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Rapport définitif - Rapport No. 376, Octobre 2015

Cas no 3088 (Colombie) - Date de la plainte: 30-MAI -14 - Clos

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  1. 321. La plainte figure dans une communication du Syndicat des travailleurs des entreprises publiques de Cali (SINTRAEMCALI) en date du 30 mai 2014.
  2. 322. Le gouvernement a adressé ses observations dans une communication en date du 5 décembre 2014.
  3. 323. La Colombie a ratifié la convention (no 87) sur la liberté syndicale et la protection du droit syndical, 1948, la convention (no 98) sur le droit d’organisation et de négociation collective, 1949, la convention (no 151) sur les relations de travail dans la fonction publique, 1978, et la convention (no 154) sur la négociation collective, 1981.

A. Allégations de l’organisation plaignante

A. Allégations de l’organisation plaignante
  1. 324. Dans une communication en date du 30 mai 2014, l’organisation plaignante allègue que deux de ses membres, MM. Emir Mezu et Manuel Cortez, ont été licenciés illégalement par l’entreprise EMCALI (ci-après dénommée l’«entreprise») dans un contexte marqué par des tensions entre l’organisation syndicale et l’entreprise. A cet égard, l’organisation indique que: i) en mars 2009, le SINTRAEMCALI dénonçait la politique de privatisation de l’entreprise tout en cherchant à obtenir la réintégration de six dirigeants et de 45 militants syndicaux licenciés illégalement en 2004 (cas no 2356 présenté au Comité de la liberté syndicale); ii) afin d’affaiblir le SINTRAEMCALI, l’entreprise a décidé d’encourager la création d’organisations syndicales parallèles appuyant la politique de privatisation de l’entreprise et discréditant le SINTRAEMCALI; iii) le 4 mars 2009, date à laquelle le SINTRAEMCALI menait une réunion, M. Marlon Ferley Torres a distribué un bulletin qui allait à l’encontre de l’organisation; iv) MM. Emir Mezu et Manuel Cortez, exerçant le droit à la liberté syndicale, ont sommé M. Marlon Ferley Torres de présenter le contenu de ce bulletin aux participants à la réunion; v) après avoir refusé dans un premier temps et à l’issue d’un entretien téléphonique, M. Marlon Ferley Torres a décidé d’assister à la réunion en question; vi) par la suite, M. Marlon Ferley Torres a intenté une action disciplinaire et a porté une plainte au pénal contre MM. Emir Mezu et Manuel Cortez qui l’auraient conduit de force à la réunion; et vii) bien que MM. Emir Mezu et Manuel Cortez aient été acquittés au pénal, l’entreprise a décidé néanmoins de les licencier sans leur garantir une procédure disciplinaire régulière.
  2. 325. L’organisation plaignante ajoute qu’il n’existe aucune certitude absolue que les deux travailleurs aient commis les actes dont ils ont été accusés, que l’entreprise n’a pas respecté le droit des travailleurs à la défense du fait qu’elle a appliqué le décret no 2127 de 1945 au lieu de la loi no 734 de 2002 (Code disciplinaire unique) qui prévoit davantage de garanties en matière disciplinaire et que, dans le cadre des attaques antisyndicales dont le SINTRAEMCALI a fait l’objet, le licenciement des deux travailleurs présente un caractère antisyndical. L’organisation plaignante demande au comité de recommander au gouvernement que les deux travailleurs soient réintégrés et que le Code disciplinaire unique soit appliqué à l’avenir dans les cas de licenciements disciplinaires dans le secteur public.
  3. 326. Dans cette même communication, l’organisation plaignante fait référence également au licenciement, le 4 juin 2010, de M. Gilberto Arredondo Castaño, travailleur affilié à EMCALI, qui aurait également été victime de la politique antisyndicale de l’entreprise. L’organisation a joint en annexe une chronologie des événements et des procédures judiciaires en lien avec ce licenciement.

B. Réponse du gouvernement

B. Réponse du gouvernement
  1. 327. Dans une communication en date du 5 décembre 2014, le gouvernement transmet les observations de l’entreprise EMCALI. L’entreprise nie tout d’abord appuyer la création d’organisations syndicales parallèles dans le but d’affaiblir le SINTRAEMCALI, elle affirme que le respect de la liberté syndicale implique que les organisations de travailleurs sont pleinement habilitées à se mettre en conformité et à se réguler par elles-mêmes, et que tel est le cas pour les 11 organisations syndicales qui coexistent à l’heure actuelle au sein de l’entreprise. Concernant le licenciement de MM. Emir Mezu et Manuel Cortez, l’entreprise déclare que: i) M. Marlon Ferley Torres a déposé le 5 mars 2009 une plainte interne contre MM. Emir Mezu, Manuel Cortez et Edwin Castañeda, les accusant d’avoir exercé une violence physique à son égard; ii) une procédure disciplinaire a été engagée à l’encontre des trois travailleurs, dans le respect du droit à la défense et de la procédure administrative régulière; iii) le 9 mars 2009, un entretien a été mené avec les travailleurs en présence d’un avocat du SINTRAEMCALI; iv) la procédure administrative s’est conclue par l’annulation du contrat de travail de MM. Emir Mezu et Manuel Cortez; v) en première comme en deuxième instance, les juridictions du travail ont confirmé que le licenciement des deux travailleurs était légal; et vi) le jugement rendu en deuxième instance fait l’objet d’un pourvoi en cassation, et les parties sont dans l’attente de la décision de la Cour suprême de justice à cet égard.
  2. 328. En ce qui concerne l’allégation selon laquelle EMCALI aurait appliqué à tort le décret no 2127 de 1945 au lieu de la loi no 734 de 2002, l’entreprise affirme que la loi no 734 de 2002 n’a pas abrogé le décret no 2127, et que celui-ci constitue la norme applicable en cas de rupture de contrat de travail d’un fonctionnaire pour un juste motif, lequel a été reconnu par les juridictions du travail en première et en deuxième instance.
  3. 329. S’agissant du licenciement de M. Gilberto Arredondo Castaño, l’entreprise indique que le droit à une procédure régulière et à la défense du travailleur a été respecté, que la légalité du licenciement a été confirmée en première et en deuxième instance, et que les parties attendaient que la Chambre du travail de la Cour suprême de justice statue sur le pourvoi en cassation.
  4. 330. Le gouvernement transmet ensuite ses propres observations et déclare que: i) si, entre 2012 et 2014, 16 enquêtes administratives du travail ont été ouvertes à la demande de SINTRAEMCALI contre l’entreprise (à l’issue desquelles quatre sanctions ont été prononcées), aucune plainte administrative n’a été déposée auprès d’une juridiction du travail concernant le cas précis de MM. Emir Mezu et Manuel Cortez; et ii) la légalité du licenciement des deux travailleurs a été confirmée en première et en deuxième instance, et les parties sont dans l’attente de la décision finale de la Cour suprême de justice.
  5. 331. Le gouvernement précise qu’il a été démontré que les licenciements étaient dus à la conduite irrespectueuse des travailleurs et que le syndicat n’avait apporté aucune preuve relative à un éventuel comportement antisyndical.

C. Conclusions du comité

C. Conclusions du comité
  1. 332. Le comité observe que le présent cas porte principalement sur le licenciement de deux membres du SINTRAEMCALI, MM. Mezu et Cortez, après une altercation avec un autre travailleur de l’entreprise EMCALI apparemment en désaccord avec les positions du syndicat. Le comité note que l’organisation plaignante allègue que les licenciements présentent un caractère antisyndical et que l’entreprise n’a pas respecté le droit à la défense des travailleurs du fait qu’elle a appliqué le décret no 2127 de 1945 au lieu de la loi no 734 de 2002, et que, pour ces motifs, l’organisation demande au comité de recommander que les deux travailleurs soient réintégrés et que la loi no 734 de 2002 soit appliquée à l’avenir dans les cas de licenciements dans le secteur public, le décret no 2127 devant être abrogé.
  2. 333. Le comité note par ailleurs que l’organisation plaignante évoque également le licenciement d’un troisième membre du SINTRAEMCALI, M. Arredondo Castaño, dans des circonstances différentes de celles ayant conduit au licenciement de MM. Mezu et Cortez. Bien que l’organisation plaignante ait transmis une chronologie des événements et des procédures judiciaires en lien avec le licenciement susmentionné, le comité observe que l’organisation ne présente aucun argument pour appuyer la thèse selon laquelle le licenciement de M. Arredondo Castaño serait contraire aux principes de la liberté syndicale et de la négociation collective. Dans ces conditions, le comité ne poursuivra pas l’examen de cette allégation.
  3. 334. Concernant l’éventuel caractère antisyndical du licenciement de MM. Mezu et Cortez, le comité note que l’organisation plaignante allègue que les faits de violence dont les travailleurs ont été accusés n’ont pas été prouvés, raison pour laquelle ces derniers ont été acquittés au pénal, et que le véritable motif du licenciement réside dans la volonté de l’entreprise de porter un coup au SINTRAEMCALI. Le comité prend note par ailleurs des déclarations de l’entreprise et du gouvernement selon lesquelles: i) le tribunal de première instance a estimé qu’il avait été établi que MM. Mezu et Cortez avaient entravé la liberté de l’un de leurs collègues, ce qui justifiait leur licenciement; ii) la juridiction de deuxième instance avait confirmé la légalité du licenciement; et iii) l’organisation plaignante ne fournit aucun élément concret accréditant le caractère antisyndical des licenciements.
  4. 335. Au vu de ce qui précède, le comité observe que le caractère justifié du licenciement de MM. Mezu et Cortez a déjà donné lieu à des décisions judiciaires de première et de deuxième instance, et que les parties sont dans l’attente du jugement de la Chambre du travail de la Cour suprême de justice. Le comité constate aussi que l’éventuel caractère antisyndical des licenciements ne faisait pas partie des arguments avancés dans les procédures intentées devant les juridictions nationales. Dans ces conditions, le comité ne poursuivra pas l’examen de cet aspect du cas.
  5. 336. S’agissant de l’allégation selon laquelle il serait nécessaire d’abroger le décret no 2127 de 1945 et de faire en sorte que les licenciements disciplinaires dans le secteur public soient régis par la loi no 734 de 2002, le comité constate que l’organisation plaignante ne donne aucune indication quant aux motifs pour lesquels le décret no 2127 de 1945 n’assurerait pas une protection adéquate contre la discrimination antisyndicale. Le comité ne dispose donc pas des éléments nécessaires pour pouvoir se prononcer sur cette allégation et ne poursuivra pas l’examen de cette dernière à moins qu’il reçoive davantage d’éléments de la part de l’organisation plaignante.

Recommandation du comité

Recommandation du comité
  1. 337. Au vu des conclusions qui précèdent, le comité invite le Conseil d’administration à décider que ce cas ne requiert pas un examen plus approfondi.
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