailleur jouissant de la protection syndicale, elle peut supprimer le poste tout en reconnaissant et versant les indemnités correspondantes». Le gouvernement souligne la bonne foi et la conformité légale des mesures prises par l’institution en liquidation; ainsi, devant le caractère obligatoire et légal de sa fermeture définitive, elle a reconnu et versé les indemnités correspondantes. De plus, outre la légalité certaine du licenciement des travailleurs jouissant de la protection syndicale, on ne saurait contraindre une institution en liquidation à rester en activité une fois que le processus de liquidation est achevé, uniquement parce qu’elle attend la sentence d’un juge du travail, qui d’ailleurs peut n’intervenir qu’après plusieurs années. Une telle manière d’agir, en plus d’être contraire à la législation nationale, va à l’encontre des principes constitutionnels de rapidité, d’économie et d’efficacité qui régissent l’action des autorités et des organes du pays, sans parler des coûts élevés que cela impliquerait.
  5. 497. A cet égard, le gouvernement confirme les mesures administratives et judiciaires qui ont été prises, et il ajoute que la Coordination du groupe de travail de l’emploi et de la sécurité sociale a décidé de révoquer la résolution relative à l’enregistrement du syndicat au motif que le quorum n’avait pas été atteint lors de l’élection du comité directeur. Le gouvernement souligne que, dans le cas présent, des décisions administratives du travail et des décisions judiciaires ont été prises dans l’exercice des fonctions et des attributions propres à la séparation des pouvoirs publics, par la branche judiciaire du Pouvoir public, qui est indépendante de la branche exécutive, et c’est pourquoi le gouvernement respecte et accueille ses décisions.

C. Conclusions du comité

C. Conclusions du comité
  1. 498. Le comité prend note du fait que, dans le cas présent, l’organisation plaignante allègue le refus d’enregistrer le comité directeur du Syndicat des travailleurs des communications, des secteurs connexes et du transport (SINTRACOMUNICACIONES) – section Antioquia (problème qui a trouvé sa solution après divers recours administratifs et judiciaires), ainsi que le licenciement, le 26 décembre 2006, des membres du comité directeur du syndicat de référence au moment de la liquidation de l’Administration postale nationale – ADPOSTAL – en dépit du fait que ces travailleurs jouissaient du droit de protection syndicale et, par conséquent, ne pouvaient être licenciés sans une autorisation judiciaire préalable.
  2. 499. Le comité note que le gouvernement indique que: 1) devant la non-viabilité de l’institution sur les plans économique et financier, il a décidé son démantèlement et le début du processus de liquidation sans intention d’attenter aux droits syndicaux; 2) une fois que la liquidation définitive de l’institution a été signée, même en l’absence d’autorisation judiciaire concernant la levée du droit de protection syndicale, ce droit prend fin (en l’occurrence le droit à la stabilité de l’emploi) étant donné la non-existence juridique de l’institution, conformément au concept émis par le Plan de modernisation de l’administration publique 10; 3) le directeur du Programme de modernisation de l’administration a fait savoir dans le cadre d’une consultation que, «une fois la liquidation achevée, conformément à ce qui est prévu par l’alinéa 2 de l’article 8 du décret-loi no 254 de 2000, la suppression des postes serait automatique; par conséquent, même si l’entité n’a pas reçu l’autorisation judiciaire de licencier un travailleur jouissant du droit de la protection syndicale, elle peut supprimer le poste tout en reconnaissant et versant les indemnités correspondantes; 4) le gouvernement souligne la bonne foi et la conformité légale des mesures prises par l’institution en liquidation; ainsi, devant le caractère obligatoire et légal de sa fermeture définitive, elle a reconnu et versé les indemnités correspondantes; 5) dans ces conditions, on ne saurait contraindre l’institution en liquidation à conserver son activité uniquement parce qu’elle attend la sentence d’un juge du travail qui, d’ailleurs, peut n’intervenir qu’après plusieurs années; 6) lorsque l’institution, l’entreprise ou l’employeur disparaît, le lien de travail ainsi que la garantie qui obligeait l’employeur à respecter le droit de protection syndicale de ces travailleurs disparaissent également; 7) concernant ce cas, des décisions administratives du travail et des décisions judiciaires ont été prises au plus haut niveau dans ce sens, et le gouvernement déclare les respecter et les accueillir.
  3. 500. Compte tenu des informations qui ont été communiquées, le comité entend souligner qu’il ne lui appartient pas de se prononcer sur la question de la rupture du contrat de travail par congédiement, sauf dans le cas où le régime de congédiement implique une discrimination antisyndicale. [Voir Recueil de décisions et de principes du Comité de la liberté syndicale, cinquième édition, 2006, paragr. 779.] Le comité constate que, s’agissant de la liquidation et de la disparition de l’Administration postale nationale – ADPOSTAL, la totalité des travailleurs ont été licenciés au terme du processus de liquidation et non pas seulement les membres du comité directeur du syndicat en question. En outre, la question du droit de protection syndicale prévu par la législation nationale a été résolue par les tribunaux. Dans ces conditions et étant donné les explications données par le gouvernement concernant la légalité des licenciements et des sentences judiciaires à cet égard, le comité ne poursuivra pas l’examen de ces allégations.

Recommandation du comité

Recommandation du comité
  1. 501. Au vu des conclusions qui précèdent, le comité invite le Conseil d’administration à décider qu’il n’y a pas lieu de poursuivre l’examen de ce cas.
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