Allégations: L’organisation plaignante allègue que ses membres employés par la Commission de transport de Toronto (CTT) ont été privés de leur droit fondamental de grève et de leur droit à négocier librement les termes et conditions de leur emploi, en vertu d’une loi (loi de 2011 sur le règlement des conflits de travail à la Commission de transport de Toronto) qui déclare que la CTT est un service essentiel
- 215. La plainte figure dans une communication du Syndicat uni du transport (ATU)-Local 113, en date du 5 décembre 2014.
- 216. Le gouvernement du Canada a transmis les observations du gouvernement de l’Ontario dans une communication en date du 28 octobre 2015.
- 217. Le Canada a ratifié la convention (nº 87) sur la liberté syndicale et la protection du droit syndical, 1948. En revanche, il n’a pas ratifié la convention (nº 98) sur le droit d’organisation et de négociation collective, 1949.
A. Allégations de l’organisation plaignante
A. Allégations de l’organisation plaignante- 218. Dans sa communication en date du 5 décembre 2014, l’ATU-Local 113 explique qu’il est un syndicat en vertu de la loi de 1995 sur les relations de travail de l’Ontario. Il représente les travailleurs du transport et de la maintenance dans le secteur du transport public de l’Ontario (Canada), y compris les employés de la Commission de transport de Toronto (CTT). La CTT est un organisme de transport public fournissant des services d’autobus, de tramway, de transport adapté et de transport rapide à Toronto (Ontario). A l’heure actuelle, environ 10 066 employés de la CTT sont représentés par Local 113 (6 719 dans les départements du transport et 3 347 dans les départements de la maintenance).
- 219. L’organisation plaignante explique par ailleurs que Local 113 et la CTT entretiennent depuis longtemps une relation de négociation collective respectueuse et ont négocié environ 55 conventions collectives depuis les années 1920. Avant l’adoption, en 2011, de la loi faisant état du caractère «essentiel» des membres de Local 113 employés par la CTT, Local 113 avait mené pendant des décennies d’âpres négociations afin d’améliorer la protection et les conditions de travail de ses membres. Les travailleurs syndiqués de la CTT ont mené des actions de grève à huit reprises au cours des soixante-deux dernières années:
- ■ 1952 – grève de dix-neuf jours;
- ■ 1970 – grève de douze jours;
- ■ 1974 – grève de vingt-trois jours; retour au travail imposé par voie législative;
- ■ 1978 – grève de huit jours; retour au travail imposé par voie législative;
- ■ 1991 – grève de huit jours;
- ■ 1999 – grève de deux jours; retour au travail imposé par voie législative;
- ■ 2006 – grève d’un jour; retour au travail imposé par voie législative;
- ■ 2008 – grève de deux jours; retour au travail imposé par voie législative.
- 220. A cet égard, l’organisation plaignante allègue ce qui suit: lorsque Local 113 a mené des actions de grève contre la CTT, dans cinq cas sur huit, la province de l’Ontario a introduit et mis en œuvre rapidement une loi de retour au travail, mettant ainsi fin au conflit social; avec le temps, même les courtes grèves ont été stoppées par des lois de retour au travail politiquement opportunes; enfin, malgré l’absence totale d’éléments de preuve indiquant que les grèves menées par Local 113 mettaient ou risquaient de mettre en danger dans tout ou partie de la population la vie, la santé ou la sécurité de la personne, il est devenu politiquement souhaitable pour les gouvernements de limiter les actions de grève menées à la CTT ou d’y mettre un terme.
- 221. L’organisation plaignante allègue en outre que, le 16 décembre 2010, la ville de Toronto a prié la province de l’Ontario de déclarer le caractère essentiel des transports publics à Toronto, interdisant ainsi les actions de grève des membres de Local 113. Le rapport des services du personnel de la ville de Toronto élaboré avant cette demande a fait apparaître un certain nombre de points clés s’agissant des grèves à la CTT:
- a) d’après la Division municipale du développement économique, de la culture et du tourisme, une grève à la CTT se traduirait principalement par une diminution de la production totale de biens et services de la ville, du fait d’un allongement des temps de trajet et de la modification des modalités de travail des navetteurs;
- b) les services d’incendie, les services médicaux d’urgence et les services de police de la ville de Toronto ont tous décrit la façon dont une grève à la CTT affecte leur capacité à traiter efficacement les urgences. Tous les services ont indiqué qu’une grève des employés de la CTT et une interruption des services de la CTT avaient des répercussions notables sur leur délai et leur capacité de réponse;
- c) le bureau de santé publique de Toronto […] ne dispose pas de données permettant de quantifier les conséquences sanitaires d’une grève des transports à Toronto.
- 222. D’après l’organisation plaignante, une motion présentée au conseil municipal de Toronto pour que la province de Toronto déclare la CTT comme un service essentiel met clairement en évidence les motivations de la demande: «les récents sondages ont systématiquement montré que plus de 75 pour cent des Torontois sont favorables à ce que la CTT soit déclarée “service essentiel” (ce chiffre atteint parfois 90 pour cent)». D’après l’organisation plaignante, lorsque le ministre du Travail d’alors a présenté le texte à l’Assemblée législative de l’Ontario, il a mentionné «l’impact économique des interruptions du travail» et a noté que les «interruptions des services de la CTT affectent lourdement l’économie de la ville».
- 223. Le 22 février 2010, le ministre du Travail de l’Ontario d’alors a présenté la loi de 2011 sur le règlement des conflits de travail à la Commission de transport de Toronto, qui a ensuite reçu la sanction royale le 30 mars 2011. Conformément aux sections 1 et 15 de la loi, l’interdiction des actions de grève autrement légales s’applique à tous les employés de la CTT. La loi stipule ce qui suit:
- 1. 1) Les définitions qui suivent s’appliquent à la présente loi. […]
- «employé»: Un employé de l’employeur. («employee»)
- «employeur»: La Commission de transport de Toronto. («employer»)
- 15. 1) Malgré la loi de 1995 sur les relations de travail, les employés à qui la présente loi s’applique ne doivent pas se mettre en grève et leur employeur ne doit pas [leur refuser l’entrée à l’entreprise].
- 224. La loi prévoit également un arbitrage obligatoire pour le règlement des conflits en suspens, y compris un certain nombre de critères restrictifs qui, d’après l’organisation plaignante, limitent la discrétion et la flexibilité de l’arbitre:
- 4. Si le ministre a informé les parties que le conciliateur n’est pas parvenu à conclure une convention collective, les questions encore en litige entre les parties sont tranchées par arbitrage conformément à la présente loi.
- 10. […]
- 2) Pour rendre sa sentence, l’arbitre prend en considération tous les facteurs qu’il estime pertinents, notamment les critères suivants:
- 1. La capacité de payer de l’employeur compte tenu de sa situation financière.
- 2. La mesure dans laquelle des services devront peut-être être réduits, compte tenu de la décision ou de la sentence arbitrale, si les niveaux de financement et d’imposition actuels ne sont pas relevés.
- 3. La situation économique prévalant en Ontario et dans la cité de Toronto.
- 4. La comparaison, établie entre les employés et des employés comparables des secteurs public et privé, des conditions d’emploi et de la nature du travail exécuté.
- 5. La capacité de l’employeur d’attirer et de garder des employés qualifiés.
- 6. Les objets de la loi de 1997 sur le règlement des différends dans le secteur public.
- 225. L’organisation plaignante fait référence au cas no 1768 concernant l’Islande, dans lequel le comité a jugé que la loi islandaise prescrivant à un arbitre de «tenir compte des conventions en vigueur concernant les salaires et les conditions de travail dans la marine marchande et de l’évolution générale des salaires dans le pays», au moment de fixer les niveaux de salaire, était incompatible avec les libertés syndicales fondamentales, car elle «ne confère pas à [l’arbitre] une souplesse d’interprétation», et a estimé que l’arbitrage obligatoire doit être «véritablement indépendant, ce qui signifie que les résultats des arbitrages ne doivent pas être prédéterminés par des critères législatifs».
- 226. L’organisation plaignante soutient qu’avec la sanction royale, les membres de Local 113 employés par la CTT ont perdu leur droit de grève acquis de longue date et ont obtenu un système d’arbitrage dans lequel l’arbitre doit respecter bon nombre de critères restrictifs. La loi de 2011 sur le règlement des conflits de travail à la Commission de transport de Toronto a entraîné le gel immédiat des négociations de fond et a eu un effet inhibiteur sur toutes les négociations futures.
- 227. La loi prévoit également qu’un examen aura lieu dans l’année qui suit le cinquième anniversaire de son entrée en vigueur:
- 22. Dans l’année qui suit le cinquième anniversaire de l’entrée en vigueur de la présente loi, le ministre fait entreprendre un examen de l’application de la présente loi et demande un rapport sur les résultats de l’examen.
- 228. L’organisation plaignante indique que cet examen devrait avoir lieu fin 2015 ou début 2016. Les conclusions et recommandations du comité seraient extrêmement pertinentes dans ce contexte.
- 229. D’après l’organisation plaignante, en 2011 les négociations se sont poursuivies pendant quelque temps, mais aucun progrès notable n’a été accompli. En comparaison avec des précédents cycles de négociation au cours desquels les parties n’étaient pas parvenues à négocier des conventions collectives dans leur intégralité et avaient eu recours à la grève, lors du cycle de négociations de 2011, beaucoup moins de points ont fait l’objet d’un accord. Les parties n’ayant pas réussi à conclure de convention collective en 2011, le conflit a été confié à un arbitre du travail, conformément à la loi. Même si les parties sont parvenues à négocier une convention collective en 2014, l’impossibilité pour Local 113 d’utiliser la menace de l’action de grève a eu un effet inhibiteur sur les négociations et a profondément modifié le pouvoir de négociation de Local 113.
- 230. Faisant référence aux cas examinés par le comité, l’organisation plaignante rappelle que le comité a systématiquement et constamment jugé que, pour les travailleurs, le droit de grève est un moyen fondamental et légitime de défendre leurs intérêts sociaux et économiques, et qu’il s’agit d’«un corollaire indissociable du droit syndical protégé par la convention no 87» (cas no 1954, paragr. 405). L’organisation plaignante rappelle en outre que le comité a donné une définition étroite des «services essentiels» en concluant qu’un service est essentiel uniquement si son interruption «met en danger la vie, la sécurité de la personne ou la santé dans tout ou partie de la population» (voir, par exemple, cas no 1989, paragr. 324), et que le fait que l’interruption d’un service causerait d’importants dommages économiques n’est «pas déterminant» pour juger du caractère essentiel d’un service (cas no 1963, paragr. 230):
- [L]e fait d’établir un lien entre les restrictions aux actions revendicatives et l’entrave aux échanges et au commerce permet de porter atteinte à une large gamme d’actions légitimes. Certes, l’impact économique des actions revendicatives et leurs effets sur les échanges et le commerce sont regrettables; cependant, ils ne suffisent pas à rendre le service visé «essentiel», et le droit de grève devrait donc être maintenu.
- 231. L’organisation plaignante fait également référence aux cas dans lesquels le comité avait jugé que les services de transport de passagers n’étaient pas des «services essentiels» aux fins de la restriction du droit de grève (cas no 2078: transports publics municipaux à Vilnius, Lituanie; cas no 2057: transports publics municipaux à Bucarest, Roumanie; cas no 2324: services de transbordeurs en Colombie-Britannique, Canada; cas no 1768: services de transbordeurs en Islande; cas no 2212: services de transbordeurs en Grèce; cas no 2044: services de transbordeurs au Cap-Vert; et cas no 2741: travailleurs du transport à New York, Etats-Unis). L’organisation plaignante souligne que le comité, qui a toujours considéré que le «secteur des transports, y compris celui d’une grande métropole, ne constitue pas un service essentiel au sens strict du terme», a parfois reconnu que, dans certaines circonstances, le maintien d’un service minimum pourrait être approprié dans les transports métropolitains (cas no 2741, paragr. 767-68).
B. Réponse du gouvernement
B. Réponse du gouvernement- 232. Dans sa communication en date du 28 octobre 2015, le gouvernement du Canada fait part des observations suivantes formulées par le gouvernement de l’Ontario.
- 233. Le gouvernement de l’Ontario indique que la loi de 2011 sur le règlement des conflits de travail à la Commission de transport de Toronto est entrée en vigueur le 30 mars 2011. Elle prévoit un système équitable et neutre d’arbitrage obligatoire rendu par un tiers indépendant pour le règlement des conflits que les parties ne peuvent résoudre par l’intermédiaire du processus normal de négociation collective. D’après le gouvernement de l’Ontario, les parties jouent un rôle clé et jouissent des droits importants ci-après au titre de la loi: elles peuvent choisir l’arbitre et la méthode d’arbitrage; elles ont toute possibilité de présenter leurs éléments de preuve ainsi que des remarques; et elles peuvent, à tout moment avant que l’arbitre ne rende une sentence, convenir que l’arbitrage devrait recommencer devant un arbitre différent.
- 234. Le gouvernement de l’Ontario soutient que la loi a été adoptée en réponse à une demande des élus de la ville de Toronto pour traiter la situation particulière de Toronto et de son système de transports ainsi que pour répondre aux besoins des habitants et des visiteurs. Cette situation est notamment caractérisée par le rôle essentiel que joue la CTT dans la vie de la cité et dans la protection de la santé et de la sécurité des habitants. Le gouvernement rappelle notamment que: i) Toronto est la plus grande ville du Canada; ii) la CTT est le plus grand système de transports au Canada et le troisième plus grand en Amérique du Nord; iii) la région du Grand Toronto affiche la plus grande concentration d’établissements de santé du pays – 40 hôpitaux, 84 établissements de soins de longue durée et 21 centres de soins communautaires; iv) chaque jour ouvrable, environ 1,5 million de personnes, dont beaucoup de travailleurs du secteur de la santé, utilisent les services de la CTT; et v) un rapport de 2008 commandé par l’ATU-Local 113 lui-même a mis en lumière les répercussions environnementales et sanitaires associées à une perturbation totale des services de la CTT. Ce rapport a notamment estimé que, sans ces services, on compterait plus de 178 000 voitures supplémentaires sur les routes de Toronto et environ 350 000 nouveaux déplacements en voiture chaque jour ouvrable (d’où des conséquences sur la santé et l’environnement liées aux événements tels que les accidents de la route, le brouillard de pollution, etc.).
- 235. Le gouvernement de l’Ontario souligne qu’il est attaché à des relations professionnelles équilibrées, stables et productives. Il estime que la loi n’entrave pas le droit d’association ou de négociation collective des employés. En effet, la loi encourage expressément les parties à poursuivre les négociations en vue de conclure une nouvelle convention collective. Le gouvernement indique qu’il a examiné avec attention la demande des élus de la ville de Toronto et a tenu des consultations avec la ville, la CTT et ses agents négociateurs, dont l’ATU-Local 113. Les parties prenantes, y compris l’ATU-Local 113, et le grand public ont eu la possibilité d’exprimer leurs vues concernant la proposition par une communication directe au gouvernement et par la voie législative. En Ontario, le processus législatif est public et démocratique. Au cours de ce processus, un comité permanent de l’Assemblée législative, composé de membres de tous les partis politiques, a tenu des auditions pour recueillir l’avis du public. L’ATU-Local 113, notamment, a présenté des remarques à cette occasion. Toutes les remarques ont été prises en considération par le gouvernement. Après avoir attentivement étudié la demande de la ville et ses motivations, la réalité de la situation et les contributions des parties prenantes y compris l’ATU-Local 113, le gouvernement a apporté une réponse juste et pondérée.
- 236. Le gouvernement de l’Ontario conclut que la CTT joue un rôle essentiel, unique et primordial dans la vie des Torontois; la perte des services de la CTT est bien plus qu’un désagrément ou qu’une simple question économique. Le gouvernement considère que la loi respecte la liberté de s’associer et de négocier collectivement, et encourage en effet les solutions négociées librement. Elle constitue un moyen équitable, neutre et indépendant de régler les problèmes qui ne peuvent pas l’être par la voie de la négociation collective.
C. Conclusions du comité
C. Conclusions du comité- 237. Le comité note que, dans sa communication en date du 5 décembre 2014, l’ATU-Local 113 allègue que ses membres employés par la Commission de transport de Toronto (CTT) ont été privés de leur droit fondamental de grève et de leur droit à négocier librement les termes et conditions de leur emploi, en vertu d’une loi (loi de 2011 sur le règlement des conflits de travail à la Commission de transport de Toronto) qui déclare que la CTT est un service essentiel et interdit de ce fait tout recours à l’action de grève.
- 238. Le comité note qu’en vertu de la section 15 de la loi «les employés à qui la présente loi s’applique ne doivent pas se mettre en grève». Conformément à la section 1 de la loi, cette législation s’applique aux employés de la CTT.
- 239. Le comité note les informations communiquées par le gouvernement de l’Ontario pour justifier l’interdiction des grèves dans le système de transports de Toronto et en particulier les informations concernant le rôle de la CTT dans la vie de la cité.
- 240. Le comité rappelle que le droit de grève est un des moyens essentiels dont disposent les travailleurs et leurs organisations pour promouvoir et pour défendre leurs intérêts économiques et sociaux. Il rappelle également que le droit de grève peut être restreint, voire interdit: 1) dans la fonction publique uniquement pour les fonctionnaires qui exercent des fonctions d’autorité au nom de l’Etat; ou 2) dans les services essentiels au sens strict du terme, c’est-à-dire les services dont l’interruption mettrait en danger, dans l’ensemble ou dans une partie de la population, la vie, la sécurité ou la santé de la personne. Le comité a estimé que les transports métropolitains ne constituent pas des services essentiels au sens strict du terme. Il rappelle que le transport de voyageurs et de marchandises ne constitue pas un service essentiel au sens strict du terme; il s’agit toutefois d’un service public d’une importance primordiale où l’imposition d’un service minimum en cas de grève peut se justifier. A cet égard, un service minimum pourrait être approprié comme solution de rechange possible dans les situations où une limitation importante ou une interdiction totale de la grève n’apparaît pas justifiée et où, sans remettre en cause le droit de grève de la plus grande partie des travailleurs, il pourrait être envisagé d’assurer la satisfaction des besoins de base des usagers ou encore la sécurité ou le fonctionnement continu des installations. [Voir Recueil de décisions et de principes du Comité de la liberté syndicale, cinquième édition, 2006, paragr. 522, 576, 587, 607 et 621.]
- 241. En ce qui concerne l’arbitrage obligatoire (section 4 de la loi), le comité observe que ce cas ne porte pas sur un recours ponctuel à l’arbitrage obligatoire, mais plutôt sur une interdiction générale du droit de grève dans un secteur qui ne peut être considéré, dans son intégralité, comme essentiel, contrairement aux principes susmentionnés. Le comité rappelle qu’un système d’arbitrage obligatoire par les soins de l’administration du travail, lorsqu’un différend n’a pas été réglé par d’autres moyens, peut avoir pour résultat de restreindre considérablement le droit des organisations de travailleurs d’organiser leur activité et risque même d’imposer une interdiction absolue de la grève, contrairement aux principes de la liberté syndicale. Il rappelle également que l’arbitrage obligatoire pour mettre fin à un conflit collectif du travail est acceptable soit s’il s’intervient à la demande des deux parties au conflit, soit dans les cas où la grève peut être limitée, voire interdite, à savoir dans les cas de conflit dans la fonction publique à l’égard des fonctionnaires exerçant des fonctions d’autorité au nom de l’Etat ou dans les services essentiels au sens strict du terme, c’est-à-dire les services dont l’interruption risquerait de mettre en danger dans tout ou partie de la population la vie, la santé ou la sécurité de la personne. En outre, le comité considère que les dispositions selon lesquelles, à défaut d’accord entre les parties, les points de la négociation collective restés en litige seront réglés par arbitrage ne sont pas conformes au principe de la négociation volontaire énoncé à l’article 4 de la convention no 98. [Voir Recueil, op. cit., paragr. 568, 564 et 993].
- 242. Le comité note également l’allégation supplémentaire de l’organisation plaignante traitant de questions autres que celles soulevées ci-dessus, selon laquelle la section 10(2) de la loi limite la discrétion et la flexibilité de l’arbitre en ce qu’elle prévoit certains critères que «l’arbitre prend en considération». Le comité considère que les critères que l’arbitre est tenu de prendre en considération au titre de la loi semblent lui ménager une discrétion et une flexibilité suffisantes, étant entendu qu’il ne devrait être fait référence à l’arbitrage que conformément aux principes susmentionnés.
- 243. Au vu de l’examen du fonctionnement de la loi qui doit être mené prochainement, le comité prie instamment le gouvernement de prendre les mesures nécessaires afin que le gouvernement de l’Ontario révise la loi de 2011 sur le règlement des conflits de travail à la Commission de transport de Toronto, en consultation avec les partenaires sociaux, d’une manière permettant de garantir les droits des travailleurs de la CTT conformément aux principes susmentionnés. Le comité prie le gouvernement de le tenir informé à cet égard.
Recommandation du comité
Recommandation du comité- 244. Au vu des conclusions qui précèdent, le comité invite le Conseil d’administration à approuver la recommandation suivante:
- Au vu de l’examen du fonctionnement de la loi qui doit être mené prochainement, le comité prie instamment le gouvernement de prendre les mesures nécessaires afin que le gouvernement de l’Ontario révise la loi de 2011 sur le règlement des conflits de travail à la Commission de transport de Toronto, en consultation avec les partenaires sociaux, d’une manière permettant de garantir les droits des travailleurs de la CTT. Le comité prie le gouvernement de le tenir informé à cet égard.