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Suites données aux recommandations du comité et du Conseil d’administration - Rapport No. 386, Juin 2018

Cas no 2723 (Fidji) - Date de la plainte: 01-JUIL.-09 - En suivi

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Suites données aux recommandations du Comité et du Conseil d'administration

Suites données aux recommandations du Comité et du Conseil d'administration
  1. 18. Le présent cas, dans lequel les organisations plaignantes allèguent des actes de violence, de harcèlement et d’intimidation, l’arrestation et la détention de dirigeants et de militants syndicaux, une ingérence continue dans les affaires internes des syndicats, l’imposition de restrictions injustifiées aux réunions syndicales et à d’autres activités syndicales légitimes, la publication de différents décrets entravant l’exercice des droits syndicaux, et la révocation d’un dirigeant syndical fonctionnaire de l’instruction publique, a été examiné pour la dernière fois par le comité à sa réunion de mars 2017. [Voir 381e rapport, approuvé par le Conseil d’administration à sa 329e session, paragr. 36 à 55.] A cette occasion, le comité a prié le gouvernement: i) de le tenir informé du fonctionnement dans la pratique du Conseil consultatif sur les relations du travail (ERAB) et de la cour d’arbitrage, et notamment des progrès réalisés par ces instances; ii) d’indiquer si toutes les conventions collectives abrogées en vertu du décret de 2011 sur les industries nationales essentielles (emploi) (ENID) ont été remplacées par de nouvelles conventions négociées et, si tel n’est pas le cas, de prendre les mesures nécessaires pour garantir que, au moins dans le secteur public, les conventions collectives abrogées puissent être utilisées comme base de renégociation; iii) de veiller à ce que le décret no 1 de 2012 portant modification du décret sur l’ordre public (POAD) ne soit pas appliqué pour entraver l’exercice de la liberté de réunion dans le contexte des droits syndicaux; iv) de réintégrer sans délai Rajeshwar Singh (secrétaire national adjoint du Congrès des syndicats des Fidji (FTUC)) au sein du conseil d’administration des Services de base aérienne (ATS) dans ses fonctions de représentant des intérêts des travailleurs, dans l’éventualité où cela ne serait pas encore fait; et v) d’obtenir l’abandon immédiat de toutes les poursuites pénales en cours pour rassemblement illégal à l’encontre de MM. Daniel Urai et Nitendra Goundar. Le comité a également exprimé l’espoir que, après plusieurs années, l’ERAB examinerait sans délai le cas de M. Tevita Koroi, président de l’Association des enseignants des Fidji, qui a été licencié à l’issue d’une procédure disciplinaire pour avoir enfreint la loi de 1999 sur le service public, et que le gouvernement garantirait à l’avenir le droit des syndicats d’exercer leurs activités légitimes dans le secteur sucrier et dans les autres «industries nationales essentielles». Enfin, le comité a dit vouloir croire que le gouvernement continuerait de s’attacher à appliquer le rapport conjoint de mise en œuvre (JIR) et la loi sur les relations du travail (ERP), telle que modifiée en 2016, et que les travailleurs des secteurs considérés comme des «industries nationales essentielles» seraient en mesure de bénéficier dans un avenir proche du système de retenue à la source des cotisations syndicales qui a été rétabli.
  2. 19. Le gouvernement a présenté ses observations dans une communication en date du 11 septembre 2017. En ce qui concerne le fonctionnement de l’ERAB et de la cour d’arbitrage, le gouvernement indique que l’ERAB, principal organe consultatif sur les relations du travail, s’est réuni en juin 2017 pour aborder la révision des réglementations sur le salaire minimum national et les salaires, et que la révision de la législation du travail, telle que décrite dans le JIR, est un exercice permanent qui continuera de faire l’objet de discussions au sein de cette entité. La cour d’arbitrage, créée en tant que tribunal des relations du travail et constituée de membres tripartites pour assurer la promotion des principes du dialogue social et du tripartisme, traite toutes les questions d’emploi qui concernent les industries et services essentiels.
  3. 20. Quant au système de retenue à la source des cotisations syndicales, le gouvernement indique qu’il a été restauré dans l’ensemble du secteur public, y compris dans les industries et services essentiels. En ce qui concerne les conventions collectives abrogées par l’ENID, le gouvernement réitère qu’elles ne peuvent pas être rétablies automatiquement puisque de nouvelles conventions collectives ont été négociées et sont maintenant en vigueur. Le gouvernement ajoute qu’il incombe aux employeurs et aux travailleurs de décider s’ils veulent ou non rétablir les conventions collectives antérieures ou s’il convient de les utiliser comme base de renégociation.
  4. 21. En ce qui concerne les allégations de restrictions à la liberté de réunion et le POAD, le gouvernement précise que, aux Fidji, le maintien de l’ordre public est régi par la loi de 1978 sur l’ordre public, dont l’article 8 dispose que toute personne qui souhaite organiser une réunion ou un cortège dans l’espace public doit adresser à cet effet une demande d’autorisation à l’autorité compétente. Pour les réunions dans les lieux publics, une autorisation est nécessaire, en raison de certains impératifs administratifs, comme la fermeture des voies d’accès ou la mise en place d’un service d’ordre. Dans les autres cas, il n’est pas nécessaire de disposer d’une autorisation. Le gouvernement ajoute que la Charte des droits figurant dans la Constitution garantit à tous les Fidjiens le droit à la liberté de réunion, d’association et de déplacement.
  5. 22. En ce qui concerne les poursuites pénales en cours à l’encontre de MM. Daniel Urai et Nitendra Goundar pour rassemblement illégal contrevenant à la loi sur l’ordre public, le gouvernement explique que toute infraction au droit pénal est traitée par le bureau du Procureur général, un bureau indépendant doté d’un pouvoir prévu par la Constitution, et précise que les poursuites engagées à l’encontre de MM. Urai et Goundar pour rassemblement illégal ont été abandonnées le 6 février 2017. Le gouvernement rappelle également que l’Etat a retiré les accusations de grève illégale et les accusations portées en vertu de l’article 65 du décret sur les crimes et délits.
  6. 23. Concernant le cas de M. Tevita Koroi, le gouvernement reprend les informations fournies précédemment sur les circonstances de son licenciement.
  7. 24. Le FTUC fournit des informations complémentaires dans une communication en date du 26 septembre 2017, alléguant que le gouvernement n’aurait pas agi de bonne foi dans l’application du JIR, que peu voire aucun progrès n’aurait été réalisé depuis sa signature et que les demandes répétées du comité auraient rarement abouti. Malgré l’abrogation de l’ENID par le gouvernement, la situation s’est détériorée étant donné qu’il emploie maintenant d’autres moyens tels que le recours aux contrats individuels, l’intimidation, le harcèlement des travailleurs et la désinformation pour affaiblir et discréditer les syndicats. En outre, la recommandation du comité de solliciter l’assistance technique du Bureau pour résoudre la question des services essentiels n’a pas été suivie d’effet plus d’un an et huit mois après la signature du JIR et l’organisation plaignante n’a eu connaissance d’aucune assistance technique fournie pour promouvoir de meilleures relations du travail aux Fidji. Cette dernière ajoute que le gouvernement a récemment imposé unilatéralement un nouveau taux de salaire minimum de 2,68 dollars des Etats-Unis (dollars E.-U.) par heure sans aucune concertation avec le FTUC et sans l’approbation de l’ERAB, qu’il a rompu son accord avec le FTUC sur la révision de la législation du travail en vue d’assurer sa conformité avec les conventions fondamentales de l’OIT, y compris le droit de grève et la définition des services essentiels et que, malgré de nombreux rappels, il n’a pas réuni l’ERAB pour examiner de près les propositions déjà convenues entre la Fédération du commerce et des employeurs des Fidji et le FTUC.
  8. 25. En ce qui concerne le fonctionnement de l’ERAB et de la cour d’arbitrage, l’organisation plaignante allègue que: i) le gouvernement a décidé de choisir les représentants des travailleurs et des employeurs au sein de l’ERAB au lieu d’opter pour les organisations de travailleurs et d’employeurs les plus représentatives; ii) il y a eu peu de discussions avec les représentants du gouvernement siégeant à l’ERAB, car ils ne sont pas habilités à prendre des décisions ou à s’entendre avec les représentants des travailleurs ou des employeurs; iii) l’ERAB ne tient pas de réunions mensuelles et, malgré de nombreux rappels, ce conseil ne s’est pas réuni depuis février 2017; iv) l’ERAB n’est plus un organe tripartite, mais seulement bipartite, au sein duquel les représentants des travailleurs et des employeurs jouent un rôle actif; v) la cour d’arbitrage manque cruellement de ressources, a pris du retard dans le traitement des dossiers, ne peut siéger régulièrement et manque d’efficacité. Si l’intention était de créer un nouveau tribunal pour traiter les conflits d’intérêts sans délai, il n’en est rien puisque les dossiers sont toujours en instance; et vi) la cour d’arbitrage ordonne rarement le versement de dommages et intérêts. Pour étayer davantage ses allégations, l’organisation plaignante soumet un rapport de la Confédération des syndicats du secteur public (CPSU) selon lequel la cour d’arbitrage est désormais une instance que l’on peut saisir pour un différend, mais dont on peut attendre les décisions indéfiniment; environ 186 cas, dont certains remontent à plus de dix ans, doivent être examinés avant que la cour ne se penche sur les cas récents concernant l’augmentation des salaires et les négociations de conventions collectives, et ces cas risquent de traîner en longueur avant leur règlement. En effet, à moins qu’un tribunal à plein temps ne soit établi pour résorber l’arriéré émanant du JIR, les autres différends en cours, qui ont des conséquences sur les moyens de subsistance des membres du syndicat, pourraient rester en suspens pendant des années (par exemple, en 2016, l’Association de la fonction publique des Fidji (FPSA) a saisi la cour à sept reprises concernant des conflits d’intérêts requérant une attention immédiate dans la mesure où, compte tenu de la réticence des entités gouvernementales concernées à négocier des conventions collectives, les membres du syndicat restent sans protection).
  9. 26. En ce qui concerne les conventions collectives abrogées en vertu de l’ENID, l’organisation plaignante allègue qu’aucune nouvelle convention collective n’a été négociée dans l’une quelconque des entreprises publiques ou dans la fonction publique, à l’exception du secteur du bois, étant donné que les autres entreprises et municipalités ont jusqu’à présent refusé de signer une convention collective, et considère que rien ne justifie de ne pas rétablir les conventions antérieures. Aussi l’organisation plaignante dénonce-t-elle l’absence totale de négociation dans le secteur public et donne les exemples concrets suivants:
    • – En septembre 2017, le gouvernement a annoncé que tous les fonctionnaires allaient être mis sous contrat individuel à durée déterminée et qu’il procéderait à un ajustement salarial, mais uniquement pour les signataires des nouveaux contrats. Cette mesure a été prise sans discussions ni négociations avec les syndicats, au mépris de l’engagement du gouvernement de respecter le droit des travailleurs à la négociation collective, et a suscité beaucoup d’anxiété et d’inquiétude parmi les travailleurs. Dans ces conditions, les syndicats du secteur public (Association des services publics des Fidji, Syndicat des enseignants des Fidji, Association des enseignants des Fidji et Association des infirmières des Fidji) ont demandé à organiser un vote à bulletin secret en vue d’une action collective en vertu de l’article 175 de la loi sur les relations du travail pour contester l’imposition unilatérale de contrats individuels à durée déterminée. Alors que rien dans la loi ne l’autorise à le faire, l’administrateur du registre des syndicats a rejeté la demande de vote à bulletin secret au motif qu’aucune négociation n’avait eu lieu. Le jour du scrutin, les syndicats n’ont pas été autorisés à accéder au lieu de travail pendant les pauses, et le gouvernement a adressé un mémorandum à tous les fonctionnaires pour qu’ils ne participent pas au vote, les informant que cette participation serait considérée comme de l’insubordination et que les travailleurs seraient sanctionnés. Les syndicats ont déposé une requête devant le tribunal des relations du travail en vue d’obtenir une ordonnance autorisant l’organisation d’un vote à bulletin secret. En outre, lorsque l’Union nationale des travailleurs a notifié, au nom de ses membres dans une entreprise de peinture, son intention de voter à bulletin secret en vue d’une grève pour contester l’absence de négociation et de conclusion par l’employeur d’un accord sur son cahier des revendications visant à modifier la convention collective, l’administrateur du registre a ordonné au Bureau des élections des Fidji d’organiser un vote à bulletin secret en vue d’une action collective, alors même que le scrutin ne prévoyait pas l’élection de dirigeants. Le syndicat a donc refusé une telle ingérence du bureau des élections.
    • – La Direction générale de l’eau des Fidji a publié un mémorandum à l’intention de tous les membres de son personnel indiquant que, à l’expiration de leur contrat individuel, ils devraient postuler de nouveau aux mêmes postes, sans aucune garantie de maintien dans l’emploi, tout en retardant les négociations sur une convention collective.
    • – Au sein du conseil d’administration des ATS (49 pour cent des parts sont détenus par les travailleurs et 51 pour cent par le gouvernement), le gouvernement a révoqué les administrateurs du conseil d’administration et refusé que les travailleurs y soient représentés, comme l’exigent les règles de l’entreprise. La direction a entrepris de violer les conventions collectives et il s’en est suivi une série de suspensions et de licenciements de travailleurs. Bien qu’une liste de points à discuter et à trancher ait été fournie à la direction et au gouvernement, aucune mesure n’est prise et aucune négociation collective n’a lieu dans l’entreprise. Les travailleurs ont également notifié leur intention de voter à bulletin secret pour une action collective, mais l’entreprise a déposé une requête en justice afin que l’entreprise soit classée dans la catégorie «services essentiels».
  10. 27. Le rapport de la CPSU fourni par l’organisation plaignante dénonce également un déni systématique du droit à la négociation collective dans le secteur public depuis dix ans et indique que, malgré les nombreux efforts déployés par les syndicats du secteur public pour entamer des négociations collectives, le refus du gouvernement de s’engager à un quelconque niveau est plus flagrant que jamais. Le rapport contient en outre les informations complémentaires suivantes: i) même s’ils sont parties prenantes, les syndicats sont tenus à l’écart et peuvent uniquement s’en remettre aux déclarations des médias ou parfois aux déclarations faites par le gouvernement au Parlement; ii) trois réunions seulement ont eu lieu au cours des trois dernières années entre le ministre de la Fonction publique et les syndicats du secteur public, même lorsque le sujet était un «fait accompli»; iii) la réforme du secteur public semble être l’une des raisons du refus du droit à la négociation collective dans la fonction publique, et les syndicats du secteur public doivent donc s’en tenir à présenter des observations dans les procédures disciplinaires devant le tribunal disciplinaire de la fonction publique et dans les conflits de droits relevant de l’ERP, les conflits d’intérêts et les fonctions des tribunaux des relations du travail ayant été transférés à la cour d’arbitrage; iv) malgré les déclarations répétées de bonne volonté, le mouvement syndical ne cesse d’être la cible d’attaques constantes, et de nombreuses législations et pratiques en vigueur sont modifiées pour convenir au gouvernement et à ses entités; v) le ministre de l’Emploi et le ministre responsable des services nationaux de lutte contre les incendies continuent de fragiliser les syndicats indépendants; et vi) il n’y a pas de négociation collective pour la fixation des salaires dans le secteur public. Par ailleurs, le rapport fait état de plusieurs cas de violation de la négociation collective et d’autres droits syndicaux:
    • – L’évaluation des emplois actuellement entreprise dans le secteur public se fait sans la participation des syndicats du secteur public, et cet exercice est imposé de manière unilatérale aux travailleurs de la fonction publique.
    • – La Direction des transports terrestres continue de retarder les négociations sur une convention collective et a récemment procédé à 15 licenciements sommaires, dans la plupart des cas sans donner de motif, en violation de l’ERP (la direction cite un jugement du tribunal du travail relatif à un autre employeur dans lequel il est dit qu’il n’était pas nécessaire de motiver les licenciements sommaires. Comme cette décision n’a pas fait l’objet d’un appel, elle est invoquée pour licencier les travailleurs).
    • – Les services nationaux de lutte contre les incendies ont soutenu un syndicat interne contre la FPSA en place et, même si l’administrateur du registre a été prévenu de ne pas procéder à son enregistrement, il a cédé aux pressions, enregistré le syndicat et refusé d’en divulguer les raisons. Le syndicat ayant été formé sous le contrôle de l’employeur dans le but d’évincer le syndicat indépendant existant, l’affaire est maintenant devant le tribunal du travail.
    • – La direction de l’administration fiscale et douanière des Fidji a retiré de la liste de service 19 membres de la FPSA, les privant ainsi de 30 pour cent de leur salaire, et a refusé de négocier une convention collective pendant plus de deux ans.
    • – La société Airports Fidji Limited a refusé de négocier une convention collective et le cahier des revendications de la CPSU. Le différend est actuellement en instance devant la cour d’arbitrage, car aucun autre recours ne peut être exercé en vertu de la législation du travail en vigueur.
    • – Le ministère de la Fonction publique n’a pas pris acte du cahier des revendications de la CPSU et le secrétaire permanent du ministère refuse de l’accepter. Le différend a été porté devant la cour d’arbitrage.
    • – Le ministère des Affaires locales, du Logement et de l’Environnement a refusé de traiter avec les syndicats. Par exemple, un accord a été conclu entre la FPSA et deux municipalités locales, mais celui-ci doit être approuvé par le ministère qui n’a pas pris acte des lettres du syndicat. L’affaire est en instance devant la cour d’arbitrage.
    • – Le syndicat des enseignants des Fidji et l’Association des enseignants des Fidji se heurtent à d’immenses difficultés dans la négociation collective avec le ministère de l’Education.
  11. 28. En ce qui concerne les restrictions à la liberté de réunion et le POAD, l’organisation plaignante indique qu’une coalition d’organisations non gouvernementales s’est déjà vu refuser sa demande de manifestation au motif que cela perturberait la circulation, ce qui, aux yeux de l’organisation plaignante, ne constitue pas une justification appropriée. L’organisation plaignante a également présenté une demande de manifestation et de rassemblement dans un parc de la capitale le 21 octobre 2017 pour protester contre l’imposition unilatérale de contrats individuels à durée déterminée, la révision de la loi sur le salaire minimum et la restriction du droit de grève, et attendait une réponse des autorités.
  12. 29. L’organisation plaignante allègue en outre, en ce qui concerne le décret sur les partis politiques, que l’article 14 classe les responsables syndicaux dans la catégorie des fonctionnaires, alors qu’il n’en va pas de même pour les ministères qui sont financés par des fonds publics. L’organisation plaignante affirme que les syndicats sont des organisations fondées sur l’affiliation et dotées de leurs propres règles et qu’elles doivent être libres de s’associer politiquement ou de soutenir un parti qui respecte les droits des travailleurs. Les syndicalistes ne sont pas des fonctionnaires et ont des droits individuels en matière d’appartenance politique, d’adhésion et de participation aux élections. Selon l’organisation plaignante, la restriction prévue dans le décret sur les partis politiques va donc à l’encontre des droits individuels des syndicalistes et des syndicats qui décident démocratiquement d’être politiquement actifs et porte atteinte à la liberté syndicale.
  13. 30. Enfin, s’agissant de M. Tevita Koroi, l’organisation plaignante indique que son cas n’a pas été abordé lors de l’une quelconque des réunions de l’ERAB. Quant aux allégations d’actes de violence, de harcèlement et d’intimidation à l’encontre de dirigeants et de militants syndicaux ayant exercé leur droit à la liberté d’association (allégations que le comité a cessé d’examiner lors de sa dernière réunion faute d’informations complémentaires de la part de l’organisation plaignante), l’organisation plaignante considère que toutes les informations disponibles à cet égard ont été fournies mais que la situation n’a pas évolué depuis, que le gouvernement et la police n’ont pas donné suite au rapport d’agression déposé par M. Felix Anthony à la police et que l’hôpital public a refusé de fournir un rapport médical.
  14. 31. Le comité prend dûment note des informations fournies par le gouvernement et le FTUC. Il accueille favorablement l’indication du gouvernement selon laquelle le système de retenue à la source des cotisations syndicales a été restauré dans l’ensemble du secteur public, y compris dans les industries et les services essentiels, et les poursuites pénales engagées contre MM. Daniel Urai et Nitendra Goundar pour rassemblement illégal ont été abandonnées en février 2017.
  15. 32. En ce qui concerne l’ERAB et la cour d’arbitrage, le comité note, selon les indications du gouvernement, que ce conseil s’est réuni en juin 2017 pour discuter des instruments relatifs au salaire minimum, que la révision de la législation du travail, telle que décrite dans le JIR, est un exercice permanent qui continuera de faire l’objet de discussions au sein de cette instance et que la cour d’arbitrage, un tribunal tripartite des relations du travail, traite toutes les questions d’emploi concernant des industries et services essentiels. Tout en prenant dûment note des informations fournies, le comité observe que le gouvernement ne donne pas de détails sur le fonctionnement dans la pratique de ces instances et des progrès réalisés, par exemple les résultats concrets de discussions ou de questions convenues dans le cadre de l’ERAB tripartite ou le nombre de cas traités et réglés par la cour d’arbitrage. A cet égard, le comité observe que, selon l’organisation plaignante, l’ERAB ne s’est pas réuni depuis février 2017 et sa structure tripartite est remise en question étant donné que les représentants du gouvernement siégeant à l’ERAB ne sont pas habilités à prendre des décisions. Le comité note en outre que l’organisation plaignante dénonce l’inefficacité et le manque de ressources de la cour d’arbitrage, alléguant en particulier que, même si des conflits d’intérêts sont portés devant cette cour, il peut s’écouler des années avant qu’elle ne les examine en raison de l’important retard accumulé dans le traitement des dossiers. Compte tenu des graves préoccupations exprimées par l’organisation plaignante et du rôle important que l’ERAB et la cour d’arbitrage devraient jouer, le comité prie le gouvernement de prendre les mesures nécessaires pour que ces deux instances disposent de tous les moyens nécessaires leur permettant de fonctionner correctement et efficacement et de fournir des informations détaillées sur leur fonctionnement dans la pratique, notamment sur les questions examinées au sein de l’ERAB et les accords conclus par ses membres tripartites, ainsi que sur le nombre de différends traités et réglés par la cour d’arbitrage. Le comité s’attend en outre à ce que l’ERAB se réunisse dans un avenir proche de sorte que l’assistance technique précédemment suggérée par le comité concernant certaines questions à examiner puisse bientôt être fournie. Notant en outre les allégations de l’organisation plaignante selon lesquelles le gouvernement n’a pas agi de bonne foi dans l’application du JIR, que peu voire aucun progrès n’a été réalisé depuis sa signature et que le gouvernement impose unilatéralement diverses décisions pour affaiblir et discréditer les syndicats, le comité prie le gouvernement de fournir ses observations sur ces allégations et s’attend à ce que ce dernier prenne les mesures nécessaires pour répondre à ces préoccupations et fasse preuve de bonne foi et d’engagement dans la mise en œuvre du JIR à l’avenir.
  16. 33. Le comité observe, concernant la question des conventions collectives abrogées par l’ENID, que les informations fournies par le gouvernement et l’organisation plaignante sont contradictoires. Si le gouvernement maintient que de nouvelles conventions collectives ont été négociées et sont en vigueur, et qu’il incombe aux travailleurs et aux employeurs de décider s’ils veulent ou non rétablir les conventions collectives et les utiliser comme base de renégociation, l’organisation plaignante dénonce l’absence totale de négociation collective et allègue que, hormis dans le secteur du bois, aucune nouvelle convention collective n’a été négociée en remplacement des conventions abrogées, toutes les autres entreprises et municipalités refusant de signer une convention collective. Le comité prend note des exemples concrets fournis, dans lesquels l’organisation plaignante allègue que la négociation collective a été refusée ou retardée par l’entreprise d’Etat ou que le gouvernement a imposé unilatéralement ses décisions sans aucune concertation avec les syndicats. Compte tenu de l’impact négatif de l’abrogation par l’ENID des conventions collectives en vigueur et des informations contradictoires fournies par le gouvernement et l’organisation plaignante sur l’état actuel de la négociation collective dans le secteur public, le comité rappelle qu’employeurs et syndicats doivent négocier de bonne foi en s’efforçant d’arriver à un accord et des relations professionnelles satisfaisantes dépendent essentiellement de l’attitude qu’adoptent les parties l’une à l’égard de l’autre et de leur confiance réciproque. [Voir Compilation des décisions du Comité de la liberté syndicale, sixième édition, 2018, paragr. 1329.] Le comité prie par conséquent le gouvernement de fournir des observations supplémentaires sur les allégations susmentionnées et de prendre toutes les mesures nécessaires pour faciliter les négociations et contribuer à la promotion de la négociation collective dans le secteur public, en particulier lorsque les organisations de travailleurs rencontrent des obstacles ou des difficultés à cet égard, afin de créer un environnement favorable à la conclusion de nouvelles conventions collectives et de remplacer celles précédemment abrogées par l’ENID.
  17. 34. Le comité observe en outre, d’après les informations fournies, que, parallèlement à l’absence alléguée de négociation collective, l’organisation plaignante dénonce également d’autres violations des droits syndicaux, dont la création d’un syndicat contrôlé par l’employeur, des actes d’intimidation et des menaces dans le contexte d’un scrutin de grève, l’ingérence dans la conduite des votes à bulletin secret, la suspension et le licenciement de travailleurs et la révocation de représentants des travailleurs de leur fonction de représentation. Bien que les informations dont il dispose ne lui permettent pas de tirer des conclusions complètes à cet égard, le comité rappelle que le licenciement d’un travailleur en raison de son appartenance à un syndicat ou de ses activités syndicales porte atteinte aux principes de la liberté syndicale. La révocation, par le gouvernement, de certains dirigeants syndicaux constitue une grave atteinte au libre exercice des droits syndicaux. L’exercice des activités des organisations d’employeurs et de travailleurs pour la défense de leurs intérêts devrait être exempt de pressions, d’intimidations, de harcèlement, de menaces et d’actions visant à discréditer les organisations et leurs dirigeants, y compris la manipulation de documents. L’article 2 de la convention no 98 établit l’indépendance totale des organisations de travailleurs vis-à-vis des employeurs dans l’exercice de leurs activités. [Voir Compilation, op. cit., paragr. 1104, 654, 719 et 1188.] Le comité souligne également que les organisations de travailleurs devraient avoir le droit d’organiser leur gestion et leur activité et de formuler leur programme d’action sans aucune intervention des autorités publiques. Dans ces conditions, le comité prie le gouvernement de fournir ses observations sur les allégations susmentionnées et veut croire que tout membre ou dirigeant syndical dont la suspension ou le licenciement est motivé par des raisons antisyndicales sera rétabli sans délai. En outre, le comité s’attend à ce que le gouvernement garantisse à l’avenir le droit d’exercer des activités syndicales légitimes dans le secteur public, y compris les scrutins de grève, sans aucune forme d’intimidation ou d’ingérence.
  18. 35. En ce qui concerne les restrictions à la liberté de réunion et le POAD, le comité note que le gouvernement reproduit le texte de l’article 8 de la loi sur l’ordre public et se contente de reprendre des informations déjà fournies sans toutefois indiquer si des mesures concrètes ont été prises ou sont prévues pour que cet article ne soit pas appliqué dans le but de restreindre la liberté de réunion dans le contexte des droits syndicaux. A cet égard, le comité prend note des informations complémentaires fournies par l’organisation plaignante selon lesquelles une coalition d’organisations non gouvernementales a récemment vu sa demande de manifestation refusée au motif que cela ralentirait la circulation, et l’organisation plaignante a également présenté une demande pour organiser une manifestation et un rassemblement en octobre 2017. Le comité tient à souligner une fois de plus l’importance qu’il attache à la liberté de réunion dans le contexte des droits syndicaux et prie le gouvernement de fournir ses observations sur les allégations susmentionnées et de prendre les mesures nécessaires pour que le POAD ne soit pas appliqué afin d’entraver l’exercice de ces droits et de le tenir informé de toute mesure concrète prise ou envisagée à cet égard.
  19. 36. Le comité note par ailleurs, concernant le cas de M. Tevita Koroi, que le gouvernement se borne à rappeler que ce dernier a été licencié à l’issue d’une procédure disciplinaire pour avoir enfreint la loi de 1999 sur le service public et observe, selon l’indication de l’organisation plaignante, que le cas de M. Koroi n’a toujours pas été examiné par l’ERAB. Le comité note avec regret qu’en dépit d’indications précédemment données, à savoir que le cas serait réexaminé par l’ERAB, le gouvernement ne fournit aucune nouvelle information à cet égard. Le comité réitère donc une fois de plus son attente, à savoir que, après plusieurs années, l’ERAB examine le cas de M. Koroi sans délai supplémentaire et que, dans le cadre de cet examen, il tienne dûment compte des conclusions formulées à ce sujet par le comité lors de l’examen du présent cas à sa réunion de novembre 2010 [voir 358e rapport, paragr. 550-553] afin d’assurer la réhabilitation de M. Koroi. Regrettant par ailleurs que le gouvernement ne fournisse pas d’informations sur la réintégration de M. Rajeshwar Singh (secrétaire national adjoint du FTUC) dans ses fonctions au sein du conseil d’administration des ATS, et notant, d’après les informations complémentaires fournies par l’organisation plaignante, que les nouveaux administrateurs représentant les travailleurs ont également été destitués par le gouvernement, le comité prie ce dernier de fournir des informations complètes sur ces allégations et de réintégrer sans délai M. Singh dans ses fonctions de représentant des intérêts des travailleurs, ainsi que tout autre représentant des travailleurs destitué pour des raisons antisyndicales.
  20. 37. S’agissant des allégations d’actes de violence, de harcèlement et d’intimidation à l’encontre de dirigeants et de militants syndicaux ayant exercé leur droit à la liberté d’association, formulées précédemment en l’espèce, le comité rappelle que ces allégations concernaient M. Felix Anthony (secrétaire national du FTUC et secrétaire général du Syndicat général et des travailleurs de l’industrie sucrière des Fidji (FSGWU)), M. Attar Singh (secrétaire général du Conseil des syndicats des îles Fidji), M. Mohammed Khalil (président du FSGWU – antenne de Ba), M. Taniela Tabu (secrétaire général de l’Union nationale des travailleurs Taukei de Viti) et M. Anand Singh (avocat). Le comité rappelle également avoir indiqué, lors de l’examen de ce cas en mars 2017, qu’il ne poursuivrait plus l’examen de ces allégations, les organisations plaignantes n’ayant pas fourni d’informations sur les faits nouveaux précédemment rapportés par le gouvernement. Toutefois, notant l’explication de l’organisation plaignante selon laquelle toutes les informations disponibles ont déjà été fournies, qu’aucun fait nouveau n’est intervenu depuis et que le gouvernement et la police n’ont pas donné suite au rapport d’agression déposé par M. Anthony à la police, le comité croit comprendre que les allégations ci-dessus pourraient ne pas être entièrement éclaircies. Par conséquent, il invite les organisations plaignantes et le gouvernement à indiquer si une enquête indépendante a été menée sur les actes allégués de violence, de harcèlement et d’intimidation à l’encontre de MM. Felix Anthony, Mohammed Khalil, Attar Singh, Taniela Tabu et Anand Singh, et à transmettre des informations détaillées sur les résultats de cette enquête ainsi que sur les mesures prises en conséquence et toute autre information pertinente récente à cet égard.
  21. 38. Enfin, le comité rappelle qu’il a déjà examiné les allégations selon lesquelles l’article 14 du décret sur les partis politiques porte atteinte aux droits syndicaux lors de sa réunion de juin 2016. [Voir 378e rapport, paragr. 265.] A cette occasion, le comité a attiré l’attention de la Commission d’experts pour l’application des conventions et recommandations sur les aspects législatifs de ce cas.
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