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Rapport définitif - Rapport No. 378, Juin 2016

Cas no 3155 (Bosnie-Herzégovine) - Date de la plainte: 18-AOÛT -15 - Clos

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Allégations: L’organisation plaignante allègue la violation du dialogue social par le gouvernement de la Fédération de Bosnie Herzégovine et la marginalisation des syndicats, y compris l’organisation plaignante, dans le processus de négociation et d’adoption de la nouvelle loi sur le travail

  1. 85. La plainte figure dans une communication de la Confédération des syndicats indépendants de Bosnie-Herzégovine (SSSBiH) en date du 18 août 2015.
  2. 86. Le gouvernement a fait parvenir ses observations dans une communication en date du 1er décembre 2015.
  3. 87. La Bosnie-Herzégovine a ratifié la convention (no 87) sur la liberté syndicale et la protection du droit syndical, 1948, la convention (no 98) sur le droit d’organisation et de négociation collective, 1949, et la convention (no 154) sur la négociation collective, 1981.

A. Allégations de l’organisation plaignante

A. Allégations de l’organisation plaignante
  1. 88. Dans sa communication en date du 18 août 2015, l’organisation plaignante allègue la violation du dialogue social et la marginalisation des syndicats par le gouvernement de la Fédération de Bosnie-Herzégovine (FBiH) dans le processus de négociation et d’adoption de la nouvelle loi sur le travail, l’intervention du gouvernement dans la négociation collective, de même que l’affaiblissement de la protection des droits des travailleurs à la suite de l’adoption de la loi sur le travail. En particulier, l’organisation plaignante indique que: i) les travaux préparatoires relatifs à l’élaboration de la nouvelle loi ont démarré d’une manière intensive à la mi-avril 2015, lorsque des représentants du ministère du Travail et de la Politique sociale (MTPS), des syndicats et des employeurs ont établi la première version de la loi sur le travail, sur la base de laquelle de nouvelles négociations devaient avoir lieu et qui a été soumise aux parties à la négociation pour commentaires et suggestions; ii) l’organisation plaignante a soumis ses recommandations au ministère compétent dans le délai convenu; iii) à deux reprises, en juin 2015, le gouvernement, de concert avec le Fonds monétaire international et la Banque mondiale, a unilatéralement modifié certaines dispositions du projet de loi sur le travail et distribué le nouveau libellé sous la forme d’un document de travail à l’organisation plaignante; iv) le 1er juillet 2015, lors d’une séance du Conseil économique et social du territoire de la FBiH (ESC), il a été précisé que le dernier libellé du projet de loi sur le travail tel qu’envoyé aux partenaires sociaux par le ministère compétent le 24 juin 2015 constituerait la base des négociations à venir; v) il était convenu que l’intégralité du document de travail devrait être lue durant la première audition, avant que les partenaires sociaux ne discutent les dispositions sur lesquelles il n’y avait pas d’accord; vi) la discussion du document de travail a commencé le 2 juillet 2015, tandis que le gouvernement et les représentants des employeurs faisaient pression sur les représentants syndicaux pour qu’ils acceptent de négocier sur une base quotidienne de 16 heures à 20 heures afin que les négociations puissent se terminer rapidement; vii) alors que les représentants syndicaux avaient averti que le projet de loi sur le travail constituait une question très sensible, le gouvernement a répondu que la loi devait être négociée «sous quelque forme que ce soit» avant la fin de juillet 2015; viii) en raison d’autres obligations envers ses membres, la délégation de la SSSBiH auprès de l’ESC n’a pas pu et n’a pas cédé aux pressions, à la suite de quoi le gouvernement et les représentants des employeurs ont programmé d’autres séances et collèges de l’ESC sans consultation préalable des syndicats, en violation des Règles de procédure de l’ESC et de l’Accord sur le fonctionnement de l’ESC (à titre d’exemple, une séance de collège a été programmée pour le 16 juillet 2015 et, alors que le président de l’ESC avait été averti par écrit que le président de la délégation de la SSSBiH ne pourrait pas y participer, la séance s’est tenue sans la présence de représentants syndicaux; néanmoins, faute de quorum, la séance du collège a été reprogrammée); ix) après des enquêtes menées par l’organisation plaignante à la suite de la séance de l’ESC le 15 juillet 2015, il a été précisé que le gouvernement adopterait le document en tant que projet de loi sur le travail, ce qui semble indiquer qu’il se présenterait sous la forme d’une proposition, et, en tant que telle, il serait transmis à la procédure parlementaire pour adoption; x) le 21 juillet 2015, les directeurs des institutions publiques, des entreprises et des institutions en majorité détenues par l’Etat ont soumis des propositions et suggestions au projet de loi sur le travail qui n’ont fait l’objet d’aucune discussion à l’ESC; enfin xi) le gouvernement, à sa séance du 23 juillet 2015, a modifié certaines dispositions qui avaient précédemment fait l’objet d’un accord au sein de l’ESC et a adopté à l’unanimité le projet de loi sur le travail sans le consentement de l’ESC quant à son libellé. L’organisation plaignante allègue donc que le gouvernement a violé les articles 7 et 8 de la convention no 154 et que les syndicats ont été exclus, dans la pratique, du dialogue social, même si une discussion a eu lieu entre les trois partenaires sociaux le 15 juillet 2015; néanmoins, à cette date, la première lecture de l’ensemble des dispositions juridiques n’était même pas terminée.
  2. 89. L’organisation plaignante déclare que, suite à la manière inacceptable dont la loi sur le travail a été adoptée par le gouvernement de la FBiH, le 30 juillet 2015, elle a organisé des manifestations devant le bâtiment du Parlement qui, selon les estimations des syndicats, ont réuni environ 12 000 travailleurs. L’organisation plaignante précise en outre que, pour empêcher l’adoption du projet de loi sur le travail à la Chambre des peuples du Parlement de la FBiH, elle a invité les représentants des partis politiques à signer la déclaration conjointe et à condamner la décision du gouvernement de soumettre la loi sur le travail à la procédure parlementaire, étant donné qu’elle n’avait pas été acceptée par l’ESC. La déclaration conjointe a aussi exprimé la nécessité d’élaborer une série d’autres lois pertinentes avant l’adoption de la loi sur le travail, telles que la loi sur les amendements à la loi sur les grèves. Selon l’organisation plaignante, les appels lancés par les travailleurs réunis, qui demandaient un délai supplémentaire pour pouvoir harmoniser les dispositions juridiques, ont été ignorés, et la Chambre des peuples a adopté le projet de loi à une courte majorité et en violation des Règles de procédure parlementaires et des droits constitutionnels des délégués (le projet de loi sur le travail était à l’ordre du jour deux jours avant la séance de la Chambre des peuples et, étant donné que l’article 177(3) des Règles de procédure de la Chambre des peuples prévoit que les amendements doivent être soumis dans un délai qui ne saurait être inférieur à trois jours avant la tenue de la séance programmée de la Chambre des peuples, les délégués de la Chambre des peuples n’ont pas pu soumettre d’amendements au projet de loi sur le travail). L’organisation plaignante indique en outre que le lendemain, dans le cadre d’une procédure d’urgence, la Chambre des représentants du Parlement de la FBiH a adopté, à une courte majorité, le projet de loi sur le travail, en violation des Règles de procédure de la Chambre des représentants (en vertu de l’article 192(2), l’initiateur d’une proposition doit préciser par écrit les raisons de l’adoption d’une loi par une procédure d’urgence, ce qui n’a pas été fait en l’espèce et, en vertu de l’article 191(2), la procédure d’urgence ne peut être utilisée que si l’adoption d’un texte par la procédure régulière peut avoir des conséquences négatives pour la fédération). L’organisation allègue aussi que, lors d’une séance de la Chambre des représentants, le gouvernement de la FBiH a rejeté l’ensemble des 45 amendements au projet de loi sur le travail pour la simple raison que, si l’un quelconque de ces amendements était accepté, la loi serait adoptée avec deux libellés différents à la Chambre des peuples et à la Chambre des représentants et devrait être harmonisée, ce qui serait une «perte de temps» supplémentaire.
  3. 90. En outre, l’organisation plaignante allègue que le gouvernement est intervenu dans la négociation collective, étant donné que le Premier ministre (en tant que président de la délégation gouvernementale de la FBiH au sein de l’ESC) a déclaré que les amendements des représentants de deux petits partis politiques au sein de la Chambre des représentants seraient incorporés dans les conventions collectives en échange de leur appui à l’adoption de la loi sur le travail, obtenant ainsi une majorité simple. Selon l’organisation plaignante, cette intervention viole les conventions nos 87 et 98 et cause un préjudice aux résultats de la convention collective, qui n’a même pas encore commencé, et constitue un mépris total et une marginalisation du rôle des syndicats dans le processus, étant donné que le gouvernement n’est pas partie à la convention collective générale.
  4. 91. De plus, l’organisation plaignante insiste sur le fait que la nouvelle loi sur le travail affaiblit certains droits et la protection des travailleurs et compromet la libre négociation collective. Elle fournit un résumé de 26 questions problématiques dans une annexe à la plainte expliquant en lien avec la liberté syndicale que:
    • – les conventions collectives pour une durée indéterminée ne peuvent pas être conclues, tandis que les conventions collectives de durée déterminée peuvent être conclues pour une durée maximale de trois ans (art. 140);
    • – les employeurs décident de la représentativité des syndicats devant l’employeur (art. 129(1));
    • – les entreprises publiques ne peuvent pas conclure des conventions collectives (art. 138);
    • – les conventions collectives applicables doivent être harmonisées avec la loi sur le travail dans un délai de cent vingt jours à compter de son entrée en vigueur; à défaut, elles cessent d’être applicables (art. 182).
  5. C’est la raison pour laquelle l’organisation plaignante a adressé une communication à la CSI lui demandant de l’aider et expliquant que la SSSBiH a été exclue des négociations portant sur la loi et qu’il est devenu évident qu’il n’y aurait pas de dialogue social en la matière. L’organisation plaignante indique que la secrétaire générale de la CSI a adressé une communication au Premier ministre de la FBiH dans laquelle elle se dit profondément préoccupée par la marginalisation des syndicats dans le processus de négociation, et appelle le gouvernement à ramener le processus politique et législatif à un dialogue social responsable et efficace sur la base du plein respect de tous les partenaires sociaux.

B. Réponse du gouvernement

B. Réponse du gouvernement
  1. 92. Dans une communication en date du 1er décembre 2015, le gouvernement de la Bosnie Herzégovine transmet la réponse du gouvernement de la FBiH qui conteste les déclarations faites par l’organisation plaignante selon lesquelles il l’a négligé en tant que partenaire social, et dément toute violation de la convention no 154 durant le processus d’élaboration de la nouvelle loi sur le travail. Il affirme que les représentants des travailleurs ont été associés à toutes les étapes précédant l’élaboration de diverses versions de la loi sur le travail jusqu’à son adoption finale, à la fois dans le cadre de leur participation aux groupes de travail et aux travaux de l’ESC, qui constitue une forme institutionnalisée de dialogue social. Le gouvernement indique aussi ne pas s’être ingéré dans le dialogue social entre les partenaires sociaux, mais a encouragé leur coopération pour parvenir à un accord par des consultations fondées sur le respect mutuel, et affirme qu’il continuera à promouvoir et à soutenir pleinement la liberté d’association des travailleurs et des employeurs et à promouvoir le dialogue social.
  2. 93. En ce qui concerne le processus d’élaboration et d’adoption de la loi sur le travail, le gouvernement fournit les renseignements suivants: i) le processus d’élaboration de la nouvelle loi sur le travail a démarré en 2008-09, et en novembre 2012, après un débat public vaste et approfondi de soixante jours, le gouvernement a préparé le projet de loi sur le travail qu’il a communiqué à l’ESC pour réexamen et pour permettre aux partenaires sociaux de s’entendre sur certains points controversés; ii) une réunion des délégations du gouvernement, de l’Association des employeurs et de la SSSBiH s’est tenue, au cours de laquelle l’organisation plaignante a exigé de traiter en premier l’article 182 du projet de loi, qu’elle jugeait inacceptable et qui régit les modalités de l’harmonisation des conventions collectives avec les dispositions de la nouvelle loi sur le travail et la cessation de leur application lorsque l’harmonisation n’a pas lieu dans les délais établis par la loi; iii) des consultations ont eu lieu avec le Premier ministre de la FBiH pour trouver une solution de compromis pour le projet d’article 182, et un nouveau texte a été proposé aux partenaires sociaux, qui ont demandé la tenue de nouvelles consultations sur le texte proposé au sein de leurs organes, mais qui n’ont fourni aucun avis malgré des demandes écrites du MTPS; iv) tous les travaux et négociations ultérieurs portant sur le texte définitif de la loi sur le travail ont été interrompus, et le projet de loi n’a pas été soumis au Parlement; v) alors que les représentants des travailleurs ont été associés à toutes les étapes du processus de négociation et de rédaction, ils ont fait des déclarations publiques alléguant que la nouvelle loi affaiblirait les droits des travailleurs, créant ainsi un climat de défiance et de mépris; vi) en avril 2015, le gouvernement nouvellement formé a relancé les négociations avec les partenaires sociaux sur le projet de loi précédemment établi, qui était considéré comme une étape décisive sur la voie des réformes; vii) un dialogue social actif a été convenu entre les représentants des partenaires sociaux, et l’ESC s’est réuni à quatre reprises au mois de juillet 2015, au cours duquel des sections de la nouvelle loi sur le travail ont été individuellement analysées; viii) lors d’une réunion tenue le 15 juillet 2015, la délégation des syndicats a remis en question la forme de la solution juridique proposée alors même que le document lui a été présenté à plusieurs reprises avec des indications claires selon lesquelles la loi se présentait sous la forme d’un projet; ix) en plus du débat public mené en 2012 avec la participation de représentants des syndicats, des employeurs, des chambres de commerce, des banques, des institutions publiques, des organisations non gouvernementales (ONG) et des autorités d’inspection, l’examen du texte durant les sessions de l’ESC est considéré comme une forme de débat public; enfin, x) durant les sessions de l’ESC, l’organisation plaignante a déclaré à de multiples reprises qu’elle n’apportait pas son soutien à l’adoption de la nouvelle loi sur le travail, a mené une campagne médiatique de désinformation sur des questions relatives aux principes fondamentaux de la loi sur le travail pour empêcher son adoption et a continué à s’opposer à l’article 182 de la nouvelle loi.
  3. 94. Le gouvernement explique par la suite que, depuis 2012, les partenaires sociaux se sont vus accorder le temps, les méthodes et les mécanismes nécessaires pour une harmonisation des dispositions litigieuses, et le projet de loi sur le travail a été inscrit à son ordre du jour en juillet 2015 afin d’établir sa version définitive et de la soumettre au Parlement. Le gouvernement signale que, durant l’élaboration de la loi, le ministère compétent en tant qu’autorité de rédaction et le gouvernement en tant qu’initiateur de la loi devaient tenir compte de l’objectivité des requêtes formulées par les syndicats, les employeurs et les autres parties prenantes des secteurs public et privé, d’un alignement horizontal sur les autres dispositions réglementaires, de l’ordre juridique en vigueur, des engagements contractés au titre des instruments internationaux, ainsi que des obligations découlant de la législation de l’Union européenne. Toutes les initiatives proposées ont été examinées, et l’autorité de rédaction a finalement décidé de ce qui était acceptable et de ce qui serait incorporé dans le texte. Réfutant l’allégation selon laquelle il souhaitait négocier la loi avant la fin de juillet 2015 quel qu’en soit le résultat, le gouvernement fait observer que la nécessité de mettre en œuvre des réformes du marché du travail, conformément au programme des réformes 2015 2018, et au programme de travail gouvernemental 2015 2018, l’a obligé à soumettre la nouvelle loi sur le travail au Parlement. Le gouvernement conteste également l’allégation selon laquelle il n’a pas tenu compte des requêtes formulées par les travailleurs pour disposer d’un délai supplémentaire pour des travaux d’harmonisation, car après l’établissement du projet de loi sur le travail le 23 juillet 2015 une autre réunion a eu lieu avec les représentants des travailleurs au cours de laquelle l’organisation plaignante s’est vue proposer sept jours supplémentaires pour des négociations et un accord, mais cette offre a été déclinée par les représentants des travailleurs. En ce qui concerne l’allégation relative à des irrégularités dans le processus d’adoption de la loi sur le travail, le gouvernement déclare que la loi a été examinée et adoptée par les deux chambres du Parlement les 30 et 31 juillet 2015 et que ces allégations sont sans objet, car le processus d’adoption des lois ne saurait faire l’objet d’une discussion devant le comité.
  4. 95. S’agissant de l’allégation d’ingérence dans la négociation collective, en promettant aux membres de deux petits partis politiques au Parlement de la FBiH d’inclure leurs propositions dans les conventions collectives en échange de leur appui au projet de loi, le gouvernement déclare que cette allégation est dénuée de fondement, car la conclusion de conventions collectives relève exclusivement du dialogue social bipartite entre les représentants des travailleurs et des employeurs, et le rôle du gouvernement se limite à fournir le cadre législatif nécessaire pour le processus de négociation et l’amélioration de la négociation collective volontaire.
  5. 96. Au sujet de l’allégation selon laquelle les dispositions de la nouvelle loi sur le travail affaiblissent les droits des travailleurs, le gouvernement déclare que ces allégations sont infondées et erronées, et fournit une liste de 18 domaines dans lesquels la loi sur le travail améliore la situation des travailleurs, y compris en rapport avec la liberté syndicale et la négociation collective:
    • – L’obligation d’obtenir le consentement du ministère du Travail compétent pour la protection d’un représentant syndical s’applique non seulement au licenciement, mais également aux transferts défavorables.
    • – La loi réglemente la représentativité des organisations de travailleurs et d’employeurs, ainsi que les critères et la procédure de détermination de la représentativité.
    • – La loi définit les participants à la négociation collective, la procédure de conclusion des conventions collectives, la forme, la durée et le contenu des conventions collectives.
  6. Le gouvernement précise en outre que, alors que sous l’ancienne loi sur le travail les conventions collectives étaient généralement conclues pour une durée indéterminée, sans que des conditions ne soient prescrites quant à leur cessation ou aux modalités de leurs amendements (la cessation d’une convention collective sans le consentement des partenaires sociaux était empêchée de la sorte), avec la nouvelle loi, les conventions collectives seraient conclues pour une durée déterminée et harmonisées avec les dispositions de la loi. Le gouvernement insiste sur le fait que l’amendement de l’article 182 était dicté par les grands intérêts économiques, un budget alourdi par des poursuites judiciaires des travailleurs de l’ordre de plusieurs millions, ainsi que par de nombreuses requêtes et initiatives exprimées durant le débat public ou adressées individuellement au ministère compétent. Selon le gouvernement, le refus de l’organisation plaignante d’accepter la nécessité de conclure des conventions collectives pour une durée déterminée et leur harmonisation avec la loi sur le travail montre que l’organisation plaignante refuse toute négociation et cherche à maintenir la situation existante qui, de l’avis du gouvernement, n’est pas viable.

C. Conclusions du comité

C. Conclusions du comité
  1. 97. Le comité note que le présent cas porte sur des allégations de violation du dialogue social et de marginalisation des syndicats par le gouvernement de la FBiH dans le processus de négociation et d’adoption de la nouvelle loi sur le travail, l’intervention du gouvernement dans la négociation collective ainsi que l’affaiblissement de la protection des droits des travailleurs, à la suite de l’adoption de la nouvelle loi sur le travail.
  2. 98. En rapport avec l’allégation de violation du dialogue social et de marginalisation des syndicats, le comité prend note des informations pertinentes ci-après fournies par l’organisation plaignante: i) les travaux préparatoires relatifs à l’élaboration de la nouvelle loi sur le travail ont démarré d’une manière intensive en avril 2015 lorsque des représentants du MTPS, des syndicats et des employeurs ont établi la première version de la loi sur le travail sur la base de laquelle de nouvelles négociations devaient avoir lieu, et à propos de laquelle l’organisation plaignante a soumis des commentaires et des recommandations au ministère compétent; ii) à deux reprises en juin 2015, le gouvernement de la FBiH, de concert avec le Fonds monétaire international et la Banque mondiale, a unilatéralement modifié certaines dispositions du projet de loi sur le travail et distribué le nouveau libellé sous la forme d’un document de travail à l’organisation plaignante; iii) la discussion portant sur le document de travail a commencé le 2 juillet 2015, tandis que le gouvernement et les représentants des employeurs faisaient pression sur les représentants syndicaux pour qu’ils acceptent de négocier sur une base quotidienne de 16 heures à 20 heures afin que les négociations puissent se terminer rapidement; alors que les représentants syndicaux avaient averti que la loi sur le travail constituait une question très sensible, le gouvernement a répondu que la loi devait être négociée «sous quelque forme que ce soit» avant à la fin de juillet 2015; iv) l’organisation plaignante n’a pas cédé aux pressions, à la suite de quoi le gouvernement et les représentants des employeurs ont programmé des séances et des collèges de l’ESC sans consultation préalable des syndicats, en violation des Règles de procédure de l’ESC et de l’Accord sur le fonctionnement de l’ESC; v) après des enquêtes menées par l’organisation plaignante à la suite de la séance de l’ESC le 15 juillet 2015, il a été précisé que le gouvernement adopterait le document en tant que projet de loi sur le travail, ce qui semble indiquer qu’il se présenterait sous la forme d’une proposition, et, en tant que telle, il serait transmis à la procédure parlementaire pour adoption; vi) les propositions et suggestions soumises par les institutions publiques, les entreprises et les institutions qui appartenaient en majorité à l’Etat n’ont pas été examinées au sein de l’ESC; viii) à sa séance du 23 juillet 2015, le gouvernement a modifié certaines dispositions du texte qui avaient précédemment fait l’objet d’un accord au sein de l’ESC et a adopté à l’unanimité le projet de loi sur le travail sans le consentement de l’ESC quant à son libellé; enfin, viii) les syndicats ont ainsi été exclus, dans la pratique, du dialogue social, même si une discussion a eu lieu entre les trois partenaires sociaux le 15 juillet 2015; néanmoins, à cette date, la première lecture de l’ensemble des dispositions juridiques n’était même pas terminée.
  3. 99. Le comité note en outre que l’organisation plaignante indique que, suite à la manière inacceptable dont la loi sur le travail a été adoptée par le gouvernement de la FBiH, elle a organisé des manifestations de protestation devant le bâtiment du Parlement de la FBiH, qui ont réuni environ 12 000 travailleurs. Le comité prend note de la déclaration de l’organisation plaignante selon laquelle, pour empêcher l’adoption du projet de loi sur le travail à la Chambre des peuples, elle a invité les partis politiques à signer la déclaration conjointe et à condamner la décision du gouvernement de soumettre la loi sur le travail à la procédure parlementaire, étant donné qu’elle n’avait pas fait l’objet d’un accord au sein de l’ESC. Le comité observe également l’allégation de l’organisation plaignante selon laquelle, malgré les appels lancés par les travailleurs réunis qui demandaient un délai supplémentaire pour pouvoir harmoniser les dispositions juridiques, tant la Chambre des peuples que la Chambre des représentants ont adopté le projet de loi sur le travail à une courte majorité et en violation des Règles de procédure de la Chambre des peuples et de la Chambre des représentants. Le comité note en outre que l’organisation plaignante allègue que, lors d’une séance de la Chambre des représentants, le gouvernement a rejeté l’ensemble des 45 amendements au projet de loi sur le travail pour éviter que la loi ne soit adoptée avec deux libellés différents à la Chambre des peuples et à la Chambre des représentants, et n’ait à être harmonisée, ce qui représenterait une «perte de temps» supplémentaire.
  4. 100. Le comité note que le gouvernement conteste les allégations de violation du dialogue social, et affirme que les représentants des travailleurs ont été associés à toutes les étapes précédant l’élaboration des diverses versions de la loi sur le travail jusqu’à son adoption finale, à la fois dans le cadre de leur participation aux groupes de travail et aux travaux de l’ESC. Le comité prend note des indications du gouvernement selon lesquelles: i) le processus d’élaboration de la nouvelle loi sur le travail a démarré en 2008-09, et en 2012, après un débat public vaste et approfondi, le projet de loi sur le travail a été communiqué à l’ESC pour réexamen et pour permettre aux partenaires sociaux de s’entendre sur certains points controversés; ii) l’organisation plaignante a exigé de traiter en premier le texte de l’article 182 qu’elle jugeait inacceptable et qui régit les modalités de l’harmonisation des conventions collectives avec les dispositions de la nouvelle loi sur le travail et la cessation de leur application lorsque l’harmonisation n’a pas lieu dans les délais établis par la loi; iii) après des consultations avec le Premier ministre, un nouveau texte de l’article 182 a été proposé aux partenaires sociaux, qui ont demandé la tenue de nouvelles consultations sur le libellé du texte, au sein de leurs organes, mais qui n’ont fourni aucun avis malgré des demandes écrites du MTPS; tous les travaux et les négociations portant sur l’élaboration du texte définitif de la loi sur le travail ont donc été interrompus, et le projet de loi n’a pas été soumis au Parlement; iv) en avril 2015, le gouvernement de la FBiH nouvellement formé a relancé les négociations avec les partenaires sociaux sur le projet de loi précédemment établi, et un dialogue social actif a été convenu; v) l’ESC s’est réuni à quatre reprises au mois de juillet 2015 au cours duquel des articles de la nouvelle loi sur le travail ont été analysés; vi) lors d’une réunion tenue le 15 juillet 2015, la délégation des syndicats a remis en question la forme de la solution juridique proposée, alors même que le document lui a été présenté à plusieurs reprises avec des indications claires selon lesquelles la loi se présentait sous la forme d’un projet; vii) en plus du débat public mené en 2012 avec la participation des représentants des syndicats, des employeurs, des chambres de commerce, des banques, des institutions publiques, des ONG et des autorités d’inspection, l’examen du texte durant les sessions de l’ESC est considéré comme une forme de débat public; enfin viii) durant les séances de l’ESC, l’organisation plaignante a déclaré à plusieurs reprises qu’elle ne soutenait pas l’adoption de la nouvelle loi sur le travail et a mené une campagne médiatique de désinformation sur des questions relatives aux principes fondamentaux de la loi sur le travail pour empêcher son adoption. Selon le gouvernement, l’organisation plaignante a continué à s’opposer à l’article 182 de la nouvelle loi, refusant ainsi de négocier.
  5. 101. Le comité note en outre l’avis du gouvernement qui soutient que, depuis 2012, les partenaires sociaux se sont vus accorder le temps, les méthodes et les mécanismes nécessaires pour une harmonisation des dispositions litigieuses, et que le projet de loi sur le travail a donc été inscrit à son ordre du jour en juillet 2015 pour établir sa version définitive et la soumettre au Parlement de la FBiH, en tenant compte de l’objectivité des requêtes formulées par les syndicats, les employeurs et les autres parties prenantes des secteurs public et privé, des lois et règlements nationaux ainsi que des engagements internationaux. Le comité note que, tout en réfutant l’allégation selon laquelle il souhaitait négocier la loi avant la fin de juillet 2015 quel qu’en soit le résultat, le gouvernement fait observer que la nécessité de mettre en œuvre des réformes du marché du travail conformément au programme des réformes 2015-2018 et au programme de travail gouvernemental 2015-2018 l’a obligé à soumettre la nouvelle loi sur le travail au Parlement de la FBiH. Le comité observe que le gouvernement conteste également l’allégation selon laquelle il n’a pas tenu compte des requêtes formulées par les travailleurs pour disposer d’un délai supplémentaire pour des travaux d’harmonisation, car, après l’établissement du projet de loi sur le travail le 23 juillet 2015, une autre réunion a eu lieu avec les représentants des travailleurs au cours de laquelle l’organisation plaignante s’est vue proposer sept jours supplémentaires pour des négociations et un accord, mais cette offre a été déclinée par les représentants des travailleurs. En ce qui concerne l’allégation relative à des irrégularités dans le processus d’adoption de la loi sur le travail, le comité note que le gouvernement déclare que la loi a été examinée et adoptée par les deux chambres du Parlement les 30 et 31 juillet 2015 et que ces allégations sont sans objet, car le processus d’adoption des lois ne saurait faire l’objet d’une discussion devant le comité.
  6. 102. En ce qui concerne les allégations de violation du dialogue social et de marginalisation des syndicats, le comité accueille favorablement les informations détaillées fournies à la fois par l’organisation plaignante et le gouvernement sur le processus de négociation, d’élaboration et d’adoption de la nouvelle loi sur le travail. A cet égard, le comité note que le débat initial sur le projet de loi sur le travail a commencé en 2008-09 et que, en 2012, un débat public a été mené avec la participation des représentants des syndicats, des employeurs, des chambres de commerce, des banques, des institutions publiques, des ONG et des autorités d’inspection; le comité note en outre que le débat a été interrompu en 2012, en raison de la nécessité d’harmoniser plus avant les dispositions contestées, à la suite de quoi des négociations plus intensives entre les partenaires sociaux au sein de l’ESC ont repris au mois de juillet 2015 au cours desquelles les partenaires sociaux, y compris l’organisation plaignante, ont été consultés et se sont vus offrir l’occasion d’examiner et d’harmoniser le texte du projet de loi sur le travail à plusieurs reprises. Malgré l’opposition de l’organisation plaignante, la loi sur le travail a été adoptée par les deux chambres du Parlement à la fin de juillet 2015. Le comité constate qu’il y a un désaccord entre l’organisation plaignante et le gouvernement sur le niveau d’inclusion des représentants syndicaux dans le dialogue social précédant l’adoption de la loi sur le travail. Tandis que l’organisation plaignante fait valoir que les syndicats ont été marginalisés et exclus, dans la pratique, du dialogue social en raison des pressions exercées à leur égard par le gouvernement et les représentants des employeurs et des modifications unilatérales du gouvernement dans le libellé du projet de loi sur le travail qui avait été précédemment convenu dans le cadre de l’ESC, le gouvernement fait valoir que les représentants des travailleurs ont été associés à toutes les étapes du processus de négociation et d’élaboration jusqu’à l’adoption finale de la loi sur le travail, à la fois dans le cadre de leur participation aux groupes de travail et aux travaux de l’ESC, et se sont vus accorder le temps, les méthodes et les mécanismes nécessaires pour l’harmonisation des dispositions litigieuses.
  7. 103. Le comité note aussi que l’organisation plaignante insiste sur le caractère précipité des négociations, mais que le gouvernement explique que la nécessité de mettre en œuvre les réformes du marché du travail, conformément au programme national de travaux et de réformes, l’a obligé à soumettre la nouvelle loi sur le travail au Parlement. Tout en notant avec intérêt les indications selon lesquelles un débat public et un dialogue social ont été établis en lien avec le projet de loi sur le travail et que les syndicats, y compris l’organisation plaignante se sont vus accorder l’occasion d’harmoniser les dispositions juridiques, le comité note avec préoccupation les allégations spécifiques formulées par l’organisation plaignante selon lesquelles le gouvernement a unilatéralement modifié le texte du projet de loi sur le travail, exercé des pressions sur les représentants des syndicats pour les amener à négocier sur une base quotidienne de 16 heures à 20 heures afin d’accélérer les négociations, programmé des collèges et des sessions de l’ESC sans consultation préalable des représentants des syndicats, modifié certaines dispositions du projet de loi sur le travail qui avaient été précédemment convenues par les partenaires sociaux et soumis le projet de loi sur le travail pour adoption dans un libellé qui n’avait pas été approuvé par l’ESC.
  8. 104. Le comité a estimé utile de se référer à la recommandation (nº 113) sur la consultation aux échelons industriel et national, 1960, qui, en son paragraphe 1, dispose que des mesures devraient être prises en vue de promouvoir une consultation et une collaboration efficace entre les autorités publiques et les organisations d’employeurs et de travailleurs sans qu’aucune discrimination ne soit exercée à l’égard de ces dernières. Aux termes du paragraphe 5 de la recommandation, cette consultation devrait viser à faire en sorte que les autorités publiques sollicitent de façon appropriée les vues, les conseils et le concours des organisations en question, notamment dans la préparation et la mise en œuvre de la législation touchant leurs intérêts. [Voir Recueil de décisions et de principes du Comité de la liberté syndicale, cinquième édition, 2006, paragr. 1068.] La consultation tripartite doit se dérouler avant que le gouvernement ne soumette un projet à l’Assemblée législative ou n’élabore une politique de travail, sociale ou économique. [Voir Recueil, op. cit., paragr. 1070.] Il est important que les consultations se déroulent dans la bonne foi, la confiance et le respect mutuel et que les parties aient suffisamment de temps pour exprimer leurs points de vue et en discuter largement, afin de pouvoir parvenir à un compromis adapté. Le gouvernement doit aussi veiller à donner le poids nécessaire aux accords auxquels les organisations de travailleurs et d’employeurs sont parvenues. [Voir Recueil, op. cit., paragr. 1071.] Le comité ne considère pas que la procédure d’adoption de la nouvelle loi sur le travail ait été contraire aux principes de la liberté syndicale. Cependant, le comité encourage le gouvernement à promouvoir la continuation du dialogue social tripartite au sein de la FBiH afin d’assurer le suivi de l’application des dispositions législatives mentionnées.
  9. 105. En ce qui concerne la négociation collective, le comité note les allégations de l’organisation plaignante selon lesquelles le gouvernement de la FBiH est intervenu dans la négociation collective en déclarant que les amendements des représentants de deux petits partis politiques à la Chambre des représentants seraient incorporés dans les conventions collectives en échange de leur appui à l’adoption du projet de loi sur le travail, obtenant ainsi une majorité simple. Le comité observe que, selon l’organisation plaignante, une telle intervention est préjudiciable sur le résultat de la négociation collective, qui n’avait même pas encore commencé, et ignore et marginalise totalement le rôle des syndicats dans le processus, étant donné que le gouvernement n’est pas partie à la convention collective générale. Le comité prend également note toutefois de la déclaration du gouvernement selon laquelle cette allégation est infondée du fait que la conclusion de conventions collectives relève exclusivement du dialogue social bipartite entre les représentants des travailleurs et des employeurs, et le rôle du gouvernement se limite à fournir le cadre législatif nécessaire pour le processus de négociation et l’amélioration de la négociation collective volontaire. Compte tenu de la nature contradictoire des allégations de l’organisation plaignante et de la réponse du gouvernement, le comité s’en tient à rappeler le principe selon lequel les organes de l’Etat devraient s’abstenir d’intervenir dans la libre négociation collective entre les organisations de travailleurs et d’employeurs.
  10. 106. Concernant le niveau de protection des droits des travailleurs, le comité note que l’organisation plaignante fournit un résumé de 26 questions problématiques, et fait valoir que la loi sur le travail affaiblit certains droits et la protection des travailleurs et compromet la libre négociation collective. Le comité note en particulier que l’organisation plaignante déclare que les conventions collectives de durée indéterminée ne peuvent pas être conclues, tandis que les conventions collectives de durée déterminée peuvent être conclues pour une durée maximale de trois ans (art. 140), et que les conventions collectives applicables doivent être harmonisées avec la loi sur le travail dans un délai de cent vingt jours à compter de son entrée en vigueur, faute de quoi elles cessent d’être applicables (art. 182). L’organisation plaignante fait valoir que cela revient à annuler les effets des conventions collectives antérieures, car si des travailleurs ne veulent pas rester sans convention collective les syndicats devront accepter tous les changements de la loi sur une base «à prendre ou à laisser». Le comité note aussi les allégations de l’organisation plaignante, qui déclare que la loi ne permet pas de conclure des conventions collectives dans les entreprises publiques (art. 138) et que la détermination de la représentativité d’un syndicat au niveau de l’entreprise par l’employeur est illogique et peut constituer une méthode pour se livrer à des abus (art. 129(1)).
  11. 107. Le comité note que le gouvernement indique que la loi sur le travail améliore la situation des travailleurs dans 18 domaines et que, en particulier, elle définit les participants à la négociation collective, la procédure de conclusion des conventions collectives, la forme, la durée et le contenu des conventions collectives; de même, elle réglemente la représentativité des organisations de travailleurs et d’employeurs, ainsi que les critères et la procédure de détermination de la représentativité. En rapport avec l’article 182 contesté, le comité prend note de l’explication du gouvernement: alors que, sous l’ancienne loi sur le travail, les conventions collectives étaient généralement conclues pour une durée indéterminée, sans que des conditions ne soient prescrites quant à leur cessation ou aux modalités de leurs amendements (la cessation d’une convention collective sans le consentement des partenaires sociaux était empêchée de la sorte), avec la nouvelle loi, les conventions collectives seraient conclues pour une durée déterminée et devraient être harmonisées avec les dispositions de la loi. Le comité prend également note du raisonnement du gouvernement selon lequel l’amendement de l’article 182 était dicté par les grands intérêts économiques, un budget alourdi par des poursuites judiciaires des travailleurs de l’ordre de plusieurs millions, ainsi que par de nombreuses requêtes et initiatives exprimées durant le débat public ou adressées individuellement au ministère compétent.
  12. 108. A cet égard, le comité constate des divergences d’opinions entre l’organisation plaignante, qui fait valoir que la loi sur le travail affaiblit certains droits et la protection des travailleurs et compromet la libre négociation collective, et le gouvernement, qui affirme que ces allégations sont infondées et erronées, car la loi sur le travail comporte plusieurs dispositions qui améliorent la situation des travailleurs par rapport à la loi précédente. Le comité prend note de la liste des questions considérées comme problématiques par l’organisation plaignante, ainsi que des domaines dans lesquels, selon le gouvernement, la loi sur le travail renforce les droits des travailleurs.
  13. 109. A la lumière de ce qui précède, le comité ne considère pas que la disposition subordonnant les conventions collectives existantes à une harmonisation avec la nouvelle législation (art. 182) soit contraire aux principes de la liberté syndicale et de la négociation collective.
  14. 110. Au sujet de l’article 140, tout en rappelant le principe général selon lequel la durée des conventions collectives est une question qui relève au premier chef des parties concernées, mais que si une action gouvernementale est envisagée la législation devrait refléter un accord tripartite. [Voir Recueil, op. cit., paragr. 1047.] Le comité comprend néanmoins la nécessité de disposer de règles claires relatives à la validité des conventions collectives et, considérant que la loi prévoit que les conventions collectives pourront être reconduites par les parties, il ne considère pas que cette disposition constitue une violation des principes de la liberté syndicale.
  15. 111. En ce qui concerne la représentativité des syndicats au niveau de l’entreprise, le comité note que la loi prévoit des critères objectifs et précis préétablis et que l’article 129(1) prévoit que la représentativité est déterminée par l’employeur. A cet égard, le comité souhaite souligner que la volonté de s’assurer du caractère représentatif d’un syndicat ou de le vérifier se concrétise le mieux lorsqu’il existe de fortes garanties en matière de secret et d’impartialité. Par conséquent, la vérification du caractère représentatif d’un syndicat doit être effectuée par un organe indépendant et impartial. [Voir Recueil, op. cit., paragr. 351.] Compte tenu de ces considérations et des préoccupations soulevées par l’organisation plaignante, le comité note que la détermination de la représentativité par l’employeur, bien que pouvant faire l’objet d’un recours auprès de la fédération ou d’un ministère cantonal en charge du travail, pourrait donner lieu à une discrimination antisyndicale, notamment s’il est obligatoire de fournir à l’employeur une liste des membres syndicaux. Le comité invite donc le gouvernement à encourager l’ouverture des consultations avec les partenaires sociaux, dans le cadre de l’ESC du territoire de la FBiH, en vue d’établir un mécanisme indépendant et impartial pour déterminer la représentativité des syndicats au niveau de l’entreprise.
  16. 112. En ce qui concerne le droit de conclure des conventions collectives au sein d’entreprises publiques, le comité observe que le texte de l’article 138 n’envisage pas d’interdiction à cet égard. Le comité veut donc croire que les travailleurs des entreprises publiques seront en mesure de négocier collectivement. Le comité rappelle que l’organisation plaignante peut fournir à la Commission d’experts pour l’application des conventions et recommandations des informations détaillées supplémentaires sur toute question pendante concernant l’application des conventions nos 87 et 98.

Recommandations du comité

Recommandations du comité
  1. 113. Au vu des conclusions qui précèdent, le comité invite le Conseil d’administration à approuver les recommandations suivantes:
    • a) Le comité n’a pas observé que la procédure d’adoption de la nouvelle loi sur le travail était contraire aux principes de la liberté syndicale. Cependant, le comité encourage le gouvernement à promouvoir la continuation du dialogue social tripartite au sein de la FBiH afin d’assurer le suivi de l’application des dispositions législatives mentionnées.
    • b) Le comité invite le gouvernement à encourager l’ouverture des consultations avec les partenaires sociaux, dans le cadre du Conseil économique et social du territoire de la FBiH afin d’établir un mécanisme indépendant et impartial pour déterminer la représentativité des syndicats au niveau de l’entreprise dans les cas où celle-ci pourrait être contestée;
    • c) Le comité rappelle que l’organisation plaignante peut fournir à la Commission d’experts pour l’application des conventions et recommandations des informations détaillées supplémentaires sur toute question pendante concernant l’application des conventions nos 87 et 98.
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