Allégations: L’organisation plaignante allègue des violations des droits de négociation collective, des restrictions du droit de manifester, le licenciement illégal de dirigeants syndicaux et l’arrestation et la poursuite au pénal d’un dirigeant syndical après sa participation à une manifestation
- 545. La plainte figure dans une communication du Congrès des syndicats du Zimbabwe (ZCTU) en date du 23 mars 2018.
- 546. Le gouvernement a présenté ses observations dans une communication en date du 12 avril 2019.
- 547. Le Zimbabwe a ratifié la convention (nº 87) sur la liberté syndicale et la protection du droit syndical, 1948, ainsi que la convention (nº 98) sur le droit d’organisation et de négociation collective, 1949.
A. Allégations de l’organisation plaignante
A. Allégations de l’organisation plaignante- 548. Dans une communication en date du 23 mars 2018, le ZCTU allègue des violations des droits de négociation collective, des restrictions du droit de manifester, le licenciement illégal de huit dirigeants syndicaux et l’arrestation et la poursuite au pénal d’un dirigeant syndical après sa participation à une manifestation.
- 549. Le ZCTU explique que, depuis 2012, ZESA Holdings Private Limited et sa filiale Zimbabwe Electricity Transmission and Distribution Company (ci-après «l’entreprise») refusent d’honorer une convention collective qui avait eu pour effet d’augmenter le salaire minimum de base de leurs salariés à 275 dollars par mois et de rationaliser les écarts entre les barèmes des traitements. L’entreprise et sa filiale appartiennent au gouvernement, et leur conseil d’administration est nommé par le ministre de l’Energie et de l’Electricité.
- 550. Le ZCTU explique que la convention a été enregistrée conformément au paragraphe 1 de l’article 79 de la loi sur le travail et publiée en tant que règlement no 50 de 2012 conformément au paragraphe 1 de l’article 80 de cette loi. Le Syndicat zimbabwéen des travailleurs de l’énergie (ZEWU), le Syndicat national des travailleurs de l’énergie du Zimbabwe (NEWUZ) et les organisations affiliées au ZCTU ont porté l’affaire devant la Haute Cour après que l’entreprise a contourné la convention et proposé des versements forfaitaires directement à ses salariés. La Haute Cour a ordonné à l’entreprise de cesser de proposer à ses salariés le paiement de rémunérations rétroactives ou de salaires et de s’abstenir de négocier directement avec eux. L’organisation plaignante allègue que, malgré l’ordonnance de la Cour, l’entreprise a persisté dans son refus de se conformer à la convention et que le différend a traîné en longueur, ce qui a incité les travailleurs et leurs syndicats à se lancer dans une action collective.
- 551. Le 27 novembre 2017, le Syndicat des travailleurs du secteur de l’énergie du Zimbabwe (ESWUZ) a écrit au directeur général de l’entreprise pour lui faire part de ses préoccupations concernant la corruption et le refus de l’entreprise de respecter la convention collective. Le syndicat prévoyait ensuite d’organiser une manifestation, qui a été interdite par une ordonnance de la Haute Cour, dans laquelle la Cour déclarait que toute forme d’action collective était interdite étant donné que l’entreprise fournissait un service essentiel. Le syndicat a fait appel de cette décision devant la Cour suprême, ce qui a eu pour effet de suspendre l’interdiction, et a organisé une manifestation le 21 décembre 2017. Selon le ZCTU, l’entreprise a persisté dans son refus de payer. L’entreprise a demandé une ordonnance de justification au ministre du Travail et des Services sociaux en vertu de l’article 106 de la loi sur le travail. Le 31 janvier 2018, le tribunal du travail a rendu une ordonnance de retrait de l’affaire, dans l’attente de l’issue de l’appel interjeté devant la Cour suprême.
- 552. L’ESWUZ a également sollicité l’intervention du bureau du Président. Les autorités ont alors ouvert une enquête, dont les conclusions ne sont pas encore connues.
- 553. Le 9 février 2018, l’entreprise a publié un communiqué de presse dans lequel elle réaffirmait son refus de payer et menaçait les dirigeants syndicaux sans plus de précisions. Le ZCTU a alors demandé à l’entreprise de retirer ses menaces et de dialoguer avec les syndicats afin de convenir d’un plan de paiement.
- 554. L’organisation plaignante indique que les syndicats prévoyaient une autre manifestation le 28 février 2018. Cette manifestation a toutefois été interdite par la Haute Cour, qui a ordonné qu’aucune manifestation n’ait lieu jusqu’à ce que la Cour suprême se prononce sur le recours dont elle était saisie.
- 555. Le 5 mars 2018, l’entreprise a suspendu huit dirigeants syndicaux de l’ESWUZ: Florence Taruvinga (présidente du Conseil consultatif national des femmes et première vice-présidente du ZCTU), Gibson Mushunje (secrétaire général), Admire Mudzonga (premier vice-président), Ackim Mzilikazi (administrateur syndical), Steogen Mwoyoweshumba (secrétaire national et membre du Conseil général du ZCTU), Taririo Shumba (membre de la section de Harare), Given Dingwiza (président du Comité national des jeunes travailleurs et membre du Conseil des jeunes travailleurs du ZCTU) et Johannes Chingoriwo (président de la section de Harare et membre du Conseil de la région Nord du ZCTU). Ces huit dirigeants sont poursuivis pour des allégations de participation à une action collective illégale, violation de la confidentialité et insubordination. Ils font actuellement l’objet d’une procédure disciplinaire, alors que la Cour suprême n’a toujours pas tranché la question de l’illégalité de la manifestation du 21 décembre 2017.
- 556. Le 12 mars 2018, le ZCTU a écrit au ministère du Travail et des Services sociaux pour demander son intervention. Il allègue que sa communication est restée sans réponse.
- 557. Le 13 mars 2018, le NEWUZ a organisé une manifestation au cours de laquelle la police a arrêté le secrétaire général du syndicat, M. Thomas Masvingwe. Il est poursuivi au pénal et a comparu devant le tribunal de première instance le 19 mars 2018. La date de son procès a été fixée au 25 avril 2018.
- 558. Le 20 mars 2018, le ZCTU a demandé au Parlement d’enquêter sur la corruption dans l’entreprise et le traitement injuste des représentants des travailleurs qui l’avaient dénoncée. La police a interdit le cortège qui devait accompagner le dépôt de la requête au motif que l’ordonnance de la Haute Cour interdisait au syndicat de participer à une quelconque manifestation contre l’entreprise. Le ZCTU indique que les allégations de corruption au sein de l’entreprise ont été rendues publiques et que la commission parlementaire chargée des comptes publics a demandé les comptes de l’entreprise. Cette dernière est également impliquée dans une escroquerie à l’appel d’offres de 5 millions de dollars et refuse de payer les travailleurs et les punit pour avoir soulevé ces questions.
- 559. Le ZCTU souligne en outre qu’aucun progrès tangible n’a été fait en ce qui concerne la mise en œuvre des conclusions et des modifications législatives recommandées par la commission d’enquête de l’OIT en 2010.
B. Réponse du gouvernement
B. Réponse du gouvernement- 560. Dans sa communication du 12 avril 2019, le gouvernement indique que l’entreprise en question est une entreprise publique et que son conseil d’administration doit rendre des comptes au ministre de l’Energie et de l’Electricité. L’entreprise produit, transporte et distribue l’électricité au Zimbabwe. Elle est le seul producteur et fournisseur d’électricité du réseau public. Elle est régie par deux lois: la loi sur l’électricité et la loi sur le fonds d’électrification des zones rurales.
- 561. Le gouvernement affirme que le règlement no 50 de 2012 mentionné par l’organisation plaignante a été enregistré par le ministère du Travail et des Services sociaux, ce qui signifie qu’il a été publié au Journal officiel et a acquis force de loi.
- 562. Le gouvernement indique en outre que le non-respect de la convention collective par l’entreprise a été porté devant la Haute Cour et qu’une décision a été rendue. Il précise que, en sa qualité de personne morale parapublique, l’entreprise est tenue de respecter la décision de la Cour. Les allégations selon lesquelles le gouvernement aurait permis à l’entreprise de ne pas se plier à cette décision sont donc sans fondement.
- 563. Le gouvernement ajoute que, à la suite de la demande d’intervention du ZCTU en mars 2018, le ministère du Travail et des Services sociaux a convoqué une réunion avec la direction de l’entreprise, les salariés concernés, les représentants du ZCTU et la Confédération des employeurs du Zimbabwe (EMCOZ). Les participants à cette réunion ont décidé que le ZCTU et l’EMCOZ s’efforceraient d’engager leurs mandants dans des discussions bilatérales en vue de trouver une solution.
- 564. En juillet 2018, du fait de l’absence de progrès, le ZCTU a demandé l’intervention du gouvernement. Le 1er août 2018, le ministère du Travail et des Services sociaux a convoqué une autre réunion, au cours de laquelle les participants ont décidé: i) que la direction de l’entreprise devait examiner les questions et les options en vue de réengager les travailleurs licenciés et informer le ministère dans les deux semaines; ii) que le ministère devait convoquer une réunion avec les travailleurs licenciés dans les deux semaines; iii) que le ministère devait faciliter la formation des syndicats et des employeurs par le BIT; et iv) que l’entreprise devait envoyer au ministère copie de l’arrêt de la Haute Cour. Les participants à la réunion ont pris note du fait que la mise en œuvre de la convention collective de 2012 avait été supplantée par un arrêt de la Haute Cour.
- 565. Malgré l’absence de progrès de la part de la direction de l’entreprise, les salariés licenciés ont rencontré des représentants du ministère du Travail et des Services sociaux en décembre 2018 et ont accepté que la question soit portée à l’attention de la ministre chargée de l’administration du travail.
- 566. En mars 2019 s’est tenue une réunion de suivi entre les salariés licenciés et les représentants du ministère du Travail et des Services sociaux. Les salariés y ont résumé par écrit leurs griefs, que le ministère a l’intention d’aborder avec le nouveau conseil d’administration de l’entreprise.
- 567. Le 11 avril 2019, la ministre du Travail et des Services sociaux a rencontré des représentants du ZCTU, de la Fédération des syndicats du Zimbabwe (ZFTU) et du Conseil APEX. Le présent cas comptait parmi les questions traitées au cours de la réunion. La ministre s’est engagée à intervenir d’urgence auprès du conseil d’administration de l’entreprise en vue de régler, entre autres, les problèmes de longue date des salariés licenciés.
C. Conclusions du comité
C. Conclusions du comité- 568. Le comité note que le Congrès des syndicats du Zimbabwe (ZCTU) allègue des violations des droits de négociation collective, des restrictions du droit de manifester, le licenciement illégal de huit dirigeants du Syndicat des travailleurs du secteur de l’énergie du Zimbabwe (ESWUZ) et l’arrestation et la poursuite au pénal d’un dirigeant syndical après sa participation à une manifestation. Il note que le gouvernement ne conteste pas le déroulement des événements décrits par le ZCTU.
- 569. Le comité note que le différend en l’espèce trouve son origine dans le refus de l’entreprise de se conformer aux termes de la convention collective de 2012, en particulier aux clauses relatives au salaire. Le comité prend note à cet égard d’une décision de la Haute Cour datée du 15 septembre et du 18 novembre 2015. Il constate, en examinant cette décision, que l’entreprise a admis ne pas avoir respecté la convention collective concernant la rémunération et s’est adressée directement aux salariés, sans associer leurs syndicats, et leur a proposé un versement aux fins de règlement. Le comité note en outre que la Haute Cour a souligné ce qui suit:
- … Une partie qui ne se conforme pas aux clauses d’une convention collective se rend coupable d’une pratique déloyale en matière de travail. Le non-respect d’une convention collective ou le refus d’être lié par cette convention est en outre un acte offensant qui constitue une infraction pénale. L’article 82 montre l’importance que le législateur accorde aux conventions collectives. Le législateur considère comme une pratique déloyale de travail le fait de ne pas se conformer à une convention collective et érige ce non-respect en infraction pénale.
- Le comité note également que la Cour a ordonné à l’entreprise:
- … De cesser de proposer à ses salariés des accords, des rémunérations rétroactives et/ou des salaires qu’elle calcule unilatéralement et arbitrairement sans faire participer les demandeurs, de cesser de négocier directement avec ses salariés au sujet des salaires et des prestations sans faire participer les syndicats, et de veiller à ce que toute négociation ou proposition d’accord se fasse avec les demandeurs ou par l’intermédiaire de leurs avocats et ne porte pas atteinte au droit des salariés à la négociation collective et aux normes équitables de travail.
- 570. Le comité note en outre que, le 9 février 2018, l’entreprise a publié un communiqué de presse dans lequel elle informait ses parties prenantes des éléments suivants: elle reconnaissait qu’un différend de longue date concernant la négociation collective de 2012 était en instance devant les tribunaux; elle n’avait pas les moyens de payer les frais découlant de la convention collective considérée, malgré la signature d’un accord; elle avait proposé un accord à ses salariés à propos de cette convention et elle était reconnaissante qu’une majorité écrasante d’entre eux avaient accepté cette proposition; et elle estimait que l’augmentation sensible des salaires et les paiements rétroactifs relatifs à la convention collective de 2012 nécessiteraient une augmentation tarifaire qui imposerait une charge inutile aux consommateurs d’électricité.
- 571. Le comité prend note de l’indication du gouvernement selon laquelle, en sa qualité de personne morale parapublique, l’entreprise est tenue de respecter l’arrêt de la Cour, mais il constate avec regret que, sept ans après la conclusion de la convention collective, les clauses relatives au salaire ne sont toujours pas appliquées. Le comité rappelle que les accords doivent être obligatoires pour les parties et que la non-application d’une convention collective, ne serait-ce que temporairement, va à l’encontre du droit de négociation collective ainsi que du principe de la négociation de bonne foi. [Voir Compilation des décisions du Comité de la liberté syndicale, sixième édition, 2018, paragr. 1334 et 1340.] Le comité exhorte le gouvernement à prendre toutes les mesures nécessaires pour s’assurer que l’entreprise parapublique en question applique la convention collective ou qu’un accord soit entièrement négocié avec le syndicat sans plus tarder. Il prie le gouvernement de le tenir informé de toutes les mesures prises à cette fin.
- 572. Le comité note que, selon le ZCTU, l’entreprise ayant refusé de se conformer à l’ordonnance de la Cour, le différend non résolu a incité les travailleurs à se lancer dans une action collective. Par une lettre en date du 27 novembre 2017, l’ESWU a informé l’entreprise de son intention de manifester. Toutefois, la Haute Cour a fait droit à la demande d’interdiction temporaire de l’employeur. Le comité prend note du raisonnement de la Cour:
- L’illégalité de l’action collective envisagée tient à deux éléments. Premièrement, les salariés du demandeur fournissent un service essentiel et la loi leur interdit d’entreprendre ou de recommander une action collective. Voir le paragraphe 3 de l’article 104 de la loi sur le travail et le paragraphe g) de l’article 2 de la déclaration de 2003 sur les services essentiels. Deuxièmement, le défendeur et ses membres n’ont pas suivi la procédure prévue au paragraphe 2 de l’article 104 de la loi sur le travail avant de recourir à une action collective pour régler leur différend avec l’employeur. Le non-respect des exigences impératives de cet article rend l’action collective illégale. Le professeur Madhuku, au nom du défendeur, a soutenu que l’article 59 de la Constitution s’appliquait. Cet article dispose que toute personne a le droit de manifester et de présenter des pétitions, pour autant que ces droits soient exercés pacifiquement. Il doit être lu conjointement avec le paragraphe 3 de l’article 65 de la Constitution, qui traite expressément du droit de chaque salarié de participer à une action collective. Ce paragraphe dispose explicitement qu’une loi peut restreindre l’exercice de ce droit afin de maintenir des services essentiels. Lire l’article 59 indépendamment du paragraphe 3 de l’article 65 serait contraire au principe établi selon lequel une constitution est un document évolutif dont les dispositions doivent être lues ensemble et non séparément. Les défendeurs n’ont pas cherché à mettre en cause les dispositions de la loi sur le travail qui ont trait aux services essentiels dans le contexte d’une action collective.
- La Cour conclut comme suit:
- … L’examen de la question de la prépondérance des inconvénients fait pencher la balance en faveur des mesures provisoires. ... L’étendue, les répercussions et les conséquences de l’action collective proposée sont des questions qui pourront être examinées à la date de renvoi. La lettre du 8 décembre 2017 ne limite pas la participation à la manifestation aux salariés en congé. Je ne crois pas qu’un autre moyen permettrait d’obtenir le même résultat que l’interdiction demandée en l’espèce. Il ne s’agit que d’une interdiction temporaire dans l’attente de l’issue de la procédure d’ordonnance de justification.
- 573. Le comité note que le syndicat a fait appel de cette décision devant la Cour suprême, ce qui a eu pour effet de suspendre l’interdiction. Il note en outre que le syndicat a organisé une manifestation le 21 décembre 2017. L’entreprise a demandé une ordonnance de justification au ministre en vertu de l’article 106 de la loi sur le travail. Le 31 janvier 2018, le tribunal du travail a rendu une ordonnance de retrait de l’affaire, dans l’attente de la décision de la Cour suprême. Le comité note en outre que, le 28 février 2018, l’ESWUZ avait l’intention d’organiser une autre manifestation, qui a été interdite par une ordonnance de la Haute Cour en mars 2018, dans laquelle la Cour déclarait que cette manifestation violait le paragraphe 3 de l’article 65 de la Constitution, interdisait toute forme d’action collective tant que la Cour suprême ne se serait pas prononcée sur le recours dont elle était saisie et ordonnait des poursuites pénales pour toute violation de cette ordonnance. Enfin, la police a rejeté une demande du ZCTU, qui voulait organiser un cortège pour accompagner le dépôt au Parlement de la requête contre la corruption et le traitement injuste des représentants des travailleurs qui avaient dénoncé cette corruption le 20 mars 2018.
- 574. Le comité note que le tribunal, l’organisation plaignante et les documents pertinents qu’elle a soumis (y compris la lettre susmentionnée du 27 novembre 2017 adressée à l’entreprise) qualifient l’action envisagée de manifestation. Le comité constate que les faits présentés en l’espèce ne permettent pas de savoir clairement si les salariés avaient l’intention de cesser de travailler ou si la manifestation devait avoir lieu en dehors des heures de travail. Le comité rappelle que, si l’on peut en effet restreindre ou interdire un arrêt de travail dans une entreprise qui fournit des services essentiels, tels que des services d’électricité en l’espèce, il faut par contre protéger comme il se doit toute manifestation organisée en dehors des heures de travail en vue d’exprimer des points de vue sur les conditions socio économiques et qui n’entraîne aucune interruption de ces services. Le comité rappelle à cet égard que les travailleurs doivent pouvoir jouir du droit de manifestation pacifique pour défendre leurs intérêts professionnels. [Voir Compilation, op. cit., paragr. 208.] Faisant observer que l’examen final de cette question est en instance devant la Cour suprême, le comité demande au gouvernement de porter les conclusions de cette affaire à l’attention des autorités judiciaires compétentes et de lui transmettre une copie de la décision finale dès qu’elle aura été rendue.
- 575. Le comité prend note des allégations du ZCTU selon lesquelles, à la suite de l’action susmentionnée du 21 décembre 2017, l’entreprise a suspendu, le 5 mars 2018, huit dirigeants syndicaux pour participation à une action collective illégale, violation de la confidentialité et insubordination. L’organisation plaignante indique que ces personnes font l’objet d’une procédure disciplinaire. Le comité note également que, selon le gouvernement, à la suite de la demande d’intervention du ZCTU en mars 2018, le ministère du Travail et des Services sociaux a convoqué une réunion avec la direction de l’entreprise, les salariés concernés, les représentants du ZCTU et la Confédération des employeurs du Zimbabwe (EMCOZ). Les participants à cette réunion ont décidé que le ZCTU et l’EMCOZ s’efforceraient d’engager leurs mandants dans des discussions bilatérales en vue de trouver une solution. En juillet 2018, le ZCTU a de nouveau sollicité l’intervention du gouvernement en raison de l’absence de progrès sur la question, et une autre réunion s’est tenue le 1er août 2018. Au cours de cette réunion, il a été convenu en particulier que l’entreprise examinerait les questions et les options en vue de réengager les travailleurs licenciés et informerait le ministère dans les deux semaines, et que le ministère, d’une part, convoquerait une réunion avec les travailleurs licenciés dans les deux semaines et, d’autre part, faciliterait la formation des syndicats et des employeurs par le BIT. Deux réunions ont également eu lieu entre les salariés licenciés et les fonctionnaires du ministère en décembre 2018 et mars 2019. Le 11 avril 2019, la ministre du Travail et des Services sociaux a rencontré des représentants du ZCTU, de la ZFTU et du Conseil APEX pour discuter de différentes questions, dont le présent cas. A cette occasion, la ministre s’est engagée à intervenir d’urgence auprès du conseil d’administration de l’entreprise en vue de régler les problèmes de longue date des salariés licenciés. Le comité exhorte le gouvernement à se pencher sur la question des salariés licenciés, conformément à l’engagement qu’il a pris lors de la réunion du 11 avril 2019, et à fournir d’urgence des informations à cet égard.
- 576. Le comité prend note de l’arrestation de M. Masvingwe, le 13 mars 2018, lors d’une manifestation organisée par le Syndicat national des travailleurs de l’énergie du Zimbabwe (NEWUZ). Selon l’organisation plaignante, l’intéressé est poursuivi au pénal et a comparu devant le tribunal de première instance le 19 mars 2018. La date de son procès a été fixée au 25 avril 2018. Le comité déplore que le gouvernement ne fournisse aucune information à ce sujet. Il rappelle que, si des personnes menant des activités syndicales ou exerçant des fonctions syndicales ne peuvent prétendre à l’immunité vis-à-vis de la législation pénale ordinaire, l’arrestation ou l’inculpation de syndicalistes doivent s’appuyer sur des exigences légales qui ne portent pas elles-mêmes atteinte aux principes de la liberté syndicale. [Voir Compilation, op. cit., paragr. 133.] Il rappelle également que nul ne peut être privé de sa liberté ou faire l’objet de sanctions pénales simplement pour avoir organisé une manifestation pacifique ou participé à une telle manifestation. Le comité croit comprendre que M. Masvingwe n’est pas détenu. Il constate toutefois que plus d’un an s’est écoulé depuis la date prévue du procès pour les accusations pénales portées contre lui. Le comité demande au gouvernement de fournir sans délai des informations détaillées sur les circonstances de l’arrestation de M. Masvingwe, les charges exactes retenues contre lui et l’issue du procès.
Recommandations du comité
Recommandations du comité- 577. Au vu des conclusions qui précèdent, le comité invite le Conseil d’administration à approuver les recommandations suivantes:
- a) Le comité exhorte le gouvernement à prendre toutes les mesures nécessaires pour s’assurer que l’entreprise parapublique en question applique la convention collective ou qu’un accord soit entièrement négocié avec le syndicat sans plus tarder. Il prie le gouvernement de le tenir informé de toutes les mesures prises à cette fin.
- b) Le comité demande au gouvernement de transmettre les éléments de considération de cette affaire aux autorités judiciaires compétentes et de lui transmettre une copie de la décision finale dès qu’elle aura été rendue.
- c) Le comité exhorte le gouvernement à se pencher sur la question des salariés licenciés, conformément à l’engagement qu’il a pris lors de la réunion du 11 avril 2019, et à fournir d’urgence des informations à cet égard.
- d) Le comité demande au gouvernement de fournir sans délai des informations détaillées sur les circonstances de l’arrestation de M. Masvingwe, les charges exactes retenues contre lui et l’issue du procès.