Allégations: Exclusion du secrétaire général de la Fédération syndicale du
secteur pétrolier de la table des négociations collectives, répression d’une manifestation
syndicale, licenciement d’un dirigeant syndical sans respect des garanties d’une procédure
régulière
- 1065. Le comité a examiné ce cas pour la dernière fois à sa réunion de
mai-juin 2015 et il a présenté un rapport intérimaire au Conseil d’administration. [Voir
375e rapport, paragr. 631 à 665, approuvé par le Conseil d’administration à sa
324e réunion (juin 2015).]
- 1066. Le gouvernement a fait parvenir des observations supplémentaires
dans des communications en date du 21 octobre 2015 et du 2 septembre 2016.
- 1067. La République bolivarienne du Venezuela a ratifié la convention
(no 87) sur la liberté syndicale et la protection du droit syndical, 1948, ainsi que la
convention (no 98) sur le droit d’organisation et de négociation collective, 1949.
A. Examen antérieur du cas
A. Examen antérieur du cas- 1068. Lors de son examen antérieur du cas, pendant sa réunion de mai-juin
2015, le comité a formulé les recommandations suivantes sur les questions en suspens
[voir 375e rapport, paragr. 665]:
- a) Le comité prie le
gouvernement de s’assurer qu’il ne sera pas recouru à l’avenir à des mesures
privatives de liberté et à des mesures de sûreté imposant une présentation
périodique devant l’autorité judiciaire et interdisant une manifestation lorsqu’il
n’existe pas de raison fondée d’engager des poursuites pénales à l’encontre de
syndicalistes exerçant leur droit de manifester.
- b) Le
comité prie le gouvernement: 1) de communiquer la décision administrative no 075 01
2013 par laquelle l’inspection du travail a autorisé le licenciement de M. Iván
Freites et de préciser les faits concrets reprochés à ce dirigeant; 2) d’indiquer si
ce dirigeant syndical a formé un recours en justice contre son licenciement et, dans
l’affirmative, de communiquer la décision.
B. Réponse du gouvernement
B. Réponse du gouvernement- 1069. Dans ses communications en date du 21 octobre 2015 et du
2 septembre 2016, le gouvernement transmet ses observations aux recommandations du
comité précitées.
- 1070. Concernant la recommandation a), le gouvernement nie l’allégation
relative à l’interdiction d’une manifestation pacifique et à l’application de mesures
judiciaires sans raison fondée. Le gouvernement précise que la manifestation pacifique
est un droit légitime dans le pays, qu’il est inscrit dans la Constitution, et que
l’Etat respecte l’exercice de ce droit tant que la manifestation ne met pas en péril la
vie, l’intégrité physique, psychique ou morale du reste de la population, non plus que
la libre circulation, l’ordre public et la sécurité de la nation. Le gouvernement
rappelle que l’on ne saurait alléguer l’exercice des droits civils, politiques et du
travail pour commettre des actes illégaux. Il ajoute que c’est à l’Etat qu’il incombe de
protéger les personnes, les biens et les institutions de la commission d’actes illégaux
lors de manifestations violentes. Le gouvernement indique par ailleurs que l’action des
forces de police et de sécurité s’en tient strictement à la loi et que ces forces ne se
déploient que pour accomplir leur devoir de protection à l’égard des personnes, des
institutions ou des biens contre lesquels des actes illégaux ont été commis.
- 1071. Concernant la recommandation b), le gouvernement réitère que, pour
ce qui est du licenciement du syndicaliste Iván Freites, l’inspection du travail de
Punto Fijo, à la demande de l’entreprise Petróleos de Venezuela S.A. (PDVSA), a lancé
une procédure de qualification de fautes et d’autorisation de licenciement à l’encontre
du syndicaliste. Le gouvernement réitère que, après que la procédure légale fondée sur
l’article 79 de la loi organique sur le travail et les travailleurs qui énonce les
motifs légitimes de licenciement (notamment à l’alinéa a) «manque de probité ou conduite
immorale au travail»; à l’alinéa c) «injure ou manquement grave au respect et à la
considération dus à l’employeur, à ses représentants ou aux membres de sa famille qui
vivraient avec lui ou elle»; et à l’alinéa i) «grave manquement aux obligations imposées
par la relation de travail») ait été suivie, par décision administrative no 075 01 2013
du 20 décembre 2013, l’inspection du travail, après avoir examiné les motifs invoqués et
respecté les délais probatoires des allégations présentées conformément au droit
constitutionnel à se défendre, a déclaré la demande recevable et autorisé l’entreprise
PDVSA à licencier M. Freites. En réponse aux demandes du comité, le gouvernement fait
savoir que les faits sur lesquels s’appuie la demande d’autorisation de licenciement
sont les suivants: i) avoir proféré des offenses graves et des accusations portant
atteinte à l’honneur, la réputation et la bienséance, au moyen de déclarations orales et
d’écrits dans la presse, à la radio et la télévision, portant ainsi un sérieux préjudice
au moral, à la dignité et à l’intégrité de l’entreprise et de sa direction; ii) avoir
fait état d’appréciations techniques contraires aux normes de l’entreprise, injuriant et
bouleversant la population. A cet égard, le gouvernement indique que ces faits ont été
vérifiés par les instances compétentes et il transmet le texte de la résolution
administrative no 075-01-2013 autorisant le licenciement. Selon cette résolution, la
participation de M. Freites à des déclarations contre l’entité de travail PDVSA et des
membres de sa direction ne fait aucun doute «en évitant les voies habituelles et
idoines, en offensant ces personnes, et en portant atteinte à leur honneur en affirmant
qu’elles sont faibles, corrompues, que ce sont des assassins et des saboteurs»; ainsi,
la résolution conclut que M. Freites s’est rendu coupable des motifs légitimes de
licenciement prévus aux alinéas a), c), et i) de l’article 79 de la LOTTT.
- 1072. Le gouvernement ajoute que M. Freites a introduit un recours en
nullité contre la décision administrative susmentionnée et que le cinquième Tribunal de
première instance du circuit judiciaire du travail de l’Etat Falcón a jugé ce recours
recevable. Le gouvernement indique qu’il transmettra au comité toute information
supplémentaire qu’il obtiendra à cet égard.
C. Conclusions du comité
C. Conclusions du comité- 1073. Le comité note les indications du gouvernement concernant la
recommandation a) de son examen antérieur du cas dans laquelle le comité a prié le
gouvernement de garantir de ne pas avoir recours à l’avenir à des mesures privatives de
liberté et à des mesures de sûreté imposant une présentation périodique devant
l’autorité judiciaire et interdisant une manifestation lorsqu’il n’existe pas de raison
fondée d’engager des poursuites pénales à l’encontre de syndicalistes exerçant leur
droit de manifester). Le comité s’attend fermement à ce que le gouvernement garantisse
qu’il sera donné plein effet à la recommandation concernée.
- 1074. Le comité rappelle que, dansla recommandation b) de son examen
antérieur du cas, il a prié le gouvernement decommuniquer la décision administrative
no 075 01 2013 par laquelle l’inspection du travail a autorisé le licenciement de
M. Iván Freites, de préciser les faits concrets reprochés à ce dirigeant et d’indiquer
s’il a formé un recours en justice contre son licenciement et communiquer la décision
éventuelle. Le comité note que le gouvernement détaille les faits concrets reprochés au
dirigeant syndical (offenses graves et accusations orales et écrites portant atteinte à
l’honneur, la réputation et la bienséance, ainsi que des appréciations techniques
injurieuses et contraires aux normes de l’entreprise) et qu’il précise que ces faits ont
été vérifiés par les instances compétentes. Le comité observe que la résolution
administrative no 075-01-2013 autorise le licenciement de M. Freites après avoir
constaté que ce dirigeant syndical avait participé à des déclarations injurieuses à
l’encontre de son entité de travail et des membres de sa direction. A cet égard, le
comité souhaite rappeler que le plein exercice des droits syndicaux exige la libre
circulation des informations, des opinions et des idées, de sorte que les travailleurs
et les employeurs, tout comme leurs organisations, devraient jouir de la liberté
d’opinion et d’expression dans leurs réunions, publications et autres activités
syndicales. Néanmoins, dans l’expression de leurs opinions, les organisations syndicales
ne devraient pas dépasser les limites convenables de la polémique et devraient
s’abstenir d’excès de langage. [Voir Recueil de décisions et de principes du Comité de
la liberté syndicale, cinquième édition, 2006, paragr. 154.] Par ailleurs, le comité
note que le gouvernement indique que M. Freites a introduit un recours en nullité contre
la décision administrative susmentionnée. Le comité prie legouvernement de communiquer
la décision qui sera arrêtée à l’issue du recours en nullité.
Recommandations du comité
Recommandations du comité- 1075. Au vu des conclusions qui précèdent, le comité invite le Conseil
d’administration à approuver les recommandations suivantes:
- a) Le comité s’attend
à ce que le gouvernement garantisse qu’il n’aura pas recours à l’avenir à des
mesures privatives de liberté et à des mesures de sûreté imposant une présentation
périodique devant l’autorité judiciaire et interdisant une manifestation lorsqu’il
n’existe pas de raison fondée d’engager des poursuites pénales à l’encontre de
syndicalistes exerçant leur droit de manifester.b) Le comité prie le gouvernement de
communiquer la décision arrêtée à l’issue du recours en justice introduit par
M. Freites contre la décision administrative no 075-01-2013.