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Rapport où le comité demande à être informé de l’évolution de la situation - Rapport No. 377, Mars 2016

Cas no 3128 (Zimbabwe) - Date de la plainte: 07-AVR. -15 - Clos

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Allégations: L’organisation plaignante allègue que le greffier a refusé d’enregistrer le Syndicat des travailleurs du tannage de la chaussure et assimilés du Zimbabwe (ZFTAWU) au sein de la Société des chaussures Bata et que la police a interdit une manifestation publique

  1. 442. La plainte figure dans des communications en date des 7 avril et 27 mai 2015 du Congrès des syndicats du Zimbabwe (ZCTU). La Confédération syndicale internationale (CSI) s’est associée à la plainte dans une communication en date du 9 avril 2015.
  2. 443. Le gouvernement a fait parvenir ses observations dans une communication en date du 21 septembre 2015.
  3. 444. Le Zimbabwe a ratifié la convention (no 87) sur la liberté syndicale et la protection du droit syndical, 1948, ainsi que la convention (no 98) sur le droit d’organisation et de négociation collective, 1949.

A. Allégations de l’organisation plaignante

A. Allégations de l’organisation plaignante
  1. 445. Dans des communications en date des 7 avril et 27 mai 2015, le ZCTU explique que, en 2012, des travailleurs au nombre de 850 de la Société des chaussures Bata, basée à Gweru, ont quitté le Syndicat des travailleurs de la chaussure en cuir et des professions connexes, car ce dernier n’agissait plus dans leur intérêt. Le 10 mai 2012, ces mêmes travailleurs, sous la conduite de leur représentant choisi, ont constitué le Syndicat des travailleurs du tannage de la chaussure et assimilés du Zimbabwe (ZFTAWU) au sein de la Société des chaussures Bata, afin de représenter les intérêts des travailleurs du tannage des cuirs et peaux pour la chaussure. Le ZFTAWU a adopté ses statuts, conformément à l’article 28 de la loi sur le travail, et présenté une demande d’enregistrement le 21 mai 2012, en vertu des articles 29(1), 33 et 34 de la loi sur le travail. Le 2 août 2013, l’avis de procédure d’accréditation a été publié dans l’avis no 379/2013 de la Gazette du gouvernement. Le 24 octobre 2014, le greffier a publié dans la Gazette du gouvernement un avis de procédure d’accréditation devant avoir lieu le 19 novembre 2014 et a invité toute personne intéressée à communiquer ses objections en la matière. Le 19 novembre 2014, le Syndicat des travailleurs de la chaussure en cuir et des professions connexes a fait connaître son opposition à l’enregistrement du nouveau syndicat. Le greffier n’a pas fourni d’exemplaire de la demande d’opposition au ZFTAWU, et les représentants syndicaux de ce dernier n’ont été servis que le jour de la procédure d’accréditation. Le 19 novembre 2014, les représentants du ZFTAWU ont protesté pour ne pas avoir reçu les exemplaires de la demande d’opposition du Syndicat des travailleurs de la chaussure en cuir et des professions connexes. Le greffier a alors demandé au syndicat protestataire de présenter des déclarations écrites, ce qu’il a fait. Le 9 janvier 2015, le greffier a rendu une décision de refus d’enregistrement du ZFTAWU aux motifs qu’une demande d’enregistrement similaire à laquelle il n’avait pas fait droit précédemment avait été confirmée par le Tribunal du travail, qu’il n’y avait pas de changement dans la baisse de la densité de la main-d’œuvre de l’industrie et que les membres du ZFTAWU constituaient une minorité de travailleurs. Le 19 février 2015, le ZFTAWU a saisi le Tribunal du travail en déposant une requête en annulation de la décision du greffier; cette requête est toujours en instance.
  2. 446. Le ZCTU estime que la décision du gouvernement de refuser l’enregistrement du ZFTAWU constitue une violation de l’article 2 de la convention no 87; l’article 65, paragraphe 2, de la Constitution nationale stipule que, «à l’exception des membres des services de sécurité, toute personne a le droit de constituer des syndicats et des organisations de travailleurs ou d’employeurs de son choix et de s’y affilier et de participer aux activités légales de ces syndicats et organisations»; l’article 27(1) de la loi sur le travail stipule que, «sous réserves des dispositions de cette loi, tout groupe de travailleurs peut constituer un syndicat».
  3. 447. Le ZCTU explique que le refus d’enregistrer le syndicat prive ce dernier de son statut légal et de la jouissance des droits et privilèges prévus à l’article 29 de la loi sur le travail, à savoir notamment la représentation de ses membres, la négociation collective, le prélèvement des cotisations syndicales par un système de recouvrement. Le ZCTU déplore que l’article 45 de la loi sur le travail accorde un large pouvoir discrétionnaire au greffier pour refuser l’enregistrement d’un syndicat sur la base de certains critères, au nombre desquels celui du syndicat majoritaire au détriment de la minorité.
  4. 448. Le ZCTU allègue aussi que le Syndicat national de la métallurgie et des industries connexes du Zimbabwe (NUMAIZ) est demeuré sans enregistrement depuis le 21 juin 2013.
  5. 449. Le ZCTU allègue en outre que, les 7 et 15 mars 2015, il a adopté une résolution tendant à organiser et mener une action de protestation devant avoir lieu le 11 avril 2015 dans les six centres régionaux du ZCTU (Harare, Bulawayo, Gweru, Mutare, Masvingo et Chinhoyi). L’action de protestation devait se dérouler sous la forme d’une manifestation publique et de la remise d’une pétition au ministère des Services publics, du Travail et de la Prévoyance sociale. Elle avait pour objet d’attirer l’attention du public et du gouvernement sur plusieurs questions ayant des répercussions sur les travailleurs du Zimbabwe: l’intention du gouvernement de geler et de réduire les salaires et traitements et d’instaurer la flexibilité du marché du travail; le non-versement ou le versement en retard des salaires des travailleurs; le non-reversement des cotisations syndicales; enfin, la détérioration générale de l’économie à l’origine de pertes d’emplois.
  6. 450. Le ZCTU, par l’intermédiaire de ses bureaux régionaux, a informé la police de l’action de protestation prévue. La police de la République du Zimbabwe (ZRP) à Bulawayo et à Masvingo a réagi en interdisant la manifestation, tandis que la ZRP du district de Mutare a émis une interdiction verbale. Le ZCTU a saisi la Haute Cour pour obtenir une ordonnance d’annulation de l’interdiction. Le 10 avril 2015, la Haute Cour a rendu une ordonnance interdisant à la ZRP de faire obstacle ou barrage à la manifestation. Le ZCTU allègue que, la veille de l’action de protestation, des individus non identifiés ont imprimé et distribué de faux communiqués de presse du ZCTU annonçant que l’action de protestation était annulée. Le ZCTU déclare qu’il y a de bonnes raisons de croire que l’appareil d’Etat et le parti au pouvoir ont joué un rôle dans l’impression et la distribution des faux communiqués de presse du ZCTU, car après avoir perdu devant la Haute Cour le gouvernement n’avait plus d’autre issue que d’entraver l’action de protestation par tout moyen.
  7. 451. L’organisation plaignante allègue en outre, que suite à l’annonce par le ZCTU de l’interdiction, le Herald, journal du gouvernement, a publié des articles intitulés «Le ZCTU payé pour manifester» et «ZCTU, MDC-T, le paroxysme de la démence». Ces articles, qui constituent des attaques contre le ZCTU, affirment mensongèrement que le ZCTU reçoit de l’argent du BIT pour ses manifestations. Le ZCTU allègue par ailleurs que le ministre de l’Eau et le commissaire politique du ZANU-PF, cités dans la presse, auraient déclaré que l’action de protestation était «une astuce d’une fédération du travail à court d’argent destinée à attirer l’attention de la communauté des donateurs et que les dirigeants syndicaux doivent demander à leurs alliés occidentaux la levée des sanctions frappant l’économie pour qu’elle puisse progresser...» Selon le ZCTU, l’Alliance des jeunes pour l’action (aile gauche du ZANU-PF) a été citée dans la presse, avertissant le ZCTU de ne pas se lancer dans l’action et qualifiant le ZCTU de «cheval de Troie du principal parti d’opposition, le MDC-T».
  8. 452. Le ZCTU allègue en outre que la ZRP du district de Mbare a interdit au Syndicat des agents de sécurité du Zimbabwe (ZISEGU), qui lui est affilié, de participer à une manifestation pacifique le 30 avril 2015, après une impasse dans les négociations salariales.
  9. 453. Le ZCTU fait valoir que, en interdisant les activités syndicales, le gouvernement viole l’article 3, paragraphes 1 et 2, de la convention no 87, l’article 4 de la convention no 98 et l’article 59 de sa propre Constitution qui stipule que: «Toute personne a le droit de manifester et de présenter des pétitions, pour autant que ces droits sont exercés pacifiquement».

B. Réponse du gouvernement

B. Réponse du gouvernement
  1. 454. Le gouvernement déclare que la décision de ne pas enregistrer le ZFTAWU a été prise une fois que le greffier a été dûment convaincu que l’industrie du cuir n’était pas suffisamment viable pour justifier l’enregistrement d’un nouveau syndicat dans le secteur. Cette décision est conforme à une décision antérieure qui a été confirmée par le tribunal du travail de ne pas enregistrer le Syndicat de la chaussure en cuir et en toile sur la même base. Elle a été prise en application de l’article 45 de la loi sur le travail qui oblige le greffier à examiner, entre autres, les critères suivants durant la procédure d’accréditation:
    • a) l’opportunité d’accorder des droits de représentation à une majorité d’employés d’une entreprise, ou d’employeurs dans un secteur d’activités, dans le cadre de négociations portant sur leurs droits et leurs intérêts;
    • b) l’opportunité de réduire au minimum le nombre d’entités avec lesquelles les employés et les employeurs doivent négocier.
  2. Le compte rendu de la procédure d’accréditation montre que le greffier a été convaincu que l’enregistrement du ZFTAWU ne contribuerait pas à promouvoir les intérêts de la majorité des travailleurs du secteur.
  3. 455. Le gouvernement indique également que la procédure d’accréditation concernant le NUMAIZ s’est déroulée le 21 septembre 2015, conformément à la législation en vigueur. Le gouvernement fait valoir que le syndicat postulant a perturbé la procédure d’enregistrement en retardant son paiement pour la parution, dans la gazette, de l’avis relatif à la procédure d’accréditation. Une décision en la matière est en cours et sera communiquée aux parties dans les meilleurs délais.
  4. 456. Le gouvernement fait savoir que les dispositions législatives relatives à l’enregistrement des syndicats sont en cours de révision. Les amendements proposés visent à donner au greffier des critères spécifiques à examiner pour l’enregistrement d’un syndicat, tels que l’existence d’un statut, l’existence d’un conseil exécutif, une adresse officielle permanente, un registre des membres et des états financiers vérifiés.
  5. 457. En ce qui concerne la prétendue interdiction faite au ZCTU d’organiser son action de protestation, le gouvernement indique que le ZCTU a pu tenir sa manifestation dans l’ensemble du pays comme prévu. Dans le cas des provinces de Bulawayo (zone métropolitaine) et de Masvingo, la ZRP a levé son interdiction initiale. En dépit du fait que le ZCTU a adressé une plainte à la Haute Cour, la police a, de sa propre initiative, levé son interdiction initiale, après des consultations internes. De l’avis du gouvernement, cela démontre que la ZRP est capable de garantir le droit d’organisation des travailleurs. Le gouvernement explique également que le calendrier de l’action de protestation a posé des problèmes pratiques et logistiques à la ZRP, car l’action de protestation a pratiquement coïncidé avec la fête de l’indépendance qui tombe le 18 avril. Divers événements étaient organisés dans le pays dans le cadre de cette fête, et les services de police faisaient partie intégrante des préparatifs, d’où la difficulté de garantir une protection policière pour la manifestation du ZCTU du 11 avril 2015.
  6. 458. Le gouvernement affirme que la ZRP a agi de bonne foi en interdisant au Syndicat des agents de sécurité du Zimbabwe de manifester, et ce en grande partie à cause du calendrier de la manifestation. Comme indiqué précédemment, l’événement coïncidait avec les commémorations nationales de la Journée de l’indépendance, et, il y avait des motifs raisonnables de penser que la manifestation serait prise en otage par des éléments malveillants au détriment des intérêts du syndicat et de l’ordre public. Par ailleurs, le gouvernement indique que le calendrier de la manifestation prévue coïncidait avec une période durant laquelle les autorités municipales de Harare s’activaient pour maintenir l’ordre public, le plus souvent en déplaçant des vendeurs de rue violents vers d’autres lieux. Le gouvernement fait remarquer que dans le présent cas l’interdiction prononcée ne revient pas à interdire indistinctement les manifestations syndicales.
  7. 459. Le gouvernement réfute l’allégation selon laquelle il a distribué des tracts annonçant l’annulation de l’action de protestation du ZCTU, et insiste sur le fait qu’il a autorisé la tenue de l’action de protestation. Il rejette par ailleurs les accusations concernant diverses déclarations soi-disant citées dans les journaux, et explique qu’il ne fait pas appel aux journaux pour faire connaître ses points de vue sur ces questions et que sa véritable position en la matière a été exprimée par la Haute Cour lorsqu’il a permis au ZCTU d’aller de l’avant avec son action de protestation.
  8. 460. Le gouvernement fait remarquer que l’amélioration continue de la situation des travailleurs en matière de droit d’organisation est le résultat des efforts permanents déployés par lui même pour donner plein effet aux conventions ratifiées de l’OIT. Au nombre de ces efforts on peut citer les activités d’échanges menées au niveau national avec les organes chargés de l’application des lois dans le domaine des normes internationales du travail avec l’appui du Bureau international du Travail depuis 2011. Le gouvernement déclare aussi qu’il y a eu des améliorations continues dans les relations entre les syndicalistes et la ZRP dans le cadre des discussions relatives aux modalités de la conduite des manifestations. Le dialogue et la coopération mutuelle devraient se poursuivre. Le gouvernement continue à collaborer avec l’OIT dans les initiatives visant à intégrer les normes internationales du travail dans les activités de la police et demeure convaincu que les organisations de travailleurs continueront à jouir pleinement de la liberté syndicale et du droit d’organisation.
  9. 461. En ce qui concerne les soi-disant attaques contre le droit de négociation collective par des rapports des médias sur des réductions et des gels de salaires et la flexibilité du marché du travail, le gouvernement indique que ces allégations n’ont rien à voir avec ses politiques ou réformes législatives en cours. Il réitère qu’il ne fait pas appel aux médias pour faire connaître ses positions politiques. Il indique qu’il continue à être guidé par les conventions ratifiées de l’OIT pour l’élaboration de ses politiques et textes législatifs. L’article 65, paragraphe 5, de la Constitution nationale défend le droit de négociation collective. Le gouvernement souligne qu’il a relancé le dialogue tripartite lors du Forum de négociation tripartite pour permettre aux partenaires sociaux de contribuer aux programmes économiques et sociaux dans le pays.

C. Conclusions du comité

C. Conclusions du comité
  1. 462. Le comité prend note des allégations du ZCTU concernant le refus d’enregistrer de nouveaux syndicats (le ZFTAWU et le NUMAIZ) et l’interdiction par la police d’organiser des manifestations syndicales.
  2. 463. Le comité note que, selon le ZCTU, le ZFTAWU a été créé le 10 mai 2012 pour représenter les intérêts des travailleurs du tannage des cuirs et peaux pour la chaussure. Ce syndicat, qui compte 850 membres, a déposé une demande d’enregistrement le 21 mai 2012 en vertu des articles 29(1), 33 et 34 de la loi sur le travail. Le 2 août 2013, l’avis de procédure d’accréditation a été publié dans l’avis général no 379/2013 de la Gazette du gouvernement. Le 24 octobre 2014, le greffier a publié dans la Gazette du gouvernement un avis de procédure d’accréditation et a invité toute personne intéressée à communiquer ses objections en la matière. Le Syndicat des travailleurs de la chaussure en cuir et des professions connexes du Zimbabwe s’est manifesté le 19 novembre 2014 pour faire opposition à l’enregistrement. Le 9 janvier 2015, le greffier a rendu une décision de refus d’enregistrement du ZFTAWU aux motifs qu’une demande d’enregistrement similaire à laquelle il n’avait pas fait droit avait été confirmée par le Tribunal du travail, qu’il n’y avait pas de changement dans la baisse de la densité de la main-d’œuvre de l’industrie et que les membres du ZFTAWU constituaient une minorité de travailleurs. Le 19 février 2015, le ZFTAWU a saisi le Tribunal du travail en déposant une requête en annulation de la décision du greffier. Cette requête est toujours en instance.
  3. 464. Le ZCTU allègue aussi qu’un autre syndicat, le NUMAIZ, est demeuré sans enregistrement depuis le 21 juin 2013.
  4. 465. Le comité note que, dans sa réponse en date du 21 septembre 2015, le gouvernement mentionne l’obligation faite au greffier en vertu de l’article 45 de la loi sur le travail d’examiner, entre autres, les critères ci-après durant la procédure d’accréditation:
    • […]
    • a) l’opportunité d’accorder des droits de représentation à une majorité d’employés d’une entreprise, ou d’employeurs dans un secteur d’activité, dans le cadre des négociations portant sur leurs droits et leurs intérêts; et
    • b) l’opportunité de réduire au minimum le nombre d’entités avec lesquelles les employés et les employeurs doivent négocier.
    • […]
  5. 466. Le comité note que le libellé de l’article 45 de la loi sur le travail semble conférer au greffier un pouvoir tout à fait discrétionnaire pour accepter ou refuser une demande d’enregistrement. Le comité est d’avis que le caractère vague de cette disposition législative ne peut qu’encourager les autorités compétentes à faire un usage abusif de leur pouvoir discrétionnaire, ce qui constitue un grave obstacle à la constitution d’organisations et peut revenir à priver les travailleurs et les employeurs du droit de constituer des organisations sans autorisation préalable. En outre, dans les systèmes où le greffier doit se fier à son propre jugement pour déterminer si les conditions pour l’enregistrement d’un syndicat sont respectées – bien que sa décision puisse faire l’objet d’un appel devant les tribunaux –, le comité a estimé que l’existence d’une procédure de recours judiciaire ne semble pas une garantie suffisante; en effet, cela ne modifie pas la nature des pouvoirs conférés aux autorités chargées de l’enregistrement, et les juges saisis d’un tel recours n’auraient eux-mêmes que la possibilité de s’assurer que la législation a été correctement appliquée. Le comité a attiré l’attention sur l’opportunité qu’il y a à définir clairement dans la législation les conditions précises que les syndicats doivent remplir pour pouvoir se faire enregistrer et à prescrire des critères spécifiques pour déterminer si ces conditions sont ou non remplies. [Voir Recueil de décisions et de principes du Comité de la liberté syndicale, cinquième édition, 2006, paragr. 302.]
  6. 467. Le comité estime en outre que l’article 45 de la loi sur le travail semble faire obstacle à l’enregistrement d’une nouvelle organisation lorsqu’une autre organisation existe déjà dans une entreprise ou une activité spécifique. Il rappelle à cet égard qu’une disposition autorisant le rejet de la demande d’enregistrement, si un autre syndicat déjà enregistré est suffisamment représentatif des intérêts que le syndicat postulant se propose de défendre, signifie que, dans certains cas, des salariés peuvent se voir refuser le droit de s’affilier à l’organisation de leur choix, contrairement aux principes de la liberté syndicale. [Voir Recueil, op. cit., paragr. 328.]
  7. 468. Le comité note en outre que la loi sur le travail ne contient pas de disposition portant sur la durée de la procédure d’enregistrement. Il relève que la procédure a duré deux ans et demi dans le cas du ZFTAWU pour constater que sa demande a été rejetée. Le comité estime que la situation en soi constitue un obstacle sérieux à la création d’organisations et équivaut à un déni du droit des travailleurs de créer des organisations sans autorisation préalable. [Voir Recueil, op. cit., paragr. 307.]
  8. 469. Le comité prend note de l’indication du gouvernement selon laquelle les dispositions législatives relatives à l’enregistrement des syndicats sont en cours de révision et que les amendements proposés visent à donner au greffier des critères spécifiques à examiner pour l’enregistrement d’un syndicat, tels que l’existence d’un statut, l’existence d’un conseil exécutif, une adresse officielle permanente, un registre des membres et des états financiers vérifiés.
  9. 470. Le comité regrette que les dernières modifications apportées à la loi sur le travail (loi no 5 d’août 2015 (amendement)) n’aient pas porté sur l’article 45. Il encourage le gouvernement, sur la base des principes susmentionnés, à modifier plus avant la loi sur le travail, en consultation avec les partenaires sociaux pour faire en sorte que: i) les conditions d’octroi d’un enregistrement ne reviennent pas à l’obligation d’obtenir l’autorisation préalable des autorités publiques pour pouvoir constituer une organisation de travailleurs ou d’employeurs; ii) l’on établisse sans ambiguïté que le fait qu’il existe déjà un syndicat représentant la même catégorie de salariés qu’un nouveau syndicat demandant l’enregistrement est en train de grouper ou se propose de grouper, ou le fait que le syndicat existant est titulaire d’un certificat lui reconnaissant la qualité d’organe représentatif pour les négociations collectives pour cette catégorie de travailleurs ne peut justifier un refus du greffier d’enregistrer le nouveau syndicat; iii) le délai prévu pour l’enregistrement d’une organisation soit raisonnable. Le comité prie le gouvernement de tenir la Commission d’experts pour l’application des conventions et recommandations informée des progrès réalisés à cet égard et attire l’attention de cette dernière sur les aspects législatifs de ce cas.
  10. 471. Au vu de ce qui précède, et pour donner plein effet à l’article 65 de la Constitution nationale qui stipule que «toute personne a le droit de constituer des syndicats de son choix et d’y adhérer et de participer aux autres activités légales de ces syndicats...», y compris «le droit de négocier collectivement», le comité demande au gouvernement de prendre les mesures nécessaires pour reconsidérer la requête présentée par le ZFTAWU en vue de son enregistrement, en garantissant ainsi à plus de 850 membres présumés le droit de créer l’organisation de leur choix et d’y adhérer sans autorisation préalable. Le comité prie le gouvernement de le tenir informé à cet égard.
  11. 472. En ce qui concerne la demande d’enregistrement du NUMAIZ, le comité prend note de l’indication du gouvernement selon laquelle la procédure d’accréditation s’est déroulée le 21 septembre 2015, conformément à la législation en vigueur et qu’une décision en la matière est en cours et sera communiquée aux parties dans les meilleurs délais. Le comité rappelle que l’importance du libre choix des travailleurs pour créer leurs organisations et s’y affilier est telle pour le respect de la liberté syndicale dans son ensemble que ce principe ne saurait souffrir de retard. [Voir Recueil, op. cit., paragr. 312.] Le comité prie le gouvernement de s’assurer que la procédure sera accélérée, si elle n’a pas encore abouti, et de transmettre la décision du greffier.
  12. 473. Le comité prend note des allégations du ZCTU concernant l’interdiction frappant trois manifestations régionales du ZCTU le 11 avril 2015, de même qu’une manifestation pacifique organisée par le Syndicat des agents de sécurité du Zimbabwe (ZISEGU) et de la réponse du gouvernement à cet égard. Le comité note que l’interdiction policière frappant l’action de protestation du ZCTU a conduit à la présentation d’une requête à la Haute Cour, qui a ordonné à la police de ne pas perturber l’action syndicale. Le comité note en outre l’indication du gouvernement selon laquelle le ZCTU a pu tenir ses manifestations le 11 avril 2015 comme prévu et que la police a levé son interdiction initiale concernant des manifestations dans deux provinces. S’agissant de l’interdiction frappant la manifestation du ZISEGU le 30 avril 2015, le gouvernement indique que, étant donné que cette activité «coïncidait avec les commémorations de la Journée de l’indépendance», il y avait des motifs raisonnables de penser que la manifestation serait prise en otage par des éléments malveillants au détriment des intérêts du syndicat et de l’ordre public. Le gouvernement indique par ailleurs que le calendrier de la manifestation prévue coïncidait avec la période durant laquelle les autorités municipales de Harare s’activaient pour maintenir l’ordre public, le plus souvent en déplaçant des vendeurs de rue violents vers d’autres lieux. Le gouvernement fait remarquer que, en l’espèce, l’interdiction prononcée ne revient pas à interdire indistinctement les manifestations syndicales.
  13. 474. Le comité prend note en outre de l’indication du gouvernement selon laquelle il y a eu des améliorations continues dans les relations entre les syndicalistes et la ZRP dans le cadre des discussions relatives aux modalités de la conduite des manifestations. Le gouvernement s’attend à ce que ce dialogue et cette coopération mutuelle se poursuivent, et indique à cet égard qu’il continue à collaborer avec l’OIT dans les initiatives visant à intégrer les normes internationales du travail dans des activités de la police et demeure convaincu que les organisations de travailleurs continueront à jouir pleinement de la liberté syndicale et du droit d’organisation. Au nombre de ces efforts, on peut citer les activités d’échanges menées au niveau national avec les organes chargés de l’application des lois dans le domaine des normes internationales du travail qui ont été soutenues par le Bureau international du Travail depuis 2011.
  14. 475. Le comité rappelle à cet égard que, lors de sa réunion de mai-juin 2012, lorsqu’il a examiné le cas no 2862 portant sur l’interdiction d’organiser des défilés à l’occasion de la Journée internationale de la femme et de la Journée internationale du travail, il avait prié le gouvernement d’élaborer et de promulguer sans délai des lignes de conduite claires à l’intention de la police et des forces de sécurité. Constatant avec regret que cela n’a pas été fait et rappelant que l’autorisation de tenir des manifestations publiques, qui constitue un droit syndical important, ne doit pas être arbitrairement refusée, le comité prie instamment le gouvernement de prendre les mesures nécessaires pour l’adoption et la mise en œuvre effectives du code de conduite pour faire en sorte que la police et les forces de sécurité suivent des lignes de conduite claires pour ce qui a trait aux droits humains et aux droits syndicaux.

Recommandations du comité

Recommandations du comité
  1. 476. Au vu des conclusions qui précèdent, le comité invite le Conseil d’administration à approuver les recommandations suivantes:
    • a) Le comité encourage le gouvernement à modifier la loi sur le travail en consultation avec les partenaires sociaux pour faire en sorte que:
      • i) les conditions d’octroi d’un enregistrement ne reviennent pas à l’obligation d’obtenir l’autorisation préalable des autorités publiques pour pouvoir constituer une organisation de travailleurs ou d’employeurs;
      • ii) l’on établisse sans ambiguïté que le fait qu’il existe déjà un syndicat représentant la même catégorie de salariés qu’un nouveau syndicat demandant l’enregistrement est en train de grouper ou se propose de grouper, ou le fait que le syndicat existant est titulaire d’un certificat lui reconnaissant la qualité d’organe représentatif pour les négociations collectives pour cette catégorie de travailleurs ne peut justifier un refus du greffier d’enregistrer le nouveau syndicat;
      • iii) le délai prévu pour l’enregistrement d’une organisation soit raisonnable.
      • Le comité prie le gouvernement de tenir la Commission d’experts pour l’application des conventions et recommandations informée des progrès réalisés à cet égard, et attire l’attention de cette dernière sur les aspects législatifs de ce cas.
    • b) Le comité demande au gouvernement de prendre les mesures nécessaires pour reconsidérer la requête présentée par le ZFTAWU en vue de son enregistrement, en garantissant ainsi à plus de 850 membres présumés le droit de créer l’organisation de leur choix et d’y adhérer sans autorisation préalable. Le comité prie le gouvernement de le tenir informé à cet égard.
    • c) En ce qui concerne la demande d’enregistrement du NUMAIZ, le comité prie le gouvernement de s’assurer que la procédure sera accélérée, si elle n’a pas encore abouti, et de transmettre la décision du greffier.
    • d) Le comité prie instamment le gouvernement de prendre les mesures nécessaires pour l’adoption et la mise en œuvre effectives du code de conduite pour faire en sorte que la police et les forces de sécurité suivent des lignes de conduite claires pour ce qui a trait aux droits humains et aux droits syndicaux. Le comité prie le gouvernement de le tenir informé à cet égard.
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