Allégations: Assassinats, menaces et actes de violence à l’encontre de
syndicalistes et de membres de leurs familles; licenciements antisyndicaux et refus
d’entreprises privées et d’institutions publiques d’exécuter les injonctions de
réintégration prononcées par l’autorité judiciaire; harcèlement de
syndicalistes
- 310. Le comité a examiné ce cas pour la dernière fois à sa réunion de
juin 2013 et, à cette occasion, a présenté un rapport intérimaire au Conseil
d’administration. [Voir 368e rapport, approuvé par le Conseil d’administration à sa
318e session (juin 2013), paragr. 411 à 424.]
- 311. Le gouvernement a fourni des éléments de réponse dans des
communications en date des 4 et 8 juillet 2013, 14 mars, 7 et 25 mai 2014.
- 312. Le Guatemala a ratifié la convention (no 87) sur la liberté
syndicale et la protection du droit syndical, 1948, ainsi que la convention (no 98) sur
le droit d’organisation et de négociation collective, 1949.
A. Examen antérieur du cas
A. Examen antérieur du cas- 313. A sa réunion de juin 2013, le comité a formulé les recommandations
suivantes [voir 368e rapport, paragr. 424]:
- a) Le comité
regrette que, malgré le temps écoulé depuis qu’il a examiné ce cas pour la dernière
fois, le gouvernement n’ait pas envoyé d’observations sur l’ensemble des allégations
restées en suspens lors de l’examen du cas à ses réunions de mars 2010, mars 2011 et
juin 2012. Soulignant que certains des faits allégués sont extrêmement graves et
qu’ils se sont produits en 2004, le comité prie instamment le gouvernement de faire
parvenir sans délai toutes les informations demandées.
- b)
En ce qui concerne l’assassinat du dirigeant syndical Julio Rolando Raquec, le
comité prie instamment le gouvernement de prendre toutes les mesures nécessaires
pour que les auteurs et instigateurs de ce crime, ainsi que le mobile de ce dernier,
soient identifiés et que les coupables soient jugés et condamnés par les tribunaux.
Le comité prie le gouvernement de le tenir informé de tout fait nouveau sur la
question.
- c) En ce qui concerne la situation de l’épouse
de M. Julio Raquec, le comité s’attend à ce que le gouvernement prenne les mesures
appropriées pour assurer la sécurité de cette personne et celle de ses
enfants.
- d) En ce qui concerne l’allégation relative aux
menaces de mort proférées à l’encontre de membres du Syndicat professionnel des
vendeurs ambulants d’Antigua, le comité prie instamment le gouvernement de prendre
des mesures immédiates pour établir un mécanisme de protection en faveur des
personnes victimes de ces menaces et pour instituer sans délai une enquête
judiciaire indépendante, menée avec diligence, sur les allégations en question. Le
comité prie le gouvernement de le tenir informé du résultat de ces mesures.
- e) En ce qui concerne les allégations relatives à la tentative
d’assassinat ayant visé M. Marcos Álvarez Tzoc, le comité prie à nouveau le
gouvernement de le tenir informé de l’exécution de la peine prononcée par le
tribunal pénal et prie instamment le gouvernement de prendre des mesures immédiates
pour établir un mécanisme de protection en faveur de M. Marcos Álvarez Tzoc.
- f) Enfin, pour ce qui est du reste des allégations, compte tenu de
l’absence d’observations de la part du gouvernement, le comité réitère les
recommandations suivantes:
- – le comité demande à nouveau au
gouvernement de lui communiquer les résultats des enquêtes effectuées par la
police nationale et le procureur aux droits de l’homme au sujet des allégations
de surveillance sélective et du vol de l’ordinateur portable de M. José
E. Pinzón, secrétaire général de la CGTG;
- – en ce qui
concerne l’allégation de licenciement de travailleurs à la municipalité de
Samayac, exploitation agricole El Tesoro, pour avoir présenté des cahiers de
revendications en vue de négocier une convention collective malgré une
ordonnance judiciaire de réintégration, le comité invite à nouveau le syndicat
auquel appartiennent lesdits syndicalistes à demander à l’autorité judiciaire
compétente de faire appliquer le jugement favorable à leur réintégration;
et
- – en ce qui concerne les allégations de menaces qui
auraient été proférées contre les travailleurs de l’aéronautique civile qui
s’étaient rassemblés face au bâtiment pour protester contre les exactions
constantes de l’administration (selon les allégations, le chef de la maintenance
de l’aéronautique les a menacés en déclarant que, pour cinq minutes de retard
dans leur travail, il leur serait dressé un procès-verbal et qu’ils seraient
licenciés, des photos ayant même été prises ensuite) et, en ce qui concerne
l’intimidation par des éléments de la sécurité des membres du syndicat qui se
dirigeaient vers le local où allait se tenir l’assemblée générale, le comité
regrette que le gouvernement n’ait pas envoyé ses observations et le prie
instamment de le faire sans délai.
- g) Le
comité s’attend fermement à ce que les engagements pris par le gouvernement dans le
protocole d’accord signé le 26 mars 2013 entre le gouvernement du Guatemala et le
groupe des travailleurs du Conseil d’administration du BIT se traduisent par des
mesures et des résultats concrets concernant les allégations de ce cas qui restent
en suspens. Le comité prie instamment le gouvernement de l’informer sans délai des
résultats de ces mesures.
- h) Le comité attire spécialement
l’attention du Conseil d’administration sur le caractère extrêmement grave et urgent
du présent cas.
B. Réponse du gouvernement
B. Réponse du gouvernement- 314. Dans des communications en date des 7 et 25 mai 2014, le
gouvernement a fait parvenir des informations sur l’état des enquêtes relatives à
l’assassinat, le 28 novembre 2004, de M. Julio Rolando Raquec Ishen, secrétaire général
de la Fédération syndicale des travailleurs du secteur informel. Comme dans les
communications précédentes fournies par le gouvernement à ce sujet et prises en
considération par le comité lors de son dernier examen du cas, le gouvernement indique
qu’avant l’assassinat l’épouse du défunt était victime d’actes d’extorsion de la part de
malfaiteurs. Il rappelle que, d’après la version des faits donnée par les témoins
oculaires, en particulier l’épouse de la victime, il a été possible d’identifier l’un
des suspects, identification corroborée par une autre personne qui se serait trouvée sur
le lieu du crime, mais que, faute de collaboration de l’épouse et d’autres éléments de
preuve, il n’a pas été possible de poursuivre le suspect, si bien que l’enquête a été
suspendue dans l’attente d’éléments nouveaux. Dans une communication en date du
30 juillet 2014, le gouvernement a transmis le rapport de la Commission internationale
contre l’impunité au Guatemala (CICIG) sur l’état des enquêtes relatives à la mort de
syndicalistes au Guatemala, dans laquelle cette instance a analysé les enquêtes menées
par le ministère public du Guatemala à propos de 56 des 58 cas d’homicide dénoncés
devant le Comité de la liberté syndicale, dont celui de M. Julio Rolando Raquec Ishen.
D’après le rapport de la CICIG, le mobile du crime était que l’intéressé refusait de se
soumettre aux tentatives d’extorsion dont il faisait l’objet dans la région où il
résidait, et le cas fait actuellement l’objet d’une enquête.
- 315. Dans une communication en date du 8 juin 2013, le gouvernement a
fait parvenir les informations fournies par le bureau du procureur métropolitain du
ministère public au sujet du vol de l’ordinateur portable de M. José E. Pinzón,
secrétaire général de la CGTG. Le bureau du procureur métropolitain indique que,
conformément aux dispositions du Code de procédure pénale (modification no 7-2011),
attendu qu’à ce jour il n’existe pas d’élément probant désignant les responsables des
faits et comme il n’est pas possible de verser de nouvelles pièces au dossier en raison
du temps qui s’est écoulé, l’affaire a été classée.
- 316. Dans les communications mentionnées aux paragraphes précédents, le
gouvernement indique également que, depuis cette année, le ministère public participe à
un groupe de travail mis en place par le ministère du Travail au sein duquel sont
représentés le pouvoir judiciaire, le ministère de l’Intérieur et le ministère des
Relations extérieures, qui est chargé de donner effet à la convention no 87, laquelle
fait obligation de sanctionner les délits commis contre des syndicalistes. Le
gouvernement indique également qu’il a engagé une équipe d’enquêteurs et du personnel
d’appui qui, sous la direction des procureurs compétents et la procureure générale,
contribuent à faire avancer l’enquête et à sanctionner les délits en question.
C. Conclusions du comité
C. Conclusions du comité- 317. Le comité regrette que, malgré le temps écoulé depuis qu’il a
examiné ce cas pour la dernière fois, le gouvernement n’ait pas envoyé d’observations
sur l’ensemble des allégations restées en suspens lors de l’examen du cas à ses réunions
de mars 2010, mars 2011, juin 2012 et juin 2013. Soulignant que certains des faits
allégués sont extrêmement graves et qu’ils se seraient produits en 2004, le comité prie
de nouveau instamment le gouvernement de lui faire parvenir toutes les informations
demandées dans un très proche avenir.
- 318. Le comité prend note des informations fournies par le gouvernement
concernant les investigations menées sur l’assassinat du dirigeant syndical, M. Julio
Rolando Raquec, dans lesquelles il est rappelé une nouvelle fois que le mobile du crime
pourrait être l’extorsion de fonds dont aurait été victime l’épouse du défunt. Le comité
prend note également du rapport de la CICIG qui analyse les enquêtes menées par le
ministère public du Guatemala sur 56 des 58 cas d’homicide dénoncés devant le Comité de
la liberté syndicale et dans lequel il est indiqué que le mobile du meurtre de M. Raquec
était que celui-ci refusait de se soumettre aux tentatives d’extorsion de fonds dont il
faisait l’objet dans la région où il résidait, et que le cas fait l’objet d’une
enquête.
- 319. Le comité regrette une nouvelle fois que, malgré l’identification
d’un suspect, l’enquête n’ait pas permis de juger ni de condamner les meurtriers. Le
comité observe en particulier que le gouvernement ne fait état d’aucune initiative
nouvelle visant à obtenir la collaboration des deux témoins oculaires de l’assassinat,
alors qu’à l’occasion de son dernier examen du cas le comité avait pris note des
indications du gouvernement selon lesquelles celui-ci espérait que le deuxième témoin
oculaire allait collaborer. Le comité rappelle que l’absence de jugements contre les
coupables entraîne une impunité de fait qui renforce le climat de violence et
d’insécurité, ce qui est extrêmement dommageable pour l’exercice des activités
syndicales. [Voir Recueil de décisions et de principes du Comité de la liberté
syndicale, cinquième édition, 2006, paragr. 52.] Le comité souligne que, pour lutter
contre cette impunité, il est essentiel que les auteurs et instigateurs de cet
assassinat, ainsi que le mobile de ce dernier, soient identifiés de manière définitive
et que les coupables soient jugés et condamnés par les tribunaux. Par ailleurs, le
comité regrette profondément de ne pas avoir reçu de nouvelles observations du
gouvernement au sujet des mesures prises pour garantir la sécurité de l’épouse de
M. Julio Raquec, Mme Mérida Coy et de ses enfants. Le comité s’attend à ce que, sans
préjudice de la participation de Mme Mérida Coy à l’enquête relative à l’assassinat de
son mari, le gouvernement prenne sans délai les mesures appropriées pour assurer la
sécurité de cette personne et celle de ses enfants. Le comité prie le gouvernement de le
tenir informé de tout fait nouveau à cet égard.
- 320. En ce qui concerne l’allégation relative à la surveillance ciblée de
M. José E. Pinzón, secrétaire général de la CGTG, et au vol de son ordinateur portable,
le comité prend note des informations fournies par le gouvernement, qui indique que le
bureau du procureur métropolitain du ministère public a classé l’affaire pour ce qui est
du vol de l’ordinateur pour défaut d’élément probant qui permette d’identifier les
responsables des faits et que, compte tenu du temps qui s’est écoulé depuis la
dénonciation de ces faits, il n’était pas possible de verser au dossier la moindre pièce
à conviction.
- 321. En ce qui concerne les allégations restantes, compte tenu de
l’absence d’observations de la part du gouvernement, le comité réitère une nouvelle fois
les recommandations déjà reproduites au paragraphe 4 du présent rapport.
- 322. Dans son précédent examen du cas, le comité avait pris note de la
déclaration du gouvernement selon laquelle le ministère public du Guatemala avait décidé
de créer avec les principales centrales syndicales du pays un groupe de travail de haut
niveau chargé d’examiner les cas de violence contre des syndicalistes, ainsi que de la
signature, le 26 mars 2013, d’un protocole d’accord entre le gouvernement du Guatemala
et le groupe des travailleurs du Conseil d’administration du BIT, dans lequel le
gouvernement du Guatemala s’est engagé, entre autres, à diligenter au plus tôt des
enquêtes indépendantes afin de déterminer les responsabilités et de sanctionner les
auteurs et les commanditaires des assassinats de syndicalistes, et à garantir la
sécurité des travailleurs et des travailleuses et, via des mesures de protection
efficaces, celle des dirigeants syndicaux et des syndicalistes contre la violence et les
menaces, afin qu’ils puissent mener à bien leurs activités syndicales. Le comité prend
note également des nouvelles informations fournies par le gouvernement concernant
l’engagement d’un groupe d’enquêteurs et de personnel d’appui par le ministère public
afin de faire avancer l’enquête et de mieux sanctionner les délits à l’encontre de
syndicalistes, ainsi que la collaboration entre le ministère public et la CICIG. Tout en
saluant ces informations, le comité regrette que les engagements et initiatives
susmentionnés ne se soient pas traduits par des résultats concrets concernant les
allégations du présent cas qui restent en suspens. Le comité exprime de nouveau le ferme
espoir que les engagements pris par le gouvernement dans le protocole d’accord signé le
26 mars 2013 et les initiatives prises pour lui donner effet se traduiront en résultats
concrets concernant les allégations du présent cas. Le comité prie instamment le
gouvernement de le tenir informé dans les plus brefs délais des résultats de ces
initiatives.
Recommandations du comité
Recommandations du comité- 323. Au vu des conclusions intérimaires qui précèdent, le comité invite
le Conseil d’administration à approuver les recommandations suivantes:
- a) En ce
qui concerne les enquêtes relatives à l’assassinat du dirigeant syndical Julio
Rolando Raquec, le comité prie de nouveau instamment le gouvernement de prendre
toutes les mesures nécessaires pour que les auteurs et instigateurs de ce crime,
ainsi que le mobile de ce dernier, soient identifiés de manière définitive et que
les coupables soient jugés et condamnés par les tribunaux. Par ailleurs, le comité
attend du gouvernement qu’il prenne sans délai des mesures pour garantir la sécurité
de la veuve de M. Julio Raquec et celle de ses enfants. Le comité prie le
gouvernement de le tenir informé de tout fait nouveau à cet égard.
- b) Le
comité regrette que, malgré le temps écoulé depuis qu’il a examiné ce cas pour la
dernière fois, le gouvernement n’ait pas envoyé d’observations sur l’ensemble des
allégations restées en suspens lors de l’examen du cas à ses réunions de mars 2010,
mars 2011, juin 2012 et juin 2013. Soulignant que certains des faits allégués sont
extrêmement graves et qu’ils se seraient produits en 2004, le comité s’attend à ce
que le gouvernement lui fasse parvenir toutes les informations demandées dans un
futur très proche. A cet égard, le comité réitère une fois de plus les
recommandations suivantes:
- – En ce qui concerne l’allégation relative aux
menaces de mort proférées à l’encontre de membres du Syndicat professionnel des
vendeurs ambulants d’Antigua, le comité prie de nouveau instamment le
gouvernement de prendre des mesures immédiates pour établir un mécanisme de
protection en faveur des personnes victimes de ces menaces et pour instituer
sans délai une enquête judiciaire indépendante sur les allégations en question.
Le comité prie le gouvernement de le tenir informé du résultat de ces
mesures.
- – En ce qui concerne les allégations relatives à la tentative
d’assassinat ayant visé M. Marcos Álvarez Tzoc, le comité prie à nouveau le
gouvernement de le tenir informé de l’exécution de la peine prononcée par le
tribunal pénal et prie instamment le gouvernement de prendre des mesures
immédiates pour établir un mécanisme de protection en faveur de M. Marcos
Álvarez Tzoc.
- – En ce qui concerne l’allégation de licenciement de
travailleurs à la municipalité de Samayac, exploitation agricole El Tesoro, pour
avoir présenté des cahiers de revendications en vue de négocier une convention
collective malgré une ordonnance judiciaire de réintégration, le comité invite à
nouveau le syndicat auquel appartiennent lesdits syndicalistes à demander à
l’autorité judiciaire compétente de faire appliquer le jugement favorable à leur
réintégration.
- – En ce qui concerne les allégations de menaces qui
auraient été proférées contre les travailleurs de l’aéronautique civile qui
s’étaient rassemblés face au bâtiment pour protester contre les exactions
constantes de l’administration (selon les allégations, le chef de la maintenance
de l’aéronautique les a menacés en déclarant que, pour cinq minutes de retard
dans leur travail, il leur serait dressé un procès-verbal et qu’ils seraient
licenciés, des photos ayant même été prises ensuite) et en ce qui concerne
l’intimidation, par des membres de la sécurité, des syndicalistes qui se
dirigeaient vers le local où allait se tenir l’assemblée générale du syndicat,
le comité regrette que le gouvernement n’ait pas envoyé ses observations et le
prie instamment de le faire sans délai.
- c) Le comité exprime
de nouveau le ferme espoir que les engagements pris par le gouvernement dans le
protocole d’accord signé le 26 mars 2013 entre le gouvernement du Guatemala et le
groupe des travailleurs du Conseil d’administration du BIT, ainsi que les
initiatives prises pour lui donner effet, se traduiront en résultats concrets
concernant les allégations du présent cas qui restent en suspens. Le comité prie
instamment le gouvernement de le tenir informé dans les plus brefs délais des
résultats de ces initiatives.
- d) Le comité attire spécialement l’attention
du Conseil d’administration sur le caractère extrêmement grave et urgent du présent
cas.