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Informations attendues des gouvernements concernant le suivi des cas - Rapport No. 384, Mars 2018

Cas no 3238 (République de Corée) - Date de la plainte: 30-AOÛT -16 - Cas de suivi fermés en raison de l'absence d'informations de la part du plaignant ou du gouvernement au cours des 18 mois écoulés depuis l'examen de ce cas par le Comité.

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Allégations: Les organisations plaignantes allèguent l’adoption unilatérale des directives gouvernementales affectant le caractère autonome de négociations collectives sans consultation avec les partenaires sociaux; la qualification d’illégale attribuée à une grève en raison de son objectif qui est de s’opposer à la politique du gouvernement; des accusations et des poursuites pénales à l’encontre d’un dirigeant syndical pour l’organisation de la grève et la participation à des manifestations; le recours à une force de police excessive contre des manifestants pacifiques ayant entraîné des lésions corporelles; et l’arrestation et la poursuite de membres et de dirigeants syndicaux en rapport avec les manifestations

  1. 238. La plainte figure dans une communication datée du 30 août 2016, soumise par la Confédération syndicale internationale (CSI), la Confédération coréenne des syndicats (KCTU) et la Fédération des syndicats coréens (FKTU).
  2. 239. Le gouvernement a transmis ses observations dans une communication reçue le 29 septembre 2017.
  3. 240. La République de Corée n’a pas ratifié la convention (nº 87) sur la liberté syndicale et la protection du droit syndical, 1948, et la convention (nº 98) sur le droit d’organisation et de négociation collective, 1949.

A. Allégations des organisations plaignantes

A. Allégations des organisations plaignantes
  1. 241. Dans une communication conjointe datée du 30 août 2016, la CSI, la FKTU et la KCTU indiquent que la plainte concerne l’imposition unilatéralement de lois et de politiques qui violent les droits en matière de liberté syndicale et de négociation collective. Ces organisations allèguent également l’arrestation et la poursuite de dirigeants syndicaux pour leur participation à des manifestations et à des grèves pour protester contre les politiques du gouvernement qui affectent les droits et intérêts des travailleurs, ainsi que le recours excessif à la force par la police contre des manifestants pacifiques. Les organisations plaignantes affirment que les peines de prison excessives réclamées par le ministère public et décidées par les magistrats montrent clairement que le gouvernement a l’intention d’envoyer un message très fort aux travailleurs pour les décourager d’exercer leurs droits de se réunir et de se syndiquer.
  2. 242. En ce qui concerne les réformes unilatérales de la législation et de la politique sur le travail, les organisations plaignantes se réfèrent au «Plan complet destiné aux travailleurs temporaires», publié le 29 décembre 2014, pour favoriser les mesures d’«amélioration de la double structure du marché du travail». Selon les organisations plaignantes, ce plan facilite les conditions de licenciement des travailleurs, introduit un système de salaires basé sur les compétences et la performance, assouplit la réglementation relative à la modification des règles sur l’emploi, prolonge la limite de la durée des contrats des travailleurs à durée déterminée, et élargit les catégories dans lesquelles le détachement des travailleurs est autorisé. Le plan complet a été publié alors que les négociations au sein de la Commission du développement économique et social (ESDC) sur l’amélioration de la double structure du marché du travail étaient en cours depuis septembre 2014 sans qu’aucun consensus n’ait été atteint au sujet des modalités d’un tel plan.
  3. 243. En outre, les organisations plaignantes indiquent que, après des négociations très difficiles, un accord tripartite sur les réformes structurelles du marché du travail (ci-après «l’accord tripartite») a été conclu le 15 septembre 2015. Cependant, aucun accord n’a été réalisé sur certaines questions au sujet desquelles le parti dirigeant a essayé par la suite d’adopter cinq projets de loi. Les sujets couverts dans ces cinq projets de loi portaient: sur l’extension de la limite de la durée des contrats des travailleurs à durée déterminée; l’élargissement des catégories d’entreprises dans lesquelles le détachement des travailleurs est autorisé; la réduction du champ d’application du salaire ordinaire; la réduction des salaires supplémentaires pour les heures de travail supplémentaires effectuées les week-ends et les jours fériés; et la prolongation de la période d’emploi requise pour l’octroi des prestations de chômage, laquelle passe de 180 jours actuellement à 270 jours. A la suite de cette initiative du gouvernement, la FKTU, qui avait participé aux discussions tripartites, s’est retirée de l’accord tripartite et a entamé une grève à grande échelle.
  4. 244. A la suite du retrait de la FKTU de l’accord tripartite et des grèves qui ont suivi, le gouvernement a dû faire face à des difficultés à l’Assemblée nationale, et les cinq projets de loi n’ont pas été adoptés. Le gouvernement a alors annoncé unilatéralement les Directives destinées à assouplir la réglementation sur le licenciement des travailleurs peu performants et les Directives sur les modifications défavorables des règles de l’emploi (ci-après «directives du gouvernement»). Le 30 décembre 2015, il a invité les universitaires et les chercheurs qui étaient favorables à sa position à une table ronde d’experts sur le sujet et leur a transmis les caractéristiques essentielles des directives. Le 17 janvier 2016, le vice ministre du Travail et de l’Emploi déclara que, si la FKTU refusait de participer au processus de consultation, les directives du gouvernement seraient appliquées en collaboration avec d’autres organisations de travailleurs. Le 22 janvier, le ministère de l’Emploi et du Travail (ci-après «le ministère») procéda à la publication des directives plus tôt que prévu. Il était prévu que le gouvernement soumette un rapport au Comité spécial sur les réformes structurelles du marché du travail de la commission tripartite et annonce les directives comme faisant partie des mesures de suivi de l’accord tripartite. Cependant, cette étape a été ignorée, et les directives du gouvernement ont été publiées à la hâte le 22 janvier 2016, peu de temps après l’exposé de la politique générale au Président le 20 janvier. Il s’agit là d’une violation évidente de l’accord tripartite, selon lequel les parties s’étaient engagées à n’établir les mesures qu’après consultations. Les directives du gouvernement ne sont pas juridiquement contraignantes; cependant, elles sont utilisées par le ministère pour conseiller les employeurs, et elles sont susceptibles d’avoir un large effet sur le marché du travail.
  5. 245. Les organisations plaignantes fournissent les détails suivants concernant la teneur et les effets potentiels des directives du gouvernement. Elles indiquent que, bien que le gouvernement prétende que les directives créeront un climat favorable où les gens seront bien rémunérés pour leur travail, en réalité elles permettront aux employeurs de licencier plus facilement les travailleurs – ce qui neutralisera de ce fait le pouvoir de négociation des syndicats et des représentants des travailleurs –, de modifier les salaires et d’introduire un système de plafonnement des salaires. Les Directives destinées à assouplir la réglementation sur le licenciement des travailleurs peu performants prévoient que «la faible performance au travail» peut constituer à elle seule un motif de licenciement, alors que la législation n’autorise le licenciement que dans des circonstances très limitées, n’incluant pas «la faible performance», et pour des motifs spécifiques pour lesquels le travailleur peut être tenu pour responsable. Les directives ne peuvent trouver leur justification dans les articles 23 ou 94 de la loi sur les normes de travail actuellement en vigueur ou dans toute autre loi antérieure. Elles proposent des procédures de licenciement des travailleurs peu performants et recommandent que ces procédures soient incluses dans les règles d’emploi de l’entreprise ou dans les conventions collectives, ce qui, de l’avis des organisations plaignantes, revient à donner explicitement aux employeurs le pouvoir d’introduire des changements défavorables aux travailleurs dans les règles de l’emploi et les conventions collectives. Les organisations plaignantes indiquent que les syndicats se sont également déclarés sérieusement préoccupés au sujet de la probabilité que les entreprises utilisent les directives pour camoufler des mesures de restructuration. Compte tenu du fait que l’examen de la performance et les réaffectations sont menés par l’employeur sans aucune surveillance ou contrôle, il n’existe aucune garantie que les directives soient suivies de manière efficace. En outre, les entreprises sont susceptibles d’interpréter les directives dans un sens qui leur permette de licencier tout travailleur dans la mesure où elles se conforment aux conditions formelles qui y sont prévues. La probabilité que les directives soient mal utilisées pour justifier des mesures excessives de licenciement au motif de la faible performance ou pour détériorer les conditions des salaires et de travail est assez grande. Selon les organisations plaignantes, du fait de l’adoption de ces directives, le gouvernement est en train de saper les négociations entre les travailleurs et la direction et de causer un déséquilibre dans leur pouvoir de négociation.
  6. 246. En ce qui concerne les Directives sur les modifications défavorables des règles de l’emploi, les organisations plaignantes indiquent qu’elles autorisent les entreprises à ajuster leur système de salaires du fait du relèvement à 60 ans de l’âge de la retraite. Cela signifierait que les salaires atteindraient leur plus haut niveau une fois que les travailleurs auraient atteint l’âge de 55 ans et baisseraient progressivement jusqu’à l’âge de la retraite. Selon le nouveau plan du gouvernement, les autorités fourniront des subventions et des consultations à environ 30 entreprises privées et 550 usines dans six secteurs clés, notamment dans le transport maritime, les finances, la médecine et l’industrie automobile, à l’occasion de l’adoption du système de plafonnement des salaires et de l’abolition des systèmes de salaires basés sur l’ancienneté. Selon les organisations plaignantes, l’application du plafonnement des salaires est susceptible de porter atteinte aux règles du travail d’une manière défavorable aux travailleurs. L’article 94(1) de la loi sur les normes de travail prévoit que le consentement d’un syndicat ou de la majorité des travailleurs est requis lorsque l’introduction du système de plafonnement des salaires ou le système de changement des salaires détériore les conditions relatives au salaire ou au travail, alors que les nouvelles directives du ministère habilitent les entreprises qui ne sont pas en mesure d’obtenir le consentement d’une majorité de leurs travailleurs à changer les règles relatives au travail, sans tenir compte de leur avis. Les organisations plaignantes déclarent que les syndicats sont préoccupés par le fait que les directives du gouvernement sont susceptibles de donner aux employeurs le dernier mot dans la détermination de tout un éventail de conditions de travail par le biais de la réforme de la structure des salaires, ce qui inclura non seulement le système de plafonnement des salaires, mais également, à une étape ultérieure, le système de rémunération basé sur la performance.
  7. 247. Les organisations plaignantes allèguent que les directives du gouvernement représentent une violation évidente de la législation coréenne, des droits de liberté syndicale et de négociation collective garantis par les conventions nos 87 et 98, et de la Constitution de l’OIT. Les directives traduisent le soutien apporté par le gouvernement pour faciliter le licenciement des travailleurs et favorisent expressément l’introduction dans les conventions collectives de procédures destinées à de tels licenciements. Selon les organisations plaignantes, cela sera sans aucun doute utilisé contre les syndicats dans la négociation, en dépit de l’incompatibilité avec la législation existante. En recommandant fermement que les travailleurs subissent des réductions salariales sur la base de l’idée non prouvée que la réduction des salaires des travailleurs âgés entraînera l’engagement de travailleurs plus jeunes, le gouvernement interfère dans les négociations salariales. Les directives du gouvernement représentent une ingérence dans l’autonomie des travailleurs et des employeurs à la négociation, étant donné qu’elles déterminent à l’avance la base sur laquelle les parties devront se mettre d’accord sur un sujet central de négociation. Par ailleurs, les Directives pour la réduction des salaires des travailleurs âgés enfreignent également la législation en vigueur et sont susceptibles d’être utilisées pour saper l’échelle des salaires négociée entre les syndicats et les employeurs. Le résultat sera une réduction des salaires de la plupart des travailleurs expérimentés.
  8. 248. Les organisations plaignantes indiquent que le gouvernement a contraint certaines institutions publiques, et notamment des entreprises publiques, à introduire un système de salaires basé sur la performance. Une recommandation élaborée de manière unilatérale à cet effet a été établie. Le 28 janvier 2016, le Comité de direction des institutions publiques a finalisé la proposition d’un système de salaires basé sur la performance dans les institutions publiques et, le 1er février, la Commission des services financiers a annoncé les mesures de promotion de la culture de la performance dans les institutions financières publiques. Le 22 avril, la Présidente Park a expliqué, au cours de la réunion sur la stratégie financière nationale de 2016, que le système de salaires basé sur la performance devrait être étendu à l’ensemble des 120 institutions publiques de manière que le secteur public puisse mener la réforme structurelle. Elle a répété cette déclaration au cours de la session du Conseil d’Etat qui s’est tenue le 10 mai. Le comité de direction a décidé le 9 mai 2016 que les entreprises publiques devraient introduire le système de salaires basé sur la performance à la fin du mois de juin et que les institutions paraétatiques devraient faire de même à la fin de l’année. La décision prévoit des incitations financières pour accélérer la réforme ciblée du système de salaires.
  9. 249. Les organisations plaignantes déclarent que l’application du système de salaires basé sur la performance à l’égard du personnel de direction des institutions publiques a été entamée il y a six ans et s’est avérée inefficace et inéquitable en l’absence de critères d’évaluation objectifs. La généralisation forcée de ce système dans le secteur public, sans discussion suffisante entre la direction et les travailleurs, sera également inefficace et inéquitable et risque d’aboutir à une réduction des services publics, ce qui représente une menace pour la sécurité des personnes. Il est également allégué dans la plainte que l’introduction forcée du système de salaires basé sur la performance a entraîné une manipulation de la législation et une violation de l’autonomie des travailleurs et de la direction à la négociation. Par ailleurs, depuis la déclaration de la Présidente, du 25 avril 2016, des dirigeants syndicaux sont arrêtés et des travailleurs contraints d’accepter le nouveau système de salaires.
  10. 250. Enfin, les organisations plaignantes allèguent que la tentative du gouvernement d’étendre le système de salaires basé sur la performance du secteur public au secteur privé a causé une violation grave de l’autonomie à la négociation des travailleurs et de la direction. Elles se réfèrent aux Directions et instructions sur les salaires et la négociation collective de 2016, publiées par le gouvernement le 23 mars 2016. Elles allèguent que le gouvernement assure la promotion des directions susmentionnées en organisant des réunions locales entre les travailleurs et la direction, en constituant des groupes de soutien formés d’experts et en choisissant des entreprises clés qui devront être gérées en conséquence. Les directions en question indiquent principalement que les entreprises ne doivent plus mettre l’accent sur l’ancienneté, mais baser plutôt le système des salaires sur les compétences et la performance; l’augmentation des salaires de la tranche supérieure des 10 pour cent des cadres et des travailleurs doit être reportée; des réunions doivent être tenues avec les organisations locales de travailleurs et d’employeurs afin de promouvoir l’emploi des jeunes; et un groupe de soutien formé d’experts doit être constitué pour promouvoir des lignes directrices sur la gestion équitable du personnel parmi les entreprises et prévoir des services généraux de consultation. Il a également été indiqué que les principales cibles de la réforme du système des salaires sont représentées par 74 entreprises clés et que les objectifs principaux pour l’introduction du système de plafonnement des salaires portent sur 1 150 entreprises, parmi lesquelles 380 occupant plus de 300 travailleurs et 770 moins de 300 travailleurs.
  11. 251. Selon les organisations plaignantes, la prochaine étape a consisté pour le gouvernement à publier le 28 mars 2016 le Plan des Lignes directrices sur l’amélioration des conventions collectives abusives ou déraisonnables, à la suite des Directives sur la révision des conventions collectives abusives ou déraisonnables, publiées le 15 avril 2015. Les organisations plaignantes allèguent que, par le biais de ce plan, le gouvernement est intervenu dans la négociation collective en prenant position en faveur de la révision et/ou de l’abrogation des clauses des conventions collectives exigeant le consentement du syndicat pour certaines décisions concernant le personnel et la direction, et notamment les changements relatifs à l’emploi ou au poste d’un responsable ou d’un membre syndical, les actions disciplinaires ou les changements qui touchent les entreprises tels que les fusions et les acquisitions. Le plan en question prévoit que de telles clauses sont déraisonnables, vu qu’elles accordent aux syndicats une très large autorité sur les ressources humaines et la direction, rendant ainsi difficile pour les employeurs de prendre rapidement des décisions de direction. Le plan susmentionné qualifie également d’illégales les clauses qui prévoient des installations, telles que le téléphone, l’électricité, l’eau, le chauffage et l’air conditionné ou des véhicules aux dirigeants syndicaux en exercice ou aux anciens dirigeants, ou bien celles qui reconnaissent comme jours de travail les jours pendant lesquels les membres d’un comité de négociation sont engagés dans la négociation collective. Selon les organisations plaignantes, suite à une décision prise par la Commission nationale des relations du travail, le gouvernement est déterminé à établir des ordres correctifs dans le cas où les entreprises ne se conforment pas aux lignes directrices en matière de révision et de correction. En outre, en avril 2016, les bureaux locaux du ministère ont transmis des lettres officielles intitulées «Recommandation pour une amélioration de l’autonomie dans les conventions collectives» à l’ensemble des syndicats et des entreprises. Les lettres susmentionnées indiquent que les questions identifiées dans les lignes directrices doivent être corrigées dans les soixante jours à compter du début des négociations entre le personnel et la direction.
  12. 252. Les organisations plaignantes indiquent que la Cour suprême de la République de Corée a confirmé la légalité et le caractère obligatoire des clauses de la convention collective que le gouvernement considère comme déraisonnables dans plusieurs de ses décisions passées. En ce qui concerne le changement d’emploi ou de poste d’un membre syndical, la Cour suprême a décidé que: «Lorsque la convention prévoit que l’employeur doit obtenir le consentement ou l’approbation préalable du syndicat de travailleurs, ou doit discuter avec le syndicat en vue de parvenir à un accord avant d’imposer une mesure, toutes mesures prises en dehors de ce processus devront en principe être considérées comme nulles et non avenues.» En ce qui concerne l’action disciplinaire, la cour a soutenu que: «Lorsque la convention collective stipule que l’employeur doit parvenir à un accord avec son syndicat concernant toutes mesures ou actions qui doivent être prises contre un dirigeant du syndicat, toute action disciplinaire prise sans le consentement du syndicat devra en principe être considérée comme nulle et non avenue.» Enfin, pour ce qui est des clauses de la convention collective qui limitent les prérogatives de la direction, la Cour suprême a soutenu que: «Même lorsqu’une question relève des droits de l’employeur en matière de direction, les travailleurs et la direction peuvent, selon ce qu’ils estiment nécessaire, engager une négociation collective et conclure une convention collective. L’efficacité d’une telle convention collective est reconnue, à moins qu’elle ne soit contraire aux lois obligatoires ou à l’ordre social.»
  13. 253. En ce qui concerne la question de l’incompatibilité des Lignes directrices sur l’amélioration des conventions collectives abusives ou déraisonnables avec les principes de la liberté syndicale et le droit à la négociation collective, les organisations plaignantes se réfèrent aux arguments présentés dans leur soumission dans le cas no 3138. [Voir 380e rapport, paragr. 355-357.]
  14. 254. Les organisations plaignantes décrivent plusieurs actions de protestation menées en 2015 par les syndicats pour exprimer leur désaccord avec ce qu’ils appellent les plans du gouvernement pour promouvoir des réformes régressives de la législation du travail et les réactions de l’Etat à leur sujet. Elles indiquent que, le 3 janvier 2015, le comité exécutif central de la KCTU a décidé de lancer une grève générale dans le cas où le gouvernement continuerait unilatéralement à soutenir les réformes. Un vote a été organisé pendant huit jours entre le 31 mars et le 8 avril 2015. Environ 84,35 pour cent des votants – 54,92 pour cent de la totalité des membres – ont voté en faveur de la grève. Le 13 avril, la KCTU a déclaré une grève générale le 24 avril, à moins que les quatre demandes suivantes ne soient remplies: i) le retrait des réformes du marché du travail; ii) le retrait de la réforme du système de pension des fonctionnaires publics; iii) le relèvement du salaire minimum à 10 000 won sud-coréens par heure; et iv) la modification de la loi sur les normes de travail et de la loi sur les syndicats et l’ajustement des relations de travail (TULRAA) de manière que les droits fondamentaux du travail soient garantis pour l’ensemble des travailleurs.
  15. 255. Selon les organisations plaignantes, dès que la décision de la KCTU de déclarer la grève fut prise, la Fédération des employeurs coréens (KEF) a fait une déclaration le 13 avril 2015, qualifiant la grève d’illégale vu que son objectif était de s’opposer à la politique du gouvernement. Par ailleurs, le ministre du Travail, Lee-Ki-kwon, a affirmé publiquement que la grève déclarée était manifestement illégale vu qu’une grève organisée pour s’opposer aux modifications et aux systèmes ou politiques introduits par le gouvernement ne se justifie pas. Il déclare aussi, en tant que ministre en charge des relations professionnelles, qu’il ne tolérera aucun dommage causé par une grève illégale. Un procureur a également annoncé que, en cas de grève, les dirigeants de la KCTU et les travailleurs grévistes seraient sanctionnés conformément au Code pénal et que des personnages clés seraient placés en garde à vue pour être interrogés.
  16. 256. A l’issue de la grève, la KEF a accusé le président de la KCTU, M. Han Sang-gyun, d’«entrave au travail», et la police l’a convoqué pour ce motif. En outre, la police l’a qualifié de dirigeant de l’action illégale qui s’est produite au cours d’un rassemblement de masse, qui a eu lieu le 16 avril 2015, pour demander des informations sur le naufrage du ferry Sewol. La KCTU a participé à ce rassemblement dans le cadre de ses activités de solidarité. Plusieurs médias ont également rapporté que M. Han a participé à la planification d’une manifestation prétendument illégale et violente. M. Han a demandé le report de l’enquête, mais le ministère public a tenté d’obtenir un mandat d’arrêt que le juge a refusé d’accorder. Le second assistant au procureur général du district central de Séoul a critiqué cette décision judiciaire en s’adressant aux médias. La demande d’un mandat d’arrêt a été renouvelée par le ministère public et un mandat d’arrêt a été finalement décerné en juin 2015.
  17. 257. Le 14 novembre 2015, M. Han a tenu une conférence de presse face au Centre de la presse de Corée, à Séoul, au cours de laquelle il a exprimé son opposition aux réformes du travail menées par le gouvernement. A l’issue de la conférence de presse, il a participé au rassemblement national des travailleurs organisé par la KCTU et à la mobilisation de masse organisée par différents mouvements sociaux. Il a ensuite trouvé refuge dans le temple bouddhiste de Jogyesa. La police l’a finalement arrêté le 10 décembre 2015 à sa sortie du temple.
  18. 258. En préparation de la mobilisation de masse du 14 novembre, la police nationale a placé le bureau de police de l’agglomération de Séoul, le bureau provincial de Gyeonggi et le bureau de l’agglomération d’Incheon au niveau d’alerte maximum; elle a établi un «avis d’interdiction» des réunions et manifestations et annoncé qu’elle dresserait des barricades avec des bus autour du lieu prévu pour le rassemblement. Le jour du rassemblement, la police a mobilisé près de 20 000 officiers de 248 escadrons et installé 19 canons à eau, 679 bus, 580 pulvérisateurs de capsaïcine et 102 dispositifs de collecte de preuves. Des barricades ont été dressées avec des bus, et des canons à eau ont été installés. Lorsque les participants ont commencé à descendre la rue et qu’ils ont été bloqués par les barricades de bus, la police a utilisé des niveaux record d’eau et de gaz lacrymogène contre eux. Des canons à eau ont été utilisés en jets directs ou ciblés, et les gens n’arrivaient plus à ouvrir les yeux ou à respirer à cause des attaques prolongées de gaz lacrymogène. Des douzaines de personnes ont été blessées par les canons à eau, notamment un fermier, nommé Baek Nam-gi, qui est tombé dans le coma après avoir été frappé par un jet direct d’eau.
  19. 259. Selon les organisations plaignantes, la police ne s’est pas excusée de l’usage excessif de la force; elle n’a mené aucune enquête et n’a pas sanctionné les responsables. Elle a plutôt qualifié la mobilisation de masse de «manifestation violente» et procédé à l’interrogatoire et à l’arrestation des participants. Près de 1 200 officiers de police ont été mobilisés à travers le pays pour enquêter sur la participation à la mobilisation de masse du 14 novembre. Le 6 décembre 2015, la police a annoncé que 1 531 personnes ont été choisies pour faire l’objet d’une enquête et qu’une procédure judiciaire serait engagée contre 585 personnes. Au cours de ce processus, 532 membres de la KCTU ont été convoqués, parmi lesquels 476 en tant que suspects et 12 en tant que témoins. Près de 15 personnes ont été mises hors de cause. Parmi les personnes convoquées, 20 ont été placées en garde à vue et, par la suite, inculpées.
  20. 260. Le 5 janvier 2016, M. Han a été inculpé pour huit différents chefs d’accusation, et notamment pour simple entrave à la circulation; entrave aggravée aux devoirs publics; lésions corporelles infligées à des officiers de police; destruction aggravée de biens publics; et violation de la loi sur les réunions et les manifestations. Il a été soutenu que M. Han avait dirigé tous les rassemblements organisés par la KCTU en 2015 ainsi que le rassemblement de masse du 14 novembre. Le 4 juillet 2016, le Tribunal central de district de Séoul a condamné M. Han à cinq années d’emprisonnement et à une amende de 500 000 won. Le 8 juillet, M. Han a interjeté appel et, le 11 juillet, le ministère public a fait de même, réclamant une peine de prison plus longue contre lui. Les organisations plaignantes indiquent que, au moment de la soumission de la plainte au comité, M. Han était détenu au centre de détention de Séoul en attendant son appel. En outre, le comité note que, selon un avis du Groupe de travail des Nations Unies sur la détention arbitraire, transmis par les organisations plaignantes pour information au comité dans une décision rendue le 13 décembre 2016, la cour d’appel a confirmé la condamnation de M. Han pour incitation à la violence, mais a rejeté l’accusation d’«avoir infligé des lésions corporelles par entrave spéciale à ses obligations publiques» et a réduit la peine de cinq à trois ans. [Voir avis no 22/2017 du Groupe de travail des Nations Unies sur la détention arbitraire concernant Sang-gyun Han et Young-joo Lee, paragr. 43 et 49.]
  21. 261. Les organisations plaignantes fournissent les noms de 20 membres et dirigeants de la KCTU ou des syndicats qui y sont affiliés contre lesquels une procédure pénale était en cours au moment de la communication pour des accusations telles que: entrave spéciale aux obligations publiques ayant causé des lésions corporelles à des agents publics; destruction spéciale de biens publics; entrave spéciale aux obligations publiques; entrave à la circulation générale; non-respect d’un ordre de dispersion; et hébergement d’un criminel. Parmi eux, six personnes ont été mises en garde à vue en attendant l’issue de leurs procès ou appels. Ce groupe comprend M. Sang gyun Han, président de la KCTU; Mme Tae-sun Bae, directrice exécutive du département de l’organisation KCTU; M. Sung-deok Cho, vice-président du Syndicat coréen des travailleurs du service public et du transport (KPTU); M. Hyun-dae Lee, directeur du département de l’organisation KCTU; M. Jun-seon Park, directeur du département de l’organisation KCTU; et M. Jae-shik Lee, président de la division Truck Sol, Gumi Local de la KPTU. Ils ont été respectivement condamnés à cinq ans, trois ans, deux ans, une année et demie, et une année et dix mois d’emprisonnement. Toutes les accusations portaient sur la participation au rassemblement de masse du 14 novembre 2015. Certains d’entre eux attendaient leur appel au moment de la communication.
  22. 262. Les organisations plaignantes indiquent aussi que les trois membres et dirigeants syndicaux suivants ont également été inculpés en relation avec la manifestation du 14 novembre, mais qu’ils ont été libérés sous caution et attendaient le résultat de leur procès au moment de la communication: M. Jae-seung Byeon, membre de la KPTU; M. Jeong-uk Yang, président du comité d’urgence de la branche Ulsan Nam-ku du Syndicat coréen du personnel de l’administration publique (KGEU); et M. Ji-ho Yang, président de la branche régionale Jeju de la KCTU.
  23. 263. Enfin, les organisations plaignantes indiquent que les 11 membres et dirigeants syndicaux suivants ont été condamnés à des peines d’emprisonnement comprises entre quatre mois et un an et demi pour des accusations d’entrave aggravée aux obligations publiques, mais qu’ils ont été tous libérés, vu que l’exécution de leur peine a été suspendue: M. Jae-geun Choi, membre du Syndicat coréen des travailleurs de la métallurgie (KMWU); M. Young-chul Choi, membre de la Fédération coréenne des syndicats du secteur de la construction (KFCITU); M. Hyung chang Jang, directeur exécutif de département de la KFCITU; M. Young hyun Jeong, secrétaire général du Syndicat coréen des travailleurs de la construction (KPCWU), branche Ulsan; M. Beom-jin Kang, membre de la KFCITU; M. Ki hong Kim, membre de la KFCITU et ancien secrétaire de la branche Ulsan de la KPCWU; M. Kyung-do Kim, membre de la KMWU; M. Geum-ju Lee, membre de la KMWU; M. Nam-guk Lee, membre de la KMWU; M. Jeong-soo Nam, directeur exécutif du département de l’éducation et des publications de la KCTU; et M. Myung-hun Park, membre de la KFCITU.
  24. 264. Les organisations plaignantes ajoutent que, en plus des procédures lancées contre les 20 syndicalistes susmentionnés, un mandat d’arrêt pour participation à la manifestation du 14 novembre a été décerné à l’encontre de Mme Young-Joo Lee, secrétaire générale de la KCTU. Mme Lee s’est réfugiée au siège de la KCTU à Séoul à partir de décembre 2015 pour éviter la détention.
  25. 265. Les organisations plaignantes se réfèrent aux différents paragraphes du Recueil de décisions et de principes du Comité de la liberté syndicale pour étayer leurs points de vue: l’arrestation et la détention de dirigeants syndicaux pour participation à des activités syndicales pacifiques violent le principe de la liberté syndicale; l’objectif des manifestations signalé dans la plainte était légitime; le gouvernement a décidé unilatéralement que la grève d’avril 2015, qui concernait la réduction de la protection légale des travailleurs, était illégale, alors que cette décision aurait dû être prise par un tribunal indépendant; le recours excessif à la force au cours de la mobilisation de novembre 2015 représentait une violation évidente du droit à la liberté syndicale.
  26. 266. En outre, les organisations plaignantes se réfèrent au rapport du Rapporteur spécial des Nations Unies sur le droit de réunion pacifique et d’association sur sa mission en République de Corée (A/HRC/32/36/Add.2), soulignant qu’il critique les efforts du gouvernement pour interdire les manifestations publiques et arrêter et poursuivre des syndicalistes qui y participent. Un extrait du rapport est joint à la plainte.

B. Réponse du gouvernement

B. Réponse du gouvernement
  1. 267. Dans une communication reçue le 29 septembre 2017, le gouvernement transmet ses observations au sujet des allégations des organisations plaignantes. Le gouvernement introduit ses observations par une remarque générale selon laquelle il déploie des efforts cohérents pour améliorer les droits fondamentaux des travailleurs et que, depuis l’inauguration de la nouvelle administration en mai 2017, il redouble d’efforts pour réaliser une société qui respecte le travail.
  2. 268. En ce qui concerne les allégations relatives aux réformes de la loi et de la politique du travail réalisées unilatéralement, le gouvernement indique qu’un projet de mesures complètes destinées aux travailleurs non réguliers avait été élaboré fin 2014 et proposé à l’ESDC, en vue de son inscription à l’ordre du jour des discussions tripartites, et qu’une discussion officielle avait été demandée. L’intention du gouvernement n’était pas d’annoncer une politique définitive concernant les travailleurs non réguliers, mais d’élaborer une solution raisonnable pour améliorer rapidement le traitement des travailleurs non réguliers dans le cadre de discussions tripartites approfondies au sein du comité spécial de l’ESDC sur les réformes structurelles du marché du travail. Cependant, aucun accord n’a été conclu sur le projet de mesures en question en raison de la divergence de points de vue parmi les membres tripartites de l’ESDC.
  3. 269. Après la déclaration par la FKTU en janvier 2015 de la rupture des négociations au sein de l’ESDC, le gouvernement coréen annonça, le 9 avril 2015, sa position pour mener les réformes structurelles du marché du travail, déclarant qu’il ferait son travail dans le cadre de la législation et des allocations budgétaires sur les questions au sujet desquelles un consensus tripartite avait été réalisé à la suite des négociations menées pendant plus de trois mois, à compter de janvier 2015. Ces questions avaient inclus la promotion de l’emploi des jeunes, la réduction de la dualité du marché du travail, l’expansion du filet de sécurité sociale, la clarification de l’éventail des salaires ordinaires, la réduction des heures de travail, et un passage en douceur vers le relèvement de l’âge de la retraite. Le gouvernement avait également déclaré que, en ce qui concerne les questions sur lesquelles un consensus sur la direction politique de base avait été réalisé, mais dont quelques détails devaient encore être réglés, tels que la modification des lois sur la protection des travailleurs non réguliers, la discussion devait se poursuivre avec les parties prenantes et les partenaires tripartites. Enfin, en ce qui concerne les questions sur lesquelles les membres tripartites ne s’étaient manifestement pas entendus, telles que le processus et les normes (par exemple l’interprétation et les directives du gouvernement) de révision des règles de l’emploi en vue de restructurer les systèmes de salaires en rapport avec le relèvement de l’âge de la retraite à 60 ans, le gouvernement annonça qu’il voulait réunir diverses opinions de la part d’experts, des travailleurs et de la direction avant d’élaborer un plan d’action détaillé.
  4. 270. En outre, le gouvernement indique que les directives sur la gestion équitable des ressources humaines (signalées par les organisations plaignantes comme étant les Directives pour faciliter les règlements concernant le licenciement des travailleurs peu performants) sont un manuel de référence destiné aux entreprises afin de les aider à appliquer une gestion des ressources humaines basée sur la performance; elles prévoient une liste de vérification pour l’établissement d’un système de gestion équitable des ressources humaines basée sur la compétence et la performance au travail, applicable au processus global de gestion des ressources humaines et notamment à l’engagement, à l’évaluation, à la rémunération, à l’éducation et à la formation, au transfert et à la gestion de la retraite. En ce qui concerne les directives sur les règles relatives à l’emploi (signalées par les organisations plaignantes comme étant les Directives sur les modifications désavantageuses des règles de l’emploi), le gouvernement indique qu’elles représentent une révision supplémentaire des directives de 2009, qui avaient servi de référence à l’évaluation des règles de restructuration de l’emploi en relation avec les mesures de suivi, telles que la réorganisation du système de salaires conformément à l’application de l’âge obligatoire de la retraite à 60 ans en 2016. Cependant, ayant constaté que les directives sur la gestion équitable des ressources humaines et les règles relatives à l’emploi avaient été établies sans se baser sur un nombre suffisant d’opinions ou sur un consensus, et qu’elles représentaient une source de conflit entre les travailleurs et la direction, bloquant le dialogue social, le nouveau gouvernement a annoncé en septembre 2017 leur abrogation.
  5. 271. En ce qui concerne les directives sur les salaires/la négociation collective (signalées par les organisations plaignantes comme étant les directions et instructions sur les salaires et la négociation collective de 2016), le gouvernement indique qu’il s’agit d’une référence distribuée chaque année aux bureaux régionaux du travail et de l’emploi et destinée aux inspecteurs du travail, comportant généralement des conseils sur les relations du travail et la négociation salariale. La restructuration du système des salaires est une question convenue au cours des années de négociations tripartites et avait été incorporée aux directives non pas pour forcer le secteur privé à les adopter, mais dans une perspective promotionnelle.
  6. 272. En ce qui concerne le plan sur la révision (illégale ou déraisonnable) des conventions collectives, le gouvernement rappelle que la CSI, la KCTU et la FKTU ont soumis conjointement une plainte au comité, à laquelle le gouvernement avait répondu par ses observations communiquées en mars 2016, et que le comité avait adopté une recommandation en novembre 2016. Le gouvernement exprime à nouveau sa position sur la question comme suit. Les conventions collectives sont signées de manière autonome entre les travailleurs et la direction. Cependant, comme leurs effets normatifs n’entrent en vigueur qu’une fois qu’elles sont signées, leur contenu ne doit pas violer les dispositions obligatoires, telles que la Constitution et les lois concernées. Ainsi, lorsqu’une convention collective viole les dispositions obligatoires ou les droits d’une tierce partie, elle doit être révisée, et une telle révision doit être effectuée de manière autonome en principe par les travailleurs et la direction. Lorsqu’une telle révision ne se produit pas de manière autonome et si, par exemple, les droits d’une partie des travailleurs, de la direction, ou des demandeurs d’emploi étaient violés de manière inéquitable, les autorités peuvent ordonner une révision conformément à l’article 31(3) de la TULRAA. Selon ce principe, le gouvernement a établi en avril 2016, à la suite d’une décision de la Commission des relations du travail, un ordre de révision portant sur des violations évidentes des lois, telles que les traitements préférentiels et spéciaux en matière de recrutement destinés aux enfants des membres syndicaux et la fourniture d’un soutien financier pour couvrir les cotisations syndicales et les dépenses de fonctionnement. Le gouvernement a estimé que la fourniture de facilités aux anciens dirigeants et aux dirigeants syndicaux actuels est une pratique du travail inéquitable qui enfreint l’indépendance syndicale, en violation de l’article 81(4) de la TULRAA. Cette position du gouvernement est soutenue par un grand nombre de décisions passées de justice. Le gouvernement cependant conteste l’allégation des organisations plaignantes selon laquelle il aurait considéré comme illégale la clause de la convention collective qui reconnaît comme jours de travail les jours pendant lesquels les membres du comité sont engagés dans la négociation collective, et indique qu’il n’a jamais pris une telle décision.
  7. 273. En outre, le gouvernement admet avoir établi une directive pour le règlement autonome des conventions collectives déraisonnables (mais non illégales). La directive prévoit que le consentement du syndicat sur les questions relatives au personnel et à la direction ne doit pas être considéré comme une violation des clauses obligatoires et qu’il ne doit donc pas faire l’objet d’un ordre de révision, mais qu’une telle prescription est susceptible de perturber le fonctionnement normal de l’entreprise ou la création possible d’emplois, et qu’il est donc préférable qu’elle soit traitée de manière autonome. Le gouvernement indique aussi que, compte tenu de la position du BIT selon laquelle, lorsqu’une convention collective est révisée, elle doit l’être par les travailleurs et la direction de manière autonome, le gouvernement a mis fin à la directive administrative concernant les conventions collectives déraisonnables à partir du 31 mai 2017. Par ailleurs, il souligne qu’il n’interviendra plus dans les conventions collectives déraisonnables concernant les conventions entre les travailleurs et la direction, et adhérera au principe du règlement autonome.
  8. 274. En ce qui concerne la promotion du système de salaires basé sur la performance, le gouvernement indique que, le 28 janvier 2016, il a publié «une recommandation pour un système de salaires basé sur la performance dans les institutions publiques» en tant que partie d’une solution pour reconstruire le système des salaires et améliorer la productivité et l’efficacité dans les institutions publiques. Cette recommandation étend la couverture du système de salaires basé sur la performance de la direction au personnel et met en place des incitations et des sanctions en vue de développer l’introduction du système. La recommandation établit des principes de base visant à assurer: l’équité des évaluations de la performance, à savoir l’augmentation des indicateurs quantitatifs lors de l’établissement des indicateurs d’évaluation; la participation du personnel à l’établissement des indicateurs; la participation d’experts externes à l’évaluation; et une procédure de recours concernant les résultats d’une évaluation.
  9. 275. En outre, le gouvernement indique que, en juin 2016, la totalité des 120 institutions publiques et organisations paraétatiques ont introduit le système élargi du salaire basé sur la performance. Cependant, quelques institutions l’ont fait sans un accord entre les travailleurs et la direction, ce qui a provoqué des conflits entre les travailleurs et la direction, et notamment des conflits juridiques. Dans le but de résoudre rapidement de tels conflits entre les travailleurs et la direction découlant du processus d’élargissement du système, le gouvernement a élaboré, le 16 juin 2017, «des mesures de suivi relatives au système de salaires basé sur la performance dans les institutions publiques». Les mesures comprenaient: 1) la suppression de plusieurs éléments de la recommandation originale, tels que le délai pour l’introduction du système de rémunération basé sur la performance et la mesure minimale dans laquelle le système de rémunération basé sur la performance devrait être introduit; 2) la suppression des sanctions telles que le gel des dépenses du personnel en cas de non-conformité avec les directives et la non-adoption du système de rémunération basé sur la performance; et 3) la suppression de la question de savoir si la rémunération basée sur la performance a été introduite ou non en tant qu’indicateur dans le système d’évaluation de la direction pour les institutions publiques. Le gouvernement déclare que, à la suite de l’introduction des mesures de suivi, les institutions publiques sont actuellement en mesure de restructurer leur système de salaires de manière autonome sur la base d’un accord entre les travailleurs et la direction, et que les institutions qui ont introduit le système sans accord entre les travailleurs et la direction sont en train de résoudre les conflits en retournant à leur système original de salaires et en abandonnant les actions en justice.
  10. 276. En ce qui concerne le contexte des actions de protestation signalées dans la plainte, le gouvernement indique que, après la déclaration par la FKTU d’une rupture de fait en janvier 2015 du compromis tripartite ambitieux et l’annonce par le gouvernement de sa position sur la direction des réformes structurelles du marché du travail en avril 2015, les organisations plaignantes ont annoncé une grève générale pour s’opposer à la proposition du gouvernement d’engager une discussion à ce sujet. En réponse à l’allégation selon laquelle le gouvernement a jugé illégale cette grève avant même qu’elle n’ait lieu, il est indiqué que le gouvernement a la responsabilité de conseiller aussi bien les travailleurs que la direction à respecter la loi en vue d’empêcher les actes illégaux. La déclaration de l’ancien ministre du Travail sur la question de la légitimité de la grève générale d’avril 2015 était destinée à informer les parties concernées de la possibilité que leurs actions puissent être illégales et à demander le respect de la position actuelle de la Cour suprême. Cependant, compte tenu de la préoccupation des syndicats de travailleurs selon laquelle la directive antérieure du gouvernement était susceptible d’affecter les droits des travailleurs à une action collective, le nouveau gouvernement mettra l’accent sur la prévention des conflits entre les travailleurs et la direction et sur la résolution des différends grâce à un engagement actif, dans le cadre notamment de directives applicables sur place et de l’inspection sur les lieux de travail et du soutien apporté au dialogue entre les travailleurs et la direction.
  11. 277. En ce qui concerne les mesures prises le 29 avril 2015 contre M. Han Sang-gyun, président de la KCTU, et d’autres personnes, le gouvernement indique que la KEF accuse M. Han et d’autres responsables syndicaux d’entrave au travail en relation avec la grève générale du 24 avril. M. Han a été poursuivi pour plusieurs infractions perpétrées au cours de 11 réunions violentes entre avril et novembre 2015, pour notamment le chef d’accusation de lésions corporelles par entrave spéciale aux obligations publiques, trois chefs d’accusation d’entrave spéciale aux obligations publiques, deux chefs d’accusation pour entrave spéciale aux biens publics, sept chefs d’accusation pour entrave générale à la circulation, cinq chefs d’accusation pour non-application d’un ordre de dispersion, et quatre chefs d’accusation pour participation à des réunions menées dans des lieux interdits. En particulier, au cours du rassemblement de mai 2015, M. Han a agressé, avec d’autres participants au rassemblement, des officiers de police. La police a décidé de mener une enquête et a exigé la présence de M. Han, ce qu’il a refusé. De ce fait, un mandat d’arrêt a été décerné contre lui; suite aux délibérations du tribunal, la gravité des faits a été établie et un mandat d’arrêt a été décerné. Cependant, lorsque le mandat d’arrêt a été décerné, M. Han s’est réfugié dans le temple Jogye dans lequel il a planifié et organisé plusieurs réunions illégales et violentes, notamment celle qui s’est déroulée le 14 novembre 2015.
  12. 278. Au cours du rassemblement du 14 novembre, plusieurs participants ont occupé de manière illégale les rues principales du centre-ville de Séoul, telles que Sejong-daero et Anguk-dong Rotary dans les deux directions, et ont agressé des officiers de police qui tentaient de les arrêter, utilisant des tuyaux de fer et des bâtons de bois. Ils ont également engagé des actions violentes comme celles de tirer les barricades de bus avec les cordes, de détruire les bus avec des marteaux et des tuyaux de fer, et de tenter de mettre le feu aux bus de la police, ce qui a provoqué des préjudices graves, 108 officiers de police ayant subi des lésions corporelles et 43 bus de la police ayant été endommagés. Face à de tels actes de violence, la police a appliqué la loi de manière légitime en bloquant la marche illégale et en arrêtant les personnes qui avaient commis les attaques, en vue de maintenir l’ordre public. Au cours de ce processus, la police a utilisé le moins possible les camions à gicleurs (de l’eau mélangée à du gaz lacrymogène), uniquement lorsque c’était nécessaire et en stricte conformité avec les prescriptions et les procédures prévues dans la Constitution et d’autres textes législatifs de la République de Corée. D’ailleurs, la réponse de la police a été considérée comme légitime par les tribunaux coréens. Les responsables syndicaux, notamment M. Han, ont été poursuivis pour avoir organisé et mené des actes en violation de la loi au cours du rassemblement.
  13. 279. En ce qui concerne l’intervention de la police au cours du rassemblement du 14 novembre 2015 et le décès d’un manifestant, auxquels se réfèrent les organisations plaignantes, le gouvernement indique aussi que, en dépit des efforts de la police pour remplir ses obligations de la meilleure façon possible, M. Baek Nam-gi, un fermier, a été sérieusement blessé et est mort le 25 septembre 2016. Une inspection interne a été menée au sein de la police, et le commissaire général, Lee Cheol-seong, s’est excusé officiellement du décès de M. Baek; dès le mois d’août 2017, le commissaire général a voulu prendre contact avec la famille endeuillée pour lui présenter personnellement ses excuses. En ce qui concerne le décès de M. Baek, un rapport a été soumis au ministère public et une enquête est menée à ce sujet; les mesures nécessaires seront prises selon les résultats de l’enquête. Cependant, de l’avis du gouvernement, le décès malheureux d’un citoyen ordinaire ne relève pas de la compétence de l’OIT.
  14. 280. Le comité rappelle que le paragraphe 133 du Recueil de décisions et de principes du Comité de la liberté syndicale du Conseil d’administration du BIT prévoit que les travailleurs doivent pouvoir jouir du droit de manifestation «pacifique» pour défendre «leurs intérêts professionnels», mais n’aborde pas la question des manifestations illégales ou violentes et ajoute que quiconque commet un crime devra être sanctionné en conséquence, ce qui est un élément fondamental de la règle de droit. Le gouvernement garantit aux syndicats l’exercice légal et pacifique de leurs droits qui sont protégés de la meilleure façon possible. Le gouvernement souligne que l’inculpation ne constituait manifestement pas une tentative de restreindre les activités syndicales, étant donné que M. Han Sang-Kyun et d’autres responsables syndicaux ont été inculpés pour avoir agressé des officiers de police et planifié une action illégale ayant entraîné des actes de violence illégaux. Il indique aussi que la Cour suprême a condamné M. Han, le 31 mai 2017 à trois ans d’emprisonnement et à une amende 500 000 won (environ 450 dollars des Etats-Unis) non pas pour ses activités syndicales mais pour violation de la législation en vigueur. Pour ce qui est de l’issue du procès des 20 autres responsables syndicaux mentionnés par les organisations plaignantes, le gouvernement fournit le tableau suivant:
    • NoNomAffiliationDate de l’arrestationDécision du tribunalConfirmation
      1Han Sang-gyunKCTU13 déc. 201513 déc. 2016, second procès31 mai 2017
      2BaeKCTU15 janv. 2016(3 ans de prison, amende de 500 000 won)31 mai 2017
      JoSyndicat coréen des travailleurs du service public et du transport (KPTU)14 janv. 201613 déc. 2016, second procès18 juil. 2017
      4LeeKCTU19 fév. 2016(18 mois de prison, amende de 300 000 won)5 janv. 2017
      5ParkKCTU24 déc. 201513 déc. 2016, second procès18 août 2017
      6LeeKPTU25 déc. 2015(Peine de 18 mois de prison suspendue pendant 2 ans)29 juil. 2016
      7ByeonKPTU21 déc. 201513 déc. 2016, second procès4 nov. 2016
      8YangSyndicat coréen du personnel de l’administration publique (KGEU)18 nov. 2015(18 mois de prison, amende de 300 000 won)3 juin 2016
      9YangKCTU19 janv. 201614 oct. 2016, premier procès7 avril 2017
      10ChoiSyndicat coréen des travailleurs du métal (KMWU)9 janv. 2016(1 an de prison)30 déc. 2016
      11ChoiFédération des syndicats ouvriers de la construction (KFCITU)24 déc. 201521 juil. 2016, second procès23 juin 2016
      12JangKFCITU19 déc. 2015(10 mois de prison)2 sept. 2016
      13JeongSyndicat coréen des travailleurs de la construction de centrales (KPCWU)21 janv. 201626 mai 2016, premier procès3 sept. 2016
      14GangKFCITU18 nov. 2015(Peine de 1 an de prison suspendue pendant 2 ans)4 juin 2016
      15KimKFCITU31 déc. 201528 janv. 2016, premier procès23 juin 2016
      16KimKMWU20 nov. 2015(Amende de 6 millions de won)9 juil. 2016
      17LeeKMWU8 janv. 201624 août 2016, premier procès24 déc. 2016
      18LeeKMWU7 déc. 2015(Peine de 1 an de prison suspendue pendant 2 ans)4 juin 2016
      19Nam KCTU7 janv. 201630 mars 2016, premier procès19 août 2016
      20ParkKFCITU18 nov. 2015(peine de 1 an de prison suspendue pendant 2 ans)21 juil. 2016
      21LeeKCTUDéc. 2015: mandat d’arrêt décerné
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  15. 281. Le gouvernement fournit quelques indications au sujet du rapport du Rapporteur spécial des Nations Unies sur le droit de réunion pacifique et d’association que les organisations plaignantes ont cité en partie dans leurs allégations. Le gouvernement déclare que le rapporteur spécial a examiné la situation globale des droits de liberté de réunion et d’association et a présenté son avis à ce sujet. Cependant, selon le gouvernement, les questions couvertes par ce rapport dépassent les compétences du Comité de la liberté syndicale du Conseil d’administration du BIT, directement liées à la protection des droits fondamentaux au travail. Le gouvernement est d’avis que, conformément au paragraphe 135 du Recueil de décisions et de principes du Comité de la liberté syndicale, les actions de contestation sont protégées par les principes de la liberté syndicale uniquement lorsque ces actions sont planifiées par des organisations syndicales ou peuvent être assimilées à des actions syndicales légitimes au sens de l’article 3 de la convention no 87. De ce fait, la demande des organisations plaignantes d’un examen par le Comité de la liberté syndicale du Conseil d’administration du BIT du rapport du Rapporteur spécial des Nations Unies ne relève pas de la compétence du BIT.
  16. 282. En ce qui concerne la situation de la liberté des réunions pacifiques et des associations en République de Corée, le gouvernement indique qu’il garantit à tous les individus le droit de réunion et d’association conformément à la Constitution coréenne et aux normes internationales sur les droits de l’homme. En particulier, la liberté de réunion est prévue dans la loi sur les réunions et les manifestations, selon laquelle quiconque désire convoquer une réunion peut le faire après avoir soumis un résumé de la réunion à la police. Le pourcentage des réunions qui n’ont pas été autorisées ne représente que 0,24 pour cent en 2011 et 0,15 pour cent en 2015. Ces faibles taux montrent que les allégations selon lesquelles le gouvernement n’assure pas la liberté de réunion ne sont pas fondées. En outre, même dans le cas de réunions non préalablement communiquées, c’est seulement lorsque des actes illégaux tels que la violence se produisent et menacent manifestement et directement la paix et l’ordre public qu’elles peuvent faire l’objet d’un ordre de dispersion, conformément aux précédents de la Cour suprême. Au cours de la période comprise entre la fin de 2016 et avril 2017, durant la veille aux chandelles qui s’est déroulée partout dans le pays, la police a réagi conformément à la législation. Plus d’un million de personnes ont participé au rassemblement, mais personne n’a été arrêté et aucune violence ne s’est produite parmi les participants. Cela peut être facilement vérifié à partir des nombreuses sources de médias. D’un autre côté, au cours de la réunion du 14 novembre 2015, le rassemblement le plus violent de tous ceux auxquels a participé M. Han, environ 68 000 participants ne se sont pas conformés à l’ordre de dispersion de la police qui a été répété 15 fois; les manifestants ont agressé les officiers de police avec des tuyaux de fer et des bâtons de bois et ont tiré les bus de la police avec des cordes. Pour répondre à un tel rassemblement violent et illégal, la police a mobilisé environ 20 000 officiers et mis en place des canons à eau et 580 appareils de spray au poivre. Ce rassemblement a causé à lui seul des lésions corporelles à 108 officiers de police, dont deux officiers grièvement blessés, endommagé 43 bus de la police et 138 appareils, ce qui en fait l’une des manifestations les plus violentes aux cours des dernières années, reconnue comme telle également dans une décision de justice. Enfin, le gouvernement déclare que l’exercice des droits prévus par les normes internationales sur les droits de l’homme peut être restreint pour des motifs liés à la sécurité nationale, à l’ordre public, ou pour la protection des droits des tierces personnes, et que les rassemblements violents ne relèvent pas de l’article 21 du Pacte international relatif aux droits économiques, sociaux et culturels, qui protège le droit de réunion pacifique.
  17. 283. Le gouvernement conclut ses observations en indiquant que les allégations des organisations plaignantes au sujet des «réformes du travail mises en application de manière unilatérale» sont exagérées, car le gouvernement a uniquement proposé un guide destiné aux discussions tripartites, en vue de résoudre la crise provoquée par la polarisation du marché du travail et le relèvement de l’âge de la retraite. Cependant, les propositions à ce propos sont actuellement soit suspendues, soit en cours de révision, sur la base de diverses opinions exprimées par les parties prenantes et acceptées par le gouvernement. Le gouvernement réitère aussi que les mesures légales prises contre le président de la KCTU, M. Han Sang-Gyun, et d’autres membres syndicaux ne sont aucunement liées à leurs activités syndicales, mais représentent une réponse à la violation des lois en vigueur au cours de rassemblements illégaux et violents.

C. Conclusions du comité

C. Conclusions du comité
  1. 284. Le comité note que ce cas concerne des allégations d’adoption de directives gouvernementales affectant le caractère autonome de négociations collectives sans consultation avec les partenaires sociaux; la qualification d’illégale attribuée à une grève en raison de son objectif qui est de s’opposer à la politique du gouvernement; des accusations et des poursuites pénales à l’encontre d’un dirigeant syndical pour l’organisation de la grève et la participation à des manifestations; le recours à une force de police excessive contre des manifestants pacifiques ayant entraîné des lésions corporelles; et l’arrestation et la poursuite de membres et de dirigeants syndicaux en rapport avec les manifestations.

    Les directives gouvernementales et le caractère autonome des négociations collectives

  1. 285. Le comité prend note des allégations relatives au processus de publication, à la teneur et à l’impact potentiel des Directives destinées à assouplir la réglementation sur le licenciement des travailleurs peu performants et des Directives sur les modifications défavorables des règles de l’emploi. Selon les organisations plaignantes, les directives susmentionnées couvrent des questions politiques fortement controversées au sujet desquelles aucun accord tripartite préalable n’a pu être réalisé. Les organisations plaignantes affirment que le gouvernement a soumis un projet de loi au Parlement, qui n’a pas été adopté en raison de l’opposition importante et de la protestation d’une partie des syndicats. Les organisations plaignantes allèguent que le gouvernement a élaboré et publié à la hâte et sans aucune consultation tripartite préalable des directives qui recommandent la révision du système de salaires et facilitent les licenciements en modifiant les règles relatives au travail et aux conventions collectives. Les organisations plaignantes soulignent que, bien que les directives ne soient pas juridiquement contraignantes, elles risquent d’avoir un large impact sur le marché du travail vu que le ministère du Travail et de l’Emploi les utilise pour fournir des conseils aux employeurs.
  2. 286. Le comité prend note de la préoccupation des organisations plaignantes selon laquelle les directives sur le licenciement portent atteinte aux négociations entre les travailleurs et la direction et provoquent un déséquilibre dans le pouvoir de négociation entre les parties, car elles se prononcent expressément en faveur de l’intégration des changements dans les conventions collectives et les règles de l’emploi, de manière à faciliter les licenciements, ce qui est préjudiciable aux travailleurs. Les organisations plaignantes affirment que, en dépit du fait qu’elles violent la législation coréenne ainsi que les normes de l’OIT sur la liberté syndicale et le droit de négociation collective, les directives sur le licenciement seront certainement utilisées contre les syndicats dans le cadre de la négociation. En outre, le comité note, d’après les observations du gouvernement, que les directives, que les organisations syndicales qualifient de directives sur le licenciement, sont en fait des directives sur la gestion équitable des ressources humaines, fournissant aux entreprises une liste de vérification destinée à établir une gestion équitable des ressources humaines sur la base des compétences et de la performance.
  3. 287. En ce qui concerne les Directives sur les modifications défavorables des règles de l’emploi, le comité prend note de l’allégation selon laquelle ces directives autorisent les entreprises qui ne sont pas en mesure d’obtenir le consentement de la majorité de leurs travailleurs à modifier les règles de travail en vue de la modification du système de salaires. Selon les organisations plaignantes, ces directives recommandent fermement que les travailleurs dont l’âge est proche de celui de la retraite subissent une réduction de salaire en vue de favoriser l’emploi des jeunes; et, conformément à un nouveau plan du gouvernement, les autorités offriront des incitations à un certain nombre d’entreprises pour qu’elles adoptent un système de plafonnement des salaires. Les organisations plaignantes estiment que, en recommandant fermement que les travailleurs acceptent de telles modifications, le gouvernement interfère dans les négociations salariales. Selon les organisations plaignantes, ces directives sont également susceptibles d’être utilisées pour porter atteinte aux échelles de salaires déjà négociées entre les syndicats et les employeurs. Le comité note que le gouvernement se réfère aux mêmes directives comme étant les directives sur les règles de l’emploi, et déclare qu’elles représentent une référence pour l’évaluation de la restructuration des règles de l’emploi, en particulier au sujet de mesures telles que le relèvement à 60 ans en 2016 de l’âge de la retraite.
  4. 288. En ce qui concerne l’impact des directives susmentionnées sur la négociation collective et la question de savoir si elles représentent une ingérence du gouvernement dans la négociation collective, le comité rappelle qu’une intervention des autorités publiques visant essentiellement à garantir que les parties qui négocient subordonnent leurs intérêts à la politique économique nationale du gouvernement, que celle-ci recueille ou non leur agrément, n’est pas compatible avec les principes généralement acceptés selon lesquels les organisations de travailleurs et d’employeurs devraient avoir le droit d’organiser librement leurs activités et de formuler leurs programmes, les autorités publiques devant s’abstenir de toute intervention de nature à limiter ce droit ou à en entraver l’exercice légal, et la législation nationale ne devant pas être de nature, ou ne devant pas être appliquée de façon à compromettre la jouissance de ce droit. [Voir Recueil de décisions et de principes du Comité de la liberté syndicale, cinquième édition, 2006, paragr. 1005.] Bien qu’il puisse être nécessaire d’aviser les parties au sujet des considérations contraignantes de l’intérêt économique national, cela exige en premier lieu que les objectifs qui doivent être reconnus comme étant dans l’intérêt général soient largement discutés par l’ensemble des parties à l’échelle nationale.
  5. 289. Le comité note, selon les organisations plaignantes, que la publication des directives le 22 janvier 2016 n’a pas été précédée de discussions tripartites, et constate qu’une telle mesure unilatérale, même non contraignante, pourrait sembler être destinée à influencer le processus et l’issue de la négociation collective, altérant de ce fait sa nature libre et volontaire. Le comité note cependant que, d’après l’indication du gouvernement, tout en constatant que les deux directives ont été établies sans avoir recueilli un nombre important d’opinions ou sans se baser sur un consensus et sont devenues une source de conflits entre les travailleurs et la direction et un obstacle au dialogue social, la nouvelle administration a annoncé en septembre 2017 son intention de les abroger. Le comité accueille favorablement cette décision et exprime le ferme espoir que toutes les futures directives seront élaborées en pleine consultation avec les organisations représentatives concernées des travailleurs et des employeurs.
  6. 290. En ce qui concerne la généralisation du système de salaires basé sur la performance dans les institutions publiques, notamment dans les entreprises publiques, le comité prend note de l’allégation selon laquelle le gouvernement a élaboré unilatéralement une recommandation à cet effet et que des incitations financières ont été prévues pour accélérer les mesures à ce propos. Les organisations plaignantes allèguent que les mesures prises par le gouvernement pour introduire le nouveau système de salaires ont déjà provoqué une violation de l’autonomie des travailleurs et de la direction à la négociation. En outre, le comité prend note de la réponse du gouvernement aux allégations confirmant que plusieurs institutions ont introduit le nouveau système de salaires sans accord entre les travailleurs et la direction, ce qui a entraîné des conflits, et notamment des conflits juridiques. Le comité note que pour remédier à cette situation, le gouvernement a pris, en juin 2017, des mesures de suivi supprimant les incitations et les pénalités prévues dans la recommandation de janvier 2016 et que, à la suite de ces mesures, les institutions qui avaient introduit le nouveau système de salaires sans l’accord des travailleurs et de la direction sont en train de résoudre les conflits en retournant à leur système original de salaires. Le comité accueille favorablement la suppression par le gouvernement des sanctions et des incitations intrusives, en vue de permettre aux parties de restructurer leurs systèmes de salaires de manière indépendante sur la base d’accords librement établis entre les travailleurs et la direction; il note avec satisfaction que les mesures de suivi ont déjà produit des effets bénéfiques en ce qui concerne la résolution des conflits survenus depuis la recommandation de janvier 2016.
  7. 291. Le comité note, d’après l’indication des organisations plaignantes, que le gouvernement a tenté d’étendre le système de salaires basé sur la performance au secteur privé, en particulier par l’intermédiaire de l’établissement des Directions et des Instructions sur les salaires et la négociation collective publiées le 23 mars 2016, prévoyant que les entreprises devraient être encouragées à réformer le système des salaires sur la base des compétences et de la performance. Tout en accueillant favorablement l’observation du gouvernement d’après laquelle la restructuration du système de salaires a été convenue après des années de négociations tripartites et n’a été incorporée dans les directives que dans une perspective promotionnelle, le comité rappelle que les salaires sont un composant fondamental des modalités et conditions de l’emploi, lequel doit être soumis à la négociation collective, et qu’il s’attend à ce que le gouvernement assure l’autonomie des parties dans le processus de négociation collective.
  8. 292. Le comité note avec préoccupation l’allégation selon laquelle, depuis la déclaration du 25 avril 2016 de l’ancienne Présidente Park, des dirigeants syndicaux ont été arrêtés et des travailleurs contraints de consentir au nouveau système de salaires. Il note cependant que les organisations plaignantes ne fournissent aucun détail spécifique quant à l’identité des travailleurs et des dirigeants syndicaux qui ont été prétendument arrêtés ou contraints, et qu’elles ne spécifient pas non plus dans quel contexte de tels actes se sont produits, s’il s’agit du cadre des consultations ou de la négociation collective ou dans tout autre contexte. Compte tenu de l’absence de détails supplémentaires à ce propos, le comité ne peut que rappeler que les droits des organisations de travailleurs et d’employeurs ne peuvent s’exercer que dans un climat exempt de violence, de pressions ou menaces de toute sorte à l’encontre des dirigeants et des membres de ces organisations, et qu’il appartient aux gouvernements de garantir le respect de ce principe. [Voir Recueil, op. cit., paragr. 44.] Il ne poursuivra pas l’examen de cette allégation.
  9. 293. En ce qui concerne les mesures prises par le gouvernement au sujet de la révision des conventions collectives qualifiées d’arbitraires ou de déraisonnables, le comité note que le gouvernement rejette l’allégation des organisations plaignantes selon laquelle il aurait qualifié d’illégales les dispositions de la convention collective qui reconnaissent comme jours de travail les jours pendant lesquels les membres du comité de négociation sont engagés dans la négociation collective, et indique qu’il n’a jamais pris une telle décision. Le comité note par ailleurs, selon l’indication du gouvernement, que celui-ci a mis fin à la directive administrative sur les conventions collectives déraisonnables à partir du 31 mai 2017, compte tenu de la position du BIT selon laquelle la révision des conventions collectives doit être effectuée par les travailleurs et la direction de manière autonome. Tout en notant que les allégations et les arguments présentés pour soutenir cette position sont étroitement liés à ceux figurant dans un autre cas concernant la République de Corée [voir 380e rapport, cas no 3138, paragr. 349-372] et rappelant que, dans ce cas, il avait regretté que le gouvernement ait apparemment proposé des incitations en vue de l’introduction de changements dans les conventions collectives dans des domaines qui devraient relever de l’autonomie des partenaires à la négociation [voir 380e rapport, paragr. 371], le comité accueille favorablement la décision du gouvernement de mettre fin à la directive visant à assurer une révision autonome des conventions collectives qualifiées de déraisonnables.

    Ingérence dans l’exercice de grèves et manifestations

  1. 294. En ce qui concerne la grève générale déclenchée le 14 avril 2015, le comité note que, selon l’allégation, aussi bien la Fédération coréenne des employeurs que le ministre du Travail avaient déclaré la grève comme illégale au motif que son objectif était de s’opposer aux politiques du gouvernement. Le comité rappelle que les grèves de nature purement politiques n’entrent pas dans le champ d’application de la liberté syndicale. Il note l’observation du gouvernement d’après laquelle la déclaration de l’ancien ministre sur la légitimité de la grève générale a été formulée en vue d’informer les parties du fait que l’action pourrait être illégale et d’exiger le respect de la position pertinente de la Cour suprême. Le comité note cependant que, d’après la dernière déclaration du gouvernement, compte tenu de la préoccupation des syndicats de travailleurs selon laquelle ce type de «directive préalable» est susceptible d’affecter le droit des travailleurs à l’action collective, le nouveau gouvernement mettra l’accent sur la prévention des conflits entre les travailleurs et l’administration. A cet égard, le comité rappelle à nouveau que la responsabilité de déclarer une grève illégale ne devrait pas appartenir au gouvernement, mais à un organe indépendant et impartial [voir 378e rapport, cas no 3032, paragr. 392] et que les organisations chargées de défendre les intérêts socio-économiques et professionnels des travailleurs devraient en principe pouvoir utiliser la grève pour appuyer leur position dans la recherche de solutions aux problèmes posés par les grandes orientations de politique économique et sociale, qui ont des répercussions immédiates pour leurs membres, et plus généralement pour les travailleurs, notamment en matière d’emploi, de protection sociale et de niveau de vie. [Voir Recueil, op. cit., paragr. 527.] Tout en notant avec intérêt que le gouvernement commence à réagir favorablement aux préoccupations des organisations de travailleurs sur l’impact éventuel des déclarations officielles sur la légitimité des grèves par rapport à leur droit à l’action collective et à son importance croissante pour la prévention des conflits de travail, le comité veut croire que le gouvernement prendra les mesures nécessaires pour veiller à ce que le droit de grève des travailleurs pour protester contre les politiques sociales et économiques qui affectent leurs intérêts soit dûment respecté.
  2. 295. S’agissant de l’allégation, confirmée par le gouvernement, selon laquelle, après la grève, la KEF a accusé M. Han, président de la KCTU, d’entrave au travail et que la police l’a convoqué pour ce motif, le comité se réfère à sa recommandation dans le cas no 1865 concernant la République de Corée
  3. 296. Le comité note, selon les allégations, que la police a publié une note d’interdiction des réunions et des manifestations préalablement à la mobilisation de masse du 14 novembre 2015 et que, au cours de cette manifestation, elle a utilisé des niveaux records d’eau et de gaz lacrymogène contre les manifestants et que des douzaines de personnes ont été blessées par les canons à eau. En outre, le comité note que, en réponse à ces allégations, le gouvernement a déclaré que plusieurs participants au rassemblement du 14 novembre ont bloqué toutes les rues principales du centre-ville de Séoul et se sont engagés dans des actes violents qui ont causé des lésions corporelles à 108 officiers de police et endommagé 43 bus de la police. Selon le gouvernement, l’intervention de la police pour bloquer la marche illégale et arrêter les personnes qui se livraient à des agressions relevait de l’application légitime de la loi en vue d’assurer la protection de l’ordre public. Les camions à gicleurs n’ont été utilisés qu’en cas de nécessité et de manière stricte, conformément aux prescriptions constitutionnelles et légales, et la réponse de la police a été jugée légitime par la Cour constitutionnelle.
  4. 297. Le comité rappelle que, si le droit de tenir de réunions syndicales est un élément essentiel de la liberté syndicale, les organisations sont toutefois tenues de respecter les dispositions générales relatives aux réunions publiques. Les travailleurs et leurs organisations sont tenus, comme les autres personnes ou collectivités organisées, de respecter la légalité. Le comité rappelle aussi que les travailleurs doivent pouvoir jouir du droit de manifestation pacifique pour défendre leurs intérêts professionnels et que les autorités ne devraient avoir recours à la force publique que dans des situations où l’ordre public serait sérieusement menacé. L’intervention de la force publique devrait rester proportionnée à la menace pour l’ordre public qu’il convient de contrôler, et les gouvernements devraient prendre des dispositions pour que les autorités compétentes reçoivent des instructions appropriées en vue d’éliminer le danger qu’impliquent les excès de violence lorsqu’il s’agit de contrôler des manifestations qui pourraient troubler l’ordre public. [Voir Recueil, op. cit., paragr. 133 et 140.] Le comité regrette les allégations de recours à la force aussi bien par les manifestants que par la police. Il note, d’après l’indication du gouvernement, qu’une inspection interne a été menée au sein de la police concernant le décès d’un manifestant, survenu des suites de ses blessures provoquées par l’intervention de la police; que le commissaire général s’est excusé officiellement de ce décès et qu’une enquête est menée par le ministère public; et que les mesures nécessaires seront prises selon l’issue de l’enquête. Le comité veut croire que, dans le cas où le résultat de l’enquête révèle des lacunes dans la gestion de la manifestation au sujet des principes susmentionnés, le gouvernement prendra toutes les mesures nécessaires de manière que les victimes du recours excessif à la force aient accès à des moyens adéquats de réparation et que, à l’avenir, l’intervention des forces de l’ordre soit menée en plein respect des principes de proportionnalité et de responsabilité. Le comité prie le gouvernement de le tenir informé de l’issue de l’enquête et de toutes mesures prises en conséquence.

    Arrestation et détention de syndicalistes et dirigeants syndicaux

  1. 298. En outre, le comité prend note de l’allégation selon laquelle, à la suite de la manifestation du 14 novembre, la police a soumis les manifestants à une enquête approfondie. Les organisations plaignantes allèguent que, au cours de ce processus, 532 membres de la KCTU ont été convoqués, parmi lesquels 20 personnes ont été arrêtées et par la suite impliquées. En ce qui concerne en particulier M. Han, le comité note, comme l’indiquent les organisations plaignantes, qu’il a été condamné à cinq ans d’emprisonnement et à 500 000 won d’amende par le tribunal de première instance et que, finalement, comme l’indique le gouvernement, la Cour suprême a confirmé le 31 mai 2017 la décision réduite de la cour d’appel le condamnant à trois ans et demi d’emprisonnement en plus de l’amende, et qu’il purge actuellement sa peine.
  2. 299. Le comité note que la totalité des 20 membres de la KCTU inculpés ont été arrêtés et détenus pour de plus ou moins longues périodes. Compte tenu des informations soumises par le gouvernement, le comité note que six membres et responsables de la KCTU (notamment M. Han) ont vu leur peine de prison, se situant entre dix mois et trois ans, confirmée; 13 ont été condamnés à différentes périodes d’emprisonnement, comprises entre quatre et dix-huit mois, mais que l’exécution de leur peine a été suspendue pour deux ou trois ans, et qu’une seule personne a été condamnée à payer une amende. Selon les informations soumises par le gouvernement, toutes les décisions sont aujourd’hui confirmées. Le comité veut croire que les 13 personnes dont la peine d’emprisonnement a été suspendue et la personne condamnée à payer une amende sont aujourd’hui libres. Cependant, le gouvernement n’indique pas la situation des cinq syndicalistes – autres que M. Han – qui avaient été condamnés à la prison, mais dont les peines n’avaient pas été suspendues. Le comité prie en conséquence le gouvernement d’indiquer si Mme Tae-sun Bae et MM. Sung-deok Cho, Hyun-dae Lee, Jun seon Park et Jae-shik Lee ont été libérés.
  3. 300. Le comité rappelle que nul ne devrait être privé de liberté ni faire l’objet de sanctions pénales pour le simple fait d’avoir organisé une grève, des réunions ou des cortèges pacifiques ou d’y avoir participé [voir 346e rapport, cas no 2323, paragr. 1122] et que, dans les cas impliquant l’arrestation, la détention ou la condamnation de dirigeants syndicaux, les intéressés devraient bénéficier d’une présomption d’innocence. Dans le cas examiné, M. Han a été arrêté, inculpé et condamné pour organisation de plusieurs manifestations syndicales et réunions publiques en 2015 et participation à de telles manifestations et réunions, notamment la manifestation du 16 avril concernant le ferry Sewol, la réunion du 1er mai et la manifestation du 14 novembre. Tous les autres syndicalistes ont été arrêtés pour leur participation à la manifestation du 14 novembre concernant les mesures controversées de la réforme du travail. Le comité note, d’après la déclaration du gouvernement, que les réunions organisées par les syndicalistes ou auxquelles ont participé les syndicalistes étaient illégales et violentes. Cependant, le comité constate aussi que la Cour d’appel de Séoul a rejeté l’accusation portée contre M. Han d’«entrave spéciale aux obligations publiques ayant causé des lésions corporelles à des officiers publics» et avait réduit sa peine de cinq à trois ans. Il note aussi que, conformément aux détails des accusations soumis par les organisations plaignantes, seuls deux syndicalistes – Mme Tae-sun Bae et M. Sung-deok Cho – ont été initialement inculpés d’«entrave spéciale aux obligations publiques causant des lésions corporelles à des officiers publics», ce qui suppose une action violente au cours des manifestations; tous les deux ont vu leur peine réduite en appel, bien qu’il n’apparaisse pas clairement si la réduction de peine résultait d’un abandon de l’accusation d’action violente. D’autres accusations portées contre les syndicalistes comprennent principalement une entrave à la circulation, une entrave aux obligations publiques et un non-respect de l’ordre de dispersion. Dans ces conditions, le comité estime qu’il ne dispose pas d’informations suffisantes pour conclure que les syndicalistes condamnés étaient directement responsables de la violence au cours des manifestations, pour perdre de ce fait leur droit à la liberté de réunion. Comme le comité comprend que toutes les décisions sont aujourd’hui confirmées, il prie le gouvernement de prendre toutes les mesures qui sont en son pouvoir pour libérer M. Han et, le cas échéant, tous les autres syndicalistes, qui sont toujours détenus pour l’organisation de la manifestation du 14 novembre 2015 ou la participation pacifique à cette manifestation, et de le tenir informé des mesures prises à ce sujet. Il prie aussi le gouvernement de fournir des informations détaillées sur les accusations pour lesquelles un mandat d’arrêt contre Mme Young-joo Lee a été décerné.

Recommandations du comité

Recommandations du comité
  1. 301. Au vu des conclusions qui précèdent, le comité invite le Conseil d’administration à approuver les recommandations suivantes:
    • a) Tout en accueillant favorablement la décision du nouveau gouvernement coréen d’abroger les directives publiées le 22 janvier 2016, le comité exprime le ferme espoir que toute future directive sera rédigée en pleine consultation avec les organisations représentatives des travailleurs et des employeurs concernées.
    • b) Tout en accueillant favorablement l’observation du gouvernement d’après laquelle la restructuration du système de salaires a été convenue après des années de négociations tripartites et n’a été incorporée dans les directives que dans une perspective promotionnelle, le comité rappelle que les salaires sont un composant fondamental des modalités et conditions de l’emploi, lequel doit être soumis à la négociation collective, et qu’il s’attend à ce que le gouvernement assure l’autonomie des parties dans le processus de négociation collective dans le secteur privé.
    • c) Le comité veut croire que, dans le cas où l’enquête du ministère public sur le décès survenu à la suite d’une intervention de la police conclut à l’existence de lacunes dans la gestion de la manifestation du 14 novembre 2015, compte tenu des principes signalés dans ses conclusions, le gouvernement prendra toutes les mesures nécessaires de manière que les victimes d’un recours excessif à la force aient accès à des moyens adéquats de réparation et que, à l’avenir, les interventions des forces de l’ordre soient menées en plein respect des principes de proportionnalité et de responsabilité. Le comité prie le gouvernement de le tenir informé de l’issue de l’enquête et de toutes mesures prises en conséquence.
    • d) Le comité prie le gouvernement de prendre toutes mesures en son pouvoir pour libérer M. Han et, le cas échéant, tous les autres syndicalistes qui sont encore détenus pour l’organisation de la manifestation du 14 novembre 2015 ou la participation pacifique à cette manifestation, et de le tenir informé des mesures prises à ce sujet. Il prie aussi le gouvernement de fournir des informations détaillées sur les chefs d’accusation pour lesquels le mandat d’arrêt contre Mme Young-joo Lee a été décerné.
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