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Rapport où le comité demande à être informé de l’évolution de la situation - Rapport No. 376, Octobre 2015

Cas no 3096 (Pérou) - Date de la plainte: 25-JUIN -14 - Clos

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Allegations: Restrictions à l’exercice du droit de grève des infirmières de la part de l’Assurance sociale en matière de santé (ESSALUD)

  1. 861. La plainte figure dans une communication du Syndicat national des infirmières de l’Assurance sociale en matière de santé (SINESSS) en date du 25 juillet 2014. Ce syndicat a envoyé de nouvelles allégations par communication en date du 4 novembre 2014.
  2. 862. Le gouvernement a envoyé ses observations dans une communication en date du 6 janvier 2015.
  3. 863. Le Pérou a ratifié la convention (no 87) sur la liberté syndicale et la protection du droit syndical, 1948, la convention (no 98) sur le droit d’organisation et de négociation collective, 1949, et la convention (nº 151) sur les relations de travail dans la fonction publique, 1978.

A. Allégations de l’organisation plaignante

A. Allégations de l’organisation plaignante
  1. 864. Dans sa communication du 25 juillet 2014, le Syndicat national des infirmières de l’Assurance sociale en matière de santé (SINESSS) allègue que le droit de grève est reconnu dans la Constitution nationale et que, les 21, 22 et 23 mai 2014, le lancement d’une grève nationale pour une durée illimitée à partir du 10 juin 2014 a été approuvé à l’unanimité, décision qui a été communiquée en bonne et due forme au ministère du Travail et de la Promotion de l’emploi le 26 mai 2014. L’employeur (l’Assurance sociale en matière de santé (ESSALUD)) a ordonné le 10 juin 2014 à ses différents organes de gouvernance, par lettre circulaire no 22-GC-ESSALUD-2014, de ne reconnaître ni les piquets de grève ni les journées spéciales programmés par les comités de lutte du SINESSS conformément à l’article 82 de la loi relative aux relations collectives du travail – décret suprême no 010-2003-TR, qui dispose que, «lorsque la grève touche les services publics essentiels ou que la mise en œuvre de certaines activités indispensables doit être garantie, les travailleurs en conflit doivent garantir la permanence du personnel nécessaire pour empêcher son interruption totale et assurer la continuité des services et activités qui l’exigeraient. Chaque année au cours du premier trimestre, les entreprises prestataires de ces services essentiels communiqueront à leurs travailleurs ou aux organisations syndicales qui les représentent et à l’autorité du travail le nombre et la fonction des travailleurs nécessaires au maintien des services, les horaires et roulements qu’ils doivent effectuer, ainsi que la périodicité avec laquelle doivent se produire leurs remplacements respectifs. La communication en question a pour objet d’obliger les travailleurs ou l’organisation syndicale qui les représente à fournir la liste nominative respective lorsque la grève a lieu.»
  2. 865. Le SINESSS indique que l’employeur n’a pas communiqué en temps opportun les secteurs essentiels conformément à la loi et que, face à la programmation en bonne et due forme des piquets de grève de la part du syndicat (organisés de telle manière que les services indispensables soient assurés), l’autorité, sur la base d’un acte de mauvaise foi, a ordonné à ses directeurs et responsables administratifs les activités antisyndicales suivantes:
    • a) que les chefs de département et de service d’assistance d’infirmerie devront assurer la réalisation de consultations externes, de centres chirurgicaux et d’hospitalisation en général, notamment les services minima, sans dûment considérer que ces services ne constituent ni des secteurs indispensables ni des centres d’attention immédiate dont la paralysie pourrait porter atteinte à la vie, la santé, l’intégrité physique et psychologique du patient;
    • b) la fixation d’heures supplémentaires pouvant atteindre le plafond de 108 heures par mois et par travailleur, uniquement dans les secteurs de consultation externe, de centres chirurgicaux et d’hospitalisation en général; l’obligation de s’acquitter d’heures supplémentaires, de RPCT, de gardes hospitalières ordinaires de plus de six heures et jusqu’à douze heures pour le personnel ordinaire inscrit au régime professionnel 728/276.
  3. 866. De cette façon, l’administration de la santé a contourné de manière dolosive et arbitraire les compétences administratives des chefs de département et des infirmiers de l’assistance en obligeant les affiliés à effectuer les services ordinaires, sans même prêter attention au fait qu’ils ont seulement l’obligation légale d’assurer les services essentiels, et non des services ordinaires comme le sont ceux de consultations externes, de centres chirurgicaux et d’hospitalisation en général.
  4. 867. La présente décision s’est basée sur l’application de la lettre circulaire no 022-DEGRAR-ESSALUD-2014 (basée sur la lettre circulaire no 152-GCGP-ESSALUD-2014 applicable à la grève des médecins et des infirmiers, décision de la direction no 995-GC-ESSALUD-2013), par laquelle l’entité ESSALUD cherche à aligner tous les secteurs de l’ESSALUD sur les secteurs essentiels, contrairement aux dispositions adoptées les années antérieures sur la base de la décision de la direction générale no 725-GC-ESSALUD-2002; c’est-à-dire que les affiliés ont été exhortés à demeurer dans leurs services ordinaires sans respecter les piquets de grève.
  5. 868. Le Deuxième bureau du procureur provincial de prévention des délits du district judiciaire de Lima a déclaré que les infirmières affiliées au SINESSS assuraient effectivement le fonctionnement des services indispensables en fonction de l’urgence et de la gravité de l’état des patients.
  6. 869. Dans la lettre circulaire no 022 susmentionnée, l’administration de l’ESSALUD a ordonné que les directions procèdent au recrutement de personnel d’assistance, à titre de suppléants ou selon d’autres modalités contractuelles telles que l’externalisation, pour faire face aux déficits d’effectifs dans des secteurs déterminés. Cela met une nouvelle fois en évidence une atteinte à la liberté syndicale, dans la mesure où la législation nationale indique clairement dans l’article 25 du règlement de la loi générale sur l’inspection du travail – décret suprême no 019-2006-TR – que tous les actes qui empêchent le libre exercice du droit de grève sont nuls lorsque l’on tente de remplacer des travailleurs en grève, par recrutement ou programmation, par recrutement direct sous contrats à durée indéterminée ou soumis à conditions, ou par recrutement indirect en ayant recours à l’intermédiation du travail ou à l’embauche et à la sous-traitance de prestataires de travaux, sans autorisation de l’autorité administrative du travail.
  7. 870. Pour cette raison, poursuit le SINESSS, il s’avère contradictoire de chercher à recruter du personnel d’assistance étranger à l’institution, dans les services ordinaires, dans la mesure où l’on sait pertinemment que, pour que l’unité puisse fonctionner de manière légale et efficace, la participation du personnel infirmier professionnel embauché et désigné avant la grève est exigée.
  8. 871. L’organisation plaignante signale que, le 11 juin 2014, l’administrateur du réseau d’assistance d’Ucayali, par lettre no 122-OA-DRAUC-ESSALUD-2014, a ordonné l’interdiction d’entrée et de sortie du personnel inscrit dans les piquets de grève et de tous les travailleurs syndiqués qui adhéraient à la grève, sans motiver plus avant sa décision à cet égard.
  9. 872. Face à l’intransigeance des autorités imposant la restriction à l’entrée des infirmiers dans les piquets de grève, le SINESSS – section d’Ucayali – a déposé le 16 juin 2014 une plainte au pénal auprès du Deuxième parquet provincial corporatif de Coronel Portillo -Ucayali.
  10. 873. Le 17 juin 2014, la directrice centrale des prestations de santé de l’ESSALUD a ordonné la programmation d’internes en spécialisations chirurgicales ou en sous-spécialisations et de médecins spécialistes pour réaliser les activités d’infirmerie dans les services ordinaires, sans envisager avec diligence que la loi générale sur la santé no 26842 prévoit elle-même la compétence de chaque professionnel, mettant en garde sur la responsabilité civile en cas de manquement à s’acquitter de leurs fonctions.
  11. 874. Le SINESSS critique également que, les 18 et 20 juin 2014, par lettres circulaires nos 1767-GRALA-JAV-ESSALUD et 024-GC-ESSALUD-2014, des retenues sur salaire ont été ordonnées pour absentéisme sur leur lieu de travail en se basant sur la déclaration d’illégalité de la grève délivrée par le ministère du Travail et de la Promotion de l’emploi.
  12. 875. Dans sa communication du 4 novembre 2014, le syndicat plaignant allègue le refus de congés syndicaux demandés par Mme Marcela Guevara González, secrétaire du bien-être social dudit syndicat, en violation du règlement sur les congés syndicaux des professionnels de la santé. Selon le SINESSS, l’administration invoque qu’elle tente d’éviter les conflits d’intérêts étant donné que Mme Guevara González occupe le poste de chef des infirmières du service des urgences des adultes, qui est un poste de confiance de l’ESSALUD et que, de ce fait, il n’est pas approprié qu’elle exerce en même temps une fonction de dirigeante au sein du SINESSS.

B. Réponse du gouvernement

B. Réponse du gouvernement
  1. 876. Dans sa communication du 6 janvier 2015, le gouvernement remet les déclarations de la Direction centrale de gestion des personnes de l’Assurance sociale en matière de santé (ESSALUD) en indiquant que: le Syndicat national des infirmières de l’assurance sociale en matière de santé (SINESSS) a déposé le 26 mai 2014 auprès du ministère du Travail et de la Promotion de l’emploi la demande de déclaration d’un avis de grève. L’autorité du travail, par décision de la direction générale no 80-2014-MTPE/2/14 du 27 mai 2014, a déclaré l’irrecevabilité de la déclaration de grève, qui concernait tous les affiliés au SINESSS se trouvant «sous le régime de travail du secteur privé», pour n’avoir pas respecté toutes les conditions requises signalées dans l’article 72 du texte unique prescrit par la loi sur les relations collectives du travail – décret suprême no 010-2003-TR; décision qui, n’ayant fait l’objet d’aucun recours, s’est trouvée confirmée. Ultérieurement, et après que la concrétisation de la paralysie annoncée a effectivement été vérifiée, le ministère du Travail et de la Promotion de l’emploi, par décision de la direction générale no 89-2014-MTPE/2/14 du 12 juin 2014, a décidé de déclarer illégale la grève nationale pour une durée illimitée du SINESSS «pour les fonctionnaires relevant du régime de travail public».
  2. 877. Avec la décision de la direction générale no 92-2014-MTPE/14 du 24 juin 2014, l’autorité du travail a déclaré non fondé le recours en examen formé par le SINESSS contre la décision de la direction no 89-2014-MTPE/2/14 du 12 juin 2014, par laquelle l’autorité du travail a déclaré illégale la grève de ce syndicat. De même, elle a déclaré épuisée la voie administrative de ladite procédure, conformément aux dispositions de l’article 218 de la loi no 27444, loi de procédure administrative générale. L’ESSALUD ajoute que, par communication no 188-GCGP-ESSALUD-2014 du 3 juin 2013, les organes représentatifs du SINESSS ont été instamment priés de se conformer à la décision de la direction générale no 980-GG-ESSALUD-2013 du 18 juillet 2013, qui contient le plan opérationnel destiné à faire face aux imprévus causés par l’interruption du travail des affiliés de l’ESSALUD. Le plan opérationnel en question englobe tous les secteurs indispensables de l’ESSALUD, qui doivent fonctionner à 100 pour cent au niveau national pendant le déroulement de toute grève ou paralysie à laquelle appellent les travailleurs syndiqués.
  3. 878. L’argument invoqué par le SINESSS, selon lequel l’ESSALUD n’a pas communiqué à l’autorité du travail le nombre et la fonction des travailleurs nécessaires au maintien de ses services, horaires et roulements, omet que le SINESSS devait veiller au bon fonctionnement des secteurs indispensables de l’institution; le syndicat en avait pleinement connaissance par la communication susmentionnée, y compris avant le début de la grève nationale pour une durée illimitée. L’ESSALUD précise que, par décret suprême no 012-2014-SA du 23 juin 2014, les dispositions visant à garantir la prestation des services de santé pendant l’exercice du droit de grève ont été adoptées.
  4. 879. Ce qui est signalé par le SINESSS dans sa plainte ne cadre pas avec les normes légales en vigueur, attendu que les secteurs indispensables identifiés dans le plan opérationnel pour faire face aux imprévus causés par l’interruption du travail des affiliés de l’ESSALUD ont été approuvés par décision de la direction générale no 980-GG-ESSALUD-2013 du 18 juillet 2013, celle-là même qui a été portée à la connaissance de tous les travailleurs syndiqués représentatifs de l’ESSALUD et, par communication no 188-GCGP-ESSALUD-2014 du 3 juin 2014, à la connaissance du secrétaire général du SINESSS.
  5. 880. En conformité avec les normes légales en vigueur, la Direction centrale de gestion des personnes, par lettres circulaires nos 177 et 189-GCGP-ESSALUD-2014 des 9 et 26 juin 2014 respectivement, a adopté les mesures nécessaires indispensables pour faire face à l’action unilatérale du syndicat afin que les services de santé offerts par l’institution ne soient pas affectés de manière substantielle. De même, elle a indiqué les mesures que le personnel devait prendre pendant la grève, décidant entre autres points que les piquets de grève ne faisaient pas partie de la programmation d’assistance et que l’on ne leur reconnaissait pas de journées de travail effectives et que le plan opérationnel pour faire face aux imprévus causés par l’interruption du travail des affiliés de l’ESSALUD, adopté par décision de la direction générale no 980-GG-ESSALUD-2013 du 18 juillet 2013, stipulait que les secteurs indispensables qu’il instituait devaient être couverts par le personnel qui était programmé dans lesdits secteurs.
  6. 881. Le rapport no 83-GCGP-ESSALUD-2014 du 29 août 2014 adressé à la Direction centrale de gestion des personnes indique que, après avoir procédé à la vérification correspondante de la documentation présentée, en raison des faits signalés par le SINESSS – section d’Ucayali – on a conclu que le réseau d’assistance d’Ucayali aurait mis en œuvre les mesures administratives, conformément à la réglementation en vigueur, aux fins d’optimiser les ressources existantes et, dans cette optique, de se conformer aux exigences pouvant surgir dans ledit réseau d’assistance au cours de la grève nationale pour une durée illimitée entamée le 10 juin 2014 par le SINESSS.
  7. 882. Quant à la retenue sur salaire dont ont fait l’objet les infirmières et infirmiers ayant obéi à la grève nationale pour une durée illimitée menée par le SINESSS, elle ne contrevient à aucune norme légale en vigueur étant donné que, conformément à ce qui est indiqué dans la législation, si le travailleur n’assure pas de services effectifs, ceux-ci ne doivent pas être rémunérés, surtout si la grève a été déclarée irrecevable et illégale par l’autorité du travail.
  8. 883. En vertu de ce qui a été exposé dans les paragraphes précédents, l’ESSALUD a mis en œuvre les mesures administratives qui correspondent à ce qui est conforme aux normes légales et administratives en vigueur, en ne se rendant coupable d’aucune violation de la liberté syndicale ni du droit de grève. Il ne s’est pas non plus produit d’atteinte au droit de grève ni d’actes d’agression à l’encontre d’un quelconque représentant des travailleurs syndiqués, en particulier du SINESSS.
  9. 884. Les articles 7, 10 et 11 de la Constitution politique du Pérou indiquent que les Péruviens ont droit à la protection de leur santé; que l’Etat reconnaît le droit universel et progressif de toute personne à la sécurité sociale, pour sa protection face aux imprévus que précise la loi et pour l’élévation de sa qualité de vie; et que l’Etat garantit le libre accès aux prestations de santé et aux retraites, par l’intermédiaire d’organismes publics, privés ou mixtes. Il convient de la même manière de respecter les droits fondamentaux consacrés dans l’article 51 du Code civil péruvien, en ce qui concerne le droit à la vie, à l’intégrité physique, à la liberté, à l’honneur et les autres droits inhérents à la personne humaine, droits qui sont inaliénables, ne peuvent faire l’objet d’une cession et sont protégés par la législation.
  10. 885. L’ESSALUD souligne que, par un acte d’accord dans le cadre d’une réunion extraprocédurale qui s’est tenue entre l’ESSALUD et le SINESSS, la grève nationale pour une durée illimitée lancée le 10 juin 2014 a été suspendue, et décision a été prise que les travailleurs seraient réintégrés à leurs postes à partir du premier roulement du 3 août 2014. Il ajoute que l’ESSALUD a respecté les droits fondamentaux consacrés dans les articles 7, 10 et 11 de la Constitution politique du Pérou mentionnés précédemment et l’ensemble des droits fondamentaux, y compris les droits syndicaux et de négociation collective.

C. Conclusions du comité

C. Conclusions du comité
  1. 886. Le comité observe que, dans le présent cas, le Syndicat national des infirmières de l’assurance sociale en matière de santé (SINESSS) allègue que, bien que la Constitution nationale reconnaisse le droit de grève, l’autorité administrative du travail a déclaré irrecevable et illégale la grève nationale pour une durée illimitée déclarée par le syndicat plaignant à partir du 10 juin 2014 devant le non-respect de la convention collective de 2013, et que l’Assurance sociale en matière de santé (ESSALUD) a adopté des mesures pour restreindre les piquets de grève, autoriser le recrutement de travailleurs en remplacement des grévistes et la retenue sur les salaires du personnel en grève. Le comité observe que, selon l’ESSALUD et les décisions administratives envoyées par le gouvernement, l’autorité administrative du travail, outre le non-respect de conditions de forme requises pour la grève, a invoqué que le syndicat n’a pas réexaminé la liste des travailleurs qui s’avèrent nécessaires pour empêcher l’interruption totale et assurer la continuité des activités.
  2. 887. Le comité observe que le syndicat plaignant, de son côté, soutient que l’ESSALUD n’a pas communiqué en temps opportun – contrairement à la législation – le nombre et la fonction des travailleurs nécessaires, ni les secteurs essentiels; en outre, selon le syndicat plaignant, l’extension des services minima est allée au-delà des «secteurs indispensables et des centres d’attention immédiate», parvenant jusqu’aux services ordinaires; le syndicat plaignant indique également que les lettres circulaires de l’ESSALUD de 2013 et 2014 sont contraires à une décision (de rang supérieur) de la direction générale de l’ESSALUD de 2002 qui limitait aux «secteurs indispensables» les services à maintenir en cas de grève. Le comité prend note que l’ESSALUD déclare que: 1) le plan d’urgence et de services minima en cas de paralysie du travail a été porté à la connaissance du syndicat depuis 2013 et que, avant la déclaration de grève, l’ESSALUD a adopté et notifié les mesures nécessaires, informant concrètement les parties que les piquets de grève ne faisaient pas partie de la programmation et que l’on ne leur reconnaissait pas de journées de travail effectives; 2) aucun acte d’agression ne s’est produit à l’encontre d’un quelconque représentant du syndicat plaignant; 3) la législation prévoit le non-paiement de rémunérations en cas de grève; 4) l’Etat est tenu par mandat constitutionnel de garantir les prestations de santé de même qu’il est tenu en vertu du Code civil de garantir le droit à la vie et à l’intégrité physique. Le comité observe que la grève des infirmières s’est terminée par un acte d’accord entre les parties, en date du 3 août 2014 (que le gouvernement a joint à sa réponse), qui aborde des questions de fond ayant donné lieu au conflit et qui comprend la réintégration des grévistes à leurs postes de travail.
  3. 888. Le comité conclut qu’il ressort des allégations et de la réponse de l’ESSALUD que les parties sont en désaccord sur la mise en œuvre effective des dispositions nationales applicables en matière de services minima et sur l’étendue et la portée de ces derniers, de même que sur la légalité ou l’illégalité de la grève. Le comité constate que la grève n’a pas donné lieu à l’ouverture de procédures disciplinaires.
  4. 889. Le comité souhaite repréciser qu’il a, à de nombreuses reprises (par exemple lors de sa réunion de mars 2014 [voir 375e rapport, cas no 3033, paragr. 763], rappelé au gouvernement du Pérou que la décision de déclarer la grève illégale ne devrait pas appartenir au gouvernement mais à un organe impartial et indépendant des parties. Le comité prie de nouveau le gouvernement, comme il l’a fait en d’autres occasions, de prendre des mesures pour modifier la législation afin qu’elle prenne en compte ce principe.
  5. 890. De même, en ce qui concerne les divergences sur le contenu des services minima, le comité signale au gouvernement la décision qu’il a adoptée dans un cas antérieur relatif à la grève dans les services essentiels lorsqu’elle est autorisée dans la législation nationale: «En ce qui concerne l’allégation relative à l’exigence légale d’un service minimum lorsqu’il s’agit d’une grève qui touche des services publics essentiels et que c’est l’administration du travail qui réglera toute divergence quant à la composition de ce service minimum, le comité estime que la législation devrait prévoir le règlement de pareille divergence par un organe indépendant et non par le ministère du Travail ou le ministère ou l’entreprise publique concernés.» [Voir Recueil, op. cit., paragr. 613.]
  6. 891. En ce qui concerne la question soulevée par le syndicat plaignant quant à la portée, à son avis excessive, des services minima compris dans les lettres circulaires de l’ESSALUD, le comité souhaite préciser qu’il n’est pas en mesure de se prononcer à ce sujet. Le comité rappelle que: «une opinion définitive fondée sur tous les éléments d’appréciation pour savoir si le niveau des services minima a été ou non le niveau indispensable ne peut être émise que par l’autorité judiciaire, étant donné que, pour la formuler, cela suppose en particulier une connaissance approfondie de la structure et du fonctionnement des entreprises et des établissements concernés, ainsi que des répercussions effectives des actions de grève». [Voir Recueil, op. cit., paragr. 614.] Le comité suggère que les divergences entre les parties sur le nombre et la fonction des travailleurs devraient être réglées par un organe indépendant tel que, par exemple, l’autorité judiciaire.
  7. 892. En ce qui concerne les allégations relatives à la retenue opérée sur les salaires des grévistes pour le temps non travaillé, le comité rappelle que les déductions de salaire pour les jours de grève ne soulèvent pas d’objections du point de vue des principes de la liberté syndicale. [Voir Recueil, op. cit., paragr. 654.]
  8. 893. En ce qui concerne l’embauche de non-grévistes, le comité rappelle qu’il l’admet en cas de services essentiels tels que le service de santé. [Voir Recueil, op. cit., paragr. 632.]
  9. 894. En ce qui concerne les allégations relatives aux piquets de grève, le comité ne peut déterminer à partir de la plainte et de la réponse du gouvernement si l’expression «piquets de grève» se rapporte à des piquets d’information à l’entrée du lieu de travail ou à des groupes de grévistes cherchant à pénétrer à l’intérieur du lieu de travail. Le comité se borne donc à rappeler d’une manière générale pour ce qui a trait aux piquets d’information que: «les piquets de grève organisés dans le respect de la loi ne doivent pas voir leur action entravée par les autorités publiques»; «l’interdiction des piquets de grève ne se justifierait que si la grève perdait son caractère pacifique»; et «le comité a jugé légitime une disposition légale interdisant aux piquets de grève de troubler l’ordre public et de menacer les travailleurs qui poursuivraient leurs occupations». [Voir Recueil, op. cit., paragr. 648 à 650.]
  10. 895. Le comité prie le gouvernement de communiquer ses observations sur l’allégation relative au refus des congés syndicaux à la dirigeante syndicale Mme Marcela Guevara González.

Recommandations du comité

Recommandations du comité
  1. 896. Au vu des conclusions qui précèdent, le comité invite le Conseil d’administration à approuver les recommandations suivantes:
    • a) Le comité prie de nouveau le gouvernement de prendre des mesures pour modifier la législation afin que la déclaration d’illégalité de la grève ne revienne pas au gouvernement mais à un organe impartial et indépendant des parties.
    • b) Le comité suggère que les divergences entre les parties sur le nombre et la fonction des travailleurs des services publics devraient elles aussi être réglées par un organe indépendant tel que, par exemple, l’autorité judiciaire.
    • c) Le comité prie le gouvernement de communiquer ses observations sur l’allégation relative au refus des congés syndicaux à la dirigeante syndicale Mme Marcela Guevara González.
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