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Rapport où le comité demande à être informé de l’évolution de la situation - Rapport No. 374, Mars 2015

Cas no 3050 (Indonésie) - Date de la plainte: 17-DÉC. -13 - Clos

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Allégations: L’organisation plaignante dénonce une attaque organisée par des organisations paramilitaires contre des travailleurs participant à une grève nationale pacifique en octobre 2013 et les effets négatifs éventuels de la loi relative aux organisations de masse adoptée en juillet 2013 sur l’exercice des droits à la liberté syndicale et à la liberté d’expression

  1. 436. La plainte figure dans des communications de la Confédération syndicale internationale (CSI) en date des 17 décembre 2013 et 4 décembre 2014.
  2. 437. Le gouvernement a fait parvenir sa réponse aux allégations dans des communications en date des 28 février et 9 mai 2014.
  3. 438. L’Indonésie a ratifié la convention (no 87) sur la liberté syndicale et la protection du droit syndical, 1948, et la convention (no 98) sur le droit d’organisation et de négociation collective, 1949.

A. Allégations de l’organisation plaignante

A. Allégations de l’organisation plaignante
  1. 439. Dans sa communication du 17 décembre 2013, l’organisation plaignante allègue que, le 31 octobre 2013, une attaque organisée par des organisations paramilitaires a été menée contre des travailleurs participant à une grève nationale pacifique pour exiger une augmentation du salaire minimum, la mise en place d’une assurance-maladie avant janvier 2014, l’adoption du projet de loi sur les travailleurs domestiques et pour protester contre l’externalisation, en particulier dans les entreprises d’Etat, et contre l’adoption de la loi relative aux organisations de masse («Ormas»), no 17 de 2013, devant la PT Abacus dans la zone de l’East Jakarta Industrial Park (EJIP), à Cikarang, Bekasi.
  2. 440. L’organisation plaignante allègue que, selon les informations disponibles, des policiers du district de Bekasi déployés sur le site pendant la grève nationale n’ont pris aucune mesure pour mettre fin à l’attaque ou pour protéger les travailleurs, laissant ainsi se poursuivre les actes de violence.
  3. 441. L’organisation plaignante indique que 28 travailleurs des entreprises Abacus, Chaolong, Duta Laserindo, Tsuang Hine, Tristar, Gunze Furindo, Enkei, Fatasarana, Cheil Abrasive, Kyungsin, Titian Indah, Nusahadi et Tatalogistic ont été blessés par les hommes de main armés de couteaux, de barres de fer et de machettes, dont 17 gravement blessés et hospitalisés. Trois d’entre eux se trouvaient dans un état critique par suite de ces agressions physiques.
  4. 442. Selon l’organisation plaignante, les autorités ont arrêté neuf personnes suite à ces attaques; toutefois, selon ses informations, les personnes arrêtées ne comprennent pas les responsables de l’organisation des attaques et ne représentent pas la totalité de celles ayant pris part aux agressions. De l’avis de l’organisation plaignante, le gouvernement devrait prendre toutes les mesures nécessaires pour arrêter et poursuivre les responsables ayant planifié et mené ces attaques et pour sanctionner les policiers qui ont laissé ces agressions se poursuivre. Le gouvernement doit également veiller à ce que la police réagisse à l’avenir comme il convient pour garantir le droit des travailleurs de faire grève pour ce type de questions.
  5. 443. En outre, l’organisation plaignante déclare que la loi relative aux organisations de masse, très controversée, a été promulguée le 2 juillet 2013, en dépit des inquiétudes considérables et parfaitement fondées suscitées par cette loi en termes d’impact sur les droits humains fondamentaux. Selon l’organisation plaignante, plusieurs dispositions de la loi portent incontestablement atteinte aux droits à la liberté d’association et d’expression consacrés par plusieurs instruments internationaux relatifs aux droits de l’homme et devraient à ce titre être dénoncées. La loi n’établit toutefois pas clairement dans quelle mesure elle s’applique ou non aux syndicats. L’organisation plaignante exprime sa profonde préoccupation qu’une telle ambiguïté puisse être exploitée par le gouvernement pour appliquer à sa discrétion la loi aux syndicats.
  6. 444. Dans le cas où le gouvernement confirmerait que la loi relative aux organisations de masse s’applique effectivement aux syndicats, l’organisation plaignante considère que les dispositions ci-après contreviennent à la convention no 87 (analyse limitée aux extraits accessibles au public en anglais) et souhaite demander au comité d’entreprendre une étude exhaustive de la loi (jointe à la plainte à Bahasa) pour examiner d’autres violations potentielles de la convention:
    • – L’article 2 impose à toute organisation enregistrée l’obligation que ses principes fondamentaux ne soient pas en contradiction avec le Pancasila, le fondement philosophique officiel, qui exige la croyance «dans le Dieu seul et unique», une «humanité juste et civilisée», l’«unité de l’Indonésie», la «démocratie» et la «justice sociale».
    • – L’article 5 restreint les activités des organisations à huit objectifs limités consistant notamment à perpétuer les valeurs de la religion et de la croyance en Dieu; à préserver et perpétuer les normes, les valeurs, la morale, l’éthique et la culture; ou à instaurer, perpétuer et renforcer l’unité de la nation.
    • – L’article 21(b) exige que les organisations «protègent l’unité et l’intégrité de la République unitaire d’Indonésie».
    • – L’article 52 de la loi réduit les activités des organisations étrangères, qui doivent obtenir un permis du ministère des Affaires étrangères pour pouvoir exercer leurs activités. Elles ne doivent ni perturber la «stabilité et l’unicité» de l’Indonésie ni mener des «activités politiques concrètes» ou de collecte de fonds ou des activités «qui déstabilisent les relations diplomatiques».
    • – L’article 59(2) dispose que l’objectif d’une organisation est de «préserver les valeurs religieuses et la croyance en Dieu»; et la loi interdit «les insultes, le blasphème ou la diffamation contre toute religion reconnue en Indonésie».
    • – L’article 59(4) interdit la diffusion d’enseignements et de croyances en contradiction avec le Pancasila, tels que le «communisme/marxisme-léninisme» et l’«athéisme».
  7. 445. L’organisation plaignante allègue que ces dispositions pourraient aisément être invoquées pour s’ingérer, par exemple, dans le droit des syndicats à la liberté de s’exprimer sans contrainte, d’organiser leurs propres activités et d’élaborer leurs programmes, de faire grève ou de se livrer à toute autre activité concertée (comme étant potentiellement contraire au Pancasila). En outre, l’article 52 pourrait être utilisé pour interdire les activités d’organisations syndicales internationales auxquelles sont affiliés des syndicats indonésiens pour mener des activités syndicales légitimes. S’il se confirme que la loi s’applique effectivement aux syndicats, ces dispositions et d’autres doivent être modifiées ou abrogées.
  8. 446. Dans sa communication en date du 4 décembre 2014, l’organisation plaignante formule de nouvelles allégations concernant des attaques récentes de la police à l’encontre de syndicaliste manifestant pacifiquement en faveur de l’augmentation du salaire minimum dans la ville de Bekasi à l’est de l’île de Java et à Bintan et Batam dans les îles Riau.

B. Réponse du gouvernement

B. Réponse du gouvernement
  1. 447. Dans sa communication du 28 février 2014, le gouvernement répond tout d’abord aux allégations de violences commises contre des participants à la grève au cours d’une action menée par les travailleurs devant la PT Abacus dans la zone de l’East Jakarta Industrial Park (EJIP), Cikarang, Bekasi, dans le Java occidental, le 31 octobre 2013. Le gouvernement estime nécessaire de clarifier les modalités de l’action entreprise par le syndicat, qu’il s’agisse d’une grève ou d’une manifestation.
  2. 448. La manifestation nationale conduite par la Confédération des syndicats d’Indonésie (KSPI) dans la zone industrielle située dans le district de Bekasi a mobilisé quelque 30 000 personnes. En se fondant sur la lettre de la KSPI no 387/DEN-KSPI/X/2013 du 24 octobre 2013 concernant l’avis de manifestation, la police a délivré l’accusé de réception de l’avis (STTP) no STTP/YANMAS/312/X/2013/Baintelkam du 30 octobre 2013, indiquant les dispositions à prendre par les participants à la manifestation. Le gouvernement déclare que, de ce fait, dans le cadre de sa manifestation, le syndicat n’aurait pas dû avoir recours à la mobilisation en masse, au blocage de la route, au port d’armes et à d’autres éléments pouvant porter préjudice à d’autres personnes ni commettre des actes d’anarchie. Toutefois, selon le gouvernement, la KSPI n’a tenu aucun compte de ces dispositions (il a fait venir en masse d’autres travailleurs que des membres de la KSPI et a bloqué la route).
  3. 449. Pour le gouvernement, les affrontements entre la communauté et les travailleurs ont été déclenchés par les actions des travailleurs, qui se sont rués en masse dans les usines pour forcer les travailleurs qui ne voulaient pas manifester à se joindre au convoi se dirigeant vers la zone résidentielle, en bloquant les accès ou les voies publiques. Le gouvernement est convaincu que ces actions ont suscité l’émotion de la communauté car les travailleurs avaient promis par voie d’accord de cantonner leurs activités à la grève ou à l’interruption de la production, et ils avaient rompu leur engagement. Selon le gouvernement, les affrontements auxquels a donné lieu la mobilisation de masse conduite par la communauté ont été essentiellement dus à la crainte de celle-ci liée à des expériences précédentes et à des informations relatives à d’autres actions menées par des travailleurs, qui avaient porté atteinte à l’obligation du maintien de la paix civile et du service public. La communauté s’inquiétait que les activités des travailleurs puissent perturber le climat de l’investissement ou pousser des investisseurs à quitter le district de Bekasi, ce qui aurait sans aucun doute des conséquences directes sur les membres de la communauté, qui dépendent de l’existence des sociétés dans cette région, tels que les petites entreprises ou les propriétaires de services de gestion des déchets, de location immobilière, de restauration et d’ojeg (motocyclettes utilisées pour les transports publics).
  4. 450. Le gouvernement soulève ensuite la question de savoir si les travailleurs ont eu recours à une grève ou à une manifestation. Il indique que la loi no 13 de 2003 relative à la main d’œuvre réglemente l’action de grève. L’article 1 de ladite loi définit la grève comme une action collective de travailleurs organisée et menée par un syndicat pour cesser ou ralentir le travail. Pour sa mise en œuvre, les travailleurs doivent se conformer aux conditions requises des articles 137 et 140. L’article 137 dispose que la grève est un droit fondamental des travailleurs et des syndicats et qu’elle devra être organisée légalement, sans heurt et pacifiquement après l’échec d’une négociation. En vertu de l’article 140(1) et (2), les travailleurs et les syndicats qui ont l’intention d’organiser une grève ont l’obligation, dans un délai d’au moins sept jours avant la mise en œuvre effective d’une grève, de donner notification écrite de cette intention de faire grève à l’entrepreneur et à l’organisme public local en charge des questions de main-d’œuvre. La notification devra au moins comporter: i) la date (jour, date et heure) du début et de la fin de la grève; ii) le lieu de la grève; iii) les motifs de la grève; et iv) les signatures des présidents et du secrétaire du syndicat gréviste et/ou les signatures de chacun des présidents et des secrétaires des syndicats participant à la grève, qui devront être tenus responsables de celle-ci. Dans le cas d’une grève menée par des travailleurs qui ne sont pas membres du syndicat, la notification doit être signée par le(s) représentant(s) des travailleurs désigné(s) pour être le(s) coordonnateur(s) et/ou responsable(s) de la grève. Dans le cas d’une grève qui ne respecte pas les dispositions de l’article 140, l’employeur peut prendre des mesures pour protéger les outils de production et les ressources de la société de la manière suivante: i) en interdisant aux travailleurs de faire grève sur les sites où se trouvent des procédés de production; ou ii) si nécessaire, en interdisant aux travailleurs de faire grève sur le site de la société. Le gouvernement récapitule les conditions légales requises pour une grève, à savoir la tenue de négociations préalables entre les syndicats et les employeurs et, faute de parvenir à un accord (échec de la négociation), la remise consécutive d’un préavis de grève.
  5. 451. Le gouvernement déclare en outre que, aux termes de l’article 1, point 3, de la loi no 9 de 1998 relative à la liberté d’expression en public, une manifestation est une activité entreprise par une personne ou plus pour exprimer son/leur opinion (verbalement, par écrit, etc.) de manière démonstrative en public, c’est-à-dire dans un lieu où quiconque peut se rendre et pouvant être vu par n’importe qui. L’article 10 dispose que la mise en œuvre de telles protestations ou manifestations devra faire l’objet d’une notification écrite adressée à au moins trois reprises au service de police local par la personne concernée, le dirigeant ou la personne en charge du groupe, 24 heures avant le début de l’activité en question.
  6. 452. Le gouvernement souligne que la mise à exécution d’une grève exige qu’un préavis soit donné par les travailleurs ou le syndicat à l’institution en charge des questions du travail ainsi qu’à l’employeur, alors que la mise en œuvre d’une manifestation exige une notification écrite donnée au service de police local. Selon les informations obtenues du bureau de police régional et du bureau régional de la main-d’œuvre de Bekasi: i) aucune négociation n’a échoué entre les travailleurs ou le syndicat et les employeurs concernant des questions relatives aux relations professionnelles; et ii) aucun préavis de grève n’a été soumis au bureau régional de la main-d’œuvre de Bekasi. Sur la base de ce qui précède, le gouvernement conclut que l’action entreprise par la KSPI ne constitue pas une grève mais plutôt une manifestation.
  7. 453. Le gouvernement souligne que, conformément à la loi relative à la liberté d’expression en public, si des actes de violence sont commis par la société civile/des organisations de masse contre des travailleurs à l’extérieur de l’entreprise, la police prend des mesures. En conséquence, la police régionale de Metro Jaya a enquêté sur 11 plaintes publiques reçues concernant les événements susmentionnés lors de la manifestation (quatre plaintes déposées auprès de la police de Bekasi et sept auprès du siège de la police nationale indonésienne). La police a pris des mesures visant à assurer le respect de la loi par une enquête sur la base du Code pénal indonésien (loi no 8 de 1981), de la loi no 2 de 2002 relative à la police nationale indonésienne et du règlement principal de la police nationale indonésienne no 14 de 2012 portant sur la gestion de l’enquête, lesdites mesures étant constituées de: i) la rédaction du rapport de police; ii) la recherche des victimes; iii) la recherche des témoins; iv) la publication des rapports médicaux écrits provenant de l’hôpital où les victimes ont été soignées; v) la saisie et l’examen des preuves relatives à une infraction pénale; vi) la détermination de dix suspects et leur arrestation dans les 18 heures consécutives à l’incident; vii) la recherche des suspects; viii) l’établissement des chefs d’accusation pesant sur les suspects; et ix) la soumission de cinq cas au Tribunal supérieur de justice (Bandung, Java occidental). Le bureau du procureur examine actuellement les pièces des dossiers soumis par l’enquêteur aux fins d’un procès. Les questions restantes font encore l’objet d’une enquête de la part de la police. Si le cas présumé enfreint le droit pénal indonésien, il sera procédé à la détermination et à l’examen du suspect, suivis du dépôt de la plainte auprès du bureau du procureur. Pendant la procédure d’enquête, la plaignante est toujours tenue informée de l’évolution de la situation.
  8. 454. De plus, dans ses communications en date du 28 février et du 9 mai 2014, le gouvernement répond à l’allégation de l’organisation plaignante selon laquelle, s’ils sont appliqués aux syndicats, plusieurs articles de la loi relative aux organisations de masse sont contraires à la convention no 87 dans la mesure où ils portent atteinte aux droits syndicaux. Cette loi remplace la loi no 8 de 1985 portant sur les organisations de la société civile, qui a été considérée non conforme au système d’Etat actuel, et est basée sur la Constitution indonésienne de 1945. Selon le gouvernement, la loi relative aux organisations de masse a été rédigée par le Parlement (en étroite collaboration avec le gouvernement); non seulement le processus de rédaction a impliqué la Chambre des représentants et le gouvernement, mais les débats sur le projet ont également impliqué diverses composantes de la communauté indonésienne, notamment des organisations de la société civile et des organisations professionnelles.
  9. 455. Le gouvernement considère que la loi offre aux organisations de la société civile un espace suffisant pour se développer et croître de façon satisfaisante, ce qui devrait s’avérer conforme à la constitution et aux principes de gouvernance d’une organisation de la société civile. Selon l’article 1 de la loi relative aux organisations de masse, une organisation de la société civile est définie comme une organisation volontairement mise en place par la société, sur la base d’aspirations, d’une volonté, de besoins, d’intérêts, d’activités et d’objectifs analogues communs, pour participer au processus de développement en vue de la réalisation des objectifs de la République unitaire de la nation d’Indonésie conformément au Pancasila.
  10. 456. Le gouvernement indique que, dans le système juridique indonésien, il est possible de soumettre à la Cour constitutionnelle un contrôle judiciaire si la teneur d’une loi, y compris la loi relative aux organisations de masse, est estimée contraire à la Constitution indonésienne. Plusieurs organisations de la société civile en Indonésie, notamment la KSPI, ont ainsi saisi la cour le 9 janvier 2014 en déposant le dossier no 3/PUU-XI1/2014 (joint à la plainte) alléguant que certaines dispositions de la loi relative aux organisations de masse violent la Constitution indonésienne. L’examen de la loi est toujours en cours. Le gouvernement conclut donc que la loi relative aux organisations de masse ne limite pas les droits constitutionnels des citoyens, y compris des syndicats, en Indonésie.
  11. 457. Le gouvernement déclare que la loi relative aux organisations de masse ne vise pas à limiter ou à entraver les droits d’organisation des travailleurs ou des employeurs. La loi reconnaît que les organisations de la société civile sont pour le gouvernement des partenaires du développement en vue de la mise en œuvre des programmes nationaux de développement. A cet égard, le gouvernement accueille favorablement la coopération avec des organisations de la société civile tant qu’elle n’est pas en contradiction avec les principes essentiels de l’Etat, tels que reconnus dans la Constitution de 1945, dont l’article 28E.3 dispose que «chaque personne devra avoir le droit à la liberté d’association, de réunion et d’expression de ses opinions», et dont l’article 28 prévoit que «la liberté d’association et de réunion, d’expression écrite et verbale d’opinions, etc., devra être réglementée par la loi». En ce qui concerne les inquiétudes que la loi relative aux organisations de masse puisse supprimer ou limiter la liberté syndicale des travailleurs, le gouvernement fait ressortir qu’elle garantit et respecte les droits des travailleurs de s’associer et d’exprimer leurs opinions tels que prévus dans la convention no 87, ratifiée par l’Indonésie en 1998. Il ajoute que le droit des travailleurs de se syndiquer a également été réglementé par la loi no 21 de 2000 relative aux syndicats.
  12. 458. Concernant les dispositions de la loi relative aux organisations de masse spécifiquement invoquées par l’organisation plaignante (art. 2, 5, 21(b), 52, 59(2) et 59(4)), le gouvernement déclare ce qui suit. L’article 2 dispose que les principes des organisations de la société civile ne doivent pas être en contradiction avec le Pancasila et la Constitution indonésienne de 1945. Le gouvernement indique qu’il s’est en permanence efforcé d’observer les préceptes humanitaires et les droits et libertés fondamentaux de l’être humain inscrits dans le Pancasila – le fondement philosophique officiel de la République unitaire d’Indonésie, la Constitution de 1945 et la législation nationale. De fait, ces préceptes, droits et libertés, tels qu’ils figurent dans le système constitutionnel et juridique, découlent de traditions, de coutumes et de la philosophie de la vie du peuple indonésien qui remontent à des temps immémoriaux. Les bases philosophiques de l’Indonésie, le Pancasila, qui constituent les «Cinq principes moraux» de la vie indonésienne, s’appuient sur des idéaux humanitaires étroitement interconnectés et inextricables. La Constitution indonésienne, qui est basée sur la philosophie nationale du Pancasila, renferme elle aussi des préceptes humanitaires et des principes de base des droits humains. Ces principes ont été incorporés dans un certain nombre de lois et règlements nationaux qui servent à protéger et à promouvoir le bien-être du peuple indonésien. En outre, le gouvernement souligne que la Constitution de 1945 consacre de nombreux principes qui s’apparentent à ceux inscrits dans la Déclaration universelle des droits de l’homme de 1948.
  13. 459. Aux termes de l’article 5 de la loi, les organisations de la société civile visent à: i) promouvoir la participation et la responsabilisation de la société; ii) servir la société; iii) défendre les valeurs morales et la foi en Dieu tout-puissant; iv) conserver et préserver les normes, les valeurs, la morale, l’éthique et la culture au sein de la société; v) sauvegarder les ressources naturelles et l’environnement; vi) développer la tolérance sociale, l’entraide et la tolérance mutuelles à l’intérieur de la société; vii) défendre, préserver et renforcer l’unité et l’intégrité de la nation; et viii) réaliser les objectifs du pays. A cet égard, le gouvernement déclare que les objectifs nationaux de l’Indonésie tels que prescrits par la Constitution de 1945 consistent à protéger l’ensemble de la population et de la patrie indonésiennes et, afin de favoriser la prospérité générale, à développer la vie intellectuelle de la nation et à contribuer à la mise en place d’un ordre mondial basé sur la liberté, la paix durable et la justice sociale. Pour atteindre ces objectifs, le gouvernement attend de toutes les composantes de la nation, notamment des organisations de la société civile, qu’elles favorisent la réalisation des objectifs du pays tels que dictés par la Constitution.
  14. 460. L’article 21(b) de la loi impose l’obligation de défendre l’unité et l’intégrité de la nation ainsi que l’intégrité de la République unitaire de la nation d’Indonésie. Le gouvernement indique que l’obligation de préserver l’unité et l’intégrité de la nation et de l’Etat indonésiens incombe à l’ensemble du peuple indonésien. Dans ce contexte, les organisations de la société civile sont elles aussi tenues de contribuer, par leurs activités, à la préservation de l’unité et de l’intégrité de la nation et de l’Etat indonésiens.
  15. 461. L’article 52 de la loi dispose que les organisations de la société civile constituées par des ressortissants étrangers tels que visés à l’article 43(2) ont l’interdiction de: i) mener toutes activités en contradiction avec la législation en vigueur; ii) troubler la stabilité et l’intégrité de la République unitaire de la nation d’Indonésie; iii) mener des activités de renseignement; iv) mener des activités politiques; v) mener toutes activités susceptibles de déstabiliser les relations diplomatiques; vi) mener toutes activités contraires à l’objet de l’organisation; vii) collecter des fonds auprès de la communauté indonésienne; et viii) utiliser des installations et des infrastructures d’organismes et d’établissements publics. Le gouvernement précise qu’il accueille favorablement les organisations de la société civile qui souhaitent participer à la mise en œuvre de ses programmes nationaux de développement. A cette fin, les organisations de la société civile étrangères sont tenues d’obtenir un permis du gouvernement et de coopérer avec ce dernier et avec les organisations de la société civile locales. Cette disposition ne vise pas à restreindre les activités des organisations de la société civile étrangères en Indonésie mais à promouvoir la transparence, le partenariat et le transfert des connaissances et des technologies aux organisations de la société civile locales. L’enregistrement de ces organisations de la société civile étrangères avant de pouvoir mener des activités est pratique courante dans bon nombre d’autres pays.
  16. 462. L’article 59(2) de la loi interdit aux organisations de la société civile de: i) se livrer à des activités hostiles à l’égard de tout(e) tribu, religion, race ou groupe; ii) insulter, diffamer ou profaner les croyances religieuses en Indonésie; iii) se livrer à des activités séparatistes qui menacent la souveraineté de la République unitaire de la nation d’Indonésie; iv) perpétrer des actes de violence, troubler la paix et l’ordre public ou détériorer des équipements publics et sociaux; ou v) mettre en œuvre des activités qui relèvent de la compétence et des attributions d’organismes chargés de faire appliquer la loi conformément à la législation en vigueur. Le gouvernement indique que, en vue d’atteindre les objectifs de développement national visant à offrir prospérité et bien-être à l’ensemble de la population de l’Indonésie, toutes les parties prenantes devraient être en mesure de préserver l’harmonie et l’ordre public.
  17. 463. L’article 59(4) de la loi interdit aux organisations de la société civile d’embrasser, de développer et de propager des enseignements ou des doctrines en contradiction avec le Pancasila. Le gouvernement déclare que le droit à la liberté d’expression est garanti. Selon lui, l’exercice de ce droit implique le respect des droits des autres et de la législation applicable.
  18. 464. En conclusion, le gouvernement indonésien affirme que la loi relative aux organisations de masse ne limite pas les droits constitutionnels de tous les citoyens, syndicats inclus, de s’associer, de se réunir et d’exprimer des opinions en Indonésie.

C. Conclusions du comité

C. Conclusions du comité
  1. 465. Le comité note que, dans le présent cas, l’organisation plaignante dénonce: i) une attaque organisée par des organisations paramilitaires contre des travailleurs participant à une grève nationale pacifique en octobre 2013; et ii) les effets négatifs éventuels de la loi relative aux organisations de masse adoptée en juillet 2013 sur l’exercice des droits à la liberté syndicale et à la liberté d’expression des travailleurs et de leurs organisations.
  2. 466. En ce qui concerne les événements du 31 octobre 2013, le comité note que, selon l’organisation plaignante: i) les travailleurs participaient à une grève nationale pacifique devant une entreprise du district de Bekasi afin d’exiger une augmentation du salaire minimum, la mise en place d’une assurance-maladie et l’adoption du projet de loi sur les travailleurs domestiques et pour protester contre l’externalisation, en particulier dans les entreprises d’Etat, et contre l’adoption de la loi relative aux organisations de masse; ii) en dépit d’une attaque organisée par des organisations paramilitaires contre les travailleurs, les policiers déployés sur le site pendant la grève nationale n’ont pris aucune mesure pour mettre fin à l’attaque ou pour protéger les travailleurs, laissant ainsi se poursuivre les actes de violence; iii) 28 travailleurs de plusieurs entreprises ont été blessés par des personnes armées, dont 17 gravement blessés et hospitalisés (trois d’entre eux se trouvant dans un état critique); et iv) alors que les autorités ont arrêté neuf personnes en relation avec les attaques, les personnes en question ne comprennent pas les responsables ayant planifié les attaques et ne représentent pas la totalité de celles ayant pris part aux agressions. Le comité prend également note des allégations récentes de nouvelles attaques de la police à l’encontre de syndicalistes lors de manifestations pacifiques et prie le gouvernement d’y répondre en détail.
  3. 467. Le comité note les indications données par le gouvernement selon lesquelles: i) en se fondant sur la lettre de la KSPI du 24 octobre 2013 concernant l’avis de manifestation, la police a délivré l’accusé de réception de l’avis (STTP) daté du 30 octobre 2013 indiquant les dispositions à prendre par les participants à la manifestation (notamment l’interdiction de recourir à la mobilisation de masse, au blocage des routes, au port d’armes et à des actes d’anarchie), mais la KSPI n’en a pas tenu compte; ii) les affrontements entre la communauté et les travailleurs ont été déclenchés par les actions des travailleurs, qui se sont rués en masse dans les usines pour forcer des travailleurs autres que des membres de la KSPI à manifester, ont formé un convoi se dirigeant vers la zone résidentielle et ont bloqué les accès ou les voies publiques, bien qu’ils aient promis de cantonner leurs activités à la grève ou à l’interruption de la production; de même que des inquiétudes de la communauté que les activités des travailleurs puissent perturber le climat de l’investissement dans le district de Bekasi; iii) l’action nationale entreprise par la KSPI dans la zone industrielle du district de Bekasi impliquant quelque 30 000 personnes ne constitue pas une grève mais plutôt une manifestation car les conditions légales requises pour une grève aux termes des articles 1, 137 et 140 de la loi relative à la main-d’œuvre (avant l’échec des négociations tenues entre le syndicat et les employeurs, et la remise au plus tard sept jours avant la réalisation effective de l’interruption ou du ralentissement du travail, d’un préavis de grève écrit adressé à l’entrepreneur et à l’organisme public local en charge des questions de main-d’œuvre) n’ont pas été remplies (selon les informations obtenues du bureau de police régional et du bureau régional de la main-d’œuvre de Bekasi, aucune négociation n’a échoué entre le syndicat et les employeurs concernant des questions relatives aux relations professionnelles, et aucun préavis de grève n’a été soumis au bureau régional de la main-d’œuvre de Bekasi), alors que les conditions légales requises pour une manifestation aux termes des articles 1 et 10 de la loi sur la liberté d’expression en public (notification écrite adressée au service de police local à au moins trois reprises 24 heures avant le démarrage de l’activité entreprise par une personne ou plus pour exprimer son/leur opinion en public) ont été réunies; et iv) la police a enquêté sur 11 plaintes publiques contre les actes de violence survenus lors de la manifestation (rapport de police; recherche des victimes et des témoins; examen de rapports médicaux et autres preuves; arrestations opérées dans les 18 heures consécutives à l’incident et enquête sur dix suspects), cinq cas ayant été soumis au Tribunal supérieur de justice, le bureau du procureur examinant actuellement les pièces des dossiers soumis par l’enquêteur aux fins d’un procès et les questions restantes faisant encore l’objet d’une enquête de la police.
  4. 468. Le comité note les points de vue divergents de l’organisation plaignante et du gouvernement quant à la qualification de grève ou de manifestation nationale donnée respectivement à l’activité entreprise par la KSPI. Tout en rappelant que le droit de grève ne devrait pas être restreint aux seuls différends de travail susceptibles de déboucher sur une convention collective particulière, les travailleurs et leurs organisations doivent pouvoir manifester, le cas échéant, dans un cadre plus large leur mécontentement éventuel sur des questions économiques et sociales touchant aux intérêts de leurs membres [voir Recueil de décisions et de principes du Comité de la liberté syndicale, cinquième édition, 2006, paragr. 531], le comité considère qu’il importe peu pour le présent cas de savoir si l’activité de la KSPI relève en dernière analyse de la qualification de grève nationale ou de manifestation nationale. Notant que le gouvernement, tout en invoquant des actions telles que l’occupation d’usines en masse et le blocage des routes, ne prétend pas que les travailleurs aient commis des actes de violence et, dans le même temps, ne nie pas l’allégation selon laquelle les policiers déployés n’ont pris aucune mesure pour mettre fin aux attaques ou protéger les travailleurs, laissant ainsi se poursuivre les actes de violence, le comité rappelle que les droits des organisations de travailleurs et d’employeurs ne peuvent s’exercer que dans un climat exempt de violence, de pressions ou menaces de toutes sortes à l’encontre des dirigeants et des membres de ces organisations, et il appartient aux gouvernements de garantir le respect de ce principe. [Voir Recueil, op. cit., paragr. 44.] Le comité s’attend à ce que le gouvernement fasse tout son possible pour veiller à ce que ce principe soit pleinement respecté dans le futur. En outre, le comité note les positions contradictoires de l’organisation plaignante et du gouvernement quand il s’agit de savoir si les mesures prises par la police à la suite des événements ont été ou non suffisantes. Soulignant qu’il ne dispose pas des éléments lui permettant d’évaluer le caractère suffisant des mesures prises pour faire respecter la loi, le comité souhaite rappeler d’une manière générale que, lorsque se sont produites des atteintes à l’intégrité physique ou morale, le comité a considéré qu’une enquête judiciaire indépendante devrait être effectuée sans délai, car cette méthode est particulièrement appropriée pour éclaircir pleinement les faits, déterminer les responsabilités, sanctionner les coupables et prévenir la répétition de telles actions. [Voir Recueil, op. cit., paragr. 50.] Le comité veut croire que ce principe sera pleinement respecté en ce qui concerne tous les auteurs et instigateurs des actes de violence allégués, de même que pour les allégations d’inaction de la police en réponse à la violence, et il demande à être tenu informé à cet égard.
  5. 469. S’agissant de la loi relative aux organisations de masse, le comité note que, en ce qui concerne l’ambiguïté de son champ d’application alléguée par l’organisation plaignante, le gouvernement ne nie pas qu’elle soit applicable aux syndicats et qu’il existe une divergence de points de vue entre les parties quant à savoir si les dispositions concernées de ladite loi limitent ou non les droits syndicaux, en particulier le droit à la liberté d’expression.
  6. 470. D’abord et avant tout, le comité note que l’article 2 de la loi relative aux organisations de masse exige que les principes des organisations de la société civile se conforment au Pancasila qui, selon le gouvernement, est le fondement philosophique officiel du pays qui consacre comme principe premier la croyance dans le Dieu seul et unique, et que l’organisation plaignante allègue que, par exemple, le communisme/marxisme et l’athéisme seraient interdits car considérés comme étant en contradiction avec le Pancasila. A cet égard, le comité observe également que, aux termes de l’article 59(4), les organisations de la société civile ont l’interdiction d’embrasser, de développer et de propager des enseignements ou des doctrines qui contredisent le Pancasila.
  7. 471. Le comité rappelle que la liberté syndicale n’implique pas seulement le droit, pour les travailleurs et les employeurs, de constituer librement des associations de leur choix, mais encore celui, pour les associations professionnelles elles-mêmes, de se livrer à une activité licite de défense de leurs intérêts professionnels. Il réitère que le plein exercice des droits syndicaux exige la libre circulation des informations, des opinions et des idées, de sorte que les travailleurs et les employeurs, tout comme leurs organisations, devraient jouir de la liberté d’opinion et d’expression dans leurs réunions, publications et autres activités syndicales. Néanmoins, dans l’expression de leurs opinions, les organisations syndicales ne devraient pas dépasser les limites convenables de la polémique et devraient s’abstenir d’excès de langage. Le comité souligne que la liberté d’expression dont devraient jouir les organisations syndicales et leurs dirigeants devrait également être garantie lorsque ceux-ci veulent formuler des critiques à l’égard de la politique économique et sociale du gouvernement. [Voir Recueil, op. cit., paragr. 154, 157 et 495.]
  8. 472. Compte tenu de ce qui précède, le comité veut croire que la formulation vague et générale employée dans les dispositions précitées portant sur les interdictions ne sera pas utilisée de manière à restreindre l’exercice de droits syndicaux, notamment le droit des syndicats d’exprimer librement leurs opinions et d’exercer leur liberté de croyance. Le comité prie le gouvernement de fournir des informations détaillées sur toutes sanctions pénales et administratives (y compris les amendes, la dissolution ou la radiation) imposées dans le droit et la pratique pour la violation des articles susmentionnés. Le comité invite également l’organisation plaignante à communiquer toutes informations dont elle dispose sur la manière dont ces dispositions auraient été utilisées pour restreindre les droits syndicaux.
  9. 473. En outre, le comité note que l’article 5 énumère une liste exhaustive de huit objectifs que les organisations de la société civile doivent s’efforcer d’atteindre et que le gouvernement attend que toutes les composantes de la nation, y compris les organisations de la société civile, soutiennent les objectifs nationaux tels que prescrits par la Constitution. Le comité observe également que l’article 21(b) impose l’obligation de défendre l’unité et l’intégrité de la nation, de même que l’intégrité de la République unitaire de la nation d’Indonésie et que, selon le gouvernement, les organisations de la société civile sont tenues de contribuer, par leurs activités, à la réalisation de cet objectif.
  10. 474. Le comité rappelle qu’il a déjà estimé précédemment que l’obligation imposée par la loi aux dirigeants des associations professionnelles de faire une «profession de foi démocratique» pourrait conduire à des abus, car une telle disposition ne fournit aucun critère précis sur lequel pourrait se fonder une décision judiciaire éventuelle si un dirigeant était accusé d’avoir manqué à sa déclaration. En relation avec les dispositions légales selon lesquelles «les syndicats organisent et éduquent les ouvriers et employés ... afin ... qu’ils respectent la discipline du travail», «organisent les ouvriers et employés en menant des campagnes d’émulation socialiste dans le travail,» et «les syndicats éduquent les ouvriers et employés ... afin de renforcer leurs convictions idéologiques», le comité a estimé que les fonctions attribuées aux syndicats par l’ensemble de ces dispositions contribuent nécessairement à limiter leur droit d’organiser leurs activités, contrairement aux principes de la liberté syndicale. Il a estimé que les obligations ainsi définies que doivent respecter les syndicats empêchent la création d’organisations syndicales indépendantes des pouvoirs publics et du parti dirigeant qui auraient réellement pour tâches de défendre et promouvoir les intérêts de leurs mandants et non de renforcer le système politique et économique du pays. [Voir Recueil, op. cit., paragr. 506 et 507.]
  11. 475. Le comité considère une fois encore que les dispositions qui précèdent, en raison de leur caractère vague, confèrent aux autorités des pouvoirs discrétionnaires étendus pour évaluer si les objectifs des organisations concernées sont ou non compatibles avec ceux prévus par l’article 5 ou si l’obligation énoncée dans l’article 21b est ou non respectée, et qu’elles pourraient dès lors être invoquées pour refuser une demande d’enregistrement ou pour radier des syndicats. Le comité prie le gouvernement de fournir toutes informations disponibles sur la manière dont ces dispositions peuvent être ou ont été utilisées pour ce qui a trait à l’enregistrement ou à la radiation d’un syndicat. Le comité invite également l’organisation plaignante à lui communiquer toutes informations dont elle dispose à cet égard.
  12. 476. Enfin, le comité note que, aux termes de l’article 52, les organisations de la société civile créées par des ressortissants étrangers ont en particulier l’interdiction de mener des activités politiques ou toutes activités susceptibles de déstabiliser les relations diplomatiques et de collecter des fonds auprès de la communauté indonésienne et que, selon les deux parties, les organisations de la société civile étrangères sont tenues d’obtenir un permis du gouvernement avant de pouvoir mener des activités. Le comité rappelle que les dispositions qui interdisent de façon générale les activités politiques exercées par les syndicats pour la promotion de leurs objectifs spécifiques sont contraires aux principes de la liberté syndicale, et que l’assistance ou l’appui que peut apporter toute organisation syndicale internationale à la constitution, à la défense ou au développement d’organisations syndicales nationales est une activité syndicale légitime, même lorsque l’orientation syndicale recherchée ne correspond pas à celle(s) existant dans le pays. [Voir Recueil, op. cit., paragr. 500 et 739.] Le comité considère que l’article 52 pourrait être utilisé pour interdire des organisations syndicales internationales auxquelles sont affiliés des syndicats indonésiens d’entreprendre des activités syndicales légitimes et de soutenir leurs affiliés et pour s’ingérer ainsi dans le fonctionnement interne de telles organisations. Il prie le gouvernement de fournir des informations détaillées sur toute application dans la pratique de cette disposition en ce qui concerne les activités de la CSI en Indonésie. Le comité invite également l’organisation plaignante à lui communiquer toutes informations dont elle dispose à cet égard.
  13. 477. Le comité s’attend à ce que ses considérations soient prises en compte pour l’application de la loi dans la pratique et dans tout réexamen futur de la loi relative aux organisations de masse. Il prie le gouvernement de le tenir informé à cet égard de même que de tout résultat de la demande de contrôle judiciaire de certaines dispositions de ladite loi présentée le 9 janvier 2014 par des organisations de la société civile nationales et actuellement en instance devant la cour constitutionnelle.

Recommandations du comité

Recommandations du comité
  1. 478. Au vu des conclusions qui précèdent, le comité invite le Conseil d’administration à approuver les recommandations suivantes:
    • a) En ce qui concerne les allégations de violence et d’inaction de la police lors des événements du 31 octobre 2013, le comité, rappelant que les droits des organisations de travailleurs et d’employeurs ne peuvent s’exercer que dans un climat exempt de violence, de pressions ou menaces de toutes sortes à l’encontre des dirigeants et des membres de ces organisations, et il appartient aux gouvernements de garantir le respect de ce principe, s’attend à ce que le gouvernement fasse tout son possible pour veiller à ce que ledit principe soit à l’avenir pleinement respecté. Le comité prie par ailleurs le gouvernement de répondre de manière détaillée aux nouvelles allégations relatives à des attaques de la police à l’encontre de syndicalistes lors de manifestations pacifiques.
    • b) Quant aux mesures d’enquête sur l’application de la loi prises par la police à la suite des événements du 31 octobre 2013, le comité, en soulignant qu’il ne dispose pas des éléments lui permettant d’évaluer le caractère suffisant des mesures adoptées, rappelle d’une manière générale que, lorsque se sont produites des atteintes à l’intégrité physique ou morale, le comité considère qu’une enquête judiciaire indépendante devrait être effectuée sans délai, car cette méthode est particulièrement appropriée pour éclaircir pleinement les faits, déterminer les responsabilités, sanctionner les coupables et prévenir la répétition de telles actions; et veut croire que ce principe sera pleinement respecté en ce qui concerne tous les auteurs et instigateurs des actes de violence allégués, de même que pour les allégations d’inaction de la police face aux actes de violence, et il demande à être tenu informé à cet égard.
    • c) En ce qui concerne la loi relative aux organisations de masse, le comité s’attend à ce que les considérations exposées dans ses conclusions soient prises en compte pour l’application de la loi dans la pratique et dans tout réexamen futur de ladite loi. Il prie le gouvernement de le tenir informé à cet égard de même que de tout résultat de la demande de contrôle judiciaire de certaines dispositions de ladite loi présentée le 9 janvier 2014 par des organisations de la société civile nationales et actuellement en instance devant la cour constitutionnelle.
    • d) Le comité veut croire que la formulation vague et générale employée dans les dispositions précitées portant sur les interdictions ne sera pas utilisée de manière à restreindre l’exercice de droits syndicaux, notamment le droit des syndicats d’exprimer librement leurs opinions et d’exercer leur liberté de croyance, et prie le gouvernement de fournir des informations détaillées sur toutes sanctions pénales et administratives (y compris les amendes, la dissolution ou la radiation) imposées dans le droit et la pratique pour la violation des articles 2, 59(2)(b), (d) ou (e), ou 59(4) de la loi relative aux organisations de masse. Il invite également l’organisation plaignante à lui communiquer toutes informations dont elle dispose à cet égard.
    • e) Le comité prie le gouvernement de fournir toutes informations disponibles sur la manière dont les articles 5 et 21b de la loi relative aux organisations de masse peuvent être ou ont été utilisés pour ce qui a trait à l’enregistrement d’un syndicat. Il invite également l’organisation plaignante à lui communiquer toutes informations dont elle dispose à cet égard.
    • f) Le comité prie le gouvernement de fournir des informations détaillées sur toute application dans la pratique de l’article 52 de la loi relative aux organisations de masse en ce qui concerne les activités de la CSI en Indonésie. Il invite également l’organisation plaignante à lui communiquer toutes informations dont elle dispose à cet égard.
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