ILO-en-strap
NORMLEX
Information System on International Labour Standards

Suites données aux recommandations du comité et du Conseil d’administration - Rapport No. 383, Octobre 2017

Cas no 2882 (Bahreïn) - Date de la plainte: 16-JUIN -11 - En suivi

Afficher en : Anglais - Espagnol

Suites données aux recommandations du comité et du Conseil d’administration

Suites données aux recommandations du comité et du Conseil d’administration
  1. 17. Le présent cas, dans lequel les organisations plaignantes ont allégué de graves violations de la liberté syndicale, y compris licenciements massifs de membres et de dirigeants syndicaux en raison de leur participation à une grève, menaces contre l’intégrité physique de dirigeants syndicaux, arrestations, harcèlement, poursuites, intimidation et ingérence dans les affaires internes d’un syndicat, a été examiné pour la dernière fois par le comité à sa réunion d’octobre 2016. [Voir 380e rapport, paragr. 87-98, approuvé par le Conseil d’administration à sa 328e session.] A cette occasion, le comité a formulé les recommandations suivantes [voir 380e rapport, paragr. 98]:
    • a) Le comité prie instamment le gouvernement de diligenter sans délai une enquête indépendante sur les allégations relatives à la santé et à la sécurité d’Abu Dheeb avant sa libération et de fournir copie des condamnations prononcées contre Abu Dheeb et Jalila al-Salman ainsi que toute information disponible relative aux recours en appel qu’ils ont formés.
    • b) Rappelant que les travailleurs devraient avoir le droit de constituer des organisations de leur choix quelles que soient leurs opinions politiques, le comité prie le gouvernement d’informer les travailleurs concernés que, si la BTA souhaite se reconstituer, elle pourra le faire sans craindre d’obstacles législatifs ou administratifs quels qu’ils soient.
    • c) Rappelant l’engagement pris par le gouvernement dans le cadre de l’accord tripartite conclu en 2012 d’œuvrer à la ratification des conventions nos 87 et 98, le comité s’attend à ce que le gouvernement organise sans délai avec les parties concernées les consultations nécessaires à ce sujet ainsi qu’à propos de la mise en conformité de la loi sur les syndicats avec les principes de la liberté syndicale, en tenant compte des commentaires antérieurs du comité. Le comité attire l’attention du gouvernement sur l’importance de respecter ses précédents engagements et lui rappelle de nouveau qu’il peut se prévaloir de l’assistance technique du BIT. Le comité prie le gouvernement de le tenir informé de l’évolution de la situation à ce sujet.
    • d) Le comité prie le gouvernement de fournir des informations détaillées sur les résultats des enquêtes, et de solliciter des informations de la part de l’organisation d’employeurs concernées, sur les allégations précises de discrimination antisyndicale et d’ingérence par l’employeur dans les affaires syndicales dans les entreprises suivantes: ALBA, BAS, ASRY, GARMCO, BATELCO, BAPCO, BAFCO, Gulf Air, Yokogawa Middle East, KANOO cars et Sphynx cleaning. Le comité invite par ailleurs l’organisation plaignante à fournir des informations additionnelles à sa disposition en ce qui concerne sa plainte de discrimination antisyndicale dans ces entreprises.
  2. 18. Dans sa communication en date du 14 février 2017, le gouvernement indique que l’Unité spéciale d’enquête – une autorité indépendante et neutre instituée par le ministère de l’Intérieur conformément aux directives de haut niveau décrétées par Sa Majesté le Roi de Bahreïn – a mené une enquête sur l’état de santé et les conditions de sécurité de Mahdi Abu Dheeb au cours de sa détention. Après avoir examiné l’ensemble des dossiers et documents nécessaires et entendu les déclarations des parties concernées, elle a conclu qu’il n’existait aucun élément probant susceptible d’étayer les faits allégués par Abu Dheeb. Le gouvernement signale toutefois que ce dernier, conformément à l’article 20 de la Constitution et à la législation en vigueur, a le droit de faire appel de cette décision et de soumettre à l’autorité judiciaire de nouveaux éléments d’appréciation et de nouveaux documents. Il indique également que, outre l’Unité spéciale d’enquête, d’autres institutions nationales – comme l’Institution nationale pour les droits de l’homme, la Commission de défense des droits des prisonniers et des détenus et le Secrétariat général chargé de la réception des réclamations – assurent la protection des droits des détenus, et note enfin qu’Abu Dheeb et Jalila al-Salman peuvent saisir l’une de ces institutions ou le tribunal et leur soumettre leurs allégations.
  3. 19. En ce qui concerne leur détention, le gouvernement indique également qu’Abu Dheeb et Jalila Al-Salman ont tous deux comparu devant les tribunaux, eu droit à un procès équitable mené dans le respect du droit de la défense et, dans le cadre d’une audience publique de la Haute Cour d’appel (l’instance statuant sur les décisions rendues en matière pénale), bénéficié d’une réduction de la durée de leur peine d’incarcération, laquelle est passée de dix à cinq ans pour Abu Dheeb et de trois ans à six mois pour Jalila al-Salman. Réaffirmant que l’article 104 de la Constitution consacre l’indépendance du pouvoir judiciaire, le gouvernement ajoute que la libération d’Abu Dheeb à l’expiration de sa peine est à prendre en compte dans le cadre de ce cas, que les deux dirigeants syndicaux ont purgé la peine qui leur avait été imposée et que la législation nationale leur confère le droit, dont ils ne se sont à ce jour pas encore prévalus, d’introduire un recours devant la Cour de cassation ou de présenter une demande de réhabilitation.
  4. 20. Le gouvernement déclare en outre, en ce qui concerne l’Association des enseignants de Bahreïn (BTA), organisation qui a été dissoute, que les autorités concernées ont informé l’organe directeur de cette dernière qu’elle pourrait être rétablie, conformément à la loi no 21 de 1989, telle qu’amendée, sur les associations, les clubs sociaux et culturels, les commissions spéciales œuvrant dans le domaine de la jeunesse et des sports et les institutions privées, mais qu’aucune demande à cet effet ne lui a encore été adressée.
  5. 21. En ce qui concerne la possibilité de ratifier la convention (nº 87) sur la liberté syndicale et la protection du droit syndical, 1948, et la convention (nº 98) sur le droit d’organisation et de négociation collective, 1949, le gouvernement indique que plusieurs consultations ont été menées avec les autorités gouvernementales compétentes, au cours desquelles les participants ont examiné le degré de conformité de la législation nationale avec les dispositions des conventions ainsi que la possibilité de les appliquer dans leur totalité. Le gouvernement s’emploie également à faire aboutir les négociations avec les partenaires sociaux, menées dans le cadre de réunions bilatérales avec des organisations d’employeurs et de travailleurs, et à organiser des réunions tripartites, lesquelles devraient se tenir prochainement.
  6. 22. En ce qui concerne les amendements à la loi sur les syndicats (TUA) qui ont été demandés, le gouvernement confirme que la loi en question est une loi progressiste qui garantit aux travailleurs un ensemble d’avantages et de droits, qui réglemente les activités syndicales dans le respect des normes internationales du travail, et rappelle que l’introduction d’amendements dans la législation nationale nécessite la mise en œuvre de diverses mesures constitutionnelles – les amendements doivent notamment être soumis à l’Assemblée nationale (le Conseil des représentants et le Conseil consultatif) et approuvés avant d’être promulgués. Le gouvernement indique par ailleurs que les secteurs d’activités vitaux dans lesquels les grèves sont interdites sont énumérés dans la décision du Premier ministre no 62 de 2006, décision qui tient dûment compte tant des normes internationales du travail applicables dans le cadre de législations comparables que des directives du comité, ce dernier octroyant aux Etats Membres le droit de déterminer quelles sont les installations vitales dans lesquelles tout arrêt du travail serait susceptible de perturber le cours de la vie quotidienne. Conformément à ce principe, l’article 21 de la TUA, promulgué par le décret-loi no 33 de 2002, tel que modifié par la loi no 49 de 2006, a élargi pour des raisons d’intérêt public la liste des services essentiels, y ajoutant notamment les établissements d’enseignement et les installations pétrolières et gazières. Le gouvernement ajoute qu’il est obligatoire dans ces services de recourir à la conciliation et à l’arbitrage pour le règlement des conflits collectifs, ce qui réduit le recours à la grève tout en étant conforme aux normes internationales du travail et aux prescriptions des lois comparables portant sur cette question. Il indique également que le fait que l’identification des installations vitales dans lesquelles les grèves sont interdites relève de la décision du Premier ministre garantit la possibilité de modifier cette liste, au cas où l’une de ces installations ne serait plus considérée comme vitale.
  7. 23. S’agissant enfin des allégations de discrimination antisyndicale et d’ingérence de l’employeur dans les affaires syndicales dans diverses entreprises: ALBA (entreprise A), BAS (entreprise B), ASRY (entreprise C), GARMCO (entreprise D), BATELCO (entreprise E), BAPCO (entreprise F), BAFCO (entreprise G), Gulf Air (entreprise H), Yokogawa Middle East (entreprise I), KANOO cars (entreprise J) et Sphynx cleaning (entreprise K), le gouvernement indique: i) que les instances compétentes du ministère du Travail et des Affaires sociales ont rencontré des représentants syndicaux et des dirigeants des entreprises B, C, D, E, G, H et I, lesquels ont notifié dans des rapports officiels que la gestion de l’entreprise ne se heurtait à aucun obstacle, qu’ils menaient leurs activités normalement et se rencontraient régulièrement avec la direction; ii) que le ministère poursuit son enquête sur la situation des syndicats dans les entreprises A et F; iii) que l’absence de représentants syndicaux au sein de l’entreprise K est due à une diminution du volume d’activités de cette dernière et que la relation entre les représentants syndicaux et l’entreprise ont pris fin; iv) qu’il ne semble pas que l’entreprise J soit dotée d’un syndicat. Le gouvernement conclut en faisant observer qu’il s’emploie en permanence à pacifier les relations entre les syndicats et les dirigeants, à maintenir des relations fructueuses entre les deux parties en vue d’assurer la continuité du travail dans les entreprises concernées et à tirer pleinement parti du dialogue social.
  8. 24. Le comité prend bonne note des informations communiquées par le gouvernement et relève notamment que l’organe directeur de l’Association des enseignants de Bahreïn (BTA) qui a été dissoute a été informé que cette dernière pourrait être rétablie dans le cadre de la même législation que précédemment, mais qu’aucune demande n’a jusqu’ici été formulée à cet effet, et que l’enquête qui a été effectuée à propos des allégations relatives à la santé et à la sécurité du président de la BTA, Abu Dheeb, avant sa libération, n’a révélé aucun élément de preuve susceptible d’attester qu’il aurait effectivement été maltraité. Le comité veut croire à cet égard que, s’il le souhaite, Abu Dheeb peut librement et sans rencontrer le moindre obstacle contester cette décision auprès d’un tribunal ou saisir l’une des institutions de protection des droits des détenus énumérées par le gouvernement.
  9. 25. Le comité note en outre que, selon le gouvernement, Abu Dheeb et Jalila al-Salman ont bénéficié d’un procès équitable, ont purgé leurs peines respectives et n’ont pas interjeté appel devant la cour de cassation; il regrette toutefois que le gouvernement, bien qu’il ait été invité à le faire à de nombreuses reprises, ne lui ait pas encore remis une copie des condamnations prononcées contre les syndicalistes. Le comité rappelle à cet égard que la détention de syndicalistes pour des raisons syndicales constitue une grave entrave à l’exercice des droits syndicaux et viole la liberté syndicale [voir Recueil de décisions et de principes du Comité de la liberté syndicale, cinquième édition, 2006, paragr. 66], et prie à nouveau le gouvernement de lui communiquer une copie des décisions de justice rendues pour les cas d’Abu Dheeb et de Jalila al-Salman, ainsi que toute information concernant le recours qu’ils pourraient introduire devant la cour de cassation ou leur demande de réhabilitation. Le comité s’attend à ce qu’Abu Dheeb et Jalila al-Salman soient actuellement en mesure d’exercer librement leurs droits syndicaux, conformément aux principes de la liberté syndicale.
  10. 26. Le comité accueille favorablement l’indication du gouvernement selon laquelle une série de consultations avec les autorités gouvernementales compétentes ont été organisées en vue d’examiner la possibilité de ratifier les conventions nos 87 et 98 et que d’autres réunions tripartites avec les partenaires sociaux sont envisagées; il veut croire que, conformément à l’engagement qu’il a pris dans le cadre de l’accord tripartite de 2012 d’œuvrer à la ratification de ces conventions, le gouvernement sera prochainement en mesure de faire état des avancées réalisées à cet égard.
  11. 27. Le comité note cependant avec regret que, malgré ses demandes répétées – émises à l’occasion du présent cas, mais aussi dans le cadre des cas nos 2433 et 2552 – invitant les autorités à modifier la loi sur les syndicats (TUA) et la décision du Premier ministre no 62 de 2006 de manière à assurer leur conformité aux principes de la liberté syndicale, le gouvernement se contente de communiquer une nouvelle fois des informations concernant la délimitation des services essentiels et les difficultés associées à toute modification de la législation nationale, sans signaler le moindre progrès ni indiquer les mesures prises ou prévues aux fins de ce remaniement des lois. Dans ces circonstances, rappelant qu’il insiste depuis plusieurs années sur la nécessité d’une réforme législative, le comité prie à nouveau le gouvernement d’organiser sans tarder des consultations avec les partenaires sociaux concernés afin d’assurer la mise en conformité de la loi sur les syndicats avec les principes de la liberté syndicale, en tenant pleinement compte des commentaires antérieurs du comité. Il prie le gouvernement de le tenir informé de l’évolution de la situation à cet égard et lui rappelle une fois de plus qu’il peut, s’il le souhaite, solliciter l’assistance technique du BIT.
  12. 28. En ce qui concerne les allégations de discrimination antisyndicale et d’ingérence dans les affaires syndicales, le comité note que, selon le gouvernement, la majorité des syndicats ne signalent aucun problème dans la conduite des activités syndicales, mais qu’une enquête est encore en cours dans certaines entreprises et que quelques-unes ne posséderaient pas de syndicat. Sachant que le gouvernement s’est engagé à pacifier les relations entre syndicats et dirigeants d’entreprise et à maintenir entre eux des relations fructueuses, et compte tenu du fait que l’organisation plaignante n’a pas communiqué de nouvelles informations à cet égard, le comité prie le gouvernement de lui fournir des renseignements actualisés sur la situation des syndicats dans les entreprises dans lesquelles une enquête est encore en cours et veut croire que toutes les autres questions en suspens seront dûment traitées dans les plus brefs délais. Le comité veut également croire que les travailleurs des entreprises concernées sont en mesure d’exercer pleinement leur droit à la liberté syndicale et que le renforcement du dialogue social entre les partenaires sociaux contribuera largement à l’avenir à prévenir toute discrimination antisyndicale et toute ingérence dans les affaires syndicales.
© Copyright and permissions 1996-2024 International Labour Organization (ILO) | Privacy policy | Disclaimer